Page d'accueil

Entre deux Synodes (Partie I)

L'écrivain catholique conservateur américain George Weigel livre une analyse extrêmement fouillée du Synode d'octobre 2014, et des enjeux de celui de 2015 dans le n° de janvier de la revue First Things. Traduction de Anna (1er/1/2015)

Comme l'article est extrêmement long (Anna a vraiment eu beaucoup de courage!), je crois opportun de fractionner la parution.
Certains sous-titres sont de l'auteur lui-même, d'autres de la traduction, pour faciliter le lecture (en italique dans le texte).

Dans cette première partie, George Weigel étudie le déroulement du Synode et le comportement des médias; le rôle du cardinal Kasper, et plus généralement de l'Eglise allemande (dont les motivations seraient d'ordre bassement financier: la Kirchensteuer est une manne à laquelle la hiérarchie catholique est prête à sacrifier beaucoup de principes); l'émergence d'un catholicisme africain; les bizarreries de la procédure; l'absence extraordinaire de représentants de l'Institut Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille.
François est quasiment absent de ces considérations. Ou si l'on veut, il n'est présent qu'en filigrane, mais les "responsables" du gâchis éventuels sont Kasper, Baldisseri, Forte....
Il est évidemment difficile pour George Weigel de dire autre chose.

     

Entre deux Synodes

Une analyse des défis de ce moment catholique spécial
http://www.firstthings.com/article/2015/01/between-two-synods
Traduction Anna

* * *

Un autre "mardi noir"
-----
Le 19 novembre 1964, le projet de texte de la Déclaration de Vatican II sur la Liberté religieuse (Nostra Aetate) fut brusquement retiré de l'agenda conciliaire et son vote ajourné à un an plus tard. L'annonce de cette décision inattendue, motivée par la demande d'évêques italiens et espagnols considérés comme opposés à la Déclaration, provoqua quelque chose se rapprochant du chaos. Une pétition au Pape Paul VI fut concoctée à la hâte et signée par des centaines de pères conciliaires, lui demandant de permettre le vote de la déclaration avant l'ajournement de la troisième session conciliaire, deux jours plus tard. Paul VI décida qu'en dépit des réclamations de la majorité, la procédure n'avait pas été violée et que le vote était reporté à la quatrième session à l'automne 1965; il promit que la déclaration serait la première question à l'ordre du jour.

Rien de semblable à ce Mardi Noir de légende (que le noble latiniste John Courtney Murray appelait dies irae, le jour de colère) n'a été vu dans l'Eglise Catholique pendant les cinquante ans suivants jusqu'à un autre mardi: le 16 octobre 2014, presque à la fin du synode extraordinaire sur la famille convoqué par le Pape François pour préparer l'ordre du jour du synode ordinaire prévu pour octobre 2015. (Le Synode 2015 sera «ordinaire» car il est un des synodes prévus pour se tenir régulièrement tous les trois ou quatre ans). La rencontre synodale d'octobre dernier, impliquant les président des conférences épiscopales du monde entier et d'autres haut responsables catholiques, fut vraiment extraordinaire parce que, le 16 octobre, les pères du synode de 2014 se sont révoltés en bloc dans la salle synodale. Là, dans une autre scène dramatique, à haute voix et en colère, les pères ont contraint la direction du synode à publier les textes intégraux des relations des groupes de discussion (organisés par langues), dont beaucoup avaient été très critiques envers la «relation intérimaire» produite après la première semaine des débats pléniers. Cette révolte majoritaire, à son tour, a mis en route un processus conduisant à une relation finale du synode 2014 très modifiée et fortement améliorée.

Dans les deux cas, l'apparition d'une attitude non-romaine témoignait que quelque chose de sérieux se préparait concernant la compréhension même que l'Eglise catholique a d'elle même. En 1964 le sujet était la liberté religieuse, mais les questions plus profondes étaient la nature de la personne humaine, la relation entre les droits de la conscience et les revendications de la vérité, la relation historique de l'Eglise avec le pouvoir étatique, et l'attitude du Catholicisme évoluant vers la modernité politique. En 2014, le sujet était la famille et la réponse pastorale de l'Eglise à la révolution sexuelle, mais les questions controversées sous-jacentes étaient presque exactement les mêmes: la crise du mariage et de la famille, bien que cette fois elles impliquaient la relation de l'Eglise avec la culture post-moderne plus que ses relations avec la démocratie et la séparation Eglise-Etat.

