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Les erreurs d'interprétation du Concile

Il faudrait un Syllabus, dit Mgr Athanasius Schneider, dans une interview au blog italien <La Fede Quotidiana>. Traduction de Anna

Mgr Schneider: les documents du Concile ont été déformés

www.lafedequotidiana.it
Michele M. Ippolito
11 juin 2015
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Mgr. Athanasius Schneider, secrétaire Général de la Conférence Épiscopale du Kazakhstan, est évêque auxiliaire d'Astana (Kazakhstan) et évêque titulaire de Celerina. Il est né Anton Schneider le 7 avril 1961 à Tormok, dans l'ancienne Union Soviétique, et a pris le nom religieux d'Athanasius après son entrée dans l'ordre des chanoines réguliers de la Sainte-Croix de Coïmbre. Spécialiste et professeur de patristique, depuis quelques années Mgr. Schneider fait entendre sa voix prophétique afin de réveiller l'Occident de la torpeur spirituelle où elle vit actuellement, en raison surtout de fausses interprétations des enseignements pérennes de l'Église et de la théologie catholique. Il a donné une interview exclusive pour l'Italie à lafedecattolica.it.

Mgr Schneider, dans votre livre "Dominus est - Riflessioni di un Vescovo dell’Asia Centrale sulla sacra Comunione (Réflexions d'un Évêque d'Asie Centrale sur la Sainte Communion)", publié par la Libreria Editrice Vaticana, vous avez encouragé l'Église à soutenir la pratique de la Sainte Communion sur la langue et à genoux. Voulez-vous nous expliquer brièvement les motivations théologiques et historiques de cette modalité.

Les motivations théologiques s'appuient sur les vérités de la foi en la présence vraie, réelle et substantielle du Corps et du Sang du Christ sous les espèces du pain et du vin, et cette présence contient aussi la divinité du Christ à cause de l'union hypostatique, c'est à dire qu'elle contient totum et integrum Christum, comme l'a affirmé le Concile de Trente. Il y a également la vérité que le Christ est présent dans chaque partie ou fragment du pain. Il y a ensuite la vérité de la transsubstantiation. Toutes ces vérités ont été définies dogmatiquement par le Magistère de l'Église. Si nous prenons au sérieux la vérité en laquelle nous croyons, il nous faut montrer notre foi par notre comportement extérieur. La foi doit se refléter dans les œuvres concrètes, la théorie et la pratique, la foi et le culte, la lex credendi et la lex orandi doivent être en concordance réciproque. Autrement, notre foi devient boiteuse et, avec le temps, elle prendra la forme d'une foi gnostique. Finalement, la foi concrète en la présence réelle, la foi en la présence de la divinité, la foi en la présence du Christ dans les moindres fragments, la foi en la transsubstantiation disparaît. Il y a une loi inexorable dans la psychologie humaine: les gestes répétés qui nous sont devenus habituels, finissent, avec le temps, par déterminer la façon de penser. Par conséquent, si je traite ce qui est le plus sacré, le plus sublime, ce qui est le mystère par excellence, ce qui est Dieu tout-puissant (totus et integer Christus) avec presque le même geste que je prends un aliment ordinaire et d'une façon dépourvue d'un geste sans équivoque d'adoration, je ne contredis pas seulement la profondeur de ma foi, mais je commets objectivement un acte d'informalité, indigne de la majesté infinie du Christ (même si cette majesté est humblement cachée sous les espèces du pain). Ce danger réel représente une vraie motivation pastorale. Deux autres aspects d'importance éminemment pastorale apparaissent ici: la perte de plus en plus fréquente des fragments eucharistiques qui tombent au sol et sont ensuite piétinés; le vol croissant des hosties sacrées. Tout cela se produit à cause du geste si incertain, banal et qui n'a jamais existé dans l'Église, à savoir l'usage actuel de distribuer la Sainte Communion dans la main (l'usage dans les premiers siècles était très différent).

En théologie, l'anthropocentrisme semble avancer au détriment du christocentrisme. Qu'est-ce que cela va impliquer dans l'avenir prochain de l'Église?

L'anthropocentrisme comporte en fin de compte:
> le tarissement et la perte de la foi surnaturelle
> l'élimination de la grâce Divine et des moyens de la grâce
> l'élimination du sens surnaturel des sacrements, leur donnant une signification purement sociologique
> l'élimination de la prière personnelle et des œuvres concrètes de pénitence et d'ascèse
> l'élimination, au cours du temps, de l'adoration de Dieu, c'est à dire de la Très Sainte Trinité et favorise l'adoration de l'homme et de la terre (du climat, de l'océan, etc.)
>la déclaration pratique et aussi théorique que cette terre est le jardin du paradis, c'est à dire le paradis sur terre (théorie des Communistes)
>l'apostasie.
L'anthropocentrisme impliquera une lâcheté effrayante face au monde et la collaboration des fidèles et des clercs avec les idéologies anti-chrétiennes.
Se réaliseront alors ces paroles de notre Divin Maître et de l'Apôtre Saint Paul: "Quand les hommes diront: 'Paix et sûreté!', c'est alors qu'une ruine soudaine fondra sur eux" (1 Tess. 5,3). "Séparés de moi, vous ne pouvez rien faire" (Jn, 15,5) et "Quand le Fils de l'Homme viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre?" (Luc, 18,8).

Dans une conférence aussi belle que documentée, vous avez récemment parlé du Concile Vatican II et de ses documents. Pouvez-vous nous expliquer ce qui n'a pas encore été réalisé (à la lumière) des documents conciliaires et quelles sont les interprétations fausses et dangereuses que quelques théologiens donnent du dernier concile?

