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L'effet François est aussi un effet Benoît

Tensions entre vaticanistes. L'enquête de Massimo Introvigne. Et (encore) un article apaisant, lu sous la plume de Cristina Caricato dans Il Sussidiario (16/4/2013)

     

L'exaltation du nouveau Pape (dont je persiste à dire qu'au moins au début, elle était, et de façon calculée de la part de certains, aux dépens de l'ancien) semble avoir suscité quelques tensions dans le microcosme des observateurs du Vatican.
Sans intérêt, pensera-t-on. Pas sûr, s'agissant des "opinionistes" les plus influents - même si leurs querelles ne peuvent avoir la moindre influence sur le coeur de la question: la foi.
Avant-dernier épisode en date, un billet aigrelet d'Andrea Tornielli (http://2.andreatornielli.it/?p=6127 ), dénonçant sans élégance les propos de certains de ses collègues, qui se reconnaîtront, quand ils ne sont pas explicitement nommé. Echantillon, visant explicitement Angela Ambrogetti - sans la citer: certains se plaignent que la lumière ne soit pas allumée au troisième étage du palais apostolique (cf. François et la fenêtre du Pape ): alors, il n'y a qu'à mettre une lampe programmée pour s'allumer à intervalles réguliers...

Il défend "son" Pape avec passion (avec Benoît, il a juste été correct, ce n'est déjà pas mal, la différence de traitement s'explique ici: dernier paragraphe); et il tient beaucoup à son fameux "effet François", en Italie, au moins (nous avons vu, grâce à John Allen qu'il avait porté la nouvelle jusqu'au Chili).

Massimo Introvigne a voulu creuser la question, il a mené sa propre enquête, et elle confirme (pour ce qu'elle vaut, il faut quand même rappeler qu'un sondage n'est qu'un "instantané" de l'opinion comme on ne cesse de nous le répéter quand les faits ont prouvé qu'ils s'étaient grossièrement trompés) l'impression d'Andrea Tornielli.
Connaissant Massimo Introvigne pour avoir traduit beaucoup de ses textes, j'ai une totale confiance dans son honnêteté, et je ne mets pas en doute la fiabilité des chiffres relevés par son CESNUR (lui-même dit par ailleurs que ces chiffres demanderont à être confirmés dans la durée, il peut s'agir d'une simple "effervescence religieuse", dans le jargon des sociologues).
Et je lui sais gré d'avoir conclu son article sur la Bussola d'aujourd'hui par ces mots: naturellement, l'effet François est aussi un effet Ratzinger: beaucoup avouent avoir été émus et secoués aussi par la renonciation de Benoît.

C'est aussi ce que dit ce très bel article de Cristiana Caricato, dans il Sussidiario d'aujourd'hui, qui cherche à mettre tout le monde d'accord, ce qui n'est pas facile.

     

L'effet François? Il a commencé grâce à Benoît
http://www.ilsussidiario.net
(ma traduction)
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Lorsque l'on est dans le repos de Dieu, rien ne compte. Mais je suis sûre qu'aujourd'hui Benoît XVI est content. Peut-être plus que nous ne pouvons l'imaginer. Et ce n'est pas parce que son retrait volontaire le met à l'abri de ces attentions qui assiégeaient sa timidité naturelle, mais parce qu'à la place, il fêtera ses 86 années sonnées dans l'humilité et dans le secret, aimant sans forcer son tempérament, libre de porter tous dans son cœur quand il se mettra, comme chaque jour, devant son Christ. Sa conscience, celle qu'il a dépouillée avec une décision n'ayant que de rares et mointains précédents, ne se livrera pas à des examens. Ni à des bilans. Les saints n'en font pas. Ils n'en ont pas besoin, parce qu'ils savent que, dans tous les cas, ils ont déjà gagné. Mais dans une logique toute humaine, il faut dire que s'il ya un joueur qui a marqué un point dans l'histoire récente, c'est Joseph Ratzinger.

