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Lectio divina au Séminaire Romain Majeur

du Vendredi 20 février: une méditation sur la liberté, à partir de la Lettre de Saint-Paul aux Galates. Texte complet (ma traduction) et quelques images. (22/2/2009)

Rectificatif

Un lecteur attentif a la gentillesse de me signaler deux coquilles qui se sont malencontreusement glissées dans ma traduction, et qui modifient de façon très fâcheuse le sens des propos du Pape. Par deux fois, j'ai tapé "rationalité" au lieu de "relationnalité" (paragraphes 4 et 7) : mon lecteur me suggère d'ailleurs "dimension relationnelle", ce qui est effectivement plus harmonieux.

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En lisant ce texte, prononcé entièrement a braccio, les contempteurs du Saint Père, de tous les côtés, devraient sentir le rouge de la honte leur monter au front. Il se situe à un niveau tellement plus haut (ce qui ne veut pas dire qu'il est déconnecté des réalités du monde, bien au contraire).
J'ai mis quelques passages en gras, notamment celui de la fin - celui qui a été relevé par les agences de presse- où il fait clairement, mais délicatement, allusion aux divisions qui déchirent l'Eglise en ce moment.
C'est à nous tous qu'il s'adresse, et cela rappelle sa ferme injonction aux évêques de France: nul n'est de trop dans l'Eglise:
« Vous devenez comme des bêtes fauves, l'un mord l'autre ». [Saint Paul] fait allusion ainsi aux polémiques qui naissent là où la foi dégénère en intellectualisme et où l'humilité est remplacée par l'arrogance d'être meilleur de l'autre.
Nous voyons bien qu'aujourd'hui aussi il y a des choses semblables où, au lieu de s'insérer dans la communion avec le Christ, dans le Corps du Christ qui est l'Église,
chacun veut être supérieur à l'autre et avec arrogance intellectuelle, veut faire croire qu'il serait meilleur. Et ainsi naissent les polémiques qui sont destructives, ainsi naît une caricature de l'Église, qui devrait être une âme seule et un coeur seul.»
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Eh oui, c'est ainsi qu'il répond aux attaques des loups. Avec bonté, et une sagesse de père, il réduit à néant les arguments de ceux qui n'ont ces jours-ci que le mot "communication du Saint-Siège" à la bouche.

Texte original en italien sur le site du Vatican.
Ma traduction.

Vendredi 20 février
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Cet après-midi, le Saint Père Benoît XVI s'est rendu au Séminaire Romain Majeur, à la veille de la Fête de la Madone de la Confiance. À Son arrivée il a été accueilli par le Cardinal Vicaire Agostino Vallini et le Recteur, Mgr Giovanni Tani. Ensuite, dans la Grande Chapelle du Séminaire, après le discours d'hommage du Recteur, le Pape a tenu une lectio divina pour les séminaristes sur la Lettre de Saint Paul aux Galates. Enfin le Saint Père a dîné avec la communauté du Séminaire Romain.

Voici le discours du Saint Père et les mots qu’il a adressés à la Communauté du Séminaire au terme du dîner :



Discours du saint Père

Monsieur le Cardinal, chers amis,

C'est toujours pour moi une grande joie d'être dans mon Séminaire, de voir les futurs prêtres de mon diocèse, d'être avec vous sous le signe de la Madone de la Confiance. Avec Elle qui nous aide et nous accompagne, qui nous donne réellement la certitude d'être toujours aidé par la grâce divine, nous allons de l'avant !

Voyons maintenant ce que dit Saint Paul avec ce texte : « Vous avez été appelés à la liberté ».
La liberté, de tous temps a été le grand rêve de l'humanité, depuis ses débuts, mais particulièrement dans l'époque moderne.
Nous savons que Luther s'est inspiré de ce texte de la Lettre aux Galates et la conclusion a été que la Règle monastique, la hiérarchie, le magistère lui apparaissaient comme un joug d'esclavage dont il fallait se libérer. Par la suite, la période des Lumières a été totalement guidée, pénétré de ce désir de la liberté, qu'on considérait avoir finalement atteint. Mais le marxisme aussi s'est présenté comme un chemin vers la liberté.

