Autriche: mini-revue de presse francophone

Peu de couverture médiatique, en France, presque uniquement des dépêches d'agence. Aucune polémique, aucun parfum de scandale ne se profilant, il n'a pas paru nécessaire à nos "informateurs" de s'étendre sur le sujet.

Deux articles plutôt intéressants, en contradiction, bien sûr, l'un avec l'autre, mais cette opposition permet justement de se faire une idée assez juste des déchirures que les débats de société artificiels (avortement, euthanasie) provoquent dans la planète catholique, chez nous:
- Dans La Croix I. de Gaulmyn admet que l'accueil que les autrichiens ont réservé au Pape était chaleureux, et que l'affluence modeste (mais les endroits étaient restreints, et il s'agissait de la part du Saint-Père d'un pélerinage plus encore que d'un voyage pastoral) constituait un exploit, compte tenu de la météo, ce qui a été dit ici (Dures conditions à Mariazell), et ce dont témoignent les photos... tout en soulignant les habituels thèmes de friction...
- Dans Présent, Rémi Fontaine fait un compte-rendu du voyage axé sur le message transmis par Benoît XVI, et en souligne avec justesse le fil conducteur, à savoir la volonté de réveiller la foi chrétienne en Europe.


Les Autrichiens ont été chaleureux avec le pape

Le pape est intervenu à plusieurs reprises sur des sujets de société en débat en Autriche
Isabelle de Gaulmyn, La Croix du 10 sept
Article en entier ici
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Le grand parapluie blanc pontifical bascule soudain sur le bord de l’estrade de l’autel, emporté par une bourrasque plus forte que les autres, et ce vent qui souffle en rafale sur le sanctuaire de Mariazell, alors que, trempés par une pluie battante, les choristes non abrités entonnent une hymne de Monteverdi… Peu importe.

Même peu nombreux, même frigorifiés par la bise glaciale qui raidit les vêtements trempés, les pèlerins continuent de prier, chanter – merveilleusement – et applaudir le pape. Trente mille samedi, selon les organisateurs. C’est peu, certes, mais c’est une prouesse, vu les conditions météorologiques apocalyptiques.

Prouesse, aussi, la chaleur de l’accueil, l’enthousiasme malgré la pluie, chez ces Autrichiens qui semblent ne jamais perdre le sourire. C’est que, explique Antoine Lang, un « vieux montagnard », « c’est de toute façon toujours une fête : un pèlerinage à Notre-Dame de Mariazell, et en plus avec le pape, alors… » D’ailleurs, il montre son loden vert sous son ciré noir : preuve que lui, en matière de froid, en a vu d’autres…

« Moins nombreux, mais convaincus »
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Moins chaude, manifestement, la cape bleue sous laquelle tente tant bien que mal de s’abriter en riant Marguerite. Cette étudiante repartira, elle, ravie de ce qu’elle a entendu : « Ses mots sur la vérité renforcent notre foi, et nous en avons besoin. Il a le pouvoir, avec simplicité, de nous toucher au cœur », témoigne-t-elle.
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« Nous ne sommes quand même pas des milliers », observe lucidement Marguerite, après un coup d’œil rapide à la foule qui se disperse rapidement dans la brume qui a maintenant envahi le sanctuaire. « Moins nombreux, mais convaincus », se reprend-elle.

Impact « atmosphérique » de la visite pontificale
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Difficile cependant de savoir si, au-delà des « convaincus », Benoît XVI sera parvenu durant ces trois journées à toucher les Autrichiens. Il les a en effet interpellés à plusieurs reprises, n’hésitant pas à prendre position dans les débats de société qui secouent aujourd’hui le pays. Concernant l’avortement, il a critiqué implicitement un projet de loi visant à introduire un droit à l’interruption de grossesse en cas de malformation du fœtus.

Sur l’euthanasie, il a rejeté la revendication qui monte dans le pays pour le droit à une « aide active à mourir ». Dimanche aussi, il a longuement souligné l’importance de ce jour de la semaine, rappelant que la messe dominicale était « une nécessité intérieure » pour les chrétiens, et apportant ainsi un soutien à l’Église catholique autrichienne engagée dans une campagne pour défendre le repos du dimanche contre les commerces.

