Que se passe-t-il au Synode sur les jeunes?

Rien qui ne soit prévisible, et qui soit digne d'être retenu sinon la triste image d'une Église à la traîne du monde, qui doit SE convertir (et non LE convertir) afin d'y garder une petite place. Réflexion de Riccardo Cascioli (10/10/2018)


Et tout cela en pure perte, comme on le voit en ce moment à travers le tollé médiatique soulevé par les propos du Pape sur l'avortement et son emploi du terme à effet "tueur à gages" (sans doute a-t-il ses raisons, dont celle de se rallier les "conservateurs", au moins les plus naïfs, au moment où l'Eglise est en pleine tempête et où lui-même sent sur lui et sur son entourage le vent du boulet... ): la haine et le mépris du "monde" envers l'Eglise sont intacts, et l'effet Bergoglio fond comme neige au soleil - si tant est qu'il ait jamais existé.

(Image d'archives)

Synode, la triste image d'une Église à la remorque du monde


Riccardo Cascioli
www.lanuovabq.it/
9 octobre 2018
Ma traduction

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Ecoute, dialogue, accompagnement, discernement. Au Synode, les mots d'ordre habituels résonnent, mais les rapports et les interviews de ceux qui dirigent l'assemblée nous donnent l'image d'une Église plus préoccupée par le consensus du monde et des jeunes, que par une proposition de pleine signification de la vie.


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Ecoute, dialogue, accompagnement, discernement. Au Synode des jeunes aussi, les mots d'ordre sont ceux que nous avons l'habitude d'entendre depuis un certain temps déjà. Et les briefings quotidiens nous disent combien le climat d'écoute et de dialogue établi dans la salle synodale est beau : on parle de tout, «sans préjugés». Un «processus de vraie rencontre et d'écoute entre les générations», résumait il y a quelques jours le secrétaire spécial du Synode, le Père jésuite Giacomo Costa.

Pourtant, à en juger par les comptes-rendus et les déclarations de ceux qui dirigent le Synode, on a l'impression d'un terrible vide.
Mgr Charles Chaput, archevêque de Philadelphie, l'a aussi souligné d'une certaine manière dans son discours, lorsqu'il a mis en garde contre une écoute comme fin en soi, qui oublie «d'annoncer le Christ sans hésitation et sans excuse». En fait, en lisant l'Instrumentum Laboris, en lisant les interviews aux secrétaires du Synode, en écoutant les briefings quotidiens qui rendent compte de l'avancement des travaux, on voit émerger une Église qui n'a rien à dire, rien à proposer. Comme si le témoignage de l'Évangile consistait à écouter ce que les jeunes avaient à dire, à les accompagner dans leurs rêves, à trouver un langage pour se mettre à leur diapason.

Pour communiquer quoi, ensuite? On ne sait pas. Au contraire, c'est l'Église qui doit se «convertir», elle doit changer, écoutant les jeunes. C'est ce que fait bien comprendre le Père Costa, déjà mentionné, qui, dans une interview au Quotidiano Nazionale au début du Synode a expliqué que des provocations sont venues des jeunes sur de nombreuses questions, provocations qui en réalité finissent toujours par les mêmes choses: homosexualité, gender, sexe avant le mariage, discrimination contre les femmes y compris dans le domaine ecclésial. Eh bien, dit le Père Costa, «ces stimuli sont confiés aux Pères synodaux, pour qu'ils soient touchés en profondeur. Je suis convaincu que leur discernement nous permettra de nous concentrer sur la direction dans laquelle l'Église est invitée à s'engager». Et encore: «Les jeunes attendent de l'Eglise qu'elle change, qu'elle sache être plus proche».

C'est l'image terrible d'une Eglise contrainte à suivre le monde pour avoir encore droit à une petite plece dans la socité, pour se sentir encore utile, pour survivre. Il n'y a rien qui nous rappelle que la seule chose que l'Église puisse nous offrir, c'est une proposition pour le plein sens de la vie, cette rencontre avec le Christ qui donne sens à toutes choses, et qui rend donc pleinement raisonnable l'enseignement que l'Église nous a transmis depuis le Christ. Certaines déclarations semblent être une photocopie des discours de ces chefs de partis qui, après une défaite électorale, disent «nous devons à nouveau nous faire comprendre par le peuple».

On dit qu'il faut dialoguer sur tout, «pour aborder de manière concrète des questions controversées telles que l'homosexualité et les questions de genre, dont les jeunes discutent déjà librement et sans tabous», c'est écrit dans l'Instrumentum Laboris. On veut donner l'idée d'une Église qui, après des siècles de fermeture, a enfin l'intention d'aborder des questions jusqu'ici soigneusement évitées, recouvertes par des «doctrines abstraites». En fait, c'est juste un truc linguistique qui cache une intention complètement différente. Parce que de certains thèmes, on discute depuis l'Ancien Testament, et l'Église en a toujours parlé avec une pleins compréhension de ce qui anime le cœur et l'esprit de l'homme, de Jésus à Benoît XVI.

La nouveauté de ce Synode - et plus généralement d'un certain mauvais pli dans l'Église - n'est pas dans le fait que l'on discute de certains sujets , mais que soit remis en question ce que l'Église a toujours annoncé comme vérité de l'homme. Voici, par exemple, ce qu'a dit un père synodal, tel que rapporté dans le briefing de Paolo Ruffini, le nouveau Préfet du Département de la Communication du Vatican (et le choix des interventions à rapporter dans ces briefings n'est certainement pas fait au hasard): le thème est «sexe et chasteté prénuptiale, abstinence avant le mariage»; le père synodal - nous reprenons le compte-rendu d'Avvenire - souligne combien la position de l'Eglise sur cet aspect présente «deux risques: d'une part, le risque de faire se marier les couples avant le temps d'une maturité adéquate de leur volonté, d'autre part, le risque de provoquer un éloignement du sacrement chez les personnes qui ne peuvent vivre une vie de couple sans rapports sexuels». Devant cette interdiction, a dit encore le père synodal, il y a des jeunes que «nous perdons pendant un certain temps», certains reviennent, d'autres «nous les perdons pour toujours».

C'est l'image fidèle d'une Église aplatie sur la recherche du consensus, qui ne reconnaît plus la vérité sur l'homme que Jésus nous a révélée. Mgr Chaput l'a également rappelé lorsque, contestant la présence d'un langage LGBT dans l'Instrumentum Laboris, il a dit que «ce que l'Église affirme comme vérité de la sexualité humaine n'est pas un obstacle, mais le seul véritable chemin vers la joie et la plénitude de la vie». Et plus généralement «les adultes ont la tâche de transmettre la vérité de l'Evangile de génération en génération, intacte de compromis et de déformations. Trop souvent, cependant, les responsables de ma génération, dans nos familles et dans l'Église, par une combinaison d'ignorance, de lâcheté et de paresse, ont abdiqué leur responsabilité d'éduquer les jeunes à transmettre leur foi dans le futur».

Voilà, le problème est là, dans la foi. Nous ne parlons plus par foi, mais par calcul politique. Bien sûr, tout n'est pas comme cela dans l'Église. Certes, comme ce fut le cas pour Chaput, il y aura d'autres voix dans ces semaines qui rappelleront la vraie tâche de l'Église, mais nous n'en entendrons guère parler par le secrétariat du Synode. Parce que les dirigeants de l'assemblée sont plus préoccupés par la promotion de leur propre agenda.

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