Nous nous demandons ce soir : qu'est-ce que la liberté ? Comment pouvons-nous être libres ? Saint Paul nous aide à comprendre cette réalité compliquée qu’est la liberté, en insérant ce concept dans le contexte de visions anthropologiques et théologiques fondamentales. Il dit : « Que cette liberté ne devienne pas un prétexte pour vivre selon la chair, mais qu'au moyen de la charité vous soyez au service les uns des autres ». Le Recteur nous a déjà dit que « chair » n'est pas le corps, mais « chair » - dans le langage de Saint Paul - est l'expression de l'absolutisation du moi, du moi qui veut être tout et prendre tout pour lui. Le moi absolu, qui ne dépend de rien ni de personne, semble posséder réellement, en définitive, la liberté. Je suis libre si je ne dépends de personne, si je peux faire tout ce que je veux. Mais justement cette absolutisation du moi est « chair », c'est-à-dire qu'elle est dégradation de l'homme, et non pas conquête de la liberté : le libertinisme n'est pas liberté, c'est plus plutôt la faillite de la liberté.

Et Paul ose proposer un paradoxe fort : « Au moyen de la charité, soyez au service » (en grec : douléuete) ; autrement dit la liberté se réalise paradoxalement en servant ; nous devenons libres, si nous devenons serviteurs les uns des autres. Et ainsi Paul met tout le problème de la liberté dans la lumière de la vérité de l'homme. Se réduire à la chair, en s'élevant apparemment au rang de divinité - « Moi seul, je suis l'homme » - introduit dans le mensonge. Parce qu'en réalité il n'en est pas ainsi : l'homme n'est pas un absolu, comme si le moi pouvait s'isoler et se comporter seulement selon sa volonté. C'est contre la vérité de notre être. Notre vérité est que, avant tout, nous sommes des créatures, créatures de Dieu et nous vivons dans la relation avec le Créateur. Nous sommes des êtres relationnels. Et ce n'est qu'en acceptant notre dimension relationnelle que nous entrons dans la vérité, autrement nous tombons dans le mensonge et en lui, finalement, nous nous détruisons.

Nous sommes des créatures, et donc dépendants du Créateur. Dans la période des Lumières, surtout à l'athéisme, cela apparaissait comme une dépendance dont il fallait se libérer. En réalité, cependant, ce ne serait une dépendance fatale que si ce Dieu Créateur était un Être tyrannique, pas un Être bon, que s'il était comme sont les tyrans humains. Si, au contraire, ce Créateur nous aime et que notre dépendance est d'être dans l'espace de son amour, dans ce cas la dépendance est vraiment liberté. De cette façon en effet nous sommes dans la charité du Créateur, nous sommes unis à Lui, à toute sa réalité, à tout son pouvoir. Donc cela est le premier point : être créature veut dire être aimé du Créateur, être dans cette relation d'amour qu'Il nous offre, avec laquelle il vient vers nous. De cela dérive avant tout notre vérité, qui est, en même temps, appelée à la charité.

Et donc voir Dieu, s'orienter à Dieu, connaître Dieu, connaître la volonté de Dieu, s'insérer dans la volonté, c'est-à-dire dans l'amour de Dieu, c'est entrer toujours plus dans l'espace de la vérité. Et ce chemin de la connaissance de Dieu, de la relation d'amour avec Dieu est l'aventure extraordinaire de notre vie chrétienne : parce que nous connaissons dans le Christ le visage de Dieu, le visage de Dieu qui nous aime jusqu'à la Croix, jusqu'au don de lui-même.

