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Mgr Ravasi interviewé par La Croix

... une semaine avant la rencontre du Pape avec les artistes. Commentaire.
Et un article de Francesco Colafemmina, initiateur de
l'Appel à Sa Sainteté pour un art authentiquement catholique (15/11/2009)

Lire ici les autres articles: Le Pape et les artistes

Frédéric Mounnier, envoyé spécial de La Croix à Rome, a interrogé Mgr Ravasi, président du Conseil Pontifical pour la culture.
Il a évidemment été question de la rencontre tant attendue du Saint-Père avec les artistes, samedi prochain, dans la Chapelle Sixtine.
Les citations sont en italique.
(Article ici: La Croix)

 


Le prélat commence par constater fort justement que le divorce entre l'art et l'Eglise existe bel et bien "car l’art contemporain semble pour une grande part avoir exploré toutes les voies de la déconstruction, du nihilisme, pour nous amener à constater l’inconsistance de l’être, démontrant que plus rien ne vaut rien, jouant de la provocation sur l’absence de sens de notre réalité. Mais, affronté à cet itinéraire, ce même art se trouve automatiquement en passe de se détruire, car l’objectif ultime ne peut être que le silence de la mort, du suicide".

C'est donc l'"art contemporain" qui est à l'origine du divorce, et non l'Eglise, et cette introduction peut sembler une condamnation dudit "art".
Fort bien.

Le moment est donc venu, selon lui, "pour une nouvelle proposition : engager les artistes à se réapproprier les grands symboles, les grandes narrations, les grands thèmes, les grandes figures. "

Certains de ses propos qui suivent laissent pourtant perplexes, voire désorientés.

A la question Allez-vous inciter les artistes à se faire catéchistes ?, il se hâte de répondre: PAS DU TOUT!!

Il a dû mal lire ce que disait le Saint-Père sur ce sujet; par exemple s'adressant au clergé de Rome, en février 2007, celui-ci forme le voeu que la chapelle pauline (*) alors en restauration, soit (à nouveau) une catéchèse vivante.
Puis, un peu plus loin, le Pape insiste:
"Cela me semble réellement un devoir - également dans la formation des futurs prêtres - de connaître ces trésors et d'être capables de transformer en catéchèse vivante ce qui est présent en eux et nous parle aujourd'hui".

Ce n'est pas l'avis de Mgr Ravasi, qui poursuit:
"L’artiste ne doit pas faire une œuvre directement catéchétique. L’esthétique authentique, lorsqu’elle touche les grands thèmes, peut s’interroger et nous interroger sur le sens de la vie, même si elle ne prend pas en compte le message évangélique. Une esthétique artistique authentique (?), par nature, touche l’éthique".


Ah bon? Michel-Ange, qui est l'incarnation de la perfection à laquelle l'art peut atteindre lorsqu'il rencontre la foi, a fait une oeuvre de théologien et de catéchiste. Comment par exemple imaginer plus belle narration de la Genèse que celle, grandiose, et immédiatement accessible à chacun (même si, évidemment, elle ouvre une profonde réflexion ultérieure) , qui recouvre la voûte de la Chapelle Sixtine.? Et il suffit de parcourir, comme je l'ai fait cet été, la galerie des Offices de Florence, par exemple, pour comprendre que tous les grands peintres du quattrocento et du cinquecento italiens étaient d'éminents théologiens, avec une culture bibliste presque inconcevable aujourd'hui.
(voir à ce sujet ce site: Un site à visiter sans faute )

