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Sur la béatification de Jean-Paul II

Quelques réflexions: en béatifiant son prédécesseur, Benoît XVI assure une visibilité maximale à l'Eglise et s'adresse aussi à la "Cour des Gentils". Et une interviewe de Gian Maria Vian, le directeur de l'Osservatore Romano (15/1/2011)

-> voir ici: Bienheureux Jean-Paul II

L'annonce, hier, de la béatification prochaine de Jean-Paul II n'a pas suscité un enthousiasme unanime.
Il est de bon ton de parler des "ombres du pontificat": d'un côté, pédophilie, Maciel, et, soi-disant, les finances du Vatican, de l'autre, le fameux "esprit d'Assise", la surexposition médiatique, les voyages, les repentances à répétition - autant de reproches qu'on ne peut décidément pas qualifier d'"ombres"!
On lira à ce propos la belle analyse du Suisse Romain.
Mais malgré les oppositions, Benoît XVI a tenu bon.
Il est légitime d'essayer de comprendre pourquoi.

Il y a d'abord un point qu'on ne peut pas nier: c'est la grande, profonde, loyale amitié que Benoît XVI a vouée à son prédécesseur. Il y consacre de belles pages dans Lumière du Monde, se qualifiant même de "petit pape" (inutile de vous dire à quel point, pour une fois, je me trouve en désaccord avec lui!!). Ce facteur humain est incontournable, et pour se convaincre de sa réalité, il suffit de revoir ce petit film: Les deux Papes .

Mais bien sûr, ceci ne suffit pas à tout expliquer.
Benoît XVI sait mieux que personne que les saints n'ont pas tous les honneurs des autels, bien loin de là, et que des vies humbles et cachées peuvent celer plus de trésors de sainteté que les cryptes des cathédrales. Mais une béatification comme celle de JP II est une façon inespérée - et une occasion à ne pas laisser passer - de donner une visibilité universelle à la foi. Ce que Jean-Paul II a fait tout au long de son pontifcat - et va donc continuer de faire, par delà la mort.

Depuis le début du pontificat, Benoît XVI a créé une bonne trentaine de béatifiés (voir ici), mais contrairement à JP II, il ne préside généralement plus les cérémonies de béatification, qui se déroulent "sur place": il s'agit la plupart du temps de figures "locales" (1), dans lesquelles les habitants de telle ou telle région peuvent s'identifier - sans établir en aucune façon une graduation dans la sainteté. Une exception notable a été la béatification toute personnelle et en quelque sorte "amicale" de John Henry Newman. Avec Jean-Paul II, on atteint vraiment l'universel. L'évènement du 1er mai fait déjà les manchettes! Je pense que c'est un aspect important (qu'on peut trouver discutable), en tout cas à ne pas négliger, pour comprendre la décision du Saint-Père. Elle s'inscrit dans sa volonté de s'adresser aussi au "cercle extérieur", à cette "Cour des Gentils" qui lui tient à coeur, et à laquelle il a dédié un nouveau dicastère.

C'est aussi ce qui ressort, il me semble, du billet de Jean-Marie Guénois qui titre sur son blog: "Ils" n'auront pas eu la peau de Jean-Paul II...
...
L'expression est vulgaire, voire déplacée, mais personne n'aura eu la peau de Jean-Paul II. La part sombre de l'Eglise catholique (ndlr: une formulation que je ne partage pas! il eût été plus correct de parler de "certains membres de l'Eglise"...) n'aura pas emporté ce que cet homme - grand -aura apporté et donné de meilleur, bien au delà des bancs d'églises. Et c'est tant mieux.