Mais le caractère relationnel d'une créature implique aussi un second type de relation : nous sommes en relation avec Dieu, mais en même temps, comme famille humaine, nous sommes aussi en relation l'un avec l'autre. En d'autres termes, la liberté humaine est, d'une part, être dans la joie et dans le vaste espace de l'amour de Dieu, mais elle implique aussi être une seule chose avec l'autre et pour l'autre. Il n'y a pas liberté contre l'autre. Si je m'absolutise, je deviens ennemi de l'autre, je ne peux pas plus cohabiter et toute la vie devient cruauté, devient faillite. Seule une liberté partagée est une liberté humaine ; dans l'être ensemble nous pouvons entrer dans la symphonie de la liberté.

Et donc c'est un autre point de grande importance : seulement en acceptant l'autre, en acceptant même l'apparente limitation à ma liberté qui dérive du respect pour celle de l'autre, seulement en m'insérant moi dans le réseau de dépendances qui nous rend, finalement, une unique famille, je suis en chemin vers la libération commune.

Ici apparaît un élément très important : quel est-elle la mesure du partage de la liberté ? Nous voyons que l'homme a besoin d'ordre, de droit, pour que puisse ainsi se réaliser sa liberté qui est une liberté vécue en commun. Et comment pouvons-nous trouver cet ordre juste, dans lequel personne ne soit opprimé, mais où chacun puisse donner sa contribution pour former cette sorte de concert des libertés ? S'il n'y a pas une vérité commune de l'homme telle qu'elle apparaît dans la vision de Dieu, reste seulement le positivisme et on a l'impression de quelque chose d'imposé, et même de manière violente. D'où cette rébellion contre l'ordre et le droit comme s'il s'agissait d'un esclavage.

Mais si nous pouvons trouver l'ordre du Créateur dans notre nature, l'ordre de la vérité qui donne à chacun sa place, ordre et droit peuvent être vraiment des moyens de liberté contre l'esclavage de l'égoïsme. Le service mutuel devient moyen de la liberté et ici nous pourrions insérer toute une philosophie de la politique selon la Doctrine sociale de l'Église, qui nous aide à trouver cet ordre commun qui donne à chacun sa place dans la vie commune de l'humanité. La première réalité à respecter, donc, est la vérité : liberté contre la vérité n'est pas liberté. Le service l'un à l'autre crée l'espace commun de la liberté.

Puis Paul continue en disant : « La loi trouve sa plénitude dans un seul précepte :"Aime ton prochain comme toi même ». Derrière cette affirmation, apparaît le mystère du Dieu incarné, apparaît le mystère de Christ qui dans sa vie, dans sa mort, dans sa résurrection, devient la loi vivante. D'emblée, les premiers mots de notre Lecture - « vous êtes appelés à la liberté » - font allusion à ce mystère. Nous avons été appelés par l'Évangile, nous avons été appelés réellement dans le Baptême, dans la participation à la mort et à la résurrection du Christ, et de cette façon nous sommes passés de la « chair », de l'égoïsme à la communion avec le Christ. Et ainsi nous sommes dans la plénitude de la loi.

Vous connaissez probablement tous les belles paroles de Saint Augustin : « Dilige et fac quod vis - Aime et fais ce que tu veux ». Ce que dit Augustin est la vérité, si nous avons bien compris le mot « amour ». « Aime et fais ce que tu veux », mais nous devons réellement avoir pénétré dans la communion avec le Christ, nous être identifiés avec sa mort et sa résurrection, être unis à Lui dans la communion de son Corps. Dans la participation aux sacrements, dans l'écoute de la Parole de Dieu, réellement la volonté divine, la loi divine entrent dans notre volonté, notre volonté s'identifie avec la sienne, devient une seule volonté et ainsi nous sommes réellement libres, nous pouvons réellement faire ce que nous voulons, parce que nous voulons avec le Christ, nous voulons dans la vérité et avec la vérité.

