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POURQUOI BENOÎT XVI A LES JEUNES DE SON CÔTÉ
 

Un éditorialiste du Catholic Herald, Milo Yiannopoulos (*), constate l'échec des niveaux intermédiaires de l'Eglise (i.e. les conférences épiscopales) à mobiliser les jeunes, "à la recherche d'un leadership direct et charismatique" que Benoît XVI sait leur proposer. (2/9/2011)




 
 

Un lieu commun qui perdure depuis le 19 avril 2005 (dans le meilleur des cas, c'est-à-dire quand on met de côté l'ex panzerkardinal et gendarme de la foi) consiste à dire: les gens venaient voir Jean-Paul II, ils viennent écouter Benoît XVI.
Depuis 6 ans que j'observe le Saint-Père, l'ayant même vu de près, j'en suis arrivée à la conclusion définitive que cette analyse est erronée.
Les catéchèses, les homélies du Saint-Père sont admirables (et doivent êtres lues), mais les gens qui accourent Place Saint-Pierre, à Castelgandolfo, et à chacun de ses déplacements, que ce soit en Italie ou à l'étranger, ne viennent pas pour l'écouter... pour la simple raison que c'est impossible (les gens qui par dizaines de milliers étaient massés le long des rues de Madrid ne venaient de toutes façons pas l'"entendre"!).
On pourrait dire aussi qu'ils viennent simplement voir le successeur de Pierre. Il y a sans doute un peu de cela.
Mais je crois profondément qu'il y a dans sa personnalité quelque chose d'indéfinissable, de très subtil (que les grossiers représentants des medias ne peuvent pas percevoir) qui fait qu'il est infiniment touchant. Une humilité, une fragilité, mais aussi une honnêteté, une authenticité absolue, le refus de se prêter au jeu de la communication - que nous avons particulièrement ressenti lors de la veillée des Cuatro Ventos. Il est totalement autre. Et c'est à cela que les foules qui l'acclament partout où ils se déplacent sont sensibles.
Dans le Catholic Herald, hebdomadaire catholique britannique de ligne opposée à la ligne "conciliaire" représentée par The Tablet (qu'on pourrait en gros comparer à celle de La Croix), un journaliste cherche lui aussi les raisons qui font que Benoît XVI est si populaire parmi les jeunes: "des jeunes qui sont à la recherche d'un leadership direct et charismatique en phase avec leurs inclinations politiques, et même liturgiques, que les hiérarchies épiscopales ne parviennent pas à leur proposer, et qui s'adressent directement au Saint-Père"..




 

Pourquoi Benoît XVI a la cote parmi les jeunes
Les jeunes sont attirés par le pape, car, bien qu'il soit célèbre, il transcende le vilain culte de la célébrité
Par Milo Yiannopoulos (*)
jeudi 1er Septembre 2011
Texte original en anglais, www.catholicherald.co.uk/ , ma traduction.
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Le spectacle de plus d'un million de jeunes venus accueillir le pape Benoît XVI à Madrid pour les Journée Mondiales de la Jeunesse a été extraordinaire - c'est pourquoi il était tellement pénible de voir la BBC concentrer de façon si mesquine sa couverture sur la minuscule bande d'extrémistes venus protester la nuit d'avant.
Parce qu'il y a évidemment quelque chose au sujet de ce pape auquel ces jeunes s'identifient vraiment.

Certes, il est vrai que les jeunes catholiques étaient aussi assez passionnés par Jean-Paul II. Mais je perçois une sorte particulière d'affection pour Benoît XVI de la part des jeunes; quelque chose qui va au-delà de l'enthousiasme pour Jean-Paul II. D'une certaine façon, le Pape actuel est aussi charismatique que son prédécesseur. Mais alors que Jean-Paul II était un habile opérateur médiatique, se délectant de fréquentes "séances-photos" dignes de la princesse Diana, il y avait toujours le sentiment que JPII-l'homme n'était pas tout à fait la même personne que le Pape Jean-Paul II. On pouvait même aller jusqu'à dire qu'il y a avait une tension entre son charisme personnel et sa charge.

Les messes de Jean Paul II étaient parfois des mariages gênants entre rituels prescrits et culture moderne.
Alors qu'il y a un génie particulier dans la manière dont le pape actuel interprète son rôle. Et d'observer comment, agissant par l'intermédiaire de son maître de cérémonie, Mgr Guido Marini, il a imprimé son autorité - et, dans le même temps, sa personnalité - sur la visite papale en Grande-Bretagne. Cette autorité s'impose comme authentique et convaincante. Et les jeunes ont le désir naturel de suivre des personnalités aussi charismatiques.

En Benoît XVI, le public et le privé semblent en harmonie beaucoup plus étroite. Sa capacité à fondre sa propre personnalité avec la grandeur de son office semble amener les jeunes à ressentir avec lui un lien personnel qu'ils n'ont pas avec une bureaucratie diocésaine sans visage.