Le scénario des médias
-----
Hélas, bien peu de cette profondeur émergeait des reportages et commentaires sur le synode de 2014, trop souvent filtrés à travers le prisme narratif du «pape humain et progressiste et ses alliés contre ceux du parti de l'intransigeance à l'égard de Vatican II».
Ce scénario comporte toutefois une interprétation erronée du Pape François, une idée fausse des vrais problèmes en jeu, une fausse image de la majorité au synode, le déni des manipulations qui ont entaché le processus synodal et une représentation caricaturale de ceux qui tenaient le rôle des Méchants. Pire encore, il détourne l'attention des graves questions que le Pape François voulait justement mettre en évidence: la crise du mariage et de la famille partout en Occident et le défi de lier vérité et miséricorde dans le soutien pastoral de ceux qui, de multiples manières, sont blessés par cette crise.

A cause des passions soulevés par le synode extraordinaire et des rapports confus et déformés qui en ont été faits, il va y avoir énormément de turbulence dans l'air de l'Eglise Catholique l'année prochaine. La turbulence pourrait être réduite, et quelques progrès pastoraux accomplis, si les graves problèmes qui sous-tendent (et cachent) les tentatives de l'Eglise Catholique de se confronter avec la culture post-moderne, et surtout sa normalisation et sa justification idéologique de la révolution sexuelle, étaient vus pour ce qu'ils sont. Alors seulement ils pourraient être discutés dans un esprit plus calme que celui qui a prévalu à Rome et partout dans le monde à la mi-Octobre 2014 et dans les semaines immédiatement successives.

Le problème allemand
-----
Le Pape François se rend compte qu'il y a une crise globale du mariage, comme il l'a abondamment et clairement exprimé dans un discours passionné au mouvement Schoenstatt la semaine après la conclusion du synode. Il y a affirmé que le mariage et la famille n'ont jamais été autant attaqués qu'aujourd'hui, par une «culture du rebut» qui réduit le pacte du mariage à une simple «association», et contre laquelle l'Eglise doit proposer «très clairement» la vérité au sujet du mariage.
Il a toujours été dans les intentions du Pape que le synode de 2014 soit un un vaste débat sur la crise du mariage et de la famille. Car il pense que c'est seulement si la nature de la crise est pleinement comprise que l'Eglise pourra poursuive sa réflexion sur sa façon de proposer sa conception du mariage, afin qu'elle soit plus immédiatement audibles et vivable dans la culture gnostique d'aujourd'hui. Cet examen approfondi de la crise, et la célébration du mariage chrétien comme sa réponse, ne s'est pas produite au degré souhaitable. Et cela a été dans une large mesure par la faute des évêques allemands conduits par le Cardinal retraité Walter Kasper, allié avec le secrétaire général du synode le Cardinal Lorenzo Baldisseri , lesquels semblaient déterminés à pousser la question de la Sainte Communion aux divorcés et civilement remariés en première ligne des débats synodaux.

L'obsession allemande sur cette question était dans un sens une expression d'auto-référentialité vis à vis des problèmes pastoraux d'une Eglise Allemande sclérotique, qui sont incontestablement graves. Dans un autre sens, toutefois, la question de l'«interdiction de Communion» (comme elle a été grossièrement décrite dans la presse) est un cheval de Troie pour un argument bien plus large sur la nature de la doctrine et son développement. Celui-ci reprend à son tour le débat qui a cours depuis longtemps sur la signification de Vatican II et sa relation avec la tradition catholique, que Kasper et ses alliés semblent déterminés à rouvrir.

L'argent, le nerf de la guerre
-----
Dix mois avant le Synode, j'ai demandé à un bon connaisseur du catholicisme allemand la raison de l'insistance de la hiérarchie catholique allemande sur la révision du problème de la Sainte Communion à ceux qui vivent de secondes noces civiles, alors que dans le monde, la majorité de l'Eglise considère qu'il a été suffisamment débattu lors du synode de 1980 sur la famille, et qu'il semblait avoir été réglé avec la réaffirmation de l'enseignement et de la pratique traditionnels de l'Eglise dans l'exhortation apostolique de 1981 de Saint Jean-Paul II Familiaris Consortio (La Communauté de la Famille) et en 1983 par le code de droit canonique. J'ai reçu une réponse d'un seul mot: «L'argent».

