Benoît XVI et la liturgie, à petits pas

Pour la messe du Baptême du Seigneur (Baptême du Seigneur- Messe à la Chapelle Sixtine ), le Pape a confirmé sa volonté de corriger à petites touches les abus liturgiques.
Cette démarche avait commencé avec l'arrivée de Mgr Guido Marini, et s'est amplifiée avec les célébrations de Noël.

Loin de toutes les approximations de la "grande" presse, un excellent article (et presque "prophétique", puisqu'il date du 24 décembre dernier!) du journaliste italien, Paolo Rodari, fait le point.
Il a compris que le coeur du pontificat est peut-être là, que ce pape est plus préoccupé de spiritualité que de politique, de liturgie que d'écologie.
Si on en juge par les réactions de Ses adversaires, on peut supposer qu'Il voit juste et loin.

Article original en italien sur son blog: www.palazzoapostolico.it

Ma traduction



Voici Noël : et le Pape insiste sur l'"ancienne" orientation
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(Paolo Rodari, 24 décembre)

C'est surtout dans les liturgies pontificales (c'est-à-dire celles que le Pape préside sur le trône, ou bien à la "chaire" (cathedra), de la basilique vaticane) qu'émerge le style liturgique sobre, soigné, et en même temps courageux, caractéristique de Benoît XVI.
Un style qui, en insistant ce qui est le coeur (l'essence) de la vie de la foi des croyants, c'est-à-dire la liturgie, est destiné à marquer en profondeur tout le pontificat du successeur de Jean-Paul II.
Vers Rome, en effet, vers la façon dont Rome célèbre la liturgie, le monde entier regarde, et il est donc évident que c'est d'abord le style liturgique propre au Pontife qui peut peser sur la vie de foi des comunnautés chrétiennes éparses dans les différents continents.
Plus que les mots et les discours (néanmoins importants) c'est l'"ars celebrandi" qui manifeste ce que le pasteur entend apporter au monde et à son Église.
Et Benoît XVI en est conscient. En est conscient aussi celui qui, depuis le premier octobre dernier, en est le nouveau maître des cérémonies, Mgr Guido Marini.
Et c'est aussi à cause de cette conscience que, pas après pas, les liturgies pontificales des derniers mois voient la courageuse introduction d'anciens usages récemment tombés en désuétude, usages qui, dans l'ensemble, réalisent ce qui apparaît comme les attentes de Benoît XVI : la liturgie doit favoriser une commune orientation du prêtre et des fidèles vers l'Orient, c'est-à-dire à Celui qui vient, au Seigneur qui revient au milieu de son peuple, au milieu de ceux qui, avec la voix, le regard et l'attitude, montrent qu'ils l'attendent.
C'est avant tout l'orientation, en effet, qui semble pouvoir être la garantie que les paroles dédiées par Georges Bernanos à la vie liturgique- "On ne comprend absolument rien à la civilisation moderne si on n'admet pas en premier lieu qu'elle est une conjuration universelle contre toute forme de vie intérieure" - ne se réaliseront pas complètement.

Petit gestes.
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De minuscules changements permettent à la liturgie d'être ce que le Pape veut qu'elle soit.
Après la messe - récemment célébrée - de suffrage des cardinaux défunts au cours de l'année, dans laquelle, de façon significative, la croix fut à nouveau placée au centre de l'autel (pour indiquer l'orientation du regard), après les célébrations suivantes, où revinrent les formes romaines classiques et une noble austérité exempte de formes "profanes" (les parements et les couleurs furent ceux adaptés aux temps liturgiques), voilà les célébrations de Noël. Voilà la messe de minuit (ce soir) et, demain, de la loggia centrale de la basilique vaticane, le traditionnel message de Noël et donc la bénédiction "Urbi et Orbes", à la ville de Rome et au monde entier.
Pour la messe de minuit le trône papal sera à nouveau, comme le veut la tradition, à sept marches.
Benoît XVI mettra une casula brodée à l'occasion de son quatre-vingtième anniversaire et une mitre enrichie de pierres fines.
Pour la bénédiction du jour de Noël, le Pontife portera un piviale en lamé brodé d'or qui appartint à Jean XXIII et, avec elle, une mitre du Souverain Pontife dont Benoît XVI a pris le nom : Giacomo della Chiesa, ou Benoît XV.
Et ensuite ce sera toujours depuis la loggia centrale de la basilique vaticane que Ratzinger donnera la bénédiction "Urbi et Orbi" avec la croix papale, c'est-à-dire celle à trois branches qui remonte à Léon XIII.
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Joseph Ratzinger l'a déjà écrit dans l'"incipit" de ce qui, quelques années auparavant, peu de mois après sa sortie, en Allemagne était déjà devenu un phénomène editorial, c'est-à-dire "Der Geist der Liturgie. Eine Einführung "(L'esprit de la liturgie. Une introduction"), lorsque, cherchant à reprendre noir sur blanc les aspirations du célèbre "Esprit de la liturgie" de Romano Guardini, il écrivit que si son livre "réussissait à son tour à servir de stimulant à quelque chose comme un 'mouvement liturgique', un mouvement vers la liturgie et vers sa célébration correcte , à la fois extérieure et intérieure ", l'intention qui l'avait poussé à un tel travail "serait pleinement accomplie".

A partir de petites choses, il se crée un grand mouvement de restauration, de ravalement de ce qui, surtout dans les années ayant suivi le Concile, a fait perdre à la liturgie beaucoup de la beauté de ses formes.
Pourtant tout n'est pas perdu. La liturgie peut encore être célébrée comme un moment d'"adoration commune" - ce sont des mots de Ratzinger -, un instant "pour aller à la rencontre de celui qui vient: ce n'est pas un cercle refermé sur lui-même qui exprime l'essence de l'évènement, mais le départ commun, qui s'exprime dans l'orientatation commune ".

Le Motu Proprio "Summorum Pontificum" (dans quelques jours sortira - elle est déjà prête - une note d'Ecclesia Dei qui en expliquera mieux le fonctionnement) est un signe important dans le sillage de ce retour à une orientation commune.
Les petites modifications apportées au Pontificat durant ces derniers mois, le sont aussi. Elles sont, en effet, fidèles aux règles, et donc à un critère liturgique directement issu de l'histoire bimillénaire de l'Église.



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