Redonner son sens à Noël

La catéchèse du 17 décembre


Il pense à tout, et tous, lors de cette splendide catéchèse.
A ceux qui sont touchés par la crise économique.
Aux enfants qui ne voient pas le jour.
Aux parents qui ne peuvent pas le devenir.
... et on ne peut s'empêcher de penser aux épisodes récents d'attaque contre le Saint-Siège, notamment à propos de l'instruction Donae Vitae.
Il nous appelle à vivre un Noël dans la sobriété. A redécouvrir son sens.
Et j'étais contente qu'il fasse allusion au caractère historique de la fête, dont j'avais, un peu par hasard, parlé récemment (Le 25 décembre est une date historique )

Ma traduction




Chers frères et soeurs !

Aujourd'hui commencent les jours de l'Avent, qui nous préparent immédiatement au Noël du Seigneur : nous sommes dans la Neuvaine de Noël qui dans beaucoup de communautés chrétiennes est célébrée avec des liturgies riches de textes bibliques, tous orientés à alimenter l'attente pour la naissance du Sauveur. L'Église entière, en effet, concentre son regard de foi vers cette fête maintenant proche, en se préparant, comme tous les ans, à s'unir au cantique joyeux des anges, qui dans le coeur de la nuit annonceront aux bergers l'évènement extraordinaire de la naissance du Rédempteur, les invitant à se rendre dans la grotte de Bethléem. Là gît l'Emmanuel, le Créateur qui s'est fait créature, enveloppé de langes et étendu dans une pauvre mangeoire (cf. Luc 2.13-14).

Pour le climat qui le caractérise, Noël est une fête universelle. Même ceux qui ne se professent pas croyants, en effet, peuvent percevoir dans cette répétition chrétienne annuelle quelque chose d'extraordinaire et de transcendant, quelque chose d'intime qui parle au coeur. C'est la fête qui chante le don de la vie. La naissance d'un enfant devrait toujours être un évènement qui apporte joie; embrasser un nouveau-né suscite normalement des sentiments d'attention et de soin, d'émotion et de tendresse.

Noël est la rencontre avec un nouveau-né qui vagit dans une pauvre grotte. En le contemplant dans la crèche comment ne pas penser à tous les enfants qui aujourd'hui encore, dans de nombreuses régions du monde, voient le jour dans une grande pauvreté? Comment ne pas penser aux nouveau-nés non accueillis, refusés, ceux qui ne parviennent pas à survivre par carence de soins et d’attentions ? Comment ne pas penser aussi aux familles qui voudraient la joie d'un enfant et ne voient pas cette attente comblée?

Sous la poussée d'un consumérisme hédoniste, malheureusement, Noël risque de perdre son sens spirituel pour se réduire à une simple occasion commerciale d'achats et échanges de cadeaux! En vérité, pourtant, les difficultés, les incertitudes et la même crise économique dont en ces mois de nombreuses familles font l’expérience, et qui touche l'humanité entière, peuvent être un stimulant pour redécouvrir la chaleur de la simplicité, de l'amitié et de la solidarité, ces valeurs typiques de Noël.

Dépouillé des incrustations consuméristes et matérialistes, Noël peut devenir ainsi une occasion pour accueillir, comme cadeau personnel, le message d'espoir qui émane du mystère de la naissance du Christ.

Tout ceci cependant ne suffit pas pour cueillir dans sa plénitude la valeur de la fête à laquelle nous nous préparons. Nous savons qu'elle célèbre l'événement central de l'histoire: l'Incarnation du Verbe divin pour la rédemption de l'humanité.
Saint Léon le Grand, dans une de ses nombreuses homélies de Noël, s'exclame ainsi : « Exultons dans le Seigneurs, ô mes très chers, et ouvrons notre coeur à la joie la plus pure. Parce qu'il est venu le jour qui pour nous signifie la nouvelle rédemption, l'antique préparation, le bonheur éternel. Il se renouvelle en effet pour nous dans le cycle annuel récurrent, le haut mystère de notre salut, qui, promis, au début et accordé à la fin des temps, est destiné à durer sans fin » (Homilia XXII).
Sur cette vérité fondamentale Saint Paul revient à plusieurs reprises dans ses lettres.
Aux Galates, par exemple, il écrit : « Lorsque vint l'accomplissement du temps, Dieu envoya son Fils, né d'une femme, né sous la Loi… afin que nous recevions l'adoption en tant que fils » (4.4).
Dans la Lettre aux Romains il met en évidence les conséquences logiques et exigeantes de cet évènement salvifique : « Si nous sommes fils (de Dieu), nous sommes aussi des héritiers : héritiers de Dieu, co-héritiers du Christ, si nous prenons vraiment part à ses souffrances pour participer aussi à sa gloire » (8.17).
Mais c'est surtout Saint Jean, dans le Prologue du quatrième Évangile, qui médite profondément sur le mystère de l'Incarnation. Et c'est pourquoi le Prologue fait partie de la liturgie de Noël depuis les temps les plus anciens : en lui se trouve en effet l'expression la plus authentique et la synthèse la plus profonde que cette fête et du fondement de sa joie. Saint Jean écrit : « Et Verbum caro factum est et habitavit in nobis /Et le Verbe s'est fait chair et il vint habiter parmi nous » (Jean 1.14).