L'Eglise allemande est financée par la Kirchensteuer, la «taxe de l'Eglise» levée par la République Fédérale sur tous les citoyens qui n'ont pas opté pour la sortie de l'Eglise. Les fonds concernés sont considérables; en 2011, la Kirchensteuer a fourni à l'Eglise catholique en Allemagne 6,3 milliards de dollars. Récemment, toutefois, de plus en plus de catholiques allemands on opté pour la sortie. Dans une tentative maladroite d'arrêter la saignée, les évêques allemands ont émis en 2012 un décret affirmant que celui qui ne paie pas la taxe «sort de l'Eglise» et que de tels apostats de facto sont exclus de sa vie sacramentelle, sauf en danger de mort. Le décret a été largement raillé et des canonistes allemands l'ont déclaré nul (nonstarter), car pour «sortir de l'Eglise» il faut plus que la signature d'une déclaration assermentée. Et en tout cas, le paiement de la Kirchensteuer n'a cessé de baisser.

De nombreux évêques allemands semblent en avoir conclu que ce schéma de désertion du payement de la taxe de l'Eglise s'explique par la perception de l'Eglise catholique comme la représentante minable, mesquine et cruelle de propositions, comme l'indissolubilité du mariage, qu'aucun européen du 21ème siècle qui se respecte ne peut accepter. Le fait que les gens aient arrêté de payer la Kirchesteuer parce que ils ne croient plus que Jésus est le Seigneur et que l'Eglise Catholique est son Corps semblerait l'explication la plus directe. Mais adopter cette interprétation oblige à admettre que l'effondrement de la foi et de la pratique catholiques en Allemagne est en rapport avec l'échec colossal de la théologie et de la catéchèse allemandes à transmettre efficacement l'Evangile dans les difficiles conditions de la modernité tardive et de la post-modernité. Mais - pour emprunter l'image à une autre bataille - ça c'est un pont trop loin. (ndt: cf. fr.wikipedia.org/wiki/Un_pont_trop_loin ; et aussi fr.wikipedia.org/wiki/Opération_Market_Garden).

Le cardinal Kasper
----
Avant le synode, d'importantes critiques aux propositions du Cardinal Kasper pour permettre aux catholiques divorcés et remariés civilement d'être réadmis dans la pleine Communion eucharistique de l'Eglise, ont été publiées dans la revue trimestrielle Nova et Vetera et dans le livre d'essais 'Demeurer dans la vérité du Christ: Mariage et Communion dans l'Eglise Catholique', comprenant parmi ses auteurs cinq cardinaux. Dans les deux cas les réponses aux propositions de Kasper étaient académiquement sérieuses et respecteuses dans le ton. Et toutefois, Kasper, répondant à ses détracteurs (surtout dans des interviews dans la presse) n'a pas su maintenir le débat au niveau du sérieux qu'il méritait, rejetant comme fondamentaliste doctrinaux et scripturaux ceux qui avaient repéré dans ses propositions de graves problèmes bibliques, patristiques, théologiques, canoniques et pastoraux.

Pendant le synode, le Cardinal Kasper a donné une conférence à Vienne dans laquelle il a situé sa propre position sur le mariage et la famille dans le cadre de sa compréhension de Vatican II comme un concile ouvrant une nouvelle ère dans la vie catholique, où toutes les vieilles vérités sont à présent re-examinées, voire reconsidérées.
On, se demande, ici aussi, quelles informations sont arrivées en Allemagne dans les dernières décennies. Les secteurs dynamiques du monde développé sont ceux qui ont vécu l'orthodoxie vibrante de l'enseignement de Jean-Paul II et de Benoît XVI; les secteurs en ruine du catholicisme européen - c'est à dire la plus grande partie du catholicisme de l'Europe occidentale - sont ceux qui se sont pliés aux vents du zeitgeist et ont falsifié les frontières doctrinales et morales de l'Eglise, imaginant que c'était «l'esprit du Vatican II». Mais Kasper était là sur la même ligne que le secrétaire général du synode Baldisseri, préconisant une falsification ultérieure des frontières, et le faisant d'une manière qui a paru à la majorité des pères synodaux (nonobstant la stratégie médiatique) en flagrante contradiction avec l'enseignement du Seigneur lui-même.

