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Petite réflexion personnelle autour d'un article du Père Amar sur Padreblog (4/2/2012)

Sur le blog Padre Blog, le Père Amar publie un article très intéressant, intitulé "L'anonymat sur internet est-il catho-compatible?"
Et de poursuivre:

(...) l’anonymat défoule. Depuis toujours. Et les routes d’Internet n’ont pas échappé aux mêmes dérapages ...
Car les pseudos ont en effet fleuri sur la Toile, y compris dans la blogosphère catholique.
Et derrière de nombreux surnoms transformés en autant de paravents commodes, des courageux anonymes qui se disent chrétiens catholiques, provoquent de vives empoignades. Les anathèmes pleuvent, les jugements et les attaques sont légion. Trop souvent, l’agora du Net devient foire d’empoigne.
En face, de vrais hommes et femmes qui avancent à visage découvert sont sommés de « dialoguer » et de répondre à de parfaits inconnus.
...
Dans les rédactions, les auteurs s’engagent, assument, signent leurs articles et peuvent même en répondre en justice (ndlr: sans doute pas ceux auxquels pense l'Abbé), tandis que sur le Web « loulouteXY » ou « j@ckadi907 » colportent les rumeurs, insultent tranquillement et manquent à l’honnêteté.

Fort bien. Tout au plus pourrais-je, de ce prologue, reprocher à l'Abbé un manichéisme excessif: d'un côté les bons (ceux qui signent de leur vrai nom) de l'autre les méchants (qui se cachent sous des pseudos ridicules).

Ce serait vraiment trop simple.

L'Abbé pose de nombreuses questions - dont beaucoup sont plus que légitimes, je les ai déjà partagées à la lecture de certains forums - et il présente des arguments intéressants.
Mais d'abord, il entretient une confusion gênante entre blogueur, et simple intervenant dans les forums ou les commentaires des blogs.

Et surtout, le vrai problème est-il de livrer - ou non - un état civil (la plupart du temps parfaitement inconnu) en pâture aux internautes? N'est-il pas avant tout un problème moral, que je sois "connu" ou "anonyme": dans mes commentaires, est-ce que je tente de faire passer des idées que je crois justes, ou bien est-ce que je sème la discorde, la zizanie, répandant des informations non contrôlées, voire des mensonges. En un mot, est-ce j'essaie de me conformer aux sages leçons de Saint-François de Sales (cf. Journalisme, leçon d'il y a 400 ans ):

« Que ton discours soit calme, franc, sincère, sans fioritures, simple et véridique. Tiens-toi éloigné de la duplicité, de la ruse et de la dissimulation. Il est vrai que toute vérité n'est pas doit toujours être dite; mais en aucun cas, il n'est permis d'aller contre la vérité» .

Il est clair que beaucoup de blogueurs qui signent de leur "vrai" nom, y compris catholiques, sont souvent très éloignés de cet idéal, et il me serait facile de citer des exemples.

Le Père Amar pose parmi d'autres cette question, qui s'adresse (certes indirectement!) à moi, et à laquelle je crois avoir répondu ici et ici :

(...) si j’ai fait le choix d’un pseudo, suis-je au clair – en conscience – avec le motif de ce choix ? Est-ce par prudence ou par honte, par orgueil ou par peur ? Pour ne pas avoir à être sincère, à réfléchir et à argumenter ? Par simple confort ?

Cette question fait le miel de quelques-uns (pas tous!) des journalistes professionnels qui tiennent un blog à leur nom: mais ce faisant, ils ne font que leur métier, qui leur impose d'être aussi présent là où se fait l'info, sur le Réseau; et ils n'ont pas d'autre choix que de porter ce nom comme un étandard, car sans leur "nom" et son capital de notoriété (quelles que soit les raisons, bonnes ou mauvaises, qui la justifient), ils ne sont rien, et leur blog aurait tout juste quelques maigres visites. Ces mêmes journalistes d'ailleurs, ne répugnent pas à donner la parole, via les commentaires, à des "anonymes" qui signent des mêmes pseudos grotesques dénoncés plus haut. Ces commentaires sont souvent haineux, ils "colportent les rumeurs, insultent tranquillement et manquent à l’honnêteté". Et comme ils ne sont pas "modérés", on peut supposer qu'ils reflètent - en toute sécurité - l'opinion des courageux blogueurs blasonnés.


