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Divorce et annulation du mariage

Rappel du dernier discours du Pape Benoît à la Rote Romaine, le 27 janvier dernier (25/10/2013)

>>> Communion pour les divorcés remariés?

Alors que le débat sur l'accès à la communion des divorcés remariés revient au premier plan de l'actualité, à l'occasion de la publication sur l'OR d'un document du préfet de la CDF, relisons le discours de Benoît XVI devant les membres du Tribunal de la Rote Romaine pour l'ouverture de l'annéee judiciaire, rendez-vous habituel du mois de janvier.
Dans cette dernière édition, le 27 janvier 2013, à deux semaines de l'annonce de sa "démision", le Pape évoquait l'absence de foi des époux comme motif possible d'annulation d'un mariage.

Texte intégral: benoit-et-moi.fr/2013-I/la-voix-du-pape/foi-et-mariage

Le commentaire de P. de Saint-Pierre

Extraits du discours

Dans le contexte de l'Année de la Foi, je voudrais m'arrêter en particulier, sur certains aspects de la relation entre la foi et le mariage, en notant que la crise actuelle de la foi qui affecte différentes parties du monde, porte avec elle une crise de la société conjugale, avec toutes la charge de souffrance et de difficultés que cela comporte pour les enfants.
Nous pouvons prendre comme point de départ la racine linguistique commune que possèdent, en latin, les termes fides et foedus, ce dernier étant un terme avec lequel le Code de droit canonique désigne la réalité naturelle du mariage, comme un pacte irrévocable entre un homme et une femme (cf. can. 1055 § 1). En effet, la confiance réciproque est la base incontournable de tout pacte ou alliance.

Sur le plan théologique, la relation entre foi et mariage prend une signification encore plus profonde. En effet, le lien sponsal, bien qu’étant une réalité naturelle, entre les baptisés a été élevé par le Christ à la dignité de sacrement (cf. ibid.).

Le pacte indissoluble entre un homme et une femme n’exige pas, afin d’assurer son caractère sacramentel, la foi personnelle des futurs époux ; ce qui est demandé, comme condition minimale nécessaire, est l’intention de faire ce que fait l’Église. Mais s’il est important de ne pas confondre le problème de l’intention avec celui de la foi personnelle des contractants, il n’est toutefois pas possible de les séparer totalement.

Comme le faisait remarquer la Commission théologique internationale dans un document de 1977, « Là donc où l’on ne perçoit aucune trace de la foi comme telle (au sens du terme “croyance”, disposition à croire) ni aucun désir de la grâce et du salut, la question se pose de savoir, au plan des faits, si l’intention générale et vraiment sacramentelle, dont nous venons de parler, est présente ou non, et si le mariage est validement contracté ou non ». Le bienheureux Jean-Paul II, en s’adressant à ce tribunal, il y a dix ans, précisa toutefois qu’« une attitude des futurs époux ne tenant pas compte de la dimension surnaturelle du mariage peut le rendre nul uniquement si elle porte atteinte à la validité sur le plan naturel, sur lequel est placé le signe sacramentel lui-même » . À propos de cette problématique, en particulier dans le contexte actuel, il sera nécessaire de promouvoir des réflexions supplémentaires.

La culture contemporaine, marquée par un subjectivisme accentué, et un relativisme éthique et religieux, place la personne et la famille face à des défis pressants.
En premier lieu, face à la question sur la capacité de l'être humain de se lier, et si un lien qui dure toute la vie est vraiment possible et correspond à la nature humaine, ou n'est pas au contraire, en opposition avec sa liberté et son auto-réalisation. Il fait partie d'une mentalité diffuse, en effet, de penser que la personne devient elle-même en restant «autonome» et en n'entrant en contact les uns avec les autres que par des relations qui peuvent être interrompues à tout moment.

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La foi en Dieu, soutenue par la grâce divine, est un élément très important pour vivre le dévouement mutuel et la fidélité conjugale. On n’entend pas par cela affirmer que la fidélité, comme les autres propriétés, ne soient pas possibles dans le mariage naturel, contracté entre non baptisés. En effet, celui-ci n’est pas privé des biens qui « proviennent du Dieu créateur et s’inscrivent de manière inchoactive dans l’amour sponsal qui unit le Christ et l’Église » . Mais assurément, la fermeture à Dieu ou le refus de la dimension sacrée de l’union conjugale et de sa valeur dans l’ordre de la grâce rend difficile l’incarnation concrète du modèle très élevé du mariage conçu par l’Église selon le dessein de Dieu, pouvant arriver à miner la validité même du pacte si, comme le reconnaît la jurisprudence consolidée de ce Tribunal, elle se traduit par un refus de principe de l’obligation conjugale de fidélité elle-même, c’est-à-dire des autres éléments ou propriétés essentielles du mariage.

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Les saints qui ont vécu l'union matrimoniale et familiale dans la perspective chrétienne, ont réussi à surmonter les situations les plus adverses, atteignant parfois la sanctification du conjoint et des enfants d'un amour renforcé par une solide foi en Dieu, une piété religieuse sincère et une vie sacramentelle intense.
Ces expériences, marquées par la foi, font comprendre combien, aujourd'hui encore, est précieux le sacrifice offert par le conjoint abandonné ou qui a subi le divorce, si - reconnaissant l'indissolubilité du lien matrimonial valide - il réussit à ne pas se laisser «entraîner dans une nouvelle union ... Dans ce cas, son exemple de cohérence chrétienne et de fidélité assume une valeur particulière de témoignage devant le monde et l'Église»

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On ne doit donc exclure la considération qu'il puisse y avoir des cas dans lesquels, précisément en raison de l'absence de foi, le bien des conjoints est compromis, c'est-à-dire exclu du consensus lui-même: par exemple, en cas de subversion de la part de l'un, à cause d'une idée erronée de l'union conjugale, du principe de parité, ou en cas de refus de l'union duale qui marque le lien du mariage, en relation avec la possible exclusion de la fidélité et de l'usage de la copula accomplie humano modo.

Avec ces considérations, je n'ai certainement pas l'intention de suggérer un facile automatisme entre manque de foi et nullité de l'union conjugale, mais plutôt de mettre en évidence comment cette carence peut, mais pas nécessairement, blesser les biens du mariage, puisque la référence à l'ordre naturel voulu par Dieu est inhérent au pacte conjugal (cf. Gen 2.24).