Une nouvelle bombe en vue?

Kevin Farrell

Après McCarrick, le protagoniste serait cette fois le cardinal Farrell, rien de moins que le chef du nouveau Dicastère pour la famille (8/9/2018)

 

L'information est issue d'un journal peu suspect de sympathies traditionaliste, un journal de gauche (!!), en son temps très impliqué dans les Vatileaks "Il fatto Quotidiano".

Voici un tweet de Francesca Fagnani, journaliste à "Il fatto Quotidiano", daté du 4 septembre dernier, où elle annonce son dernier article.

A priori, diront certains, ce n'est pas précisément une bombe, puique le fait que McCarrick a vécu en quelque sorte en "colocation" (??) avec Farrell pendant des années a déjà été annoncé partout (nous en avons même parlé dans ces pages). Mais la possibilité de la publication prochaine du rapport des 3 cardinaux enquêteurs désignés par Benoît XVI à la fin de son pontificat, cela, oui, ce serait une vraie bombe...

L'article est en accès payant sur internet, mais le site dit "de ragots" <Dagospia> (qu'en réalité, selon Sandro Magister, tout vaticaniste italien digne de nom consulte car il est très bien informé, et cache, au milieu de bobards de toutes sortes, des articles très documentés et absolument fiables) l'a mis en ligne, avec une suite, parue le lendemain.

Le titre de l'article (rajouté par <Dagospia>) est évidemment une provocation sensationaliste: la "cohabitation" suggérée par "Il Fatto" (titre: UN DOSSIER SUR L'ÉVÊQUE FARRELL. IL A COHABITÉ PENDANT DES ANNÉES AVEC LE CARDINAL DU SCADALE MCCARRICK) est carrément devenus "concubinage", ce qu'il faudrait évidemment prouver: raison de plus pour inviter le lecteur à la plus grande prudence.

BOMBES SUR LE VATICAN - LE CARDINAL MCCARRICK ÉTAIT-IL LE PETIT AMI ET VIVAIT-IL AVEC MGR FARRELL? SUR "IL FATTO", LA RÉVÉLATION QUI FIGURERAIT DANS LE RAPPORT SUR LA MORALE AU SEIN DE LA CURIE, RÉDIGÉ PAR LES CARDINAUX HERRANZ, TOMKO ET DE GIORGI ET REMIS À RATZINGER.


Francesca Fagnani
Il Fatto quotidiano, (via m.dagospia.com)
Ma traduction

* * *

1. UN DOSSIER SUR L'ÉVÊQUE FARRELL. NOUVELLE "BOMBE" AU VATICAN
4 septembre

Dans l'Eglise est en cours une guerre civile extrêmement violente et sans précédent, qui attaque le pontife.
Le document écrit par l'archevêque Carlo Maria Vigano, dans lequel le pape François est accusé d'avoir tu les abus commis par l'ex-archevêque de Washington Theodore McCarrick a fait le tour du monde. Mais bientôt, une autre bombe pourrait éclater. Selon des sources qualifiées de proches de la Congrégation pour la doctrine de la foi, il y aurait également un dossier sur l'évêque Kevin Joseph Farrell.
Nommé par Bergoglio motu proprio en 2016 à la tête du nouveau Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie, il est de fait le religieux américain de plus haut grade dans la Curie. Ex-membre des Légionnaires du Christ, Farrell fut nommé évêque auxilliaire de Washington justement parce que c'est Mccarrick lui-même qui l'avait voulu pour adjoint: tous deux aurait fait partie du "cercle magique" du Pape François. Mais ce n'et pas tout. Ils auraient aussi pendant des années partagé le même appartement, et vécu ensemble. Comment, alors, Farrell aurait-il pu ne pas être au courant des pratiques sexuelles de McCarrick? Qu'y a-t-il dans ce dossier sur Farrell? Comment est-il possible que le Pape et le Secrétaire d'Etat, d'habitude informé de tous les fascicules ouverts par le Tribunal de la Congrégation, n'en aient rien su? Et la haute nommination de Farrell est-elle postérieure ou antérieure à l'ouverture de ce fascicule?
L'historien De Mattei, parmi les plus grands spécialistes du Vatican, connu pour ses positions traditionalistes, ajoute une pierre: "Le lien entre les deux prélats n'a jamais été clarifié. Derrière le silence du Pape François et du Secrétaire Parolin, pourrait-il y avoir autre chose?". Autrement dit?
"Je connais personnellement Vigano. C'est un homme honnête, il a un bon jugement. Je suis certain que tout ce qu'il dit est vrai. Il est probable qu'il en sait davantage. Comme on le sait, il existe ce fameux rapport des trois cardinaux (Herranz, Tomko, De Giorgi) sur la corruption morale au Vatican, et pas seulement, au sein de la Curie, remis à Ratzinger avant sa démission. Ce rapport est connu de François et d'un nombre limité de personnes. Qu'adviendrait-il s'il était publié?"

Rencontre des "deux papes" à Castelgandolfo, le 23 mars 2013. Qu'y a-t-il dans cette mystérieuse boîte?