Il y a treize ans, le Cardinal Joachim Meisner, alors archevêque de Cologne, me confiait que la plus grande ressource du catholicisme allemand pour se reconstruir au 21ème siècle est le témoignage de ses martyrs du 20ème siècle. Le pouvoir spirituel de la résistance fondée sur des principes est une chose à laquelle les théologiens allemands, évêques, et théologiens-évêques (et leurs compagnons de route) feraient bien de réfléchir dans les mois précédents le synode de 2015. L'acquiescement, suivi de la reddition, suivis de la collaboration: voici la troublante séquence parcourue par une trop grande partie du Catholicisme Européen pendant la confrontation de l'Eglise avec les totalitarismes de la moitié du 20ème siècle en Allemagne et en Italie, et avec leurs alliés en France. Les martyrs choisirent une voie différente. La voie indiquée par leur témoignage contre-culturel mérite d'être prise en considération alors que le Catholicisme cherche à mettre en oeuvre la vision du Pape François d'une «Eglise en mission permanente» face au sécularisme agressif, avec son érosion du mariage et de la famille.

Le moment de l'Afrique.
-----
Sans surprise, les propositions poussées par les allemands et leurs alliés au synode de 2014 ont été présentés dans les grands médias comme courageuses, nouvelles et innovantes, alors qu'en réalité elles étaient plutôt périmées, résidus d'une vision de ce Catholicisme «progressiste» qui a manifestement échoué, selon tous critères évangéliques, en Europe et ailleurs. Ce qui a été nouveau au synode extraordinaire - et qui a contribué à le rendre «extraordinaire» dans le sens ordinaire du mot - c'est l'émergence du catholicisme africain comme facteur majeur dans l'évolution future du catholicisme mondial. Les pères synodaux africains ont été parmi les meneurs dans la contestation des propositions de Kasper, faisant résolument valoir que l'idée chrétienne de mariage a été dans leurs cultures une force libératrice, surtout pour les femmes. Ils ont aussi suggéré, implicitement voire explicitement, que les évêques représentants d'églises locales mourantes ne devraient pas exporter la décadence occidentale dans les pays du Sud, où le catholicisme grandit exponentiellement par la prédication des vérités de l'Evangile dans la compassion mais sans compromission.

Cela a demandé du courage, non seulement car les africains étaient exposés aux accusations d'être culturellement arriérés (ou, comme l'a affirmé peu élégamment le Cardinal Kasper, d'être la proie des «tabous»). Il a fallu du courage aussi parce qu'une bonne partie de l'Eglise en Afrique est financée par les agences allemandes catholiques de développement, qui sont extraordinairement riches et très généreuses, grâce à la Kirchensteuer. Mais il a semblé à des hommes comme le Cardinal Wilfrid Fox Napier, archevêque franciscain de Durban (Afrique du Sud), longtemps considéré comme aligné avec la gauche catholique, qu'il se jouait quelque chose d'exceptionnellement important dans la discussion synodale au sujet du mariage et de la pastorale des personnes ayant des tendances homosexuelles. Ainsi Napier et d'autres ont cru le moment venu de tirer la sonnette d'alarme, ce que Napier fit avec une remarquable dénonciation de la relation intérimaire du synode (et sa fuite dans la presse) - un appel courageux autorisant les autres à exprimer ce qu'ils pensaient vraiment des manipulations de la discussion synodale, ouvertement révélées dans la relation.

Une procédure manipulée (The Process)
---
Tout au long du synode, les inquiétudes vis à vis des manipulations du processus synodal de la part du secrétaire général, Cardinal Baldisseri, allié avec l'Archevêque Bruno Forte, le théologien italien, secrétaire spécial du synode, étaient systématiquement rejetées comme alarmisme complotiste de la part des conservateurs, même par des Vaticanistes normalement raisonnables (et il y en a quelques-uns) [ndt: ce ne peut-être ni Magister, ni Tosatti, ni Rusconi... peut-être un anglophone que nous connaissons bien]. En tout cas, ce n'était pas l'histoire racontée par de nombreux pères synodaux, et ce furent évidemment leurs frustrations concernant la procédure qui conduisirent à l'explosion du 16 octobre et à la publication ultérieure des relations des débats des groupes de discussion sur base linguistique (circoli minori), qui ont révélé l'âpre et large désaccord avec la ligne du rapport intérimaire préparé par Forte.