La dernière confirmation de cette thèse - qui m'est toute personnelle - se trouve dans la recherche présentée hier par le Cesnur, le Centre d'études sur les nouvelles religions de Turin. C'est un sociologue qui l'a menée, un observateur du sacré, au-dessus de tout soupçon, Massimo Introvigne, qui sur un ton scientifiques et avec sécurité doctrinale, a voulu vérifier ce qui se chuchotait et se déballait avec une satisfaction surprenante sur des sites et des feuilles catholiques. C'est un printemps de la foi, un retour sur les bancs des paroisses poussiéreuses, et même dans les confessionnaux. Ceux en bois, avec un grille perforée, dont souvent, en t'agenouillant, tu sens craquer la structure vermoulue et prie pour que la peine pour tes péchés ne consiste pas à te rompre le ménisque. Ils ont appelé cela «l'effet François». L'hypothèse était la suivante: «Le nouveau pape est sympathique, les gens l'adorent, ils ont compris son annonce d'un Dieu miséricordieux et retournent au bercail».
Il fallait vérifier les données. Et Cesnur a tenté, par le biais de questionnaires diffusés selon la technique "en cascade" (?) sur les réseaux sociaux (Facebook et Twitter pour les non-initiés).

Les résultats confirment que les fidèles et les confessions augmentent dans plus de la moitié des églises italiennes. 53% d'un échantillon de 200 personnes, de prêtres et de religieux, a affirmé avoir constaté dans sa communauté une augmentation des personnes qui se rapprochent de la pratique religieuse. Et aussi, dans 43,8% de ces cas, l'augmentation des fidèles est considérée comme substantielle, supérieure à 25%. Pas mal. Et aux sceptiques qui pourraient se méfier de la sincérité cléricale (disons que l'échantillon est évidemment intéressé, le conflit d'intérêts évident) Introvigne oppose les conclusions d'une enquête similaire menée parmi les laïcs, 500 pour être précis. Eh bien, eux aussi, bien que plus distraits et moins enthousiastes à l'admettre se sont aperçus du «phénomène Bergoglio»: 41,8%.

Convaincue, par des graphiques, de la fiabilité et du caractère concret de ces hypothèses, on peut s'attendre à ce que certains essaient de les capitaliser. Les pasteurs aux enclos délabrés, les pauvres prêtres épuisés par le ministère multitâche (ndt: dans le texte, le mot employé est multitasking, qui désigne le fait de pratiquer plusieurs activités en même temps), les fans improvisés et enragés de François (ses pires ennemis), les exaltateurs a-critiques du nouveau qui n'agissent que pour massacrer l'ancien. Soyons clairs, ce n'est pas le cas de Massimo Introvigne, toujours précis et ponctuel dans l'analyse, sage lorsqu'il considére et souligne qu'en réalité, l'effet est double et que l'on devrait parler du phénomène «Benoît / François».
En effet, l'enquête a révélé que ce qui a fait monter la vague de sympathie renouvelée pour tout ce qui est étiqueté comme catholique ç'a été au début la renonciation de Ratzinger. Ce qui a déclenché les qustions, ouvert les yeux, interrogé les âmes et suscité les attentes, c'est, d'abord, la commotion causée par le fait abyssalement humble et profondément chrétien de Benoît XVI. Le premier dans l'ordre chronologique, soulignons-le.
Et là, nous en revenons à la satisfaction et à l'anniversaire de Joseph Ratzinger.

Pensez-vous qu'un homme qui a jeté du haut des remparts de l'histoire le pouvoir qui lui venait d'une élection à laquelle l'Esprit Saint avait mis la main, à condition de faire le bien de son Eglise, puisse souhaiter autre chose que l'accomplissement de ce qui est le bien? C'est pourquoi je suis sûre que sa sérénité. Pour beaucoup, il a parié, pour d'autres il s'est simplement remis à Dieu. Effectuant un pari que seule une foi inébranlable peut supporter. Ce qui est certain, c'est que les choses ne pouvaient pas aller mieux que cela, après sa décision de gravir la montagne pour pousser avec le vent de la prière la barque de Pierre.
Nous avons François, une église réactive et plus vivante que jamais, un programme de réforme que le pontife allemand a caressé et préparé pendant des années, une espérance visible et palpable fondée sur le Christ ressuscité. Un moment de grâce, pour celui qui va souffler ses bougies.
Son cadeau? L'enquête du Cesnur .