2. PEUR AU VATICAN: TOUS LES NOMS SUR LA LISTE DU LOBBY GAY
5 septembre

Derrière le silence tenace des dirigeants du Vatican sur ce qui a été dénoncé dans le désormais célèbre document de l'archevêque Carlo Maria Viganò, il pourrait y avoir la crainte d'être démentis par de nouveaux faits et événements qui conduiraient à l'explosion de cette "guerre atomique" dont - depuis des jours - parlent des voix internes au Saint Siège.

Hier, nous vous avons parlé de "l'affaire Farrell": un dossier sur l'évêque auxiliaire de Washington Kevin Farrell serait déposé au Vatican, à la Congrégation pour la doctrine de la foi qui enquête sur les crimes sexuels et moraux. Ce dossier, s'il n'était pas démenti, tomberait sur le Pontife comme un pavé. Farrell, nommé directement par Bergoglio à la tête du Dicastère pour la famille, aurait cohabité avec Theodore McCarrick, ancien cardinal, ancien archevêque de Washington, impliqué dans plusieurs cas d'abus sexuels contre des séminaristes.

Après avoir contacté la Congrégation pour un commentaire, ou éventuellement un démenti, la réponse a été: "Il n'y aura pas de communication". Le Vatican ne dément donc pas Il Fatto Quotidiano, mais choisit, comme pour McCarrick, la stratégie du silence. D'autant plus que les préoccupations du Saint-Siège ne s'arrêtent pas là.
Les nouveaux nuages à l'horizon concernent la possibilité concrète que les documents contenus dans l'enquête que les cardinaux Julián Herranz, Jozef Tomko et Salvatore De Giorgi ont remis à Benoît XVI avant sa démission soient rendus publics.

Le rapport contient un tableau détaillé et inquiétant de la corruption morale et matérielle du clergé, avec noms, prénoms et circonstances. Nous avons exceptionnellement réussi à visionner un document avec en-tête pontifical contenu dans l'enquête, et dont nous publions ici un extrait [sans doute dans la version papier du journal, ndt]: il s'agit d'une liste de prélats et de laïcs qui appartiennent au dit lobby gay, qui à travers le chantage et les secrets pourraient conditionner, ou avoir conditionné, leurs positions et carrières (les leurs, comme celles des autres).
Nous ne révélerons pas les noms indiqués dans la liste, mais nous pouvons confirmer que parmi les noms, il y a des personnes destituées par le Pape, d'autres déplacées d'office, d'autres qui occupent encore des postes importants dans des organes stratégiques du Vatican, comme Propaganda Fide et même le Secrétariat d'Etat.
L'enquête sur les trois cardinaux Herranz-Tomko-De Giorgi est restée jusqu'à présent top secret. Cependant, un cercle restreint mais pas infime de personnes a eu l'occasion de le lire, et ce déjà avant le Conclave, pour donner un coup de main à l'Esprit Saint qui allait alors porter Bergoglio sur le trône papal.

Des dizaines de prêtres et de hauts prélats ont été interrogés pour établir le dossier, et des documents de toutes sortes ont été recueillis. Si le public prenait connaissance du contenu du rapport final, ce serait un désastre pour l'image de l'Église, déjà dévastée dans le monde entier par des scandales sexuels. Mais c'est ce qui pourrait arriver à ce stade, puisque le vol des corbeaux est une pratique vaticane séculaire, qui se manifeste chaque fois que la guerre entre bandes entre gangs se durcit.

Et cette fois, la guerre est contre le Pape lui-même. Bergoglio, du reste, ne peut certes pas compter sur la protection de la Curie, étant donné la relation compliquée qui s'est instaurée dès le début, pour les questions de pouvoir, personnelles et doctrinales (rappelez-vous seulement les dubia soulevés par quatre cardinaux au Pape sur l'exhortation apostolique Amoris Laetitia, dans laquelle Bergoglio ouvre à la communion des divorcés remariés).

Mais François ne peut même pas compter sur certains de ses amis et partisans les plus puissants, eux-mêmes submergés par les scandales d'abus sexuels ou pour avoir couvert ces comportements: de McCarrick à Farrell, du cardinal Roger Mahony au cardinal Godfried Danneels, des prélats chiliens au très puissant cardinal George Pell, le numéro 3 du Vatican [je ne suis pas certaine qu'il puisse être associé aux autres, mais son cas reste à éclaircir, ndt], actuellement en procès en Australie pour plusieurs crimes sexuels. Pell aurait souhaité démissionner de son poste de ministre des Finances du Vatican, mais le Pape a préféré un simple congé. Du reste, lorsqu'il fut nommé numéro trois du Vatican, ses histoires ne pouvaient qu'être connues de Bergoglio lui-même.

A travers ces pages, nous demandons au Pape Bergoglio, au Secrétaire d'Etat Parolin, de faire la lumière sur McCarrick, Farrell et la commission des trois cardinaux, sur les questions morales, on ne peut pas se cacher derrière le silence. La réforme de l'Eglise passe aussi par la vérité.

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