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Etat de grâce

et saturation, à propos de certains commentaires de vaticanistes, et d'autres, sur l'"effet François"". (8/4/2013)

     

J'avoue que je commence vraiment à saturer (pour rester polie) de certains commentaires hagiographiques lus autour du Pape François, et surtout de l'obligation de répéter constamment: «François n'y est pour rien, ce sont les autres qui disent que...» - comme si je devais m'excuser de garder un minimum d'esprit critique.
Comme il n'a pour le moment pris aucune décision, que la nouveauté de ses homélies ne peut avoir bouleversé quiconque (sauf quelques formules-choc insérées "a braccio" dans un corps doctrinal parfaitement balisé... que demander de plus?), on est obligé d'admettre que ce qui a frappé les gens, ce sont uniquement ses gestes. Il ne peut l'ignorer (et son humilité si vantée m'apparaît de moins en moins évidente), au point que ces fameux "gestes" ressemblent de plus en plus à de la démagogie.
Comme nous vivons dans une société de l'image, et que cette image est par définition véhiculée par des "media", les médias ont forcément quelque chose à voir avec la popularité du nouvel élu (et, parallèlement, la hâte de plus en plus supecte à liquider son prédécesseur)
Mais popularité ne signifie pas qualité, comme l'histoire, surtout non-religieuse, il est vrai, en a fourni de nombreux et parfois tristes exemples.
Beaucoup de défenseurs de François s'appuient sur le fait qu'il serait en continuité parfaite avec Benoît XVI (alors qu'il accumule ostensiblement les "gestes" - justement! - prouvant le contraire, dernier en date, pas vraiment nécessaire, mais voulu, la reprise de la férule "hideuse" de Paul VI, hier à Saint-Jean de latran, cf. fidesetforma.blogspot.fr), les ruptures éventuelles ne portant que sur des "détails" ridicules, en gros des questions de "chiffons", colifichets, dentelles et guipures, contre chasubles en polyester - sous-entendu: il y a tellement plus important.
C'est ignorer complètement huit ans de magistère de Benoît XVI pour qui, je le rappelais hier "la beauté est une catégorie morale", en particulier dans ses manifestations à travers la liturgie.

Un correspondant, Gilles B. m'écrit:
En lisant certains des articles mis en ligne sur votre blog, j'ai repensé à cette formule de je ne sais plus qui, affirmant que Vatican II avait ouvert les portes de l'Eglise et que les gens avaient profité pour en sortir massivement. La même rhétorique est toujours à l'oeuvre.

Justement, je viens de lire un article d'un des vaticanistes les plus en vue, Andrea Tornielli, que j'ai jusqu'à présent presque toujours apprécié. Je ne le traduis pas - sauf le premier paragraphe, très éloquent - car je ne veux pas m'attribuer indirectement un propos sur lequel je vais émettre quelques (vives) réserves. Je résume donc.

Tornielli rebondit sur un article publié sur l'OR, il y a trois jours, et que j'ai traduit ici: Alléluia!! Les églises vont enfin se remplir...

L'article s'intitule, de façon emphatique:
Eglises pleines, et homélies online
(source)
Et il commence ainsi:

Les prêtres affirment: «Plus de fidèles dans les confessionnaux»
Tandis que l'on enregistre des critiques du nouveau pape de la part d'intellectuels et de sites Web qui jusqu'à il y a un mois se déclaraient ouvertement papistes et qui digérent mal la sobriété du successeur de Benoît, la vague de sympathie des fidèles de François se poursuit.
Une sympathie certainement pas due à un engouement médiatique (ndt: ah bon!): beaucoup de gens se sont rapprochés du sacrement de la confession le dimanche de Pâques, touchés par les paroles de Bergoglio sur le pardon et la miséricorde. En témoignent des curés et prêtres provenant de diverses régions de l'Italie.

La suite ressemble à ce que nous appelons un "micro-trottoir", autrement dit un prétendu sondage d'opinions réalisé à partir d'un "échantillon" soi disant représentatif... mais forcément très réduit, sur des critères mal définis, ici, de prêtres.

Andrea Tornielli a donc rassemblé un pannel (numériquement très faible, puisque je suppose qu'il les a contactés par téléphone) de curés de paroisse, unanimes! Certains ont vu des gens "avec les larmes aux yeux" (il y en a qui ont la larme facile), raconter qu'ils étaient bouleversés par la simplicité d'expression du nouveau Pape.
Andrea Tornielli cite les noms de tous ses correspondants. Mais moi, française (même relativement familière de la recherche sur internet), que puis-je savoir d'eux? N'étaient-ils pas de ceux qui, huit ans durant, ont systématiquement "snobé" le magistère de Benoît XVI, et qui aujourd'hui, dûment sollicités, encensent les premiers pas de François, tandis que leur ouailles attendent probablement qu'il leur remette tous leurs péchés, sans rien demander en échange!!! Attention à la chute!
On m'objectera à juste titre que je devrais me réjouir de voir les églises se remplir. Certes! Mais on ne m'empêchera pas non plus de me poser des questions sur la durée de tels engouements, et aussi sur la motivation de ceux qui, à défaut de les susciter, en font leur miel.

A croire que nous sommes brusquement passés, comme déjà en France en 1981, "de l'ombre à la lumière" (Jack Lang?)
L'intention de comparer les deux Pontificats, particulièrement blessante, en dépréciant le précédent, saute aux yeux.
Et que l'on ne me parle pas d'"état de grâce". Nous savons déjà, et je l'ai prouvé, qu'il n'y a jamais eu cet état de grâce avec Benoît XVI.

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Note:
Cf ici :
Qui est le plus humble? Benoît XVI, qui prenait son petit-déjeuner dans le prétendu "faste" de l'Appartement du 3e étage du Palais Apostolique, assis à la même table que les "memore domini" de la "famille", ou François, qui est pour l'occasion entouré de ses collaborateurs (tous masculins!! quid du Pape "féministe"?), comme n'importe quel homme d'affaires à un briefing matinal?