Discours de la Sapienza (II)


Sur Internet, le copié-collé est une plaie...
Sauf que... certains textes méritent une diffusion maximale.
Voici ce que j'ai trouvé parmi le meilleur...


Sandro Magister

L'université de Rome ferme ses portes au pape. Voici le discours qu'elle n'a pas voulu écouter

Un quarteron d'enseignants et d'étudiants a contraint Benoît XVI à annuler sa visite à "La Sapienza". Mais le pape professeur ne s'est pas avoué vaincu: il a rendu public avec un jour d'avance le discours qu'il avait écrit pour l'occasion.
Une suite au formidable discours de Ratisbonne, sur les questions ultimes de la foi et de la raison
Sandro Magister

On l'a accueilli à la Mosquée Bleue d'Istanbul. On lui a offert une chaire à l'université de Ratisbonne. On l'attend à New York pour un discours devant les Nations Unies.

Mais pas à l'université de Rome "La Sapienza". Elle lui est fermée. Benoît XVI a dû renoncer à lire un discours, le jeudi 17 janvier, dans la principale université du diocèse dont il est l'évêque. L'université qui avait déjà reçu la visite de Paul VI en 1964 et de Jean-Paul II en 1991.

L'annulation inouïe de la visite du pape a été annoncée le mardi 15 janvier à 17 heures dans un bref communiqué de la salle de presse du Vatican.

Le lendemain, le mercredi 16 janvier, le cardinal secrétaire d'état a écrit au recteur de l'université qui avait invité Benoît XVI, le professeur Renato Guarino:

"Les conditions pour un accueil digne et serein ne pouvant pas être assurées, du fait de l'initiative d'un groupe tout à fait minoritaire de professeurs et d'étudiants, il a été jugé opportun de reporter la visite prévue pour enlever tout prétexte à des manifestations qui pourraient s'avérer regrettables pour tous.

"Toutefois, le Saint-Père, conscient du désir sincère de la grande majorité des professeurs et des étudiants de recevoir une parole culturellement significative, dont on peut retirer des indications stimulantes dans son cheminement personnel de recherche de la vérité, a consenti à ce que vous soit envoyé le texte qu'il avait préparé personnellement pour l'occasion, [...] dans l'espoir que tous puissent s'en inspirer pour des réflexions et approfondissements enrichissants".

Le même jour, dans l'après-midi, sortait "L'Osservatore Romano" avec le texte complet du discours que le pape aurait dû lire le jour suivant à l'université "La Sapienza".

Un discours dans la ligne de celui qu'avait prononcé Benoît XVI à l'université de Ratisbonne le 12 septembre 2005. Sur la nature et les missions d'une université, sur le rapport entre vérité et liberté, entre foi et raison, entre la philosophie, la théologie et les autres branches du savoir, entre l'Eglise et le monde contemporain.

Un discours d'importance capitale pour comprendre la pensée du pape Joseph Ratzinger. Pour comprendre pourquoi il invite sans cesse la raison "à se mettre à la recherche du vrai, du bien, de Dieu et, dans ce cheminement, à distinguer les lumières utiles qui sont apparues tout au long de l'histoire de la foi chrétienne".
.....


Patrice de Plunkett

Le discours que le pape devait prononcer à La Sapienza

Un texte profond et puissant ! ...
A la lecture de cette conférence, on se sent pris de compassion envers les « arguments » des nains qui l’ont empêchée... Des milliers d’internautes, piqués de curiosité par l’incident de La Sapienza, vont découvrir la profondeur de la pensée de Benoît XVI.

Suite ici..


Liberté politique

La Sapienza : pourquoi Benoît XVI dérange
Philippe de Saint-Germain

Invité à se rendre à l’université de Rome “La Sapienza”, Benoît XVI a annulé sa visite, contestée par une soixantaine d’universitaires laïcistes. "Étant donné les troubles qui se sont développés depuis plusieurs jours autour de la visite papale à la Sapienza, a fait savoir la Salle-de-presse du Saint-Siège, il a été décidé de renoncer à cette invitation. Le Saint-Père fera néanmoins parvenir aux autorités académiques le texte de l'intervention qu'il avait préparée."