Qu'est-ce qui a fait défaut dans la procédure? Plusieurs choses.
Le Pape avait demandé, justement, un débat ouvert et libre, ce qui n'était pas tout à fait caractéristique de l'expérience catholique des synodes depuis l'établissement de cette institution lors de Vatican II. Mais le secrétariat du synode a refusé de publier les textes des interventions des pères synodaux de la première semaine quand les pères, les auditeurs et les observateurs parlaient à toute l'assemblée. Les résumés des débats publiés par le Service de presse du Vatican (vraisemblablement sous la direction du secrétariat du synode) et plus d'une des conférence de presse quotidiennes ont été accusés d'être des exercices de propagande ("spin") plutôt que de fidèles restitutions de la variété des discussions. Ceux qui ont suggéré qu'une communication plus honnête était souhaitable ont été rembarrés, et plus d'un père du Synode en a conclu que la manipulation de la procédure était «manifeste et incompétente» dans le sens qu'elle était autant évidente que, pour ainsi dire, stupidement évidente.

Mais c'est la relation de mi-synode de Forte qui a durci la postion (put iron into the spines) des pères synodaux. Cette relation était supposée donner l'image des débats de la première semaine du Synode, devant être ultérieurement examinés et perfectionnés par les groupes linguistiques pendant la deuxième semaine. Mais Forte l'a rédigée comme un projet de document final du synode, mettant en évidence des sujets qui devaient être du plus grand intérêt pour les médias internationaux qui attendent la grande reddition catholique à la révolution sexuelle - est s'est retrouvé, lui et le rapport intérimaire, désavoués en substance par le Cardinal Peter Erdö, rapporteur du synode, lors de la conférence de presse où le rapport intérimaire a été présenté.

Au début des travaux des groupes linguistiques, un des membres a demandé aux autres, évoquant les termes de la relation de mi-synode de Forte sur la pastorale envers les personnes de même sexe: «Avez-vous entendu tout cela la semaine dernière?». Il a obtenu une réponse unanimement négative. L'adoption, dans le rapport intérimaire, du langage de l'insurrection gay a été objet d'autres critiques, les pères synodaux insistant que l'Eglise catholique ne doit pas décrire les êtres humains par leurs désirs, quels qu'ils soient, et que cela contredit la riche anthropologie catholique de la personne humaine, énoncée plus récemment par Jean-Paul II dans son encyclique inaugurale Redemptor Hominis, et dans sa théologie du corps.

Une absence remarquable
-----
Ce qui à son tour a soulevé une autre question sur la procédure synodale: Pourquoi aucun membre de l'Institut Pontifical Jean-Paul II sur le Mariage et la Famille n'a-t-il été invité comme auditeur ou observateur du synode?
L'Institut dépend de la propre Université Romaine du Pape, celle du Latran; elle a des facultés partout dans le monde; Stanislaw Grygiel, fondateur de l'Institut, et sa femme Ludmilla, ont produit de magnifiques études sur l'idée chrétienne de mariage dans une conférence européenne des questions familiales peu avant le synode. Mais les Grygiel n'ont pas été invités au synode; l'éminent théologien moral qui est l'actuel directeur de l'Institut de Rome, Mgr Livio Melina, n'a lui non plus pas été invité. Vue l'organisation du Vatican, ce n'étaient pas des omissions accidentelles. Il s'agit probablement d'une décision délibérée du secrétaire général du synode, le Cardinal Baldisseri, qui n'avait sans doute pas intérêt à voir la démarche et les propositions de Kasper contestées par le magistère de Jean-Paul II, même si ce magistère avait prouvé être la meilleure réponse à la révolution sexuelle et aux graves dégats collatéraux que ce bouleversement avait produit sur le mariage et la famille.

Cette erreur peut être facilement réparée dans la préparation du synode ordinaire de 2015. Les délibérations de cette plus large assemblée (qui comprendra un plus grand nombre d'évêques que le synode extraordinaire) pourraient grandement bénéficier de l'expérience de la faculté de l'Institut Jean-Paul II.
Car ils ont fait progresser (eux et d'autres, également non invités au synode de 2014) une anthropologie catholique intégrale répondant à l'assaut de la révolution sexuelle, non pas en y consentant, mais en invitant au débat avec ceux qui prennent la sexualité humaine le plus au sérieux: ceux qui voient dans l'amour marital fidèle et fertile une image de la vie intérieure de la Trinité, ou ceux qui réduisent le sexe à un sport de contact?

* * *

A suivre...

  benoit-et-moi.fr, tous droits réservés