Enfin, dans le recueil de méditations publié en France sous le titre "La gloire de Dieu aujourd'hui" (ed. Parole et Silence), Joseph Ratzinger évoquait la personnalité de Saint Wolfang de Regensbourg et il écrivait (page 186):
La grandeur d'une personnalité se mesure souvent à sa capacité à donner, et à façonner autrui. Wolfang n'a pas eu de postérité à travers une oeuvre littéraire, mais à travers tous ceux auxquels il a transmis la force de sa foi et son humanité.
Il me semble que ces mots s'appliquent bien à Jean Paul II (pour la postérité de l'oeuvre littéraire, je ne sais pas...)
Même si Wolfang était qualifié seulement de "saint européen". Jean Paul II, lui, sera un bienheureux (et pas encore un saint: voir ici la distinction entre les deux) mondial. Ou "global", selon le terme à la mode.
* * * * *

Une interviewe du directeur de l'OR


Quotidiano Nazionale, 15 janvier 2011
Iacopo Scaramuzzi
Article ici (via Raffaella)
Ratzinger sait bien à quel point Wojtyla a influencé non seulement les catholiques. Dans son évaluation, son pontificat et ses ombres éventuelles entrent moins en ligne de compte que l'extraordinaire profil personnel et spirituel de l'homme
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- Au cours des dix derniers siècles, aucun pape n'a béatifié son prédécesseur immédiat. Professeur Giovanni Maria Vian, pourquoi Ratzinger a-t-il pris cette décision exceptionnelle?
"Ratzinger connaît bien Karol Wojtyla. Pendant un quart de siècle, il a été son collaborateur, et le témoin de l'impact que Jean-Paul II a eu pas seulement sur les catholiques. Et ensuite, comme d'autres papes dans l'histoire, Karol Wojtyla était déjà de son vivant l'objet de la dévotion populaire"

- Pourquoi le processus de béatification de Jean Paul II, qui avait commencé à bride abattue, a-t-il semblé s'enliser à un moment donné?
"Je pense que les coups de freins ont été une impression médiatique, une perception de ceux qui l'auraient voulu "santo subito". En fait, après la dispense initiale, le procès a eu lieu dans des conditions normales, sans accélération ou freinage. "

- Au cours de ces dernières années les scandales datant du pontificat de Jean Paul II ont semblé jeter une ombre sur sa figure ...
"Avec la béatification, l'Eglise montre la sainteté personnelle d'un Serviteur de Dieu. Dans le cas d'un Pape comm Wojtyla, l'évaluation a pris en compte, non pas tant son pontificat ou ses ombres que le profil personnel et spirituel extraordinaire de l'homme."

- Une béatification si rapide ne risque-telle pas de ne pas avoir le juste recul historique?
"La béatification concerne l'ensemble de la figure de Karol Wojtyla, y compris les années antérieures à la papauté. Il faudra des décennies pour une véritable évaluation, toutefois, elle déjà commencé avec d'excellents historiens français, comme Bernard Lecomte.

- Ratzinger a d'évidentes différences de style et de gouvernement par rapport à Jean-Paul II, mais il en reprend les intuitions, comme la convocation d'un sommet interreligieux en Octobre à Assise. Quel rapport ont-ils eu?
"Wojtyla a voulu Ratzinger à Rome, quatre ans après avoir été élu Pape, et il ne l'a plus lâché. Il avait pour lui une estime énorme. Aucun acte doctrinal de la papauté de Jean Paul II n'a eu lieu sans le soutien de Ratzinger. De ce point de vue il y a une forte continuité. Après, ce sont deux hommes de formations très différentes, un philosophe et un mystique, Karol Wojtyla, un théologien, Joseph Ratzinger (ndt: ce théologien est aussi un philosophe!). "

- Et avec les autres religions?
"Avec l'islam en particulier, la ligne entre les deux est la même: travailler ensemble pour miner la violence. Les accents, bien sûr, sont différents; les vues de Wojtyla étaient plus mystiques et politiques. Ratzinger, qui est beaucoup moins politique, mise cependant sur des résultats concrets. "

© Copyright Quotidiano Nazionale, 15 janvier 2011

Note

(1) Un exemple proche de moi, lu sur le journal régional la semaine dernière.
Clairement, les habitants de ce quartier de Metz peuvent se sentir concernés.
Et aussi ceux de Dax, la ville de son martyre.
Article ici: http://www.republicain-lorrain.fr/


(à voir aussi, ce magnifique diaporama, sur le site du RepLo , illustrant un bel article).

Un discours non diplomatique aux diplomates Les livres de religion dans les hypermarchés