Un peu plus loin, il est très sévère, et surtout inutilement condescendant avec "les productions artisanales sans ambition" (je suppose qu'il ferait rentrer dans cette catégorie le magnifique tableau d'Aristides Artal dont il a été question ici: l'artiste catholique):
"Nous croyons à la possibilité d’une rencontre entre la foi et l’art, pourvu que l’art sorte de son impuissance provocatrice. De même, l’Église ne doit plus s’en tenir à une récupération hasardeuse de styles anciens et à des productions artisanales sans ambition. Elle doit accepter la confrontation avec ces nouvelles grammaires, à ces nouvelles modalités d’expression. Ce dialogue-là serait fécond pour elle".
(...)
La plupart des grands architectes ont tous déjà construit une église. On peut citer Renzo Piano (église Padre Pio à San Giovanni Rotondo, Italie), Richard Meyer (église Tor Tre Teste, près de Rome), Massimiliano Fuksas (à Milan), Tadao Ando (qui réalisa plusieurs églises au Japon), etc. Et n’oublions pas Le Corbusier avec Ronchamp.
Tous se sont attachés à modeler l’espace dans sa nudité, jouant sur la lumière, l’intimité…"

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J'ai fait une recherche avec Google sur ces éminents artistes et architectes adulés par la critique contemporaine.
Au vu des oeuvres que j'ai pu trouver, et au risque de passer pour ignare, je n'ai pas aimé (c'est une litote): il est clair que la sensibilité artistique de Mgr Ravasi n'est pas celle de nombreux catholiques, pas la mienne en tout cas, et sans doute pas celle du saint-Père.

Voici par exemple une humble petite église d'un village de Picardie (aujourd'hui, hélas, à l'abandon).
L'église de Barisis-aux-bois avait été détruite durant la première guerre mondiale, et elle a été reconstruite à l'identique.
Pur produit de l'artisanat que méprise Mgr Ravasi, elle s'efface derrière sa fonction, et elle est très belle, elle a ce que le Père Scalese (ou plutôt un de ses amis), citant les experts en marketing, appelait un family style, qui devrait parler immédiatement au coeur des catholiques - ou ce qu'il en reste, encore hélas!


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Photos François M. (novembre 2009)

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L'Eglise,
dit-il, peut accepter une part de provocation, si elle ne s'accompagne pas de blasphème (la question est: où commence le blasphème? Mgr Ravasi répond), la limite étant "la provocation du vide, qui nous enferme dans un cercle mortifère"...

Enfin, à la question:
"Votre sentiment est-il partagé par le pape ?"

Mgr Ravasi répond:
"Lorsque je lui ai proposé le principe d’une telle rencontre avec les artistes, Benoît XVI a immédiatement accepté. Il souhaite un véritable dialogue. Il sait que nous ne sommes plus les enfants de l’Antiquité classique, du classicisme.
Nous ne pouvons plus écouter Stockhausen comme on écoute Mozart (ndr - écouter ici par exemple: http://www.stockhausen.org/ascension_bar_1.mp3 ) . Cela nous demande à tous un travail.
Le pape est fondamentalement curieux de toutes les tentatives pour comprendre ce monde nouveau. Il est prêt à être surpris. Nous sommes au tout début d’un nouveau dialogue."
--------------
Notre Saint-Père est curieux de tout, sans aucun doute. Il est prêt à être surpris, c'est moins sûr, car ce n'est pas un béotien, et il sait à quoi s'en tenir.
Mais surtout, cela ne signifie pas du tout que c'est lui qui va surprendre ses hôtes. En tout cas, pas dans le sens que ceux-ci attendent.

*****************

Francesco Colafemmina a lui aussi lu l'interviewe de Mgr Ravasi avec une certaine perplexité...
Il y voit finalement l'expression de la culture "gauche caviar"!! Tout simplement...
Texte en italien: http://fidesetforma.blogspot.com
Ma traduction:

Les postulats:

Le postulat de base du discours "ravasien" sur l'art est l'"historicisation" absolue de l'expression artistique, selon un processus typiquement hégélien. L'art du passé appartient au passé et de même pour l'art de chaque époque. Tout est conditionné et limité par les conditions historiques et sociales qui ont donné naissance à un type spécifique d'art.
Chacun de nous sait bien qu'il n'en est rien. Qu'un art enfermé dans des compartiments est pure création académique. Et en plus, chacun comprend que ce point de vue "évolutioniste" de l'art repose sur l'idée de décadence et de mort de toute expression artistique inspirée par l'art du passé, ou le passé (par passé, j'entends l'aube du XXe siècle).

