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Benoît XVI, conservateur, ou libéral?

Réflexion autour d'un article du Père Scalese (16/12/2010)

L'article du Père Scalese, faisant suite à un autre (cf Lumière du Monde, vu par le Père Scalese ) , lui aussi assez critique, où il s'interrogeait sur l'opportunité pour un Pape d'accorder des interviewes, m'a troublée, et même un peu blessée. Car, malgré le titre en forme de question, sa réponse ne fait aucun doute.
En y réfléchissant, je me suis rendue compte que le trouble venait des adjectifs "traditionaliste" et surtout "progressiste" qui sont utilisés dans l'article, et qui sont évidemment inappropriés, s'agissant du Pape, dont le Père Scalese convient d'ailleurs qu'il est "le Père de tous". Le Pape ne peut pas être un "catholique progressiste" (une expression à laquelle je suis particulièrement allergique); est-il un "théologien progressiste" - c'est l'expression utilisée dans le texte ci-dessous, mais elle présente, dans le contexte, une ambiguïté qui suscite le malaise. Disons d'ailleurs qu'ils sont rares (et sans doute à recherchercher parmi les spécialistes) ceux à qui cette tendance a sauté aux yeux: je n'en fais pas partie, pour plusieurs raisons, dont la plus évidente est que je suis pas spécialiste.
Ce que j'aime avant tout, chez Benoît XVI, c'est l'homme, mais aussi le penseur, le sage, le "Père de tous", donc, et pas forcément le théologien, qui m'échappe, même si c'est une composante essentielle de sa riche personnalité.

"Nous ne devons pas nous scandaliser si à un moment donné, nous découvrons qu'il a trop ses propres idées, qui ne coïncident pas en tout avec les nôtres", dit le Père Scalese.

Le 22 novembre dernier, un visiteur de mon site (JPV, que je remercie encore...) ne m'écrivait pas autre chose - c'était à propos du préservatif, alors qu'ici, il s'agit des relations avec les "tradis":

"Pour ceux qui pourrait être choqués par les propos du Saint-Père - déformés ou amplifiés par les médias - il suffit de se rappeler que nous n'avons pas le droit de nous faire une idole.
Parfois, cette idole peut-être une image que nous nous faisons du Saint-Père. Pourtant, l'Esprit souffle où il veut et, sachant cela, nous n'avons pas à nous inquiéter ni à être déçu que ses propos - pris dans une perspective réductrice - puissent venir égratigner l'image de surhomme que nous aurions l'audace (et l'erreur) de nous faire. C'est son humanité qui fait la grandeur de Benoît.
Il est le guide du troupeau, soutenu par l'Esprit saint. Que nous faut-il de plus? Prier ce même Esprit que nous ne nous égarions pas en écoutant les loups plutôt que le pasteur.
Rien de nouveau sous le Soleil comme il est écrit. Ne perdons pas notre paix!"


D'une certaine façon, c'est bien que le livre de Peter Seewald nous aide à comprendre - et à accepter - cette évidence.

Texte en italien ici: http://querculanus.blogspot.com/...

Ma traduction:

15 Décembre 2010
Conservateur ou libéral?
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J'ai l'impression que la publication du livre-interviewe de Benoît XVI "Lumière du monde" a causé, dans les rangs du traditionalisme, une certaine déception. Et pas seulement en raison de la déclaration - objectivement inédite (malgré les tentatives d'interprétation à la lumière de la doctrine morale traditionnelle) - sur l'utilisation des préservatifs.

Les traditionalistes pensaient que Benoît XVI était l'un d'eux. En effet, avant de devenir pape, le cardinal Ratzinger passait pour le principal représentant de l'aile conservatrice de la Curie romaine: ses interventions en tant que Préfet du Saint-Office étaient toujours en défense de l'orthodoxie (mais peut-être oublie-t-on que ces interventions étaient le plus souvent "commandées" par Jean-Paul II) (ndt: on peut aussi penser que le cardinal inspirait JPII) . Une fois devenu pape, Benoît XVI a attiré la sympathie des traditionalistes par l'attitude d'ouverture aux lefebvristes, et surtout pour ses interventions dans le domaine de la liturgie ( en premier lieu , la libéralisation du rite romain). Il est vrai qu'il y avait eu d'autres attitudes qui laissaient perplexes (ndt: ?); mais habituellement, ou bien on les ramenait à des manoeuvres de cour (la résistance de l'aile la plus progressiste de la Curie romaine) ou à des motifs d'opportunité «politique» (la prise en compte nécessaire des positions parfois radicales de certains épiscopats).

