Le Pape et les medias

Une intense activité pastorale

Après le discours de La Sapienza qui, bien que n'ayant pu être prononcé par son auteur, a connu un succès d'audience presque inespéré où je n'hésite pas à reconnaître "le plan de Dieu", le Saint-Père nous offre coup sur coup deux documents limpides et profonds qui concernent notre vie quotidienne, l'un sur l'éducation (Réflexions sur l'éducation ), l'autre sur les medias.
Je ne peux pas affirmer qu'ils sont "entièrement de sa plume", comme nous savons que c'est le cas pour le fameux discours de la Sapienza...
Mais c'est bien son enseignement...

Quiconque s'intéresse à l'actualité et essaie de comprendre le monde où nous vivons, est forcément très avide de connaître les ressorts de cette information qui nous submerge.
Et lorsque, comme moi, on rédige un petit site autour de l'actualité, on comprend mieux la nécessité du choix dans les sujets traités. Dès lors, ce qui devient intéressant est de connaître les motivations de ces choix.

Il y a aussi, bien sûr, le message trouble que la grande industrie du divertissement tente de faire passer auprès des plus jeunes et des plus fragiles, par le biais de fictions et de magazines (un exemple: La série télé qui brise les tabous).
Elle y réussit assez bien, d'ailleurs, il suffit de s'informer des dernières statistiques concernant la famille et le mariage (voir ici: La famille attaquée )

Il faut admettre que tout n'est pas négatif. Il y a une quantité d'informations honnêtement rapportées, souvent passionnantes.
Et évidemment, comment oublier que nous devons aux moyens de communication modernes d'avoir accès à toute l'actualité autour du Saint-Père, que nous nous réjouissons de suivre, et dont nous sommes heureux de pouvoir amplifier un peu le message.

Voici donc le "MESSAGE DU SAINT-PÈRE BENOÎT XVI POUR LA 42ème JOURNÉE MONDIALE DES COMMUNICATIONS SOCIALES"
(source: Vatican )

Bien qu'il soit aussi accessible sur le site du Vatican, il mérite d'être recopié en entier.

Le courage du Pape
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Et il convient de souligner le courage d'une telle déclaration. Ce n'est certes pas une déclaration d'hostilité aux medias, la vérité n'est jamais hostile, mais il est probable que ceux qui pour favoriser l’écoute, ce qu’on appelle l’audimat,[..] n’hésitent pas à recourir parfois à la transgression, à la vulgarité et à la violence, et à imposer des modèles distordus de vie personnelle, familiale ou sociale, chercheront, d'une façon ou d'une autre, à se venger de celui qui les a percés à jour.


Les médias : au carrefour entre rôle et service.

.... Chercher la Vérité pour la partager.
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Chers Frères et Sœurs !

1. Le thème de la prochaine Journée mondiale des Communications sociales – "Les médias : au carrefour entre rôle et service. Chercher la Vérité pour la partager "– met en lumière l’importance du rôle des moyens de communication sociale dans la vie des individus et de la société.
En effet, il n'y a pas d’aspect de l'expérience humaine, notamment si nous considérons le vaste phénomène de la mondialisation, où les médias ne soient pas devenus partie constitutive des relations interpersonnelles et des processus sociaux, économiques, politiques et religieux. À ce propos, j'écrivais dans mon Message pour la Journée mondiale de la Paix du 1er janvier dernier: « Les moyens de communication sociale, par les potentialités éducatives dont ils disposent, ont une responsabilité spéciale pour promouvoir le respect de la famille, pour illustrer ses attentes et ses droits, pour mettre en évidence sa beauté » (n. 5).

