Vincent Lambert et les "directives anticipées"

Les médias exploitent les circonstances et font le forcing pour convaincre les gens de rédiger leur "testament biologique", premier pas vers la légalisation de l'euthanasie, et pour promouvoir une révision en ce sens de la loi Leonetti. Qu'en est-il en Italie, où la loi est en vigueur depuis 2018? (22/5/2019)

La situation de Vincent Lambert et les déchirements de sa famille sur l'issue à envisager rappellent que des situations graves et imprévisibles peuvent survenir. Pour éviter autant que possible ce cas de figure, une personne peut faire connaître son souhait à l'avance dans ses "directives anticipées". Mais comment ça marche ?
«Il est clair que si chacun d’entre nous veut éviter que le drame de Vincent Lambert se reproduise, il nous faut écrire nos “directives anticipées” et désigner une “personne de confiance”», a affirmé l'ancien député Jean Leonetti, qui a contribué à la loi la plus récente sur la fin de vie.
Mais que sont ces "directives anticipées" ? Beaucoup de Français l'ignorent : seulement quatre sur dix savent que cela existe et un peu plus d'une personne sur dix a rédigé de telles directives, selon des chiffres annoncés par le directeur du Comité consultatif national d'éthique (CCNE).
(www.letelegramme.fr)

On ne comptera pas sur moi pour donner le mode d'emploi.
Mais il est essentiel de savoir comment se passent les choses dans un pays (l'Italie) où les "directives anticipéess" sont déjà en vigueur (1). Selon un point de vue, disons, catholique (pour les autres, on n'a que l'embarras du choix des sources)

(1) Voir à ce sujet le site d'une ONG financée par George Soros (ça ne s'invente pas, et ce n'est ni une fake new ni du complotisme primaire), comme ils l'annoncent à l'onglet "à propos de nous": «Nous tenons à remercier Open Society Initiative for Europe (OSIFE) pour le soutien que la fondation nous a apporté, notamment lors de notre lancement» ).

Le droit de choisir
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En décembre 2017, le Parlement italien a approuvé une nouvelle loi sur les directives anticipées, la loi nº 219/2017, connue sous le nom de Directive avancée de santé (DAT). Celle-ci est entrée en vigueur le 31 janvier.
Cette loi reconnaît enfin à tous les adultes en pleine possession de leurs capacités mentales la possibilité de donner formellement des directives anticipées concernant les traitements médicaux qu'ils souhaiteraient recevoir au cas où ils ne seraient plus en mesure de faire ce choix eux-mêmes en raison d'une maladie grave ou d'une incapacité mentale.
La loi représente une grande avancée pour de nombreuses associations et partis qui se battent depuis de nombreuses années pour que cette réglementation soit mise en place.

L'Italie pire que la France. Ici, Vincent serait déjà mort.


Tommaso Scandoglio
lanuovabq.it
22 mai 2019
Ma traduction

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Si Vincent Lambert avait été citoyen italien, quel aurait été son sort? A cette heure, il serait déjà dans l'autre monde parce qu'avec la loi 219 sur le "biotestament", son épouse Rachel, en l'absence de DAT [disposizioni anticipate di trattamento] et en tant que représentant légal, aurait eu le pouvoir de vie ou de mort sur lui, sans même avoir à déranger les juges.


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Ceux qui ont suivi l'affaire Lambert et compris sa nature exacte ne peuvent qu'être horrifiés par une telle détermination à donner la mort à un patient handicapé. Aux mains des juges et des médecins, la vie de Vincent, 42 ans, est toujours suspendue à un fil, ou plutôt suspendue à une perfusion qui le nourrit et l'hydrate.