La publication de "Lumière du monde" a en quelque sorte marqué la fin des illusions: le pape Benoît XVI n'est pas le traditionaliste qui a été dépeint par la droite et la gauche, mais continue d'être le théologien libéral qui a participé activement au Concile Vatican II. Bien sûr, depuis lors, de l'eau a coulé sous les ponts, les positions de Ratzinger ont progressivement évolué, mais sans jamais remettre en question l'attitude libérale de fond.

Si on veut décrire l'évolution à grands traits, je pense qu'on peut identifier trois ou quatre "tournants" dans sa vie. Le premier est soixante-huit qui, selon Hans Küng, aurait notablement impressionné Ratzinger (ndt: curieuse référence: n'aurait-il pas été plus logique de se fier à l'autobiographie de Joseph Ratzinger lui-même?), le conduisant à des positions plus modérées. Le second tournant est son passage à Rome, qui lui a permis de voir les choses dans une perspective différente, soit parce que Rome est un observatoire plus universel, soit parce que la tâche à effectuer le forçaient à assumer des positions plus rigides. Le troisième tournant a été le contact, pour des raisons institutionnelles, avec le mouvement traditionaliste (c'est lui qui géra le «schisme» lefebvriste), qui l'obligea à reconnaître au moins certaines de leurs raisons. La dernière avancée a consisté dans l'élection à la papauté: parmi les objectifs programmatiques, dès le début,il y avait l'œcuménisme, et c'est dans ce contexte qu'il faut considérer la réduction de la fracture avec la Fraternité Saint Pie X, qui a entraîné la libéralisation de la liturgie romaine antique, et la levée de l'excommunication des quatre évêques lefebvriste. Tout cela n'a jamais signifié un reniement des positions de départ, mais doit plutôt être lu à la lumière de celles-ci: l'ouverture au mouvement de Mgr Lefebvre ne peut pas être considéré comme une approbation du traditionalisme qua talis , mais comme l'une des nombreuses réalisations de l'œcuménisme souhaité par le Concile. Je pense qu'une analyse sommaire, qui donne une bonne photographie de la personnalité de Benoît XVI, est celle exprimée par Mgr Bernard Fellay à une conférence qui s'est tenue à Bahia, le 9 Juillet 2010: "Le pape est un homme dont la tête est progressiste, mais avec un cœur catholique, amoureux de la tradition".

C'est probablement une bonne chose qu'il y ait eu cette désillusion. Les traditionalistes semblaient vouloir en quelque sorte "annexer" le pape, en faisant presque le leader d'un parti et oubliant qu'il ne peut être que le père de tous. Dans le même temps, je pense qu'il est aussi bon de réaliser qu'il ne faut jamais placer ses espoirs exclusivement sur un homme, fût-il le Pape. Le pape est certainement un point de référence fondamental dans l'Eglise, mais il ne peut pas être, même lui, absolutisé: ce qui compte c'est la foi dans le Christ, l'amour pour l'Eglise et la fidélité à la tradition (la vraie!). En tout cela, le Pape est un guide pour nous; mais nous ne devons pas nous scandaliser si à un moment donné, nous découvrons qu'il a trop ses propres idées, qui ne coïncident pas en tout avec les nôtres. Bien sûr, il serait préférable, comme je l'écrivais dans un précédent post, afin d'éviter toute confusion, que le pape en quelque sorte se dépouille de lui-même et se limite à faire le pape; mais peut-être cela est-il devenu impossible de nos jours (pensez à ce qu'on dirait, s'il se refusait à répondre aux questions des journalistes!). Ce qui importe, c'est de lui rester fidèle, non pas quand il donne des interviews (dans ce cas, on peut en toute quiétude être en désaccord), mais quand il exerce son autorité apostolique.

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