2. Grâce à une vertigineuse évolution technologique, ces moyens ont acquis des potentialités extraordinaires, posant en même temps des questions et des problèmes nouveaux et inédits.
On ne peut nier l'apport qu'ils peuvent donner à la circulation de l’information, à la connaissance des événements et à la diffusion du savoir: par exemple, ils ont contribué de manière décisive à l'alphabétisation et à la socialisation, ainsi qu’au développement de la démocratie et du dialogue entre les peuples. Sans leur apport, il serait vraiment difficile de favoriser et d’améliorer la compréhension entre les nations, de donner un souffle universel aux dialogues de paix, de garantir à l'homme le bien primordial à l'information, assurant en même temps la libre circulation des idées concernant surtout les idéaux de solidarité et de justice sociale.
Oui ! Dans leur ensemble, les médias ne sont pas seulement des moyens pour la diffusion des idées, mais ils peuvent et doivent même être des instruments au service d'un monde plus juste et plus solidaire.
Le risque n’est malheureusement jamais absent qu'ils se transforment au contraire en systèmes destinés à soumettre l'homme à des logiques dictées par les intérêts dominants du moment. C’est le cas d'une communication utilisée à des fins idéologiques ou pour la diffusion de produits de consommation au moyen d'une publicité insistante. Sous prétexte de représenter la réalité, on tend de fait à légitimer et à imposer des modèles distordus de vie personnelle, familiale ou sociale. En outre, pour favoriser l’écoute, ce qu’on appelle l’audimat, on n’hésite pas à recourir parfois à la transgression, à la vulgarité et à la violence. Il y a enfin la possibilité que soient proposés et soutenus, à travers les médias, des modèles de développement qui augmentent plutôt que réduisent la fracture technologique entre pays riches et pays pauvres.

3. L'humanité se trouve aujourd'hui à un carrefour. Ce que j'ai écrit dans l'Encyclique Spe salvi à propos de l'ambiguïté du progrès vaut aussi pour les médias, qui offrent des potentialités inédites pour le bien, mais qui ouvrent en même temps des potentialités abyssales de mal n'existant pas auparavant (cf. n. 22). Il est par conséquent nécessaire de se demander s’il est sage de laisser les moyens de communication sociale être assujettis à un fonctionnement aveugle ou finir par être à la merci de qui s'en sert pour manipuler les consciences. Ne devrait-on pas plutôt faire en sorte qu’ils restent au service de la personne et du bien commun et qu’il favorisent "la formation éthique de l'homme, pour la croissance de l'homme intérieur" (ibid.) ? Leur extraordinaire impact dans la vie des individus et de la société est un élément largement reconnu, mais on doit aujourd'hui mettre en évidence le tournant, je dirais plus encore, la véritable mutation de rôle, qu'ils ont à réaliser.
Aujourd'hui, de façon toujours plus marquée, la communication semble avoir souvent la prétention non seulement de représenter la réalité, mais de la déterminer grâce au pouvoir et à la force de suggestion qu’elle possède. Il arrive par exemple que, dans certaines situations, les médias soient utilisés non pas pour remplir correctement leur rôle d'information, mais pour "créer" les évènements eux-mêmes. Cette périlleuse mutation de leur fonction suscite la préoccupation de nombreux pasteurs. Parce qu'il s'agit évidemment de réalités qui pèsent profondément sur toutes les dimensions de la vie humaine (morales, intellectuelles, religieuses, relationnelles, affectives, culturelles), mettant en jeu le bien de la personne, il faut réaffirmer que tout ce qui est techniquement possible n’est pas éthiquement praticable. L'impact des moyens de communication sur la vie de l'homme contemporain pose donc des questions que l’on ne peut éluder, et qui demandent des choix et des réponses qui ne peuvent être renvoyés à plus tard.