Prions donc le Seigneur qu'il nous aide dans ce chemin commencé avec le Baptême, un chemin d'identification avec le Christ qui se réalise toujours de nouveau dans l'Eucharistie. Dans la troisième Prière eucharistique, nous disons : « Nous devenons dans le Christ un seul corps et un seul esprit ». C'est un instant où, par l'Eucharistie et par notre vraie participation au mystère de la mort et de la résurrection du Christ, nous devenons un seul esprit avec Lui, nous sommes dans cette identité de la volonté, et ainsi nous arrivons réellement à la liberté.

Derrière ce mot - la loi est accomplie - derrière cet unique mot qui devient réalité dans la communion avec le Christ, apparaissent derrière le Seigneur toutes les figures des Saints qui sont entrés dans cette communion avec le Christ, dans cette unité de l'être, dans cette unité avec sa volonté. La Madone surtout, apparaît dans son humilité, dans sa bonté, dans son amour. La Madone nous donne cette confiance, nous prend par la main, nous guide, nous aide dans le chemin d'être unis à la volonté de Dieu, comme elle l'a été dès le premier instant et a exprimé cette union dans son « Fiat ».

Et finalement, après ces belles choses, encore une fois dans la Lettre il y a une allusion à la situation un peu triste de la communauté des Galates, lorsque Paul dit : « Si vous vous mordez et vous dévorez mutuellement, prenez garde au moins à ne pas vous détruire entièrement les uns avec les autres… Marchez selon l'Esprit ». Il me semble que dans cette communauté - qui n'était plus sur le chemin de la communion avec le Christ, mais sur celui de la loi extérieure de la « chair » - émergent naturellement aussi des polémiques et Paul dit : « Vous devenez comme des bêtes fauves, l'un mord l'autre ». Il fait allusion ainsi aux polémiques qui naissent là où la foi dégénère en intellectualisme et où l'humilité est remplacée par l'arrogance d'être meilleur de l'autre.

Nous voyons bien qu'aujourd'hui aussi il y a des choses semblables où, au lieu de s'insérer dans la communion avec le Christ, dans le Corps du Christ qui est l'Église, chacun veut être supérieur à l'autre et avec arrogance intellectuelle, veut faire croire qu'il serait meilleur. Et ainsi naissent les polémiques qui sont destructives, ainsi naît une caricature de l'Église, qui devrait être une âme seule et un coeur seul.

Dans cet avertissement de Saint Paul, nous devons aujourd'hui encore trouver un motif d'examen de conscience : ne pas penser être supérieur à l'autre, mais nous trouver dans l'humilité du Christ, nous trouver dans l'humilité de la Madone, entrer dans l'obéissance de la foi. Réellement ainsi le grand espace de la vérité et de la liberté dans l'amour s'ouvre aussi à nous.

Enfin, nous voulons remercier Dieu parce qu'il nous a montrés son visage dans le Christ, parce qu'il nous a offert la Madone, il nous a offerts les Saints, il nous a appelés à être un seul corps, un seul esprit avec Lui. Et prions qu'il nous aide à être toujours plus inséré dans cette communion avec sa volonté, pour trouver ainsi, avec la liberté, l'amour et la joie.

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Mots du Saint-Père au terme du dîner
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On me dit qu'on attend encore un mot de moi. J'ai déjà parlé peut-être trop, mais je voudrais exprimer ma gratitude, ma joie d'être avec vous. Dans la conversation, à table, j'ai appris davantage sur l'histoire du Latran, en commençant par Constantin, Sixte V, Benoît XIV, le pape Lambertini.

Ainsi j'ai vu tous les problèmes de l'histoire et la renaissance toujours renouvelée de l'Église à Rome. Et j'ai compris que dans la discontinuité des évènements extérieurs il y a la grande continuité de l'unité de l'Église dans tous les temps. Et même par la composition du Séminaire j'ai compris qu'elle est expression de la catholicité de notre Église. De tous les continents nous sommes une Église et avons en commun le futur. Espérons seulement que croissent encore les vocations, parce que nous avons besoin, comme l'a dit le Recteur, de travailleurs dans la vigne du Seigneur. Merci à vous tout !

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Catéchèse du 18 février (II) Défense de la vie