François va-t-il liquider l'héritage de Benoît?

Deux décisions attendues incessamment pourraient le laisser supposer: la fin de la Commission Ecclesia Dei et la suppression de la Maison Pontificale dont le préfet actuel est Mgr Gänswein. Les explications de Riccardo Cascioli sur "Il Giornale" (13/1/2019)

A présent, François veut effacer l'héritage de Benoît XVI


Riccardo Cascioli
13 octobre 2019
Il Giornale
Ma traduction

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C'est une question de jours avant que deux autres fils importants qui maintiennent le Pape François lié à son prédécesseur soient coupés: des voix de plus en plus insistantes donnent en effet pour certaine la suppression de la Préfecture de la Maison pontificale, dont le titulaire est Mgr Georg Gänswein, qui est également secrétaire personnel de Benoît XVI; et la fin de la Commission Ecclesia Dei, établie en 1988 pour le dialogue avec la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, mais aujourd'hui point de référence surtout pour l'application de Summorum Pontificum, le Motu Proprio de Benoît XVI qui libéralisa la messe en Latin selon le rite antique.

Deux décisions qui, si elles sont confirmées, ont une grande valeur à la fois symbolique et opérationnelle. Ce n'est pas non plus une surprise. Le premier excellent nom à tomber fut le cardinal américain Raymond Burke, que Benoît XVI avait voulu à Rome en 2008 comme Préfet de la Signature Apostolique. En novembre 2014, le Pape François l'a démis de ses fonctions, mais un an auparavant, il l'avait déjà remplacé à la Congrégation des Évêques.
Puis ce fut au tour du Cardinal Gerhard Müller, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi depuis 2012, ami personnel de Benoît XVI et "curateur" de l'œuvre de Joseph Ratzinger, brusquement liquidé à la fin de son premier mandat, fin 2017. Une approche différente a été adoptée à l'égard du cardinal guinéen Robert Sarah, que le pape François lui-même a nommé à la tête de la Congrégation pour le Culte divin en novembre 2014, le déplaçant du Conseil pontifical Cor Unum, neutralisé en contournant ses décisions et en l'isolant complètement, y compris en désavouant publiquement ses initiatives.
La dernière pièce à retirer est donc Mgr Georg Gänswein, un personnage gênant qui, avec des interviews et des conférences, a gardé ouverte la question des «deux papes», très bien expliquée dans le récent livre d'Antonio Socci Il Segreto di Benedetto XVI avec des affirmations qui réfutent pour Benoît XVI le rôle de «grand père sage» que son successeur a voulu lui donner. «Avec le pas du 11 février 2013, il n'a pas du tout abandonné ce ministère, dit Gänswein, il n'y a donc pas deux papes, mais de facto un ministère étendu, avec un membre actif et un membre contemplatif».
Des mots qui n'ont certainement pas plu au Pape François. La suppression de la Préfecture de la Maison pontificale, en transférant la tâche des rendez-vous et des audiences du Pape à une section de la Secrétairerie d'Etat, lui permettrait de se débarrasser de Gänswein et de tout justifier par la nécessité d'une réforme plus large de la Curie.
Mais ce qui est encore plus significatif et annonciateur de conséquences, c'est le deuxième mouvement, qui est dans l'air depuis longtemps: la fermeture de la Commission Ecclesia Dei, qui frapperait surtout un acte important du magistère de Benoît XVI, à savoir la libéralisation de la messe en latin selon le Missel romain promulgué par Saint Pie V (1570) et réédité par Saint Jean XXIII en 1962. En juillet 2007, par la lettre apostolique Summorum Pontificum, Benoît XVI avait précisé qu'il s'agissait de la «forme extraordinaire» de l'unique rite romain, dont la «forme ordinaire» est celle selon le missel promulgué en 1969. De cette façon, le Pape Benoît voulait récupérer un trésor de tradition «jamais abrogé» et «à honorer en raison de son usage vénérable et antique», et éviter de dangereuses divisions dans l'Église d'un point de vue liturgique. Ce n'est un secret pour personne, en effet, que beaucoup d'évêques, fils d'une lecture «révolutionnaire» du Concile Vatican II, ont entravé et entravent l'application de cette décision. Un courant auquel le Pape François est très sensible, n'ayant jamais caché son aversion pour la messe sous la «forme extraordinaire», qu'il considère comme une opération nostalgique, et un peu une idée fixe. La suppression de la Commission Ecclesia Dei ne changerait rien formellement mais donnerait en fait beaucoup plus de force à ceux qui voudraient annuler Summorum Pontificum et la messe sous la «forme extraordinaire».

Cela peut sembler une question «technique», mais en réalité c'est un point vital pour l'Église, étant donné que la liturgie est le cœur de la foi catholique, et dans une Église qui semble déjà si divisée et confuse, la dernière chose dont elle a besoin est une autre fracture
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