« On ne peut tout attendre du pape, note un jeune prêtre, et l’Église ne sera pas plus forte d’un coup ce lundi, comme par miracle, après son départ. » Mais, poursuit-il, sa visite aura sans doute eu un impact « atmosphérique » : non du point de vue de la météo, dit-il en souriant, mais moral : « Cela permettra peut-être un climat propice à un renouveau du catholicisme autrichien. À nous d’agir… »
Isabelle de GAULMYN, à Vienne

Réveiller la foi chrétienne en Europe

Benoît XVI en Autriche
Rémi Fontaine Présent du 10 septembre
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De son arrivée à Vienne vendredi (où il a été accueilli par le Président autrichien, Heinz Fischer, et l’archevêque de la capitale, le cardinal Schönborn) à son pèlerinage à Mariazell, Benoît XVI a voulu faire de son voyage de trois jours en Autriche le symbole de son ouverture catholique dans l’enracinement doctrinal et historique le plus sûr :

« Le 850e anniversaire du sanctuaire marial de Mariazell qui est comme le cœur maternel de l’Autriche et occupe aussi une place importante dans le cœur des Hongrois et des Slaves. Il est un symbole d’une ouverture qui ne dépasse pas seulement les frontières géographiques des Etats, divers peuples voyant en Marie une dimension essentielle de la personne humaine, une capacité exemplaire à s’ouvrir à la Parole et à la vérité divine. »

C’est dans cette perspective qu’il a invité vendredi le corps diplomatique à se rappeler qu’« une Autriche sans foi chrétienne ne serait plus l’Autriche » : « Par conséquent, il doit être dans l’intérêt de tous de ne pas permettre qu’un jour dans ce pays il n’y ait peut-être plus que les pierres à parler du christianisme ! »

Réitérant son refus absolu de l’avortement qui ne peut être un droit humain – « Il est son contraire » – ainsi que de l’euthanasie, il a lancé un nouvel appel à l’Union européenne, qui ne doit « pas renier ses racines chrétiennes », doit jouer un rôle moteur pour humaniser la mondialisation et faire plus d’enfants en oubliant l’égoïsme de la société de consommation. Il a aussi défendu dimanche la dimension religieuse du repos dominical lors de la grand-messe en la cathédrale Saint-Etienne de Vienne : « L’appétit effréné de vie qui ne donne aujourd’hui aucune paix aux hommes finit dans le vide d’une vie perdue. »

Faisant l’éloge des hommes et des femmes qui se consacrent totalement à Dieu comme mère Teresa, « dans un monde où ne semblent souvent compter que le pouvoir et l’argent », le Pape a visité dimanche après-midi l’abbaye cistercienne de Heiligenkreuz, fondée en 1135 près de Vienne, qui abrite une communauté de 80 moines ainsi qu’une faculté de théologie. Il a critiqué certaines expériences liturgiques faites depuis Vatican II pour « rendre attrayante » la liturgie et attirer les fidèles, mais aussi certains courants théologiques modernes : « Dans le souci d’obtenir une reconnaissance de rigueur scientifique au sens moderne, la théologie peut perdre la respiration de la foi. »

Mais c’est à Mariazell, en la fête de la Nativité de la Très Sainte Vierge, que le Saint-Père – reçu par l’abbé de Lambrecht, monastère bénédictin dont dépend le sanctuaire, et par le recteur de ce dernier – a développé avec le plus de force le thème récurrent de son pontificat :

« Notre foi s’oppose radicalement à la résignation qui considère l’homme incapable de vérité, comme si elle était trop grande pour lui. Cette résignation face à la vérité est le centre de la crise de l’Occident, de l’Europe. S’il n’existe pas une vérité pour l’homme, alors il ne peut distinguer entre le bien et le mal. Par conséquent les grandes et merveilleuses découvertes de la science sont ambiguës : elles peuvent déboucher sur de grandes perspectives pour l’homme, mais elles peuvent aussi se transformer en une terrible menace…

« Nous avons besoin de vérité... (Il) est alors temps de regarder Jésus comme nous le voyons ici au sanctuaire de Mariazell. Comme un enfant dans les bras de sa mère et comme le crucifié. Ces deux images nous disent que la vérité s’affirme non par le pouvoir extrême, mais qu’elle se concède à l’homme par le biais du pouvoir intérieur d’être véritable. La vérité se dévoile dans l’amour (...) Regardez le Christ ! Si nous le faisons, nous nous rendons compte que le christianisme est différent et est plus qu’une morale, qu’une série de commandements et de règles. C’est le don d’une amitié qui dure dans la vie et la mort et qui porte en soi une très grande force morale dont nous avons tant besoin face aux défis de notre époque… »

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