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Le couperet du conclave de 2005

Souvenir: le 25 avril 2005, le nouveau pape s'adressait en toute simplicité à ses compatriotes bavarois (16/11/2014)

>>> Discours en entier ici: www.vatican.va

     
(discours de Benoît XVI, 25 avril 2005)
Je voudrais avant tout m'excuser pour mon retard. Les Allemands sont réputés pour leur ponctualité. A ce qu'il semble, je me suis déjà beaucoup italianisé. Mais nous avons eu une rencontre oecuménique importante avec les représentants de l'oecuménisme du monde entier, de toutes les Eglises et communautés ecclésiales, et avec les représentants des autres religions. Ce fut une rencontre très cordiale, c'est pourquoi elle a duré plus longtemps.

Mais à présent, je peux vous dire finalement: je vous souhaite une cordiale bienvenue!

Je vous remercie de tout coeur pour les voeux, les paroles, et les signes d'affection et d'amitié qui me sont parvenus de façon impressionnante de toutes les régions d'Allemagne. Au début de mon chemin dans un ministère auquel je n'avais jamais pensé et pour lequel je ne me sentais pas adapté, tout cela m'apporte une grande force et aide. Que Dieu vous le rende! Lorsque que la tournure que prenait le vote m'a progressivement fait comprendre que, pour ainsi dire, le couperet allait tomber sur ma tête, j'ai commencé à avoir le vertige. J'étais convaincu d'avoir accompli le travail de toute une vie, et que je pouvais espérer finir mes jours dans la tranquillité. Avec une profonde conviction, j'ai dit au Seigneur: Ne me fais pas cela! Tu disposes de personnes plus jeunes et plus adaptées, qui peuvent affronter ce grand devoir avec bien plus d'élan et de force. Puis, j'ai été très ému par une brève lettre, écrite par l'un de mes confrères du Collège cardinalice. Il me rappelait qu'à l'occasion de la Messe pour Jean-Paul II, j'avais centré mon homélie, en partant de l'Evangile, sur les paroles que le Seigneur adressa à Pierre au bord du Lac de Tibériade: Suis-moi! J'avais expliqué que Karol Wojtyla reçut toujours à nouveau cet appel du Seigneur, et qu'il dut toujours à nouveau renoncer à beaucoup de choses et simplement dire: oui, je te suis, même si tu me conduis là où je n'aurais pas voulu aller. Mon confrère m'a écrit: Si le Seigneur devait te dire à présent: "Suis-moi", alors rappelle-toi de ce que tu as prêché. Ne te refuse pas! Sois obéissant, comme tu as décrit le grand Pape, qui est retourné à la maison du Père. Cela m'a profondément touché. Les voies du Seigneur ne sont pas toujours faciles, mais nous n'avons pas été créés pour la facilité, mais pour les choses grandes, pour le bien.
Ainsi, à la fin, je n'ai pas pu faire autrement que dire oui. Je compte sur le Seigneur, et je compte sur vous, chers amis.
...
Marchons ensemble, soyons unis. J'ai confiance en votre aide. Je vous demande d'être indulgents si je commets des erreurs, comme tout homme, ou si quelque chose que le Pape doit dire ou faire selon sa conscience et selon la conscience de l'Eglise demeure incompréhensible. Je vous demande votre confiance. Si nous demeurons unis, alors nous trouverons le bon chemin.

Parmi les premiers mots prononcés par le pape nouvellement élu Benoît XVI, en avril 2005, certains sont passés à la postérité. C'est le cas du mot "couperet" (on lit parfois "guillottine", mot sinistre trop français pour avoir été employé ici), pour évoquer la frayeur que lui avait inspiré la perspective de devenir le Vicaire du Christ.
On se souvient peut-être moins des circonstances dans lesquelles ce mot a été prononcé: c'était le 25 avril, Benoît rencontrait dans la Salle Paul VI ses compatriotes allemands venus à Rome pour la messe d'intronisation.
Je ne retrouve malheureusement plus les reportages que j'avais archivés à l'époque, juste une photo en noir et blanc, mais en cherchant avec opiniâtreté, j'ai retrouvé sur internet (ici) le récit qu'en avait fait à l'époque Alessandro De Carolis pour Radio Vatican en langue italienne.

Le discours, certainement préparé, et médité, est pourtant d'une spontanéité touchante.
C'est tout Benoît XVI: profond, gentil, accessible et pétri d'humour..

LE SERVICE MINIMUM DE L'OSSERVATORE ROMANO

Dans la matinée du lundi 25 Avril, Benoît XVI a reçu en audience dans la salle Paul VI les délégations et les pèlerins allemands venus à Rome à l'occasion de son élection.
Aux côtés du pape étaient présents les cardinaux Joachim Meisner, archevêque de Cologne et Friedrich Wetter, archevêque de Munich et Freising, et Mgr Georg Ratzinger, frère du pape.
Au terme de la rencontre, le Pape a invité les deux cardinaux à réciter avec lui le «Notre Père» et le «je vous salue Marie» en allemand et à donner la Bénédiction apostolique. Puis il a voulu saluer et embrasser personnellement beaucoup des présents, dont certains lui avaient offert des cadeaux. En particulier, le cardinal Wetter, son successeur à Munich et Freising, lui a remis une croix pectorale en or au nom de l'archidiocèse.
(L'Osservatore Romano - 25 Avril, 2005)