Le discours prévu se présente comme un prolongement du discours de Ratisbonne, sur la liberté de la raison dans la recherche de la vérité.

Cette Leçon de La Sapienza, qui aurait pu passer inaperçue, est désormais réclamée partout : l’agence Zenit a remarqué que l’Osservatore romano en italien était introuvable jeudi soir dans les kiosques du centre-ville de Rome.

L’hostilité à la venue de Benoît XVI s’est tout d’abord manifestée par une pétition adressée au recteur de La Sapienza par soixante-sept enseignants (sur cinq mille !). Puis des étudiants ont occupé le rectorat en réclamant de pouvoir manifester contre la visite papale dans l'enceinte de l'université. Le groupe de professeurs (dont de nombreux retraités !) reprochait au pape une phrase d'un discours prononcé par lui en 1990, comme préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Traitant de la crise de confiance dans la science et de la science en elle-même, le futur pape avait évoqué le changement d'attitude de l'Église sur la question Galilée. Or la phrase contestée : « Le procès contre Galilée fut juste et raisonnable », était une citation du philosophe Paul Feyerabend.

De nombreux universitaires et le journal de gauche La Republicca, choqués par le manque de tolérance des signataires, ont regretté la violence de cet ostracisme. Un signe de plus que la laïcité négative selon l’expression de Nicolas Sarkozy n’est plus de saison en Italie comme en France. Mais l’affaire est grave, le laïcisme se durcit, et il faut en prendre la mesure, ce qui n’est pas le cas de tout le monde.

Conditionnements laïcistes

Ainsi, le quotidien La Croix (15 janvier) a cru devoir mettre en cause « l'influence d'un entourage très italien de Benoît XVI, qui n'hésite pas à mêler le Vatican à l'actualité du pays ». Cette influence néfaste, serait à l’origine « d'une sérieuse dégradation de la relation qui lie le pape à une partie du peuple italien », en raison notamment des prises de position pontificale sur l’avortement ou de la gestion de la ville de Rome. On comprend que le tabou suprême n’est pas de parler de la culture de mort, mais d’intervenir « en plein débat politique sur le sujet » !
Résultat : le pape serait « exposé trop directement à l'opinion publique et à ces déplorables… malentendus ».

Bref, La Croix n’aime pas les sujets qui fâchent. Précisément, la correspondante du journal à Rome semble ignorer le droit de l’Église à intervenir « dans l’actualité » (à temps et à contretemps), quand les droits fondamentaux de la personne humaine sont en cause, qu’il s’agisse de la vie elle-même ou de ses conditions d’existence : ce conditionnement laïque bien français, qui dénie à l’Église le droit de se mêler « de l’actualité » mériterait donc aussi un sérieux dépoussiérage, qui éviterait d’aussi grossières erreurs de jugement.

En effet, il n'y a pas de « malentendus » entre l’Église et l’Italie, mais un véritable durcissement anti-catholique. C’est la liberté de l’Église qui est visée, car les évêques italiens — comme les espagnols —, derrière les cardinaux Ruini, vicaire du pape pour Rome (qui sera bientôt remplacé), et Bagnasco, président de la CEI, ont pris des positions très fermes en faveur de la famille, du mariage, de la vie...
La gauche italienne, et notamment la gauche chrétienne, ne supporte pas les positions dites « rétrogrades » du pape sur les questions de société. Cette opposition existe dans beaucoup d'autres pays, de manière plus ou moins feutrée, mais elle devrait se renforcer et se manifester de plus en plus, car le pape ne mollira pas, et son opposition le sait.

En France, on imagine mal une invitation de l'archevêque de Paris à la Sorbonne pour un cours inaugural de l'année académique. On mesure donc mal la gravité de la situation. Or ce n’est pas en rasant les murs qu’on apaisera les oppositions.


(C) 2007 - Tous droits réservés

Imprimer cette page