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Rire pour ne pas pleurer

C’est ce qu’inspire la situation de l’Eglise sous le pape François à un prêtre blogueur italien, sur son blog <La scure di Elia> (*) . Traduction de Anna

(*) La hache d'Elie

>>> Ci-contre: fragment d'un bas-relief d'Antoine Coysevox (1640-1720) "La religion terrassant l'hérésie"

Rire pour ne pas pleurer

lascuredielia.blogspot.it
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Je dois le confesser: je pleure souvent sur l'actuelle situation de l'Église, dont je suis orphelin de père et de mère. Dans cette lutte qui devient de plus en plus âpre, je n'ai plus le soutien de l'autorité bénéfique d'un Pasteur universel à la hauteur de sa mission, ni le confort de me sentir en sécurité au sein de cette sainte Mère Église dont la direction, au nom de la miséricorde vers ceux qui n'en veulent rien savoir, est devenue marâtre avec ceux qui lui sont fidèles. Mais on ne peut pas toujours pleurer. Même si c'étaient des larmes saintes qui préparent l'âme aux consolations célestes, notre fragile psyché, blessée par le péché originel, a besoin de se remonter de temps en temps avec ces moyens humains que le bon Dieu a voulu accorder à notre espèce. Parmi ceux-ci il y a bien sûr l'humour, dans lequel il y a un secret pour résister aux pires épreuves de l'existence - secret précieux, surtout lorsque l'épreuve se révèle tout à fait inédite.

Peut-être faudrait-il lui en être reconnaissant, mais il ne se passe de jour sans que notre cher farceur de la pampa, pour extorquer les applaudissements du Zeitgeist mondain, ne nous donne des raisons pour rire ou pleurer, selon l'état d'âme du moment. Une des dernières qu'il a sorties (bien que ce ne soit que du rabâchage), c’est qu'il y a des personnes tellement bonnes qui, par la faute des autres, sont contraintes de commettre des délits car elles ne peuvent pas agir autrement (1); il suffirait de leur donner un sourire ou une caresse pour qu'elles évitent de le faire. Imaginez par exemple un drogué qui vous menace avec un couteau pour vous voler, ou bien un mafieux qui tire à l'aveugle sur un de ses semblables, ou encore un adepte du nouveau calife qui coupe les têtes à répétition, et essayez de lui donner une caresse… Ému, il vous embrassera et redeviendra un ange (n'essayez pas toutefois de le convertir, ce ne serait que du prosélytisme étroit; encore moins de lui dire que le péché grave, ce n'est permis à personne et en aucune circonstance, ce ne serait que du moralisme sinistre).

Selon la vulgate des vaticanistes stipendiés, lors du conclave de 2005 l'argentin aurait été le favori d'un autre cardinal jésuite, lequel se battait depuis longtemps pour un "renouveau" radical dans l'Église, mais qui était trop âgé et malade pour en prendre les commandes. Rien de plus faux: il s’avère au contraire, par des témoignages directs, que, lorsqu'il fut interpellé au sujet de son confrère comme nouveau candidat, le célèbre bibliste ait rejeté l'hypothèse sans cacher son mépris: "Il est trop ignorant!". L'arrogance intellectuelle, marque de l'élite jésuite "radical-chic" (souvent traduit en français par "gauche-caviar"), préféra que devînt pape l'ennemi juré de toujours, plutôt qu'un personnage de culture insuffisante, misant de toute façon sur une future stratégie de boycottage systématique…
Une fois mort le paladin des non croyants - suicide paraît-il, et donc en odeur de damnation éternelle - au conclave suivant, l'opposition du groupe dont il était à la tête ne se manifesta évidemment plus; la suite tous la connaissent. L'évaluation du niveau de culture de l'élu est par ailleurs le seul élément sur lequel nous pouvons être en syntonie avec le défunt, outre, naturellement, le choix, bien que honni, du dernier véritable successeur de Pierre.

