Adresse au Clergé de Belluno

FORMATION DE LA CONSCIENCE
Question:

... aujourd'hui, former une conscience cohérente, une conscience droite, semble toujours plus difficile. On confond le bien et le mal avec le fait de se sentir bien et de se sentir mal, l'aspect le plus chargé d'émotion.
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Réponse:
... cette première question reflète un peu le problème de la situation culturelle en Occident, car le concept de conscience s'est profondément transformé au cours des deux derniers siècles. Aujourd'hui prévaut l'idée que seul ce qui est quantifiable est rationnel, fait partie de la raison. Les autres choses, c'est-à-dire les matières de la religion et de la morale, n'auraient pas de rapport avec la raison commune, car elles ne sont pas vérifiables, ou, comme on dit, pas falsifiables lors de l'expérimentation. Dans cette situation, où morale et religion sont presque expulsées par la raison, l'unique critère ultime de la moralité ainsi que de la religion est le sujet, la conscience subjective qui ne connaît pas d'autres instances. En fin de compte, seul le sujet, avec son sentiment, ses expériences, d'éventuels critères qu'il a trouvés, décide.
Mais ce faisant, le sujet devient une réalité isolée, et c'est ainsi que changent, comme vous l'avez dit, jour après jour, les paramètres. Dans la tradition chrétienne, "conscience" signifie conscience: c'est-à-dire que nous, que notre être est ouvert, il peut écouter la voix de l'être lui-même, la voix de Dieu. La voix des grandes valeurs est donc inscrite dans notre être et la grandeur de l'homme est précisément qu'il n'est pas fermé sur lui, il n'est pas réduit aux choses matérielles, quantifiables, mais il possède une ouverture intérieure aux choses essentielles, la possibilité d'une écoute.

Conception humaine de l'écologie
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Aujourd'hui, nous voyons tous que l'homme pourrait détruire le fondement de son existence, sa terre, et nous ne pouvons donc plus simplement faire avec notre terre, avec la réalité qui nous a été confiée, ce que nous voulons et ce qui nous apparaît utile et prometteur sur le moment, mais nous devons respecter les lois intérieures de la création, de cette terre, apprendre ces lois et obéir également à ces lois, si nous voulons survivre. Cette obéissance à la voix de la terre, de l'être, est donc plus importante pour notre bonheur futur que les voix du moment, les désirs du moment. Il s'agit, en somme, d'un premier critère à apprendre: que l'être lui-même, notre terre, parle avec nous et que nous devons écouter si nous voulons survivre et déchiffrer ce message de la terre. Et si nous devons être obéissants à la voix de la terre, cela vaut encore davantage pour la voix de la vie humaine. Nous devons non seulement prendre soin de la terre, mais nous devons respecter l'autre, les autres. Que ce soit l'autre dans sa singularité comme personne, comme mon prochain, ou les autres comme communauté qui vit dans le monde et qui désire vivre ensemble. Et nous voyons que ce n'est que dans le respect absolu de cette créature de Dieu, de cette image de Dieu qui est l'homme, que ce n'est que dans le respect d'une vie vécue ensemble sur la terre, que nous pouvons aller de l'avant.

"Loi naturelle"
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... en respectant les expériences humaines qui nous indiquent le chemin d'aujourd'hui et de demain, il me semble que les Dix Commandements ont toujours une valeur prioritaire, dans laquelle nous voyons les indicateurs fondamentaux du chemin. Les Dix Commandements relus, revécus à la lumière du Christ, à la lumière de la vie de l'Eglise et de ses expériences, indiquent plusieurs valeurs fondamentales et essentielles: le quatrième et le sixième commandement indiquent ensemble l'importance de notre corps, de respecter les lois du corps, de la sexualité et de l'amour, la valeur de l'amour fidèle, la famille; le cinquième commandement indique la valeur de la vie et également la valeur de la vie commune; le septième commandement indique la valeur du partage des biens de la terre et la juste division de ces biens, l'administration de la création de Dieu; le huitième commandement indique la grande valeur de la vérité.



LE MINISTÈRE DU PRÊTRE CATHOLIQUE

Question:

... vers quelles priorités orienter aujourd'hui notre ministère de prêtres et de curés, afin d'éviter, d'un côté, la fragmentation et de l'autre, la dispersion?
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Réponse:
Je connais moi aussi un peu ce problème, avec tant de dossiers qui arrivent chaque jour, tant d'audiences nécessaires, tant de choses à faire...
... le Seigneur donne trois impératifs, qui me semblent substantiellement exprimer aujourd'hui aussi les grandes priorités du travail d'un disciple du Christ, d'un prêtre. Les trois impératifs sont: priez, prenez soin et annoncez.
... Jésus a dit: soignez les malades, ceux qui se sont égarés, ceux qui en ont besoin. C'est l'amour de l'Eglise pour ceux qui sont exclus, pour ceux qui souffrent. Les personnes riches peuvent être elles aussi intérieurement exclues et souffrir. "Soignez" se réfère à tous les besoins humains, qui sont toujours des besoins qui vont en profondeur vers Dieu. Il est donc nécessaire, comme on dit, de connaître les brebis, d'avoir des relations humaines avec les personnes qui nous sont confiées, d'avoir un contact humain et ne pas perdre l'humanité, car Dieu s'est fait homme et a ainsi confirmé toutes les dimensions de notre être humain.
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Dans l'association de ces trois priorités et, naturellement, en tenant compte de tous les aspects humains, de nos limites que nous devons reconnaître, nous pouvons accomplir comme il se doit notre sacerdoce. Cette humilité, qui reconnaît également les limites de notre force, est également importante. Ce que nous ne pouvons pas faire, le Seigneur doit le faire. Et également la capacité de déléguer, de collaborer.



