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19 avril

Il était 18h47, ce mardi 19 avril 2005.... (19/4/2014)

Un inoubliable 19 avril

(collage Benoit-et-moi)


Je ne résiste pas au plaisir nostalgique de reproduire des éléments (textes, image et même du son) que beaucoup de mes lecteurs réguliers ont sans doute déjà vu et entendu (et même plusieurs fois!).
Mais, après tout, il n'y a qu'un 19 avril par an, et il est peu probable que beaucoup de sites se soucient de rappeler celui de 2005. Et comme disait Louis de Bonald : « Entre l’inconvénient de se répéter, et celui de n’être pas entendu, il n’y a pas à balancer ».

D'abord l'image: ce profil souriant et ému... et ces petites manches noires désormais mythiques.


Et puis le son, avec le fameux "Habemus papa remix", à télécharger ici: habemuspapamremix.mp3 (en principe, on devrait voir ci-dessous un "lecteur" , sur mon système, il n'apparaît pas sous Internet Explorer, c'est pourquoi j'ajoute le lien de téléchargement) . On revit le suspense savamment entretenu par le cardinal Medina jusqu'à l'explosion finale d'enthousiasme de la foule.

Habemus papa Remix


Et encore, ces deux témoignages particulièrement touchants:

Le témoignage de mon amie Anne

C'était le jour de sa messe d'inauguration du pontificat. J'arrivais chez ma belle-mère où la télévision la retransmettait, c'était le moment de l'homélie ; nous étions nombreux je voyais l'image mais n'entendait pas le son. Et subitement je me suis sentie aimée. La télévision a été arrêtée et j'ai gardée cette impression qui ne me semblait pas logique. De retour chez moi je suis allée lire avec curiosité le texte de l'homélie et j'y ai lu ce pasage (je cite de mémoire) : "priez pour-moi pour que je vous aime de plus en plus vous tous ensemble et chacun en particulier.". J'ai su alors que mon impression correspondait à quelque chose de réel.

     

Un témoignage "anonyme"

En avril 2005, une jeune suissesse racontait sur le site <Christicity.com> sa réaction à l'élection de Benoît XVI.

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La FNAC, complice de l’annonce de l’élection de Benoît XVI...

Véronique, 25 ans, lectrice de ChristiCity, nous fait partager de quelle façon insolite elle a vécu l’élection de Benoît XVI. Non contente d’avoir pu suivre l’évènement en direct à la télé, elle voit dans ce qu’elle a vécu le doigt de l’Esprit Saint... qui a pris soin d’elle en lui permettant de vivre ce beau moment de la vie de l’Eglise qu’est l’élection d’un pape.
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Mardi soir (hier soir), j’avais cours jusqu’à 17h30.
Je quitte mon école et me dirige vers la gare. 17h40. Il fait froid. Mon bus n’est qu’à 18h30... (vive la campagne !) Je décide d’entrer dans le nouveau centre commercial, en face de la gare, pour me réchauffer. Là, je m’installe sur un banc et je bouquine : Ste Faustine, ma sainte préférée, ma "sainte de l’année" 2002.
J’ai à peine commencé que je reçois un SMS de ma mère : "habemus Papam ! " Là, je me dis : "faut absolument trouver une télé ! "
Mais où trouver une télé en pleine ville de Fribourg ? La seule solution, c’est d’essayer la fnac : ils en vendent. Sur le tas, une sera peut-être sur le bon cannal !?!
Je me précipite dans le magasin et cherche le rayon TV. Tous les écrans sont branchés sur une seule et même chaîne : on voit partout le même clip stupide (avec le son !!!). Je m’approche quand même... lentement... devant moi, il y a trois personnes de dos qui fixent un écran. Elles sont si serrées je ne vois même pas la télé en question puisqu’elles sont juste devant. Une fois suffisamment près, je vois...

... suspense...

une Place si chère et reconnaissable entre toutes : la Place St-Pierre! Et une foule immense, immense... qui attend son futur Pape dont le nom est encore inconnu.
L’attente est palpable... L’image est monotone : une foule multicolore. Au fond de l’écran, une bande rouge annonce en 6 langues différentes que le conclave a élu un pape. Super, mais lequel ???
Pour passer le temps, j’examine mes voisins : deux filles et un homme, vraissemblablement un vendeur, ou même plutôt le chef du rayon. Voyant qu’on s’intéresse à ce qui passe à la TV et non au magnifique écran plat qui sert de support et qui attend toujours un acheteur, le chef de rayon met le son à la TV. Quand même, il est trop fort, l’Esprit Saint !