Un autre postulat est cette confiance totale dans l'intellectualisme spiritualiste des artistes. C'est-à-dire cette opinion fallacieuse selon laquelle tous les artistes seraient bénéficiaires de «l'esprit» (dans un sens clairement hégélien) et qu'ils seraient donc en mesure d'accéder à des fragments de vérité et de beauté, à des fragments de «sens», en somme. C'est pourquoi l'art n'aurait pas besoin d'être chrétien pour être «vrai». Et surtout il n'aurait pas besoin de parler dans une langue qui soit universellement comprise.

D'où le postulat final: les langages peuvent communiquer de la «spiritualité», indépendamment de leur universalité. Autrement dit l'art contemporain qui ne crée pas simplement un «message», mais crée un nouveau langage qui finit par recouvrir le «message» même, est, par le simple fait d'être en mesure de créer des langages nouveaux, un art dialectique. Et par la dialectique, l'esprit évolue.

Gnose anti-chrétienne:

Tous ces postulats sont au cœur d'un nouveau «Manifeste de l'art" de l'Eglise, dont Ravasi veut se faire le promoteur. Manifeste qui devrait théoriquement exclure "l'artisanat" et la récupération "des styles anciens". Sur cet aspect des styles, on pourrait s'attarder. Les styles sont en effet caduques, mais le langage artistique, sa syntaxe et sa grammaire précèdent les styles et c'est ce langage avec sa syntaxe et sa grammaire que l'Eglise devrait encourager et défendre.
Revenant donc à cette orientation moderniste, nous pouvons lire dans l'interviewe de Ravasi que les artistes n'ont pas besoin - pour être en harmonie avec l'Église - d'être des "catéchistes". Comme pour dire que leur capacité à absorber "l'esprit" les rend déjà pour cela, en harmonie avec l'Église.
Cette grave conception spiritualiste de d'art, entre autre toujours en équilibre instable au bord du néant, de la provocation anti-chrétienne, du renversement en positif de ce qui a toujours été négatif pour l'Eglise, est exaltée outre-mesure par Mgr Ravasi.
Il faut dire, en conclusion, qu'en le lisant, on ne peut que noter avec une certaine «gêne» le recours continuel au «borderline», en somme, à l'évocation de thèmes, d'auteurs, les lieux, de concepts qui flirtent dangereusement avec le Gnosticisme et l'existentialisme de Sartre.

Le culturalisme "radical-chic":

Comment résumer cette interview.
Eh bien, je la définirais comme une interview imprégnée de culture "radical Chic" (gauche caviar), de quelqu'un qui pour être contemporain (dans le coup) a besoin de parler non pas de l'Évangile ou des Pères de l'Eglise, encore moins d'auteurs ou d'artistes chrétiens, mais de Chagall et d'Henry Miller. Une interview de quelqu'un qui voudrait «rajeunir» l'église, lui faire dépasser la stupidité rétrograde qui la caréctérise aux yeux du monde et la transformer en une sorte de foyer d'expérimentation artistique en mesure de créer une sorte de «nouvelle donne».
...

Dommage toutefois que le même Mgr Ravasi juge opportun de se laisser filmer chaque dimanche par les caméras de Channel 5, tandis qu'assis au milieu d'une église du XVIIIe siècle ou devant un retable du cinquecento il commente la Sainte-Ecriture. Nous ignorons ce que penseraient les téléspectateurs s'ils le voyaient prendre la parole devant une œuvre sans titre de Kounellis ou à l'intérieur d'un cube de Botta!


Conclusion de Francesco Colafemmina:
"Si l'interviewe ne vous a pas plu, signez l'Appel à Sa Sainteté "!!!

Note:

A propos de la Chapelle pauline, dont les travaux de restauration se sont achevés en juillet dernier, lire ici:
Le Pape devient critique d'art (http://benoit-et-moi.fr/2009-II/... )

La rencontre avec les artistes Rapport d'information sur le Saint-Siège