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Saint Valentin

Un rappel historique - avec un jour d'avance - bien utile alors que l'on assiste à la re-paganisation massive d'une fête chrétienne. Reprise

Cela fait une semaine qu'on nous tympanise avec la "Saint" Valentin - afin que les citoyens-consommateurs zélés que nous sommes censés être n'oublient pas leur devoir de faire tourner la machine économique en ... CON-SOM-MANT.
Dans les grands magasins, les librairies, les parfumeries, les pâtisseries, les marchands de chocolat, les boutiques de lingerie (qui vendent pour l'occasion de la "lingerie coquine"), impossible d'y échapper.
Cette fête devenue tapageusement païenne et lourdement érotisée - au point que c'est le journal Libération qui s'en fait désormais le chantre - est l'une des rares occasions (avec la saint Nicolas, et pour des raisons voisines) où pour une fête du calendrier chrétien, on a la droit d'utiliser le mot "Saint" (serait-ce un gros mot?).
Désormais (et cela s'est fait sournoisement, petit à petit) l'éphéméride qui conclut les différents bulletins météo quotidiens à la télévision annonce en effet "aujourd'hui, vous fêtez/vous embrassez les ...".
Occasion donc d'un petit rappel historique. C'est un article de Riccardo Cascioli, sur la Bussola, que j'avais traduit le 14 février 2012.

Saint Valentin

www.labussolaquotidiana.it
(ma traduction)
Riccardo Cascioli
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Aujourd'hui, Saint Valentin, c'est pour tout le monde la fête des amoureux, où le saint est en réalité juste un prétexte pour parler d'autre chose. Et la chose est évidente et gênante, au point d'avoir conduit de nombreux croyants à considérer Valentin comme un personnage plus légendaire qu'historique, ou du moins un «petit saint», d'autant plus que la liturgie prévoit aujourd'hui la fête des saints Cyrille et Méthode, que le pape Jean-Paul II a élevés en 1980 comme co-Patrons de l'Europe.

Mais Valentin fut un vrai saint, un évêque et un martyr, dont l'histoire vaut la peine d'être connue, au moins brièvement, de sorte qu'au moins une fois la Saint-Valentin devienne un prétexte pour en apprendre davantage sur le saint.

Donc, Valentin vécut entre les deuxième et troisième siècles à Terni, à l'époque Interamna dei Naharti, ville dont il devint évêque vers 200 et dont il est encore le patron. On sait de lui qu'il était un homme instruit, mais aussi d'une grande foi. Et sa renommée parmi ses contemporains se répandit également en raison des guérisons qu'il procurait; il n'est pas surprenant qu'il soit le patron, non seulement des amoureux, mais aussi des personnes atteintes d'épilepsie.
Dans sa biographie, ce qui est frappant, c'est la ferme conscience que la maladie est essentiellement un instrument pour reconnaître la souveraineté de Dieu, et se convertir. La conversion n'est pas le «paiement» pour la guérison, Valentin ne rançonne ni ne baptise les gens en échange d'un miracle: à ceux qu'il rencontre, il réclame la conversion comme une condition pour la guérison tout simplement parce qu'il sait que la foi seule sauve et guérit, comme du reste, Jésus l'a démontré à plusieurs reprises dans l'Evangile: "Va, ta foi t'a guéri".

Ceci est clairement démontré dans l'épisode de la guérison du fils d'un orateur romain, Craton, qui fut par la suite la cause fondamentale de son martyre. Craton était désespérée parce que son fils se mourait d'une maladie mystérieuse, et ayant entendu parler de l'évêque Valentin, il l'avait fait venir à Rome. Valentin resta dans sa maison, mais ne fit rien jusqu'à ce qu'après une discussion longue et animée, il reconnût dans le coeur de Craton cette lueur du coeur qui s'ouvre à la foi. C'est seulement alors que la guérison devint possible: Craton se convertit avec toute sa famille, et, en voyant ce qui s'était passé, se convertirent aussi trois amis athéniens du jeune homme - Proculus, Ephèbe et Apollonius - venus à Rome pour étudier le latin avec Craton. La renommée de Valentin se répandit à Rome et ce «mouvement» inattendu dans la ville provoqua l'arrestation de Valentin - d'autant plus que parmi les convertis figurait le fils du préfet de Rome - qui fut une première fois flagellé. Puis, sous Aurélien, et par décision du Préfet Placidus Furius, pour éviter les émeutes populaires, il fut emmené par les soldats pendant la nuit, transporté hors de Rome sur la Via Flaminia (reliant Rome à Terni) et décapité le 14 février 273.

Les trois jeunes Grecs qui se trouvaient dans la maison de Craton prirent son corps et le transportèrent à Terni, l'ensevelissant dans un cimetière en dehors de la ville, où se trouve aujourd'hui la basilique dédiée au Saint, dans laquelle ses restes sont conservés (tous trois furent par la suite martyrisés pour avoir dérobé sa dépouille).

Le culte de Valentin se répandit assez vite, à cause de ses vertus thaumartuges, mais pas seulement. Témoin, la rencontre entre le roi Liutprand et le pape Zacharie en 742, dans laquelle le Souverain lombard cède au Pape plusieurs villes d'Ombrie et du Latium, épisode qui est généralement considéré comme le début des Etats pontificaux. Le Pape sortit de Rome à la rencontre de Liutprand, qui menait alors une campagne militaire victorieuse en Italie, menaçant même la papauté. Le roi Lombard se trouvant à Spoleto, il voulut attendre le Pape à Terni, en face de la Basilique de Saint-Valentin, soit pour les vertus thaumaturges qui étaient reconnues au Saint, soit parce que, dès les origines, il était invoqué comme gardien des pactes. Les chroniques racontent qu'«après s'être tous les deux assis dans l'église du Bienheureux Valentin ..... touché par les saintes paroles de persuasion de celui-ci [le pape Zacharie], le roi lombard rendit au Pontife la ville qu'il avait prise aux Romains».

Et la question de l'amour?
Selon la tradition, c'est le pape Gélase Ier, à la fin du Ve siècle, qui «promut» Saint Valentin patron des amoureux, en remplacement des antiques fêtes païennes dédiées à Lupercus, dieu de la fertilité, qui se déroulaientt selon des rites "hideux et licencieux". C'est justement sa réputation de gardien des pactes qui rendait facile l'association avec la protection du mariage.
De là nacquirent de nombreuses légendes sur les miracles liés aux amoureux, mais à Terni, on conserve toujours le sarcophage de Serapia et Sabino, deux jeunes gens que le Saint unit pour l'éternité.

Quoi qu'il en soit, la célébration du 14 Février fut l'un des nombreux cas de christianisation d'une fête païenne, exactement le contraire de ce que nous vivons aujourd'hui, où l'on assiste au contraire à la "re-paganisation" d'une fête chrétienne. Se lamenter à présent contre l'industrie de la confiserie et le consumérisme ne sert à rien; la seule chose qui peut changer le cours de l'histoire - personnelle et du monde - est notre conversion. Comme l'enseignait Saint Valentin.

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