Rosario, le tailleur du Pape. Un vrai conte de fées... (4/8/2010)

Les mains de Rosario et les soutanes du Pape
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Enfant un peu rebelle, il ne voulait pas faire le paysan dans les champs de Camerino, dans la province de Macerata.
À la pioche et au rateau de ses parents, il préférait l'aiguille et le fil dans la boutique du tailleur du village.
"Je rêvais de recréer l'élégance des fleurs sur les vêtements des clients de la boutique".
Un petit artiste, en somme. "Un peu inconscient, aussi - raconte aujourd'hui Rosario Mancinelli, classe 1937, depuis plus de vingt ans couturier personnel de Ratzinger, dans son atelier du 90, Borgo Pio.

- J'avais réussi à convaincre ma mère de m'emmener en promenade à Rome, justement Place Saint-Pierre. Dès qu'elle me lâcha la main, je me mis à courir entre les colonnes, et je m'enfuis, la plongeant dans la panique. À trois heures du matin, après des heures de recherche, j'arrivai chez mes oncles, à la Storta, au fond de la Cassia. "Que fais-tu ici?", me demandèrent-ils désespérés?
Deux jours après j'étais employé dans la boutique d'un tailleur d'Ascoli Piceno, place Mazzini ".

Jésus lui avait posé une main sur la tête.
"Oui, parce que le pardon de maman arriva peu après, et ce fut le déclencheur de ma vocation de futur tailleur, avec de nouveaux patrons, Via Cestari. Le commis principal me présenta au cardinal Noè, qui m'emmena sur-le-champ travailler à l'atelier de couture du Vatican, où, avec les cardinaux Guerri et Caprio, je n'avais pas le droit de me tromper en m'attaquant à un bouton.
Ce furent eux qui me présentèrent au Secrétaire d'État Benelli : il me dit que je devais toujours me rappeler de Pie XII, comme exemple de l'élégance des soutanes".

- Et votre femme, Jeanne, quand est-elle venue ?
"Elle était institutrice à Camerino. Elle ne gagnait pas beaucoup, mais elle avait une volonté de fer. Je l'épousai, et elle devint mon aide numéro un. Elle m'a offert le bonheur, en mettant au monde trois enfants, Laura, Nadia et Paolo: et aujourd'hui je suis grand-père dix fois ".

Ensuite il y eut la boutique de Mascherino, et depuis Mars 84 ici, au Borgo Pio. Une atelier de couture où on vend également des objets de culte.

"Mais le miracle de ma vie survint un matin, avec une dame âgée, toute petite: elle me demanda si je pouvais confectionner les vêtements de clergyman de son frère Joseph Ratzinger. Là commence un conte de fée pour moi, et ma famille".

"Ratzinger était d'une douceur rare : il ne se lassait jamais d'essayer les vêtements, il avait toujours un mot gentil pour mes enfants et ma femme. Et c'est chez moi qu'il achetait le célèbre béret basque: tenez, le voilà ".
Et d'une petit armoire, il sort le couvre-chef original de celui qui était alors Mgr Ratzinger. "Il est de marque italienne, il porte la taille 58".
Cela ressemble vraiment à un conte de fées.
"Pensez que pour les messes, dans sa maison de la place de la Cité Léonine, je lui fournissais aussi un vin sicilien de Mazara del Vallo, et les hosties que me préparaient les soeurs napolitaines de la Via Aurelia, qu'il bénissait". Et il me montre les bouteilles et un sachet de plastique avec les hosties.
"Je ne l'ai jamais dit, mais devenu Pape, peu de mois après, il m'a invité avec ma femme à la messe du matin dans sa chapelle. "Vous voyez comme la vie change?", a-t'il dit en souriant à ma femme ".

- Et continuez-vous à confectionner les soutanes blanches du Pape ?
"Oui, je l'avoue, et lorsque je le vois à la télévision je m'aperçois si elles sont de moi ou pas. Les miennes ont un petit pli sur l'épaule droite et les manches à peine courtes ".

- Etes-vous seul à travailler aux soutanes de Ratzinger?.
"C'est un miracle que je ne parviens à partager avec personne. Ma fille Laura, une fois, a attaqué un bouton. Elle l'avait mérité: comme moi, elle voit dans les soutanes l'élégance des fleurs ".

Paolo Mosca, Il Messagero, 13 jenvier 2008