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13 octobre 1917-2017: relire Benoît XVI

Alors que l'on chercherait en vain dans l'agenda de François la moindre référence à cet anniversaire si important, Aldo Maria Valli nous invite à relire plusieurs textes du Pape émérite (15/10/2017)

>>> Voir aussi, du même auteur: Fatima et les paroles de trois papes
>>> Et aussi, dans ces pages: Dossier Fatima

>>> Ci-contre: Benoît XVI à Fatima le 13 mai 2010 (pages spéciales: benoit-et-moi.fr/2010-II)

13 octobre 1917- 13 octobre 2017.
Qui veille dans la nuit?

www.aldomariavalli.it
13 octobre 2017
Ma traduction

* * *

Aujourd'hui, 13 octobre 2017, centième anniversaire de la dernière apparition de Fatima et du "miracle du soleil", il vient à l'esprit les paroles que Benoît XVI prononça il y a sept ans, le 13 mai 2010 quand, dans l'homélie de la messe célébrée sur l'esplanade du sanctuaire de Fatima, il demanda:

«Qui veille, dans la nuit du doute ou de l’incertitude, avec le cœur éveillé en prière? Qui attend l’aube du jour nouveau, tenant allumée la flamme de la foi ?»

Puis Papa Ratzinger ajouta:

«Celui qui penserait que la mission prophétique de Fatima est achevée se tromperait. Revit ici ce dessein de Dieu qui interpelle l’humanité depuis ses origines : "Où est ton frère Abel ? (…) La voix du sang de ton frère crie de la terre vers moi!" (Gn 4, 9). L’homme a pu déclencher un cycle de mort et de terreur, mais il ne réussit pas l’interrompre… Dans l’Écriture Sainte, il apparaît fréquemment que Dieu est à la recherche des justes pour sauver la cité des hommes et il en est de même ici, à Fatima, quand Notre-Dame demande: "Voulez-vous vous offrir à Dieu pour prendre sur vous toutes les souffrances qu’il voudra vous envoyer, en réparation des péchés par lesquels il est offensé, et en intercession pour la conversion des pécheurs?" (Mémoires de Sœur Lucie, I, p.162)»

«À la famille humaine prête à sacrifier ses liens les plus saints sur l’autel de l’égoïsme mesquin de la nation, de la race, de l’idéologie, du groupe, de l’individu, notre Mère bénie est venue du Ciel pour mettre dans le cœur de ceux qui se recommandent à Elle, l’amour de Dieu qui brûle dans le sien. À cette époque, ils n’étaient que trois ; leur exemple de vie s’est diffusé et multiplié en d’innombrables groupes sur la surface de la terre, en particulier au passage des Vierges pèlerines, qui se sont consacrés à la cause de la solidarité fraternelle. Puissent ces sept années qui nous séparent du centenaire des Apparitions hâter le triomphe annoncé du Cœur Immaculée de Marie à la gloire de la Très Sainte Trinité».

«Quant aux nouveautés que nous pouvons découvrir aujourd’hui dans ce message, il y a aussi le fait que les attaques contre le Pape et contre l’Église ne viennent pas seulement de l’extérieur, mais les souffrances de l’Église viennent proprement de l’intérieur de l’Église, du péché qui existe dans l’Église. Ceci s’est toujours su, mais aujourd’hui nous le voyons de façon réellement terrifiante : que la plus grande persécution de l’Église ne vient pas de ses ennemis extérieurs, mais naît du péché de l’Église et que donc l’Église a un besoin profond de ré-apprendre la pénitence, d’accepter la purification, d’apprendre d’une part le pardon, mais aussi la nécessité de la justice. Le pardon ne remplace pas la justice. En un mot, nous devons ré-apprendre cet essentiel : la conversion, la prière, la pénitence et les vertus théologales. Nous répondons ainsi, nous sommes réalistes en nous attendant que le mal attaque toujours, qu’il attaque de l’intérieur et de l’extérieur, mais aussi que les forces du bien sont toujours présentes et que, à la fin, le Seigneur est plus fort que le mal, et pour nous la Vierge est la garantie visible, maternelle, de la bonté de Dieu, qui est toujours la parole ultime dans l’histoire».

Redécouvrir les vertus théologales (foi, espérance, charité), faire pénitence, pratiquer le pardon non séparé de la justice, se convertir, prier. La "recette" de Benoît XVI ne pouvait pas être plus cristalline. La réflexion est inspirée par les affaires de pédophilie, mais certainement, quand Ratzinger parle du péché dans l'Église, il ne pense pas seulement à ceux-là. Nombreux sont des péchés, nombreuses sont les infidélités.

Réévoquant les paroles prononcées par Benoît XVI il y a sept ans, il vient à l'esprit les paroles que le théologien Joseph Ratzinger utilisa en 1969 dans une série de conversations radiophoniques, au cours desquelles, allant jusqu'à faire ce qui fut défini plus tard comme une véritable prophétie sur l'Église du futur, il l'imaginat petite, réduite, obligée d'abandonner de nombreux lieux de culte, humiliée, sans importance sociale et appelée à repartir des origines. Une Église qui a traversé un "énorme bouleversement", mais qui pour cette raison même peut renaître purifiée [cf. benoit-et-moi.fr/2014-II].

«Il me semble certain que des temps très difficiles sont en train de se préparer pour l'Église. Sa vraie crise ne fait que commencer. Il faudra faire face à de grands bouleversements. Mais je suis également très certain de ce qui restera à la fin: non pas l'Église du culte politique, mais l'Église de la foi. Certes, elle ne sera plus la force sociale dominante comme elle l'était jusqu'à récemment. Mais l'Église connaîtra une nouvelle floraison et apparaîtra comme le foyer de l'homme, où trouver la vie et l'espérance au-delà de la mort».

Et alors il sera possible de voir

«ce petit troupeau de croyants comme quelque chose de totalement nouveau [et les gens]le découvriront comme un espoir pour eux-mêmes, la réponse qu'ils avaient toujours recherchée en secret».

A propos de justice et de la nécessité de recouvrer la notion de jugement, Benoît XVI a écrit des pages inoubliables dans "Spe salvi" .
Après avoir noté qu'

«à l'époque moderne, la préoccupation du Jugement final s'estompe» (n° 42),

Ratzinger explique que là où il n'y a plus de Dieu qui crée la justice, c'est l'homme lui-même qui en établit la mesure. Ce qui ouvre en fait la voie à l'injustice, comme le montre l'histoire.

Il est vrai que pour l'homme, l'image du Jugement dernier peut être effrayante, mais il est plus juste de dire que

«c'est une image qui appelle à la responsabilité».

C'est cet aspect que l'homme, surtout de nos jours, a souvent tendance à ne pas considérer. Dieu nous prend au sérieux. C'est pourquoi il nous veut libres et c'est pourquoi il nous enseigne la liberté dans la responsabilité.

Certainement, dans la justice de Dieu

«il y a aussi en même temps la grâce. Nous le savons en tournant notre regard vers le Christ crucifié et ressuscité. Justice et grâce doivent toutes les deux être vues dans leur juste relation intérieure. La grâce n'exclut pas la justice. Elle ne change pas le tort en droit. Ce n'est pas une éponge qui efface tout, de sorte que tout ce qui s'est fait sur la terre finisse par avoir toujours la même valeur».

Contre ce type de ciel et de grâce, rappelle Benoît XVI, Dostoïevski a protesté avec raison dans son roman "Les frères Karamazov".

«À la fin, au banquet éternel, les méchants ne siégeront pas indistinctement à table à côté des victimes, comme si rien ne s'était passé». (n° 44).

Aldo Maria Valli