Oui, les prêtres doivent s'intéresser aux medias (et les catholiques dans leur ensemble). C'est le thème d'un remarquable article du blog "ab2t" - lu grâce au Salon Beige. (29/8/2010)

C'est aussi l'avis du Père Dominique Rimaz: Une lettre du Suisse Romain

Article ici: http://ab2t.blogspot.com/...

Faut-il s'intéresser aux médias ?
par l'abbé Guillaume de Tanoüarn
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Les prêtres peuvent-ils s'intéresser aux médias ? Certains pensent que non, comme si le sacerdoce, faisant concurrence à la "grande Muette de la République", comportait implicitement une sorte de devoir de réserve. Mais c'est tout le contraire ! Le prêtre n'a pas à rester sur sa réserve. Il est fait pour parler. Qu'est-ce qu'un prêtre ? L'homme qui confectionne les sacrements, et qui, ce faisant, agit dans la personne du Christ. Mais si l'on considère sa valeur ajoutée en tant que personne unique, aimée et choisie par Dieu, c'est évidemment dans la parole qu'il faut aller la chercher, cette valeur ajoutée. Le prêtre est, dans tous les sens du terme, un homme de parole. Si cette parole peut de surcroît utiliser tel ou tel porte voix, pourquoi s'en priver ?

Il y a un conditionnement humain qui est important dans la diffusion de la Parole de Dieu. Dieu a voulu avoir besoin d'apôtres, et cela dès le début. Et il a voulu que la parole des apôtres retentisse d'une extrémité du monde à l'autre. il n'est pas indifférent que le Christ soit venu "en ce temps là", où florissaient les communications, grâce aux voies romaines et aux énormes travaux qu'elles ont représenté d'une part, et grâce à des lignes maritimes fonctionnant sans être (trop) perturbées par les pirates d'autre part. L'Empire a offert au Message du Christ la Paix romaine, comme une condition circonstanciellement nécessaire de la diffusion de son message.

Eh bien ! La mondialisation technologique d'aujourd'hui nous offre d'autres moyens. Les Voies romaines d'aujourd'hui passent par Internet. Il serait criminel de ne pas s'en rendre compte. Grâce à Internet, nous sortons de ce que l'on appelait au temps de Mc Luhan, dans les années 70, les "mass-media" et nous entrons dans une époque où, moyennant un minimum de compétence (..), on peut contrôler sa propre communication. Lorsque Mac Luhan expliquait "le message c'est le medium" il avait raison. Il est dangereux de communiquer quand on ne contrôle pas le medium, qui peut faire n'importe quoi de ce que vous lui donnez.

C'est l'éternel problème des mass media comme la télévision de masse, cette déformation systématique de l'information, au nom d'un message standard à faire passer, dont le vôtre ne représenterait plus qu'un symptôme parmi d'autres.
Lorsque vous êtes invités pour permettre aux organisateurs de l'émission de prouver quelque chose, vous n'êtes pas maître de la donne. Alors de deux choses, l'une. Si l'on n'a que sa personne à promouvoir, si l'on fait dans l'autopromotion, ce n'est pas forcément très grave. Quoi que vous direz, c'est vous que l'on retiendra et peu importent les conditions dans lesquelles passera votre message, du moment que personnellement vous tiriez votre épingle du jeu. Mais si vous vous sentez chargés de porter une parole qui n'est pas vôtre, là les données du problème sont très différentes. Caute ! comme disait Spinoza. Il faut user de suffisamment de précautions pour que le message dont vous êtes porteurs ne soit pas parasité dans une sorte de surimposition médiatique d'un autre message.

Mais ce qui est merveilleux aujourd'hui c'est que la télévision de masse elle-même s'essouffle, que l'on préfère choisir son film soi-même moyennant trois euros et le regarder sur son ordinateur portable que de regarder le film obligatoire à 20 H 30, avec les pubs qui n'en finissent plus.
Quant aux talk show, sans rentrer dans le détail de chacune des émissions proposées, on voit bien que la veine s'en épuise et que trop souvent l'on réinvite tout un petit monde de parleurs, toujours les mêmes, qui sont là parce que l'on sait (et donc que l'on contrôle) ce qu'ils vont dire.
Bref... La télé de masse, de moins en moins regardée, doublée par toutes sortes de chaînes plus spécialisées, ne me semble plus un endroit incontournable pour "passer" l'Evangile. D'autant plus que ne survivent à cette atmosphère, que des personnalités qui sont soit vidées de toute substance (comme le Père de La M. toujours d'accord avec ce qu'on veut lui faire dire) soit transformées en ravis de la crèche et possédés par un humanisme à la fois élémentaire et faux (comme Mgr de Parthénia), soit diabolisées et heureuses de l'être parce que cela au moins les fait exister.

Nous vivons une époque où la Culture de masse demeure pour tous ceux qui n'ont pas idée d'aller voir plus loin, mais où il est de plus en plus facile de la contourner, tant les offres sont nombreuses.
Le pape nous exhorte (c'était à Malte je crois cette année) à considérer le message chrétien - non pas comme partie intégrante du conditionnement de masse - mais comme constitutif d'"une véritable contre-culture", antimatérialiste. Cette contre-culture, qui est une culture de vie, nous avons les moyens de la diffuser sans nous laisser asservir par le medium, grâce aux progrès prodigieux de la technologie.

A nous de comprendre et de faire comprendre que cette contre-culture ne doit pas être une nième culture tribale. Il y a l'universalité d'un matérialisme et d'un consumérisme de masse qui prend aujourd'hui la forme d'une culture et aspire au Monopole universel. Il y a les enclaves, qui maintiennent les lois de la tribu, tous les petits villages d'irréductibles que l'on peut imaginer. Et il y a une contre-culture qui aspire à l'universalité au nom de la vérité dans laquelle l'homme doit se transformer s'il veut échapper au néant (je veux dire : au nom du salut annoncé). Cette contre-culture, qui n'est pas une culture de masse mais qui est une culture universelle, c'est la culture de l'Eglise catholique dans le monde.