4. Le rôle que les moyens de communication sociale ont joué dans la société doit désormais être considéré comme partie intégrante de la question anthropologique, qui apparaît comme un défi crucial du troisième millénaire. De manière identique à ce qui se passe dans le domaine de la vie humaine, du mariage et de la famille, et au sujet des grandes questions contemporaines concernant la paix, la justice et la sauvegarde de la création, sont en jeu, également dans le secteur des communications sociales, des dimensions constitutives de l'homme et de sa vérité. Lorsque la communication perd ses ancrages éthiques et échappe au contrôle social, elle finit par ne plus tenir compte du caractère central et de la dignité inviolable de l'homme, risquant de peser négativement sur sa conscience, sur ses choix, et de conditionner en fin de compte la liberté et la vie même des personnes. Voilà pourquoi il est indispensable que les communications sociales défendent jalousement la personne et respectent pleinement sa dignité. Un certain nombre de gens pensent qu’une "info-éthique" est aujourd'hui nécessaire dans ce domaine, de la même façon qu’il existe la bioéthique en médecine et dans la recherche scientifique liée à la vie.

5. Il convient d’éviter que les médias deviennent le mégaphone du matérialisme économique et du relativisme éthique, véritables plaies de notre temps. Ils peuvent et doivent par contre contribuer à faire connaître la vérité sur l'homme, en la défendant devant ceux qui tendent à la nier ou à la détruire. On peut dire plus encore que la recherche et la présentation de la vérité sur l'homme constituent la vocation la plus haute de la communication sociale. Utiliser à cette fin tous les langages, toujours plus beaux et plus raffinés, dont les médias disposent, tel est le devoir exaltant confié en premier lieu aux responsables et aux personnes travaillant dans ce secteur. C’est un devoir qui cependant, d’une certaine manière, nous concerne tous, car tous, à l’époque de la mondialisation, nous sommes bénéficiaires et agents de communications sociales. Les nouveaux médias, la téléphonie et Internet en particulier, sont en train de modifier la physionomie même de la communication et c’est peut-être une occasion précieuse pour la redessiner, pour rendre plus visibles, comme l’a dit mon vénéré prédécesseur Jean-Paul II, les aspects essentiels et inaliénables de la vérité sur la personne humaine .

6. L'homme a soif de vérité, il est à la recherche de la vérité ; ceci se manifeste aussi à travers l'attention et le succès enregistrés par de nombreux produits éditoriaux, programmes ou fictions de qualité, où la vérité, la beauté et la grandeur de la personne, y compris sa dimension religieuse, sont reconnues et bien représentées. Jésus a dit : "Vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres" (Jn 8, 32). La vérité qui nous rend libres est le Christ, parce que Lui Seul peut répondre pleinement à la soif de vie et d’amour qui est dans le cœur de l'homme. Celui qui l'a rencontré et qui se passionne pour son message fait l’expérience du désir irrésistible de partager et de communiquer cette vérité : « Ce qui était depuis le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons contemplé de nos yeux – écrit saint Jean –, ce que nous avons vu et que nos mains ont touché, c’est le Verbe, la parole de la vie [...], nous vous l’annonçons, à vous aussi, pour que vous aussi, vous soyez en communion avec nous. Et nous, nous sommes en communion avec le Père et avec son Fils Jésus Christ. C’est nous qui écrivons cela afin que nous ayons la plénitude de la joie» (1Jn 1,1-3).

Invoquons l’Esprit Saint, pour qu’il y ait des hommes de communication courageux et d’authentiques témoins de la vérité qui, fidèles à l’injonction du Christ et passionnés par le message de la foi, "sachent se faire les interprètes des instances culturelles actuelles, s'engageant à vivre notre époque de la communication non pas comme un temps d'aliénation et d’égarement, mais comme un temps précieux pour la recherche de la vérité et pour le développement de la communion entre les personnes et entre les peuples" (Jean-Paul II, Discours à la Rencontre Paraboles médiatiques, 9 novembre 2002).

Avec ce souhait, je donne à tous avec affection ma Bénédiction.
Du Vatican, le 24 janvier 2008, Fête de saint François de Sales.

BENEDICTUS PP. XVI

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Dernière modification apportée le samedi 1 mars 2008 à 20:26:43.


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