     

LE BEAU RÉCIT D'ALESSANDRO DE CAROLIS POUR RADIO VATICAN

La joie et la confiance du pape dans «l'Eglise jeune» qui se rassemblera à Cologne: dans l'audience avec des pèlerins allemands, les confidences Benoît XVI sur son élection: je n'ai fait rien pour être élu, j'ai dit mon 'OUI '
Alessandro De Carolis
Lundi 25 avril 2005
(ma traduction)
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Un pape choisi par la volonté de Dieu, qui n'a pas demandé ni espéré l'élection, conscient de sa propre insuffisance. Un pape «adopté» par Rome, mais toujours profondément attaché à ses origines allemandes et bavaroises. Un pape confiant dans l'intégrité d'une Église qu'il considère vivante et jeune, et non pas entachée par le matérialisme et l'injustice, dont le miroir est dans la conscience de ces jeunes qui dans moins de quatre mois seront aux Journées mondiales de la Jeunesse à Cologne. C'est parmi les applaudissements, quelques mots d'esprit et beaucoup de sourires que s'est déroulée ce matin dans la Salle Paul VI, l'audience de Benoît XVI aux pèlerins allemands venus à Rome pour la messe de début pontificat



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Une audience vécue en donnant la parole au cœur, à l'évocation personnelle. Après la cérémonie de début du pontificat d'hier matin - où le sentiment collectif de la fête était inséré dans le cadre d'un rituel solennel et ponctué par des gestes de haute valeur symbolique - pour Benoît XVI est arrivé ce matin le temps des sentiments et du récit personnel, dans le contexte plus libre et plus familier de la renconre avec les pèlerins allemands. Ils étaient entre six et sept mille à se presser avec affection autour du Pape, qui n'a pas ménagé les confidences sur son élection, leur demandant soutien et compréhension.

Dès l'entrée du Pontife dans la salle Paul VI, au son de l'orgue, on a perçu le climat d'un enthousiasme, pour ainsi dire, plus «intime». Benoît XVI, souriant, a serré des dizaines de mains, à travers l'étroit couloir créé parmi les fidèles, et a atteint sa place, s'excusant en plaisantant d'avoir fait attendre l'assistance. La boutade a encore plus détendu l'atmosphère dans un parterre d'où émergeaient, parmi d'autres, des drapeaux de Bavière, terre d'origine du nouveau Pape. En les regardant, Benoît XVI a dit qu'il était bavarois, même comme évêque de Rome, malgré qu'il soit dans la capitale depuis 23 ans. Entre ces deux zones géographiques distinctes, a observé Benoît XVI, il y a eu un échange fructueux au cours des siècles. La Bavière et Rome, a-t-il poursuivi, ont toujours eu de bonnes relations et de Rome à la Bavière est arrivé l'Evangile. Puis, à l'époque moderne, également de Bavière est venu un don à l'Eglise, en la personne du saint capucin bavarois Conrad, mais aussi à travers le père Rupert Mayer, le jésuite qui a défié Hitler.

L'écoute des pèlerins s'est faite plus attentive quand Benoît XVI a dit quelques mots sur son élection, sans violer le secret, comme il a tenu à le préciser. Le Pape a révélé qu'il n'avait jamais pensé être élu, ni d'avoir fait quoi que ce soit pour que cela se produise, ajoutant s'être souvenu - au moment où l'élection se profilait comme certaine - les paroles contenues dans la lettre que lui avait remise un cardinal. Celui-ci lui rappelait que si le Seigneur lui adressait son «suis-moi», alors il devrait se rappeler ce qu'il avait dit lors des funérailles de Jean-Paul II, et ne pas refuser l'appel. Les voies du Seigneur ne sont pas commodes, a ajouté Benoît XVI, mais nous ne sommes pas faits pour être à l'aise et je n'ai pas pu faire autreement que dire oui.
Dans les jours suivant la mort de Jean-Paul II, a dit le Pape, il est devenu clair pour tout le monde qu'il était perçu comme un père, et que l'Église n'était pas refermée sur elle-même, mais elle est à tous; l'Eglise - a-t-il répété à nouveau parmi les applaudissements - n'est pas vieille, mais jeune, redisant qu'il attendait avec joie le rendez-vous de Cologne, où les jeunes et le monde se réuniront avec Jésus.

Avant de conclure son discours, Benoît XVI s'est adressé directement aux cœurs de ses compatriotes, en leur demandant de marcher ensemble et de compter sur leur aide, appelant en même temps à la compréhension pour les erreurs éventuelles, dont aucun homme n'est à l'abri, et demandant leur confiance.
Une salve d'applaudissements a ponctué ces mots, avec toute l'assemblée qui s'est levée pour montrer leur appréciation. Le Pape a conclu en chantant le Notre Père et le Je vous salue Marie, entouré de deux cardinaux allemands, Meisner de Cologne, et Wetter de Munich, son successeur dans le diocèse allemand, qui a donné au Pape une croix pectorale d'or finement travaillé.