Le Pape lit la Bible
Dans les coulissesde "La Bible en continu... Deux articles de Paolo Rodari, qui montrent comment les faits démentent les idées reçues (6/10/2008)
Lu dans le blog de Paolo Rodari:
A côté d'un récit bien documenté, Paolo Rodari fait trois remarques intéressantes.
- D'abord, le sérieux, pour tout dire le "professionalisme" du pape, qui a littéralement répété son rôle.
- Ensuite, la grande première que représente un pape en prime time à la télévision. Celui qu'on persiste à décrire comme un froid et peu médiatique professeur prouve qu'il est à l'exact opposé de ce portrait archi-faux. Il sait utiliser les moyens de communication moderne, et il ne craint pas de s'exposer personnellement.
- Enfin, le style Ratzinger: il s'efface derrière son sujet. On ne saurait mieux le décrire, dans chacune de ses apparitions, qu'en le comparant à Roberto Benigni. La discrétion sereine (je dirais presque la force tranquille, si cette expression n'était pas trop connotée) opposée à l'agitation qui se donne en spectacle - mais il faut quand même admettre que Benigni, quoiqu'on pense de lui, est dans son rôle, quand il fait le clown...
On pourrait dire, pour résumer "le Pape sait tout faire", et ce qu'il fait, il le fait bien.
Illustrations de Gloria: La bible nuit et jour et La bible nuit et jour (2)
Articles originaux en italien sur le blog de Paolo Rodari.
Ma traduction
Avant...
Débuts: Papa Ratzinger répète pour sa première émission télé
http://www.paolorodari.com/2008/10/03/esordi-papa-ratzinger-fa-il-provino-per-la-sua-prima-tv/
Dans les "Palais Saints" (sacri palazzi, c'est ainsi, je suppose, qu'on nomme le Vatican), il se dit que, pour ce grand évènement, le Pape a tenu lui aussi, à répéter. Déjà, parce que cela n'arrive pas tous les jours d'aller devant des caméras pour lire la Bible. En fait, cela n'était arrivé à aucun Pontife avant Benoît XVI.
Donc, il fallait se préparer convenablement, tester les micros, évaluer l'attitude et le ton de la voix. Et c'est ce que Ratzinger a fait. À l'intérieur du palais apostolique, debout derrière un lutrin, le zucchetto (calotte) sur la tête et les lunettes bien chaussées, Benoît XVI a fait un essai de lecture complète du texte qui, dimanche soir, ouvrira le marathon télévisé organisé par la RAI (jusqu'au 11 octobre) où le Texte Sacré (de la Genèse à l'Apocalypse) sera lu par différentes personnalités reliées à un écran de la basilique de la Sainte Croix de Jérusalem.
Il reviendra au Pape de lire le premier et le second chapitre (jusqu'à la première partie du quatrième verset) de la Genèse. Il le lira en italien, à l'exception de quelques mots qui seront prononcés en hébreu.
Pour le Pontife, ni truquage ni maquillage. Tout au plus, son fidèle secrétaire particulier don Georg Gaenswein, lui ajustera le zucchetto avant les prises, au cas où cela s'avérerait nécessaire. La lecture du texte biblique ne durera que quelques minutes et tout de suite après, dans un parfait oecuménisme, ce sera au tour de l'évêque orthodoxe du patriarcat de Moscou, Hilarion Alfeev de prendre le relai.
Contrairement aux autres lecteurs, le Pape ne lira pas en direct. Son intervention sera enregistrée dans une pièce du palais apostolique par le Centre télévisé vatican (CTV) qui enverra ensuite la bobine à la RAI. Les audiences concédées aux nombreux évêques qui dimanche arriveront au Vatican pour l'ouverture du Synode n'autorisent pas le direct.
Un Pape à la télé, pour lire la Bible, c'est un évènement sans précédent.
Lorsque la télévision arriva en Italie, Pie XII était à la fin de son pontificat. Probablement ni lui ni trois de ses cinq successeurs (Jean XXIII, Paul VI et Jean Paul 1er) n'auraient accepté d'apparaître dans un marathon télévisuel, lequel, même consacré à un texte saint, reste malgré tout un show; Pacelli, Roncalli, Montini et peut-être même Luciani, auraient difficilement accepté de perdre ce caractère hiératique et sacré qui marquait leurs apparitions publiques.
Pas Ratzinger, qui dément chaque jour davantage l'image qu'on lui a cousue de froid professeur allemand. Poursuivant, en ce sens, la route ouverte par Papa Wojtyla. Ce fut ce dernier qui cassa les schémas. En faisant devenir ordinaire ce qui ne l'était pas. En apportant à chacune de ses apparitions publiques les expériences théâtrales de sa jeunesse. Jusqu'à Luciani - qui lui aussi, lors des rares occasions qu'il eut, rompit le protocole - le Pape, en public ,devait, dans la limite du possible, cacher ses sentiments. Depuis Wojtyla ce n'est plus le cas. Ratzinger s'est adapté à cette rupture protocolaire wojtylienne. Jusqu'à arriver à lire pour la télé la parole de Dieu, à l'intérieur d'un évènement entièrement détaché de toute action sacramentelle.
Une lecture que beaucoup auraient dit n'être pas dans son style. Mais il est aussi vrai que personne n'aurait osé imaginer Benoît XVI recueilli dans une mosquée d'Istanbul.
Après...
Le Pape à la télé
http://www.paolorodari.com/2008/10/06/il-papa-in-tv-e-i-rapporti-col-colle-tira-unaria-nuova-in-vaticano/
C'était hier soir. Vous allumez la RAI, pour vous apercevoir quà la télé, il y a le Pape.
C'est le marathon au cours duquel, pendant plusieurs jours, différentes personnalités se succèdent pour lire la Bible en entier.
Il revient au pape d'ouvrir le show en lisant le début de la Genèse.
« Événement incroyable », a dit Giuseppe De Carli au début du direct.
« Climat électrique », a poursuivi le vaticaniste de la RAI, bien que le Pape ait lu sa partie en différé.
Il a enregistré la lecture ces jours derniers.
L'enregistrement montre le Pape qui s'approche du lutrin. Il ouvre le Livre sacré, chausse ses lunettes et, sans commentaires, il commence à lire en italien. Aucune hésitation, aucune émotion. Au centre de la scène il y a le texte sacré, pas le Pape. Au terme de la lecture le Pontife s'assied et semble vouloir écouter les lectures suivantes. Mais ensuite l'image se réduit : le Pape, en fait, était bien en différé.
Quoiqu'il en soit, reste la grande première d'un Pape qui « ouvre » un programme tv. Ensuite d'autres lecteurs, jusqu'à Roberto Benigni. Son style est plus théâtral. Souvent il gesticule. Comme il lit la Divine Comédie (ce qu'il a fait je crois récemment, ndt), il lit la Bible. Au centre de la scène il y a lui. L'opposé, en somme, de la sobrieté papale.