A mon tour, donc, de poser quelques questions. Juste pour la réflexion, je n'attends pas de réponse.

1. Puisqu'il est d'une certaine façon question de transparence, savons-nous toujours quels intérêts se cachent derrière les grands medias, y compris "chrétiens", qui font la pluie et le beau temps - et pas seulement en France? (il serait mieux de dire que nous en ignorons presque tout! et quand d'aventure on se met à chercher et qu'on tire un fil, on est stupéfait de voir quelle pelote sans fin se déroule...). Et de qui sont-elles les vassaux, ces "grandes plumes" et ces "grandes voix" qui monopolisent l'antenne, l'image et l'écrit et qui ont le monopole du formatage de l'opinion? Inutile de citer des noms, il suffit d'ouvrir les yeux et les oreilles.
Et ces politiques, qui reçoivent leurs directives dans les Loges (cf. L'ombre des maçons sur l'Elysée), ou dans des instances mondialistes? Ils ne sont certes pas anonymes, eux, mais le pouvoir à qui ils servent de paravent n'en est pas moins aussi caché qu'inquiétant. Tout en agissant dans la plus parfaite impunité.

2. Sommes-nous vraiment libres de dire ce que nous voulons dire, dans notre beau pays?
Si nous avons une activité professsionnelle, n'avons nous pas un devoir de réserve, et notre "anonymat" n'est-il pas un hommage indirect que nous rendons à notre profession?
Notre souci de garder notre patronyme pour nous n'est-il pas aussi guidé par le désir de protéger ceux avec qui nous le partageons?
Ces considérations (que j'avais déjà faites dans les articles cités plus haut, ici et ici) ne sont pas négligeables, et si le Père Amar en admet la possibilité, il les balaie aussitôt en statuant que "dans ces situations où j'avance masqué, je ne devrais en aucun cas me permettre de polémiquer": les autres en auraient donc le droit? A quel titre?

3. Que dire, enfin, de Pietro de Paoli (cf. Un nouveau livre de Pietro de Paoli )? Et du "Cardinal" dont Olivier Legendre (cf. Le mystérieux "mon cardinal" d'O. Legendre) aurait recueilli les mémoires. Tous deux adoubés par la "bonne presse"? Leur anonymat, à eux, est autrement grave que celui des « loulouteXY » ou « j@ckadi907 » déchaînés dont parle l'Abbé Amar, car il cache des noms prétendument ILLUSTRES, et ils bénéficient à ce titre du support des medias et d'une autorité morale. Quand Pietro de Paoli écrit dans sa "Confession de Castelgandolfo" que Joseph Ratzinger a quitté Tubingen après 68 parce que des étudiants lui avaient renversé une poubelle sur la tête en le traitant de vieille baderne (Plon, 2008, page 168), n'est-ce pas infiniment plus grave que les délires de "vengeur_masqué" et autres "v@tic@n2035" que tout le monde lit avec le sourire sceptique de mise lorsqu'on se trouve confronté à des insanités?


Par ailleurs, Carlota me rappelle bien à propos cette évidence (je m'en veux de ne pas y avoir pensé!):

N'oublions pas que des auteurs célèbres ont écrit sous un pseudonyme, n'est ce pas, George Sand, Stendhal, Voltaire
(celui-là, il ne s'est pas privé de polémiquer, mais il est difficile de l'appeler "catholique"), Molière? Sans se comparer à eux au niveau littéraire, l'anonymat ne date pas des blogs. C'est donc un faux procès.

* * *


Sur ce thème, mais avec une autre approche, lire aussi le billet de Vivien Koch sur son très intéressant blog Itinerarium: intinerarium.com/2012/02/01/lidee-dune-charte-des-blogueurs-catholiques/