La contribution la plus originale et spécifique du Concile Vatican II consiste en l'appel universel à la sainteté dans le chapitre 5 de Lumen Gentium et dans l'appel universel missionnaire à l'évangélisation (le décret Ad gentes), qui se manifeste dans la collaboration des fidèles laïques avec les pasteurs de l'Église, témoignant et défendant la pureté et l'intégrité de la foi catholique dans le monde actuel jusqu'au martyre si nécessaire (Décret Apostolicam actuositatem). L'affirmation conciliaire suivante reste une des plus belles, nécessaires et actuelles: "En outre, les chrétiens doivent aller avec sagesse au-devant de ceux qui sont au-dehors, et s’efforcer de répandre la lumière de vie en toute assurance et courage apostolique, jusqu’à l’effusion de leur sang" (Déclaration Dignitatis humanae, n.14). Ces contributions, les plus essentielles, du dernier Concile ont été malheureusement brouillées et étouffées dans une large mesure par ceux qui ont occupé les chaires de théologie, c'est-à-dire les nouveaux scribes, et malheureusement aussi par de nombreux représentants du clergé et même du haut clergé. Des interprétations complètement arbitraires ont été diffusées, ainsi que des interprétations erronées de quelques expressions non suffisamment claires ou ambiguës de quelques textes conciliaires. Des mythes conciliaires ont été créés. Cette situation s'explique, d'une part, par le caractère pastoral et non définitif d'une partie importante des textes conciliaires, et, de l'autre, par l'absence d'une réfutation détaillée et systématique de ces interprétations erronées de la part du Magistère. Il faut un syllabus des erreurs d'interprétations conciliaires.

Croyez-vous que l'idée de changements en matière de morale matrimoniale soit un danger réel qui peut se réaliser à l'occasion du prochain synode des évêques à Rome ou bien n'est-il qu'un danger prophétisé par les médias anti-chrétiens?


Quelques faits ont démontré que dans le milieu ecclésiastique lui-même, il existe un danger de changement de la compréhension et de l'application pratique des vérités divines en matière de mariage et de sexualité humaine. Des exemples ont été le déroulement du synode du mois d'octobre 2014 avec des moments de manipulation au sein même du synode, la Relatio post disceptationem, le nouveau questionnaire envoyé aux diocèses, les affirmations publiques du Secrétaire du Synode, de quelques cardinaux, de représentants de quelques conférences épiscopales. Ces ecclésiastiques utilisent, étonnamment, le même langage et la même façon de raisonner que les médias anti-chrétiens. Ils ont, sur ces thèmes, la forma mentis du monde et non celle de l'Évangile. L'impression subsiste que dans les rangs mêmes du clergé il y a des collaborateurs de la dictature médiatique et politique de la nouvelle idéologie anti-chrétienne.

Il semble que la société s'homosexualise de plus en plus et, récemment, en Irlande, les mariages gay ont été reconnus. Quels seront les dangers pour l'Église en ce domaine?


Un des caractères essentiels de l'Église est le témoignage et, si nécessaire, le martyre de la vérité. Jésus a solennellement confessé face aux puissants de son époque: "Je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité" (Jn 18,37). Et ceci demeure toujours la mission de l'Église et de tout chrétien. Avoir peur, face à l'arrogance idéologique du monde, serait une contradiction à la mission essentielle de l'Église et des chrétiens. Les paroles de Jésus par lesquelles il encourageait l'Apôtre Paul au début de la prédication de l'Évangile, sont adressées à nous aussi aujourd'hui, en premier lieu à chaque évêque et ensuite aussi à chaque fidèle "Sois sans crainte, mais parle et ne te tais point, parce que je suis avec toi" (Actes 18,9). Et ces paroles aussi de Saint Pierre, dans sa Première Lettre, c'est à dire dans la première encyclique papale, sont plus que jamais actuelles: "Et qui pourra vous faire du mai, si vous êtes appliqués à faire le bien? Que si pourtant vous souffrez pour la justice, heureux êtes-vous! Ne craignez point leurs menaces et ne vous laissez point troubler; mais sanctifiez dans vos cœurs le Seigneur, le Christ, étant toujours prêts à répondre, mais avec douceur et respect, à quiconque vous demande raison de l'espérance qui est en vous; ayant une bonne conscience, afin que, sur le point même où l'on vous calomnie, vous couvriez de confusion ceux qui diffament votre bonne conduite dans le Christ. En effet, il vaut mieux souffrir, si Dieu le veut ainsi, en faisant le bien, qu'en faisant le mal." (1 Pierre 3, 13-17).

Excellence, dans quel sens est-il possible de dialoguer chrétiennement avec les représentants des autres religions et de l'Islam en particulier?

Le commandement de l'amour vers le prochain est valable pour tous et il n'y a là pas d'exception. Nous devons aimer même nos ennemis et tous ceux qui nous sont hostiles. Nous devons aimer tous ceux qui sont dans l'erreur de la foi et de la morale. En fait, nous devons spécialement avoir miséricorde envers ces personnes, afin qu'ils soient libérés par Dieu de l'erreur et du péché, puisque l'erreur et le péché sont la plus grande misère et malheur de l'homme. Nous devons et pouvons donc dialoguer avec tous, et spécialement avec les musulmans, suivant la méthode de Saint Paul et de tous les Saints: "Confessant la vérité dans la charité (veritatem facientes in caritate)" (Eph 4,15).

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