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L'exil du Père Samir Khalil Samir

Le célèbre jésuite islamologue égyptien n'est plus persona grata à l'Institut Pontifical Oriental de Rome... Il est donc rentré au Caire (4/11/2017)

>>> Ici une longue interview du Père Samir - très apprécié par Benoît XVI - par Giuseppe Rusconi, en avril 2017, à la veille du voyage de François en Egypte: L'Egypte du P. Samir Khalil Samir

L'exil du Père Samir Khalil Samir

Marco Tosatti
Stilum Curiae
4 novembre 2017
Ma traduction

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Deux jésuites. L'un qui est probablement l'un des plus grands experts chrétiens de l'islam, l'autre le Pape. Lorsque ce dernier a affirmé que l'idée de conquête était inhérente à la fois au Coran et à l'Évangile, le premier l'a corrigé: «Non. C'est une interprétation erronée. La différence est la suivante, traduite en raccourci: l'Evangile propose, l'Islam impose par la force, et ce n'est pas rien». Et il a ajouté: «Désinformer n'est pas chrétien. Certaines déclarations viennent de quelqu'un qui n'a à l'évidence pas compris l'Évangile ou qui ne connaît pas tout le Coran ou qui n'a pas de bons conseillers. Pour traiter ces questions, il faut être sérieux et avoir une compétence spécifique. Il ne suffit pas d'une interview» (article du 24 mai 2016: www.lafedequotidiana.it)

Comme par hasard, l'Institut Pontifical Oriental de Rome lui a fait savoir qu'on n'avait plus besoin de lui. Le Père Samir Khalil Samir est rentré définitivement au Caire. Dans quelques mois, il aura quatre-vingts ans, étant né en janvier 1938. Il a un cursus impressionnant: il a donné vie à Beyrouth à un institut de recherche, le CEDRAC (Centre de Documentation et de Recherches Arabes Chrétiennes), qui recueille le patrimoine littéraire arabo-chrétien du Proche-Orient. Il a enseigné au Centre de Sèvres à Paris (Faculté jésuite de théologie) et à l'Institut Maqasid de Beyrouth. Il a enseigné pendant 12 ans au PISAI (Pontificio Istituto di Studi Arabi e d'Islamistica, à Rome), pendant 5 ans à l'Institut Œcuménique de Bari, pendant 3 ans à l'Université Catholique de Milan et pendant 3 ans à l'Université de Turin, ainsi que dans diverses universités italiennes pour de courtes périodes. Il y a quelques mois encore, il était professeur à l'Institut Pontifical Oriental de Rome. Mais lorsqu'il a proposé un programme de cours pour la nouvelle année universitaire, on lui a dit que quelqu'un d'autre était déjà là pour le faire à sa place. A ce moment, il a compris qu'on n'avait plus besoin lui, pour une raison quelconque, et il a décidé de se consacrer à des projets qu'il mûrissait depuis un certain temps, et qu'il avait toujours reportés à cause d'engagements plus urgents.

Peut-être sa clarté, au sujet de l'islam et du dialogue, en a-t-elle contrarié certains dans l'Église d'aujourd'hui? C'est possible: n'oublions pas que l'Institut Pontifical Oriental est géré par les Jésuites, et que le nouveau cours, chez les Jésuites et dans l'Église, ne tolère aucune autre position que la position dominante et officielle.

Un premier grand projet du Père Samir, dans cette nouvelle phase de sa vie, est de recueillir et de réorganiser les fruits de décennies et de décennies de travail: soixante-quatre livres et plus de deux mille articles, souvent rédigés dans des langues différentes. Il est donc nécessaire de les trouver, de les vérifier, et de voir comment il est possible de collecter toute cette énorme quantité de matériel sur le christianisme du Proche-Orient dans une série de volumes ordonnés. Sans parler de la traduction d'articles, dont certains rédigés en anglais, français et arabe. L'idée originelle du Père Samir était de s'installer à Beyrouth, où sa créature, le Cedrac, une institution riche de plus de trente-cinq mille volumes, est hébergée à l'Université Saint Joseph. Mais à Beyrouth, il y a eu des problèmes, et le Père Samir a donc choisi, avec l'accord des jésuites égyptiens, de faire du Caire le centre de son activité et la nouvelle étape de son existence en tant que chercheur et acteur de premier plan de la vie de l'Église.

L'autre point auquel le Père Samir veut consacrer ses énergies dans sa nouvelle vie égyptienne est l'œcuménisme. En Egypte, il y a neuf millions de chrétiens coptes, une communauté qui a toujours témoigné par le sang de sa fidélité au Christ. Le Père Samir aimerait créer un Centre de recherche œcuménique avec la collaboration non seulement de l'Église orthodoxe copte, mais aussi de la Faculté évangélique du Caire et d'autres présences chrétiennes et catholiques. Un projet qui s'avérera certainement précieux dans cette nouvelle période difficile de relations interreligieuses avec un Islam souvent agressif et intolérant.