L'ignorance représente en général une excuse, sur le plan moral, sauf quand il s'agit d'ignorance crasse; la contestation "cultivée" et obstinée de la vérité révélée est par ailleurs un péché bien plus grave. Par ignorance, on peut de toute façon dire les pires bêtises sans même se rendre compte qu'elles relèvent des anathématismes - ces propositions limpides et libératrices qui commencent par si quis dixerit et se terminent par anathema sit (2) - des Conciles de Trente et Vatican I, et qu'un pontife devrait au moins avoir entendu nommer, au moins dans sa jeunesse. Que les affirmations incriminées ne relèvent pas du magistère officiel ou n'expriment éventuellement que des opinions personnelles, cela ne change rien: si quis dixerit, «il suffit qu'il les ait prononcées». Si en plus elles ne sont même pas rétractées, il n'y a plus rien à faire, l'excommunication est, dans ces cas, automatique. On n'a plus envie de rire ici, car la situation devient tragique.

Un pape qui tombe dans l'hérésie cesse de l'être ipso facto, nous assure Saint Robert Bellarmin (cf. benoit-et-moi.fr/2015-I-1/..un-pape-peut-il-etre-heretique). Si elle est claire au niveau théologique, la question devient bien plus délicate sur le plan canonique: il faudrait un concile qui déclarât formellement l'hérésie et demandât au pape d'abjurer ou de démissionner - chose impensable, dans la situation actuelle.
Mais comment a-t-on pu arriver à une telle dégénérescence?
La réponse est très simple: grâce à un concile défini comme pastoral (sans que d'ailleurs personne, en cinquante ans, nous ait expliqué ce que cela signifie exactement), mais qui en réalité a provoqué un bouleversement radical des croyances communes concernant les points les plus importants de la foi, ceux pour lesquels il vaut ou ne vaut pas la peine de croire et d'appartenir à l'Église.
C'est une réalité incontestable: l'herméneutique de la rupture a souvent son fondement solide en des textes constellés d'affirmations ambiguës, imprécises ou décidément problématiques du point de vue doctrinal, pour ne pas dire de celles qui, dès qu'un principe a été énoncé de façon cristalline, le démentent ensuite avec des hypothèses, réserves et considérations contraires, ou avec ces "exceptions" vagues et non bien définies qui sapent en pratique les normes à peine énoncées… Il faut avouer que les commissions, contrôlées par des évêques et des théologiens progressistes, ont travaillé avec grande finesse afin d'obtenir le consensus de l'assise sans montrer leurs réels objectifs.

Tout le monde sait que, pour forcer une porte ou une fenêtre, il suffit que le voleur trouve une fissure suffisamment large pour y insérer un pied de biche; dès qu'il a pénétré dans la maison, elle est à sa merci. Une fissure minuscule peut provoquer l'effondrement d'une digue puissante, si forte est la pression de l'eau; après, c'est le sauve qui peut. Les soi-disant "ouvertures" du Vatican II, de brèches se sont transformées en gouffres abyssaux pour la foi et le salut des âmes…
Padre Pio parlait des réunions qui ont lieu en Enfer pour concocter des plans destructeurs de l'Église et demandait à Dieu de mourir avant d'en voir la débâcle; il fut satisfait juste à temps, mais la casse avait déjà commencé. Il prophétisa l'ère de la fausse miséricorde (celle qui au lieu de libérer le pécheur l'enferme dans son péché). Aujourd'hui, dans l'"Église renouvelée", sa figure est devenue une idole, pour beaucoup qui ne vont jamais à l'église et à se confesser n'y pensent même pas. Malgré les nombreuses tentatives, le diable n'arriva pas à le neutraliser pendant qu'il était vivant; y réussirait-il aujourd’hui? La vengeance est en effet un plat qui se mange froid, même après un demi-siècle. Le cornu sait toutefois qu'il lui reste peu de temps; Padre Pio le savait lui aussi. Rira bien qui rira le dernier.

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NDT

(1) Cf. visnews-fr.blogspot.fr/2015/03/visite-la-paroisse-romaine-de-tor-bella.html

(2) Cette sentence terminaient les canons des conciles ; elle consistait en un texte bref résumant une opinion avant d'en prononcer la condamnation par la formule anathema sit : « Si quelqu'un dit [...] qu'il soit anathème. » Ainsi était déclarée hérétique une position théologique et se trouvait définie de manière négative la foi. Au Moyen Âge, l'anathème comportait l'attribution d'une peine, plus grave que l'excommunication, qui était toujours temporaire. Il n'était levé que par les plus hautes autorités ecclésiastiques. Le second concile du Vatican a renoncé à recourir à l'anathème.
(cf. ww.universalis.fr/encyclopedie/anatheme/ )





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