Danneels, le McCarrick belge

Une enquête de "Super-Ex" (Marco Tosatti) qu'Isabelle complète par d'importantes précisions (3/9/2018)

 

Très clairvoyant, comme toujours, Super Ex ! Il y a quelques jours déjà que l’épithète « McCarrick belge » circulait ! Et on pourrait relever d’autres similitudes qui ont échappé à la sagacité du chroniqueur italien : par exemple, l’influence néfaste et décisive de Danneels, pendant plusieurs décennies, sur les nominations et promotions épiscopales belges (à l’exception évidemment de son successeur direct, à qui il a fait payer cher sa fidélité au Christ et au magistère de l’Eglise !) Le critère principal était sans doute l’image et la ressemblance avec le primat d’alors.

Par ailleurs, comme McCarrick, Danneels a connu une « traversée du désert », à laquelle l’avènement du pape François a mis fin en réhabilitant l’un et l’autre. De fait, après l’affaire Vangheluwe et la disgrâce médiatique qui en résultait pour lui (juin 2010), le cardinal Danneels avait pratiquement disparu de la vie publique. Enfin François vint … Mais écoutons à ce propos le cardinal Danneels lui-même, dans une homélie à l’occasion de la célébration de son quatre-vingtième anniversaire en la cathédrale de Malines (7 juin 2013): « J’ai connu des dimanches des Rameaux avec les palmes et les ‘Hosannah’, mais aussi un vendredi saint, avec le cri de Jésus sur mes lèvres : Père, pourquoi m’as-tu abandonné ? Mais alors, arriva Pâques et le pape François !” Alléluia.

Le vendredi 15 mars 2013, rendant compte de l’élection du nouveau pape, le journal belge
Het Laatste Nieuws (de tendance historiquement anticléricale), titrait : “La douce vengeance de Danneels”. Le journaliste notait que personne n’avait quitté le conclave aussi heureux que Danneels, qui s’était livré à un lobbying intensif pour son « grand ami », dont déjà en 2005 il avait plaidé la cause. Rappelant la déception non dissimulée de Danneels après l’élection du cardinal Ratzinger en 2005, le journaliste de poursuivre, comme un vrai devin : « Quand le pape François voudra prendre conseil pour les nominations belges importantes, ce sera Danneels qui prendra l’avion pour Rome et pas Léonard » et, plus loin : « Danneels sera reçu à bras ouverts à Rome, quand il s’agira de faire le choix d’un nouveau cardinal électeur belge ».

Il y a une autre analogie troublante dans les deux cas, à savoir l’intervention publique d’un ancien nonce, mais dans des sens tout à fait opposés. Beaucoup de prélats qui s’indignent aujourd’hui des déclarations de Mgr Viganó font semblant d’oublier la fameuse interwiew de Mgr Rauber, ancien nonce en Belgique, dans laquelle il critiquait le pape Benoît XVI pour avoir nommé Mgr Léonard à Malines-Bruxelles : « Mgr Léonard n’était ni dans la première 'terna', ni dans la seconde qui a dû être faite. Personnellement, je ne le vois pas du tout adapté pour Bruxelles. J’aurais préféré un auxiliaire de Danneels. […]Avec le Cardinal Danneels, j’ai parlé souvent ; il connaissait les noms de la terna et savait que le nom de Léonard n’y figurait pas. Certainement, il aurait préféré un autre successeur, un de ses auxiliaires, très estimé du clergé », ajoutant enfin que « Danneels et Benoît XVI ont certainement des orientations différentes » (Il Regno, 3 février 2010). Pour ceux qui l’auraient oublié, rappelons quelle fut la réaction du pape François à ces propos indélicats vis-à-vis de Benoît XVI et de Mgr Léonard : le nonce Rauber fut récompensé par le chapeau cardinalice, le 14 février 2015 …


Isabelle

Danneels, le McCarrick belge, parrain de Bergoglio


www.marcotosatti.com
1er septembre 2018
Traduction par Isabelle

* * *

Il suffit de retourner un peu dans le passé pour parvenir à la conclusion que, s’il y avait un reproche à formuler contre le dossier Viganó, ce serait qu’il dit beaucoup, mais pas tout. Et cela simplement parce que Viganó raconte ce qu’il a vu lui-même.
Mais ce qu’il a vu, nous pouvons le dire, s’accorde parfaitement avec d’autres faits et incidents auxquels l’ancien nonce n’a pas assisté en personne.
Vigano souligne les excellentes relations de Bergoglio avec les hommes d’Eglise ouverts au monde gay et LGBT en général ; – quelques noms suffisent pour en faire la démonstration : Galantino et Paglia en Italie, Kasper et Marx en Allemagne, Wuerl, Farrell, Tobin, Cupich et Martin aux USA.
Pour les suites de l’affaire McCarrick, qui vivra verra (mais je n’ai aucun doute sur l’exactitude du dossier Viganó: sinon, il aurait été démenti, au moins sur ce point précis, par Bergoglio ou par Benoît) ; mais nous pouvons nous déplacer de quelques kilomètres pour trouver un sujet équivalent, un «McCarrick belge», en la personne du cardinal Godfried Danneels.
Sur Vatican Insider du 24 septembre 2015, Marco Tosatti faisait la recension de la biographie de Danneels en ces termes :

« Selon les auteurs, Danneels aurait œuvré pendant des années à préparer l’élection du pape François en 2013. Lui-même d’ailleurs, dans une video enregistrée lors de la présentation du livre à Bruxelles, reconnaît avoir fait partie d’un club secret de cardinaux opposés à Joseph Ratzinger. En riant, il le définit comme ‘une mafia qui portait le nom de Saint-Gall’. Le groupe aspirait à une réforme drastique de l’Eglise, qu’ils voulaient plus moderne et actuelle, avec à sa tête Jorge Maria Bergoglio, le pape François. C’est ce qui est arrivé. Outre Danneels et Martini, le livre cite, entre autres membres du groupe, l’évêque néerlandais Adriaan Van Luyn, les cardinaux allemands Walter Kasper et Karl Lehmann, le cardinal italien Achille Silvestrini et le cardinal britannique Basil Hume».

Quelle est la position de Danneels sur l’idéologie gay?

Le 16 octobre 2014, Paolo Rodari rappelait, dans La Repubblica, que le cardinal belge, «grand électeur» de Bergoglio, était favorable à des lois sur les unions civiles entre homosexuels, et aussi à l’idée d’accorder la communion aux divorcés remariés.
(On me permettra ici une parenthèse : tous les prélats favorables aux unions gay ont, comme par hasard, fait bloc pour s’attaquer à l’indissolubilité de la seule union voulue par Dieu, celle entre un homme et une femme, en anticipant sur Amoris Laetitia ou en défendant le document après sa publication. Est-ce le fait du hasard si Mgr Marcello Semeraro, patron des rassemblements gay en Italie et secrétaire du C9, ou le cardinal Coccopalmerio, dont le secrétaire a été surpris dans une orgie où se mêlaient drogue et sexe, ou encore le cardinal Farrell, qui a signé la préface d’un ouvrage pro LGBT du jésuite James Martin, sont tous auteurs d’au moins un texte destiné à soutenir Amoris Laetitia et à répondre, sur un ton polémique implicite ou explicite, aux dubia ?)
Mais revenons à Danneels. Certains politiciens belges soutiennent que le cardinal, à l’époque de la légalisation de l’avortement, a invité le roi Baudouin à ne pas faire d’opposition et à signer la loi. L’information est sujette à discussion (1), mais il est établi que, plusieurs années plus tard, le 11 avril 2003, Danneels n’hésitera pas à écrire au premier ministre belge, G. Verhofstadt, au sujet des unions civiles alors en discussion (2) (on se rappellera que le gouvernement Verhofstadt accordera, en 2005, aux couples gay le droit d’adoption).
Comment ne pas mettre en rapport le soutien de Danneels à la reconnaissance des unions gay et l’attitude analogue, en Italie, des années plus tard, de Bergoglio lui-même et de son fidèle Nunzio Galantino? Tous se souviendront que, lors des discussions autour de la loi Cirinnà, Bergolio n’est jamais intervenu, et pas non plus pour saluer les deux Family Days tandis que son fidèle Galantino cherchait, par tous les moyens, à stopper Massimo Gandolfini, leader du mouvement catholique pour la Vie, et qu’il a, à maintes reprises, exprimé son approbation pour le tandem parfaitement aligné Cirinnà-Boschi !
Mais revenons encore à Danneels, grand électeur de Bergoglio.
Nous l’avons appelé le «McCarrick belge», mais nous ne savons pas si, lui aussi, a sur le dos une affaire d’abus sexuels.
Ce que nous savons, c’est qu’il a été lui-même plusieurs fois accusé d’avoir, à de multiples reprises, couvert et protégé des ecclésiastiques homosexuels et pédophiles: en 1998, Danneels a été condamné à 500 000 francs d’amende, pour avoir protégé un curé homosexuel abuseur; il a été accusé par un prêtre, Rik Devillé, et par une vingtaine d’autres personnes; quelques fidèles l’ont ensuite accusé d’avoir manqué de vigilance quant à un groupe de travail œcuménique sur la pédophilie, financé par la conférence épiscopale belge. Enfin, il a été soupçonné d’avoir couvert l’évêque de Bruges, reconnu coupable d’abus sexuel sur son neveu! L’année 2010 a même vu la perquisition du domicile du cardinal et la confiscation de son ordinateur!

Le Post du 30 août 2010:

« Ces derniers jours, la presse belge a publié les enregistrements-audio de deux rencontres qui ont eu lieu au mois d’avril dernier, entre le cardinal Godfried Danneels – ancien archevêque de Bruxelles – et une des victimes des actes de pédophilie commis par l’ex-évêque de Bruges, Roger Vangheluwe, contraint à la démission en juin dernier, après avoir demandé pardon pour ses crimes. Dans les enregistrements, Danneels cherchait à convaincre la victime, aujourd’hui âgée de 42 ans, de ne pas mettre son histoire sur la place publique après tant d’années ou, à tout le moins, d’attendre la retraite du prélat : ‘Il sera à la retraite l’année prochaine et, ce serait mieux, pour toi, d’attendre’, peut-on lire dans les enregistrements retranscrits par les journaux flamands De Standaard et Het Nieuwsblad… »


Comment conclure ? Avec Emiliano Fittipaldi qui, dans son ouvrage Lussuria : Peccati, scandali e tradimenti di una Chiesa fatta di uomini (Luxure : péchés, scandales et trahisons dans une Eglise faite d’hommes), consacre justement quelques pages aux intrigues du cardinal belge, rappelle les demandes d’excuses publiques du cardinal et conclut ainsi: «Le 13 mars 2013, il sera un des grands parrains de Bergoglio. Au Synode sur la famille, il sera un fidèle parmi les fidèles (invité personnellement par le pape, note de M. Tosatti) et cherchera à pousser les revendications progressistes. Tout est pardonné.»

NDT


(1) En réalité, cette information a bel et bien été confirmée par les plus importants ministres du gouvernement de l’époque, dans une émission rétrospective de la chaîne télévisée francophone francophone à l’occasion des 20 ans de la loi sur l’avortement. Ces interventions ont d’ailleurs été retranscrites et traduites sur « Benoît et moi » (NdT).
(2) Plus précisément, Danneels adressa à Verhofstadt en 2003 une lettre dans laquelle il le félicitait d’avoir mis fin à la discrimination des couples ‘holebi’ : il trouvait excellente la reconnaissance des unions civiles, pourvu qu’on ne leur donne pas le nom de mariage.

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