À Noël donc, nous ne nous limitons pas à commémorer la naissance d'un grand personnage ; nous ne célébrons pas simplement et dans l'abstrait le mystère de la naissance de l'homme ou en général le mystère de la vie; encore moins, nous fêtons seulement le début d'une nouvelle saison. À Noël nous nous rappelons de quelque chose de très concret et de très important pour les hommes, quelque chose d'essentiel pour la foi chrétienne, une vérité que Saint Jean résume dans ces quelques mots : « le Verbe s'est fait chair ».
Il s'agit d'un évènement historique que l'évangéliste Luc se préoccupe de situer dans un contexte bien déterminé : dans les jours où fut proclamé le décret pour le premier recensement de l'empereur Auguste, alors que Quirinus était gouverneur de Syrie (cf. Luc 2.1-7).

C'est donc une nuit datée historiquement qui vit l'évènement de salut qu'Israël attendait depuis des siècles. Dans l'obscurité de la nuit de Bethléem s'alluma, réellement, une grande lumière: le Créateur de l'univers s'est incarné en s'unissant indissolublement à la nature humaine, au point d'être réellement « Dieu de Dieu, lumière de lumière » et en même temps homme, vrai homme.

Ce que Jean, appelle en grec « ho logos » - traduit en latin par « Verbum » et en italien « le Verbe » - signifie aussi « le Sens ». Donc nous pourrions entendre l'expression de Jean ainsi : le « sens éternel » du monde s'est fait tangible à nos sens et à notre intelligence : maintenant nous pouvons le toucher et le contempler (cf. 1Jean 1.1). Le « sens » qui s'est fait chair n'est pas simplement une idée générale inhérente au monde; c'est une « Parole » qui nous est adressée. Le Logos nous connaît, nous appelle, nous guide. Ce n'est pas une loi universelle, au sein de laquelle nous jouons ensuite un rôle quelconque, mais c'est une Personne qui s'intéresse à chaque personne : c'est le Fils du Dieu vivant, qui s'est fait homme à Bethléem.

A beaucoup d'hommes, et d'une certaine façon à nous tous, tout cela semble trop beau pour être vrai.
En effet, ici nous est réaffirmé : oui, il existe un sens, et le sens n'est pas une protestation impuissante contre l'absurde. Le Sens a un pouvoir : il est Dieu. Un Dieu bon, qui ne doit pas être confondu avec quelque être supérieur et lointain, auquel il ne nous serait jamais donné d'accéder, mais un Dieu qui s'est fait notre prochain et qui nous est très proche, qui a du temps pour chacun de nous et qui est venu pour rester avec nous.
Il nous vient alors spontanément la question: « Comment une telle chose est-elle possible ? Est-ce digne de Dieu de se faire enfant ? ». Pour chercher à ouvrir le coeur à cette vérité qui éclaire l'existence humaine toute entière, il nous faut plier notre esprit et reconnaître la limite de notre intelligence. Dans la grotte de Bethléem, Dieu se montre à nous, humble « petit enfant » pour vaincre notre orgueil. Peut-être nous serions-nous rendus plus facilement face à la puissance, face à la sagesse; mais Il ne veut pas de notre reddition; il fait plutôt appel à notre coeur et à notre libre décision d'accepter son amour. Il s'est fait petit pour nous libérer de cette prétention humaine à la grandeur qui jaillit de l'orgueil; il s'est librement incarné pour nous rendre vraiment libres, libres de l'aimer.

Chers frères et soeurs, Noël est une opportunité privilégiée pour méditer sur le sens et sur la valeur de notre existence. S'approcher de cette solennité nous aide à réfléchir, d'une part, sur le caractère dramatique de l'histoire dans laquelle les hommes, blessés par le péché, sont éternellement à la recherche du bonheur et d'un sens satisfaisant à leur vie et à leur mort; de l'autre, il nous exhorte à méditer sur la bonté miséricordieuse de Dieu, qui est venu rencontrer l'homme pour lui communiquer directement la Vérité qui sauve, et pour le faire participer à son amitié et à sa vie.
Préparons nous, par conséquent, à Noël, avec humilité et simplicité, en nous disposant à recevoir le don de la lumière, la joie et la paix, qui irradient de ce mystère. Accueillons le Noël du Christ comme un évènement capable aujourd'hui de rénover notre existence. Que la rencontre avec l'Enfant Jésus fasse de nous des personnes qui ne pensent pas seulement à elles-mêmes, mais s'ouvrent aux attentes et aux besoins de leurs frères. De cette manière nous deviendrons aussi témoins de la lumière que Noël irradie sur l'humanité du troisième millénaire. Demandons à Marie Très sainte, tabernacle du Verbe incarné, et à Saint Joseph, témoin silencieux des évènements du salut, de nous communiquer les sentiments qu'ils nourrissaient pendant qu'ils attendaient la naissance de Jésus, afin que nous puissions nous préparer à célébrer saintement le Noël prochain, dans la joie de la foi et animés de l'engagement d'une sincère conversion.

Bon Noël à tous !

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