IMMIGRATION

Question:

... la Vénétie est une terre de grande immigration, avec une présence importante de personnes non chrétiennes. Cette situation place nos diocèses face à une nouvelle tâche d'évangélisation en leur sein. Cela comporte cependant une certaine difficulté, car nous devons concilier les exigences de l'annonce de l'Evangile avec celles d'un dialogue respectueux des autres religions.
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Réponse:
Naturellement, c'est vous qui connaissez de plus près cette situation. Et, de ce fait, il ne m'est peut-être pas possible de vous donner beaucoup de conseils pratiques...
... Il n'existe plus de monde uniforme. En particulier en Occident, où sont présents tous les autres continents, toutes les autres religions, les autres façons de vivre la vie humaine. Nous vivons une rencontre permanente, qui ressemble peut-être à l'Eglise antique, où existait la même situation. Les chrétiens représentaient une très petite minorité, un grain de sénevé qui commençait à croître, entouré par des religions et des conditions de vie très différentes. Nous devons donc réapprendre ce que les chrétiens des premières générations ont vécu.
Saint Pierre, dans sa première Lettre, au troisième chapitre, a dit: "Vous devez toujours être prêts à rendre compte de l'espérance qui est en vous". Il a ainsi formulé pour l'homme normal de l'époque, pour le chrétien normal, la nécessité de conjuguer annonce et dialogue. Il n'a pas dit formellement: "Annoncez à chacun l'Evangile". Il a dit: "Vous devez être capables, prêts à rendre compte de l'espérance qui est en vous". Il me semble que cela est la synthèse nécessaire entre dialogue et annonce....


DIVORCÉS REMARIÉS

Question:

Nous assistons toujours plus à une augmentation considérable de situations de personnes divorcées qui se remarient, vivent ensemble et nous demandent à nous, prêtres, de les aider dans leur vie spirituelle. Ce sont des personnes qui portent souvent en elles la douloureuse demande d'accéder aux sacrements. Il s'agit de réalités qui exigent de nous une confrontation et également un partage des souffrances qu'elles comportent.
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Réponse:
Que faire? Je dirais qu'un premier point serait naturellement la prévention, pour autant que cela soit possible....
...aujourd'hui, cet axiome selon lequel l'homme entend faire ce qui est dans sa nature, un mariage unique, fidèle, se transforme en un axiome un peu différent. "Volunt contrahere matrimonium sicut ceteri homines". Ce n'est plus simplement la nature qui parle, mais les "ceteri homines", ce que tous font. Et ce que tous font aujourd'hui n'est plus simplement le mariage naturel selon le Créateur, selon la création. Ce que font les "ceteri homines", est de se marier dans l'idée qu'un jour, le mariage puisse échouer, et que l'on puisse passer ainsi à un deuxième, et à un troisième, puis à un quatrième mariage. Ce modèle, "comme tous le font", devient ainsi un modèle en opposition avec ce que dit la nature. Il devient ainsi normal de se marier, de divorcer, de se remarier et personne ne pense qu'il s'agit d'une chose qui va contre la nature humaine ou tout au moins, on rencontre difficilement quelqu'un qui soit de cet avis.
... nous devons retrouver la capacité d'écouter la nature... Redécouvrir derrière ce que tous font ce que nous dit la nature elle-même, qui parle de façon différente de cette habitude moderne. En effet, elle nous invite au mariage pour la vie, dans une fidélité pour la vie, également avec les souffrances que comporte grandir ensemble dans l'amour.
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... nous avons la souffrance de se trouver dans un lien nouveau, qui n'est pas celui du sacrement et qui ne permet donc pas la pleine communion aux sacrements de l'Eglise. Ici, il faudrait enseigner et apprendre à vivre avec cette souffrance... Nous devons généralement, dans notre génération, et dans notre culture, redécouvrir la valeur de la souffrance, apprendre que la souffrance peut être une réalité très positive, qui nous aide à mûrir, à devenir davantage nous-mêmes, plus proches du Seigneur qui a souffert pour nous et qui souffre avec nous.



CONCLUSION

... Ainsi, il devient visible que le grain de sénevé porte du fruit et devient toujours à nouveau un grand arbre dans lequel les oiseaux du monde trouvent repos.


Merci et bon courage.
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Source: site du Vatican