Sa gentillesse et son comportement de grand-père les attire, parce qu'ils semblent plus authentiques que les embarassantes tentatives de "bras tendus" dont les jeunes catholiques ont si souvent souffert.

Beaucoup de réformes liturgiques de ces dernières années, beaucoup d'encouragements, tels que les arrangements "bénédictins" de l'autel, ont pour effet de réduire l'attention sur le célébrant, tout en ajoutant de la solennité à la célébration, avec leurs symboles dramatiques et une musique qui éléve.

Nulle part l'échec de l'Eglise à être en phase avec les jeunes n'est mieux illustrée que sur ses propres sites internet. C'est un sujet sur lequel j'ai déjà longuement écrit, je ne vais donc pas insister trop sur ce sujet , sauf à faire un observation: accédez à la page "jeunesse" du site de notre propre Conférence des évêques d'Angleterre et du Pays de Galles, et la principale illustration que vous verrez concerne le National Youth Sunday ... de 2009. Je me demande ce qu'une génération élevée avec Twitter peut faire avec cela.

On peut seulement imaginer ce que les jeunes catholiques pensent quand ils lisent les tracts qui leur sont distribués, espérant trouver des informations importantes au sujet de la foi, plutôt que d'être bombardés avec la propagande de gauche sur "l'action pour la justice". Cela ne semble guère en relation avec les avertissements du Saint-Père sur les dangers du relativisme et de la sécularisation, c'est sûr. Ni avec ses enseignements sur l'impasse du consumérisme, qui selon lui, est une menace particulière pour les jeunes.

Revenons en 2007, en référence à l'aggravation constante chez les jeunes des préoccupations sur la mode et l'image de soi, où Benoît XVI a déclaré: "Comme c'est triste quand les jeunes perdent l'émerveillement, l'enchantement, des sentiments les plus beaux, la valeur du respect de son corps" (ndt: angelus du 8 décembre 2007, ici).

Bien sûr, les adolescents ne sont pas tous otages des excès de Jersey Shore (ndt: une émission de télé-réalité américaine. "L'émission nous propose de suivre le quotidien de 4 filles et 4 garçons qui cohabitent dans une villa. Les candidats sont plutôt fêtards, aiment les sorties, bronzer, le luxe... ). Alors, quand nous réalisons ce qui doit être le sommet de l'obsession pour la célébrité grotesque dans la société au sens large, pas étonnant que le message du Pape parle si fort aux jeunes.

En fait, il y a sans équivoque, un conservatisme résurgent parmi les nombreux jeunes catholiques à l'heure actuelle - tout comme pour les jeunes juifs et les jeunes musulmans. Certains dirigeants de l'Église semblent réticents ou incapables de se "connecter" avec cette renaissance du culte traditionnel, parce qu'ils sont des hommes des années 70. De même, cela doit être dit, il y a de nombreuses personnes en charge des médias catholiques et d'autres organisations catholiques, qui pourraient expliquer pourquoi ils ont du mal à produire un contenu crédible, qui attire les adolescents et les jeunes adultes.

Mais si les Conférences épiscopales, et même certains secteurs de la presse catholique, sont mal à l'aise avec ce nouveau conservatisme des jeunes, Benoît XVI ne l'est pas. En fait, c'est quelque chose qu'il partage avec la génération montante. Comme Cardinal Ratzinger, ce pape était connu pour être sceptique envers les bureaucraties, et en particulier les conférences épiscopales, comme moyen de connecter les gens à l'Eglise. Oui, elles jouent un rôle important dans la mobilisation des jeunes pour assister à des événements comme les JMJ, mais on se demande si elles sont vraiment le meilleur modèle institutionnel pour préserver l'avenir de l'Eglise quand elles se battent si mal pour cultiver l'enthousiasme de la jeunesse.

Ainsi - et je l'espère, ce n'est pas trop extravagant, ou peut-être, peut-on penser, plein d'espoir, est-ce une suggestion - il y a en cours une sorte de contraction dans ce qu'on pourrait appeler la gestion de niveau intermédiaire de l'Église catholique. Un échec, même, alors que des jeunes, qui sont à la recherche d'un leadership direct et charismatique en phase avec leurs inclinations politiques, et même liturgiques, s'adressent directement au Saint-Père.

L'honnêteté, la rigueur et le caractère scrupuleux du pape Benoît XVI- malgré l'opposition, y compris au sein de l'Eglise - frappent beaucoup de gens comme quelque chose d'héroïque, et représentent une sorte de leadership personnel qui est totalement absent dans d'autres secteurs de la vie publique.
Faut-il s'étonner que 1,5 million de jeunes se soient manifestés, la semaine dernière, pour célébrer son arrivée à Madrid?
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(*) Milo Yiannopoulos est un journaliste et homme de télévision qui a été nommé parmi les 100 personnalités les plus influentes dans l'économie numérique britannique par Wired magazine (magazine mensuel et périodique publié à San Francisco depuis mars 1993. Il se concentre sur l'incidence de la technologie dans les domaines de la culture, de l'économie et de la politique).




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