Hommage à la musique européenne...
(façonnée par la foi chrétienne) Dans le magnifique discours prononcé hier par Benoît XVI, il faut croire que ce passage a écorché les oreilles de certains.
>>> Le retour de Benoît XVI (le discours de Benoît XVI)
En traduisant le magnifique discours de remerciement prononcé hier par Benoît XVI à l'occasion de la remise du double doctorat honoris causa, je me suis gardée de faire le moindre commentaire, et abstenue d'agrémenter le texte de soulignements typographiques (comme je le fais par ailleurs souvent), par simple respect pour l'auteur. Rien de cela n'était nécessaire, il suffisait de lire... et de savourer. Même si, bien sûr, certains passages me touchaient particulièrement, comme par exemple ce paragraphe extraordinaire où il salue la spécificité de la culture occidentale (façonnée par la foi chrétienne) à travers une musique sans équivalent dans aucune autre culture...
Cela ne m'empêche pas de rechercher d'éventuels commentaires d'autres personnes, s'ils en valent la peine - et j'exclus d'emblée ceux qui se croient obligés d'insérer le péan courtisan de rigueur évoquant la bonne relation entre les "deux papes" et leur rencontre à Mater Ecclesiae avant le départ du Pape émérite pour Castelgandolfo. Quel rapport avec le thème "Musique et Liturgie" traité par Benoît XVI? Aucun, évidemment. Raison de plus pour ignorer même des louanges, qui ne viennent pas du coeur (*).
Paremi les toutes premières réactions, j'apprécie particulièrement celle d'Antonio Socci, sur sa page Facebook:
Il cite précisément le passage que je viens d'évoquer:
Dans le cadre des cultures et des religions les plus variées, il existe une grande littérature, une grande architecture, une grande peinture et de grandes sculptures. Et partout, il y a aussi de la musique. Et pourtant, dans aucune culture il n'existe une musique d'une grandeur comparable à celle née dans le contexte de la foi chrétienne: de Palestrina à Bach, Handel, jusqu'à Mozart, Beethoven et Bruckner. La musique occidentale est quelque chose d'unique, qui n'a pas d'égal dans d'autres cultures. Cela devrait nous faire réfléchir.
Bien sûr, la musique occidentale va bien au-delà du domaine de la religion et de l'Église. Et pourtant, elle trouve toujours sa source la plus profonde de la liturgie dans la rencontre avec Dieu. Chez Bach, pour lequel la gloire de Dieu est le but ultime de toute la musique, cela est tout à fait évident. La réponse grande et pure de la musique occidentale s'est développée dans la rencontre avec ce Dieu qui, dans la liturgie, se rend présent pour nous dans le Christ Jésus. Cette musique, pour moi, est une démonstration de la vérité du christianisme. Là où se développe une telle réponse, s'est réalisée la rencontre avec la vérité, avec le vrai créateur du monde. Pour cette raison, la grande musique sacrée est une réalité de rang théologique et de signification permanente pour la foi de toute la chrétienté, même s'il n'est pas du tout nécessaire qu'elle soit exécutée toujours et partout. D'autre part, cependant, il est également clair qu'elle ne peut pas disparaître de la liturgie et que sa présence peut être une manière tout à fait spéciale de participation à la célébration sacrée, au mystère de la foi.
Et il ajoute ce commentaire, sous le titre (qu'il faut lire évidemment à travers les thèses exposées par l'auteur dans son livre "Non è Francesco")
GRANDISSIME BENOÎT XVI SUR LA MUSIQUE ET LE CHRISTIANISME. AUJOURD'HUI, UN PAPE DANS LA RÉSIDENCE DES PAPES A REÇU DEUX DIPLÔMES HONORIS CAUSA:
En remettant les dipômes au pape émérite, le cardinal Dziwisz (ex-secrétaire de jean Paul II et aujourd'hui archevêque de Cracovie) avec une joie visible, a dit:
«L'acceptation, de manière exceptionnelle, de cette distinction, nous la considérons comme un signe de l'estime que Votre Sainteté a toujours nourrie pour saint Jean Paul II. Lui-même personnellement, le Pape saint, fut toujours plein de gratitude pour son plus proche collaborateur, le Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Nous sommes certains qu'aujourd'hui, il nous regarde de là-haut, et qu'il se réjouit de notre rencontre».
(*) Dans son compte-rendu, le vaticaniste de la Croix croit bon d'ajouter:
Ni européen, ni occidental, le pape François a mis en garde l’Église catholique contre un euro-centrisme historique. Dans son exhortation Evangelii gaudium, il estime que la foi chrétienne n’a pas à s’exprimer à travers les continents en imitant les seules « modalités adoptées par les peuples européens à un moment précis de leur histoire ». Son voyage en Amérique latine, la semaine prochaine, pourrait être une occasion de l’illustrer
C'est un clair désaveu de Benoît XVI à travers son successeur, et une remarque qu'on me permettra de juger aussi superflue que déplacée: François lui-même, par ses discours, ses rencontres et ses nominations, ne donne-t-il pas constamment la preuve qu'il fait passer le continent latino-américain au premier plan de ses préoccupations (bien plus que Benoît XVI ne l'a fait avec l'Europe), laissant ainsi penser que son "eglise des périphéries" règle en fait ses comptes avec l'Europe en général, et sa culture en particulier.