En lisant ce qui se passe au-delà des Alpes, on pourrait pousser un soupir de soulagement amer: «Heureusement, de telles situations ici en Italie ne pourraient jamais se produire». Outre le fait qu'elles se sont déjà produites - voir les cas d'Eluana Englaro et de Piergiorgio Welby - il faut rappeler que depuis 2018, il existe une loi en vigueur sur le sol italien, la loi n° 219, qui légitime l'euthanasie, à la fois active et omissive. Le premier cas d'application de cette loi s'est produit quelques jours après son entrée en vigueur: Patrizia Cocco, 49 ans, souffrant de SLA [Sclerosi Laterale Amiotrofica, sclérose en plaque], a demandé en février 2018 à être détachée du respirateur qui la maintenait en vie. Et elle est donc morte. Dans les départements de néonatologie s'est alors répandue - nous ne savons pas à quelle échelle - une pratique visant à ne pas réanimer les nourrissons fortement prématurés et qui ont des maladies très invalidantes. Par conséquent, le soupir de soulagement n'a pas lieu d'être.

Et en effet, posons-nous une question: si Vincent avait été citoyen italien, quel aurait été son sort?
Il serait mort depuis longtemps. En effet, selon la loi 219, il est possible de nommer comme tuteur d'une personne inapte un représentant légal qui, en l'absence de DAT - c'est-à-dire des déclarations écrites du patient - a carte blanche pour décider du sort du patient. Il lui appartient de donner, de refuser ou de révoquer son consentement pour tous les traitements et thérapies, y compris ceux qui sauvent des vies, et même l'alimentation assistée et l'hydratation. En mars 2016, l'épouse de Vincent, Rachel Lambert, a été nommée représentante légale de son mari. Ainsi, si toute l'affaire s'était déroulée en Italie, il appartenait à l'épouse, en tant que représentante légale du mari, de décider si elle devait le garder en vie ou le laisser mourir de faim. Et Rachel, depuis 2013, a toujours été en faveur de la mort de son mari. Ainsi, contrairement à ce qui s'est passé en France, ici, Vincent serait déjà mort sans même avoir à déranger les juges nationaux, les juges européens et le Comité des droits des personnes handicapées de l'ONU.

C'est dire que notre situation est pire que celle des Français. Mais étant donné qu'il n'y a jamais de fin au pire, la discipline actuelle en matière de fin de vie se détériorera encore, soit par le Parlement, soit par la Cour constitutionnelle, offrant la possibilité de pratiquer le suicide assisté, une pratique qui est interdite par la loi actuelle. En effet, la Consulta [i.e. la Cour constitutionnelle, ndt], sur requête du tribunal de Milan qui a suspendu le jugement pour aide au suicide contre le leader radical Marco Cappato, avait demandé au Parlement, en octobre dernier, de légitimer au moins partiellement l'aide au suicide - qui est encore considérée comme un crime aujourd'hui - de la manière et dans les limites que ce dernier jugerait les plus appropriées.

Le 21 mars, le Président de la Cour Constitutionnelle, Giorgio Lattanzi, lors de son rapport annuel, a rappelé au Parlement que quelques mois s'étaient déjà écoulés depuis la demande de la Consulta d'intervenir sur le crime d'aide au suicide, mais qu'il ne s'était encore rien passé. Bien qu'ils aient été rappelés à l'ordre, depuis ce 21 mars, les parlementaires sont restés inertes et à ce jour, la demande des juges n'a pas été entendue. La date limite d'intervention est fixée au mois de septembre de cette année. Actuellement, le gouvernement n'a aucune intention de s'occuper du délit d'aide au suicide, soit parce que les questions de fin de vie ne font pas, du moins officiellement, partie du pacte gouvernemental, soit parce que ces questions sont très clivantes, ce ne sont que des chats à fouetter, qui sont encore plus difficiles à fouetter au moment d'élections. Il semble donc que la stratégie consiste à faire traîner, et à remettre la patate chaude entre les mains de la Consulta, laquelle, en septembre, soit lancera un nouvel ultimatum au Parlement (et qui sait quel gouvernement nous aurons alors), soit, plus probablement, tirera elle-même les marrons du feu [donc assumera les risques au profit des partisans de l'euthanasie, ndt] et y mettra les malades incurables, les personnes gravement handicapées et celles souffrant de dépression grave.

Tout cela pour dire que, d'une part, ce qui se passe en France - résultat de batailles juridiques devant les tribunaux - serait chez nous autorisé par la loi, et que, d'autre part, nous sommes loin derrière les Français pour défendre la vie des patients ou, inversant la perspective, loin devant pour défendre l'euthanasie.

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