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Le Pape et la protection de l'environnement. Retour sur un article de la Stampa, d'octobre dernier. (30/4/2008)
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Je n'ai pas la prétention ici d'analyser en détail le complexe discours à portée philosophique que le Pape a prononcé à la tribune de l'ONU. D'autres s'en chargeront mieux que moi. Il faut l'espérer, en tous cas, car le Père Lombardi a déjà déploré que "le discours à l'ONU [soit] un peu passé sous silence " - il ne contient pas de formules-choc!
Opposant ce qui est légal à ce qui est juste, Benoît XVI a réaffirmé avec force le coeur de sa pensé: la dignité de la personne humaine, "qui demeure le point central du dessein créateur de Dieu pour le monde et pour l’histoire" est le fondement et le préalable de toute tentative vers la nécessaire régulation globale des relations entre les peuples. C'est la loi naturelle, dont tout découle.

Les titres et premiers commentaires que j'ai lus cèdent à une simplification qui ne peut être que réductrice: "Le Pape plaide pour la liberté religieuse", "Le Pape pour le droit d'ingérence", "Le Pape prône une action collective des états", etc..
Ces points étaient abordés, bien sûr, et de là à ce que certains prétendent que le Pape est favorable à un gouvernement mondial, il n'y a qu'un tout petit pas... dont je suis prête à parier qu'il sera franchi.

Je note pour ma part, au milieu du discours un paragraphe très important (il y est revenu lors de sa catéchèse du 30 avril), et vraiment "signé", c'est comme s'il avait apposé sa "griffe" personnelle:

Parce que les droits et les devoirs qui leur sont liés découlent naturellement de l’interaction entre les hommes, il est facile d’oublier qu’ils sont le fruit du sens commun de la justice, fondé avant tout sur la solidarité entre les membres du corps social et donc valable dans tous les temps et pour tous les peuples. C’était une intuition exprimée, dès le Ve siècle après Jésus Christ, par l’un des maîtres de notre héritage intellectuel, Augustin d’Hippone. Il enseignait que « le précepte : ‘Ce que tu ne veux pas qu’on te fasse, ne le fