Le cri de douleur d'un humble pasteur

... bien loin des complots romains, des intrigues diplomatiques et des considérations théologiques et juridiques. C'est un prêtre de terrain, le "curé madrilène" (Carlota), qui exprime la peine et le désarroi que lui-même mais aussi ses ouailles, ressentent face aux scandales qui se succèdent dans l'Eglise (4/9/2018)

 

Difficile de le traiter de pharisien, ou de traditionaliste aigri, ou d'élément d'un complot visant à déstabiliser François (d'autant plus qu'en apparence, il ne prend pas parti). On n'a pas le droit d'ignorer son appel ou de se moquer de sa souffrance.

On ne peut pas continuer ainsi.


Père Jorge González Guadalix
www.infocatolica.com
27/8/2018
Traduction de Carlota

* * *

On ne peut pas continuer ainsi. Depuis des semaines, des mois, nous sommes confrontés aux prétendues misères de l'Église, non seulement en ouvrant des portails d'information religieuse, mais aussi par les nouvelles à la radio et à la télévision et par la presse de toute sorte. C'est épuisant. J'ai perdu le compte des jours, des semaines.

Au cours des dernières semaines, tout ce qui s'est passé au Chili, avec la démission de bloc de tout son épiscopat. De mauvaises odeurs en provenance du Honduras. La puanteur de Pennsylvanie. A présent les quatorze pages de Viganó. Le sentiment qui vient au peuple de Dieu et à la société en général est que nous vivons dans un immense égout. Peu importe la façon dont vous le regardez, ce n’est rien d'autre qu’un égout.
Je ne sais pas ce qui est certain ou pas dans tout cela, même si je crains qu’il y ait effectivement du certain. Si la lettre de Viganò est vraie, et il y en a qui disent que oui, nous cimenterions le gouvernement de l'Église sur la pire des pourritures. Et si elle ne l'est pas, ou s'il n'exagère pas, l'archevêque et ceux qui le soutiennent seraient des personnages sinistres prêts à tout pour saper le Pontife lui-même. En tout cas, une horreur, un non-sens, une chose insupportable qui peut en laisser beaucoup indifférents, mais qui cause de la douleur dans l'Église.

Mes petites villes reçoivent les nouvelles. Internet est à la portée de tous et il est rare qu'une ville n'ait pas accès au réseau et qu'aucun moniteur ne montre comment l'utiliser. Mais ils lisent aussi la presse, ils écoutent aussi la radio et regardent la télévision.

Ils m'interrogent. Bien sûr qu'ils me demandent si c'est vrai, les catholiques évidemment. Et les non-catholiques me le jettent à la figure. Nous souffrons beaucoup. Tous. Et cette situation ne va pas s'arrêter avec le vieux remède de la discrétion, parce qu'aujourd'hui il n'y a aucun moyen de faire taire quoi que ce soit. Nous avons les réseaux sociaux, la presse, la radio et la télévision, les téléphones portables, et tout ce que vous voudrez. Je ne sais pas comment répondre. Je dis juste de prier et que nous devons rester très unis.

Le sentiment de beaucoup de prêtres et de laïcs est une profonde consternation: Sommes-nous vraiment si désespérément mauvais ? Parce que, j'insiste, si ce qu'ils disent est vrai, c'est à frémir. Et si ce n'est pas vrai, c'est à frémir aussi, en pensant à ce que certains, venus des profondeurs de l'Église, sont capables de tramer pour réaliser leurs conspirations humaines. Le peuple de Dieu, je ne dirais pas qu'il est scandalisé, mais il est fatigué de se voir tous les jours dans les médias et de supporter chaque jour des réflexions du genre «Et tu continues à croire en eux?». Ce peuple de Dieu se réfugie dans ses paroisses et ils y prient, et y pleurent en implorant des pasteurs selon le cœur du Christ.

C'est pourquoi, moi, un curé de plus, un pécheur, loin de la sainteté que le sacerdoce exige de moi, mais qui suis depuis des jours en état de choc et qui ai mal pour tant de choses, je ne peux que demander, je vous en prie, faites quelque chose, n'importe quoi, n'importe qui, qui m'aidera à sortir de cette folie dont nous souffrons. Le nettoyage, de grâce, qui que ce soit qui tombe, à commencer par vous-même s'il le faut. Sainteté, de grâce, la normalité. Que les fidèles aient à nouveau confiance en leurs pasteurs, que nous soyons des ministres qui laissent transparaître l'amour du Christ.

Je ne sais pas ce qu'un curé de village peut faire. Hier, j'ai dit à mes fidèles dans mon homélie qu'il n'y a rien de plus grand que de suivre le Christt dans l'Église catholique, malgré ses péchés, malgré ses faiblesses, malgré ces jours de vie et de souffrance. Je leur ai demandé de prier pour la sainteté de leurs pasteurs, mais aussi d'exiger transparence et honnêteté.

Je ne sais pas si c'est un annus horribilis, ou des mois, ou des lustres. Je n'en sais rien. Mais chaque fois qu'on regarde les informations, le fait de se trouver à nouveau face aux supposés scandales de l'Église catholique est quelque chose qui brise le cœur de chacun de nous.

Je ne suis pas du genre à demander quoi que ce soit. Mais, s'il vous plaît, si quelqu'un peut le faire, qu'il fasse quelque chose.... C'est totalement insoutenable.

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