Sur la place St-Pierre, la foule grossit. L’attente continue. J’observe les deux filles. Je les connais de vue. Du collège, je crois. Ou peut-être "de la messe" je ne sais où. C’est rigolo de se retrouver dans un magasin de télés pour assister à l’élection du Pape ! On sent la communion de prière qui unit les chrétiens : partout nous sommes chez nous puisque Dieu nous y accueille. Ici, évidemment, pas de Tabernacle ! Mais cet écran qui nous relie, en direct, avec les événements de la place St-Pierre...
Deux gars nous rejoignent et demandent si le nom du Saint-Père est connu. Le vendeur s’en va, revient... Il y a peu de clients et il a le temps. Pour une fois, je comprends l’utilité des chaînes comme ***, qui distillent l’actualité en permanence !
Faut dire que, depuis Pâques, j’ai certainement davantage regardé la télé que durant les trois ans précédants !!!
Soudain, les caméras cessent de montrer la foule pour se centrer sur la fameuse fenêtre qui va s’ouvrir dans quelques minutes - d’après le commentateur, qui essaie tant bien que mal (plutôt mal) de faire passer le temps en nous racontant 50 fois les mêmes choses. Le rideau blanc semble bouger... chacun retient son souffle...
Fausse alerte. L’attente continue. Une acheteuse qui comparait les prix des différents écrans plats s’approche avec son fils. Elle se met à regarder elle aussi. Nous sommes donc 8 personnes, plantées devant un écran, dans la FNAC de Fribourg !!!
Bon, je vous épargne la suite de l’attente. Passons tout de suite à l’instant tant attendu...

Mais avant, je voudrais relever encore le sentiment de joie et de communion qui émane de cette scène étrange. Le côté solennel de l’événement crée une complicité entre nous. C’est marrant comme certains événements un peu inhabituels suffisent à instaurer une communication (même non verbale) entre des individus qui ne se seraient jamais adressé un regard en temps normal. (Moi qui vient d’un tout petit village, je suis toujours étonnée par l’indifférence des gens qui se croisent sans se voir.)

Soudain, la fenêtre s’ouvre ! Chacun retient sa respiration... mais non, on ferme seulement les rideaux rouges ! Evidemment, 18h30 a passé et mon bus a quitté la gare sans moi ! Tant pis : la Providence m’a donné un écran (avec le son !!!) je ne vais pas partir avant la fin ! Même si le prochain bus n’est qu’à 21h30 !

C’est alors que la personne chargée de nous annoncer la bonne nouvelle apparaît. Et c’est les paroles que nous avons si souvent entendues ces dernières heures :
"Carissimi fratelli et sorelli, chers frères et soeurs, liebe Brüder und Schwester, annontio vobis gaudium magnum : habemus Papam !
Dominum Josephum"... (je ne connais évidemment pas les prénoms de tous les cardinaux, mais Joseph, je n’en voit qu’un ! Serait-ce possible que ...)
"Dominum Josephum Cardinalem Ratzinger ! " (plus de doute, c’est bien lui !)
Et aussitôt apparaît celui dont j’ai tant entendu parler mais que je n’ai encore jamais vraiment observé ! Soulagement : nous avons un Berger sûr pour nous guider vers le Christ ! Merci Seigneur !!!
La petite troupe se disperce... ne restent que les deux filles et moi. La tension est tombée... C’est le discours que tout le monde connaît, si touchant de simplicité et de douceur, et la bénédiction Urbi et Orbi. Que faire ? Faire le signe de croix au milieu du magasin ??? Le faire seulement dans son coeur ??? Après tout, Jésus voit l’intention et c’est ça qui compte ! Non ! Les gens penseront ce qu’ils voudront : je ferai le signe de Croix. En communion avec notre nouveau Saint-Père sur lequel on a déjà collé tant d’étiquettes. C’est à ce moment que je réalise l’ampleur de ce qui l’attend ! Ca doit être terrifiant !Il est 19h, un vendeur éteint les écrans les uns après les autres. Plus personne dans le centre commercial. Je file m’acheter de quoi souper...

Quand même, il est bon, le Seigneur ! (on savait déjà, mais c’est pas une raison pour ne plus le dire.) Il a permis que le froid m’amène justement dans ce centre où une télé m’attendait, sur la chaîne désirée ! Il s’est arrangé pour que le vendeur vienne y ajouter le son !
Il a permi que 5 jeunes croyants se retrouvent ainsi autour du même écran, créant au milieu du magasin une petite communauté chrétienne en prière !
Et surtout, Il nous a donné un Berger ! Nous ne sommes plus orphelins !
Merci mon Dieu !

     


Et enfin, le mien. Comme il a été écrit presque tout de suite après, avec le recul de 9 ans, je peux dire qu'il métait vraiment sorti du coeur.

Mon témoignage

Mardi 19 Avril 2005, il est 18h47….

Je suis comme tout le monde devant mon poste de télévision.

Je suis fébrile, mais c’est pour une raison somme toute vulgaire, l’impatience de savoir, de voir, la sensation confuse d’une tension qui monte, mais qui va se relâcher d’un instant à l’autre…Ce n’est pas très éloigné du sentiment que l’on éprouve au cinéma lorsqu’on arrive à la fin d’un film à suspense. Et puis, je n’ai guère hanté les églises depuis mon adolescence, et je suis encore convaincue que la foi est une grâce qui ne m’a pas été accordée.

Comme tout le monde, aussi, je connais l’identité du nouveau Pape, et je sais depuis l’annonce faite par le protodiacre chilien Medina qu’il a choisi le nom de Benoît XVI. Mais celui du cardinal Joseph Ratzinger ne me dit que peu de choses, je sais seulement (ce qui m’agrée) qu’il est classé comme conservateur, et que lors de la méditation du Chemin de Croix, il a prononcé des propos musclés sur l’Eglise, une barque qui prend l’eau de toutes parts…

Puis, le rideau rouge dans la loge des bénédictions de la Basilique Saint-Pierre s’ouvre comme au théâtre… et c’est une révélation !

« IL » apparaît, il ouvre les bras vers nous en un geste caressant, un geste de père, comme s’il voulait nous serrer contre lui, il sourit …
Ce geste des bras... Comment l'oublier!
Il parle en italien, d’une voix douce, légèrement cassée par la fatigue; et cette voix tremble un peu, de peur et de timidité devant la foule immense, et il bute sur les mots d'une langue qu'il maîtrise mais qui n'est pas la sienne (qui a remarqué qu’il a rectifié le « prières » français en un « preghiere » italien ?), sous l'emprise d'une émotion profonde, qu’il parvient presque à dominer, et qui me le rend instantanément touchant parce qu’il est fragile et humain. Et lorsqu’il nous bénit… il n’a plus d’âge, il est transfiguré par la sérénité, la lumière dont il rayonne. Plus rien d’autre n’existe que cette lumière.

Après, je me sens légère, joyeuse. J’ai téléphoné à ma mère pour partager cet instant de bonheur, je devrais dire "cet instant de grâce"....

Pour moi, il s’est passé ce jour-là quelque chose de vraiment spécial. Comme si une porte s’était ouverte. Beaucoup plus tard seulement, en revoyant les images enregistrées et en y repensant, j’ai réalisé qu’il était beau, avec son doux visage souriant, aux traits menus et délicats comme ceux d’un enfant.
A qui m’objectera que cet engouement banalement humain n’a rien de spirituel, et s’apparente plus à l’idolâtrie qu’à la Révélation, je répondrai que le Seigneur (s’il existe, mais maintenant, comment douter qu’il existe ?) pourrait fort bien choisir cette voie humaine pour se révéler. Après tout, les disciples ont peut-être commencé par aimer la personne de Jésus.

Après ce moment intense, quelques réflexions s’imposent à moi :

D’abord, comment ne pas croire à la prédestination ?
Il l’a dit lui-même, d’ailleurs, dans un de ses livres que j’ai lu par la suite, « Dieu a un projet pour moi ». Et il n’était pas encore pape! Comment ne pas croire en effet que Dieu ne poursuivait pas un but en le faisant naître dans cette famille simple mais exceptionnelle (il faut lire ce qu’il en dit dans son livre de souvenirs), dans cette Bavière rurale profondément marquée par le catholicisme (encore aujourd’hui!), puis en lui accordant tous ces dons vraiment extraordinaires, entièrement tournés vers la recherche et l’accomplissement du Bien, alors qu'à moins de 20 km de là, presque quarante ans plus tôt, et sur les bords de la même rivière, l'Inn, était né et avait grandi l'incarnation du Mal que fut Adolf Hitler.

Son âge apparaît comme un défi à cette société qui vénère comme le veau d’or l’apparence de la jeunesse, et envoie ainsi un message de courage et d’espoir (et pourquoi pas, de fierté) vers ceux qu’il faut bien appeler les vieux. Car son image incroyablement juvénile rayonne d' une énergie sereine qui lui donne une valeur de symbole.

Et puis, comment ne pas être impressionné par la trajectoire fulgurante du petit garçon bavarois issu d’une modeste famille paysanne, jusqu’à la plus haute charge de l’Eglise catholique, après avoir été, au dire de Time Magazine, en tant que préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, l’une des cents personnalités les plus influentes au monde. N’en déplaise aux zélateurs de la démocratie et de son soi-disant « ascenseur social », ceci témoigne de l’incroyable capacité de l’Eglise avec sa structure pyramidale, son système d’élection aristocratique et son et gouvernement monarchique (des survivances du passé !) à promouvoir le vrai mérite de l’excellence.

Quelle leçon pour notre république si encline elle-même à en donner!

Pour finir, j’aimerais témoigner d’un propos recueilli le lendemain « dans la rue » (ou plus exactement, à la caisse d’un supermarché). Devant la photo géante du nouveau Pape à la une du Figaro que je venais d’acheter, une dame m’a dit, après avoir comme tout le monde déploré son grand âge, et constaté ma réticence à ses propos : « il porte la sainteté sur son visage ». On ne saurait mieux dire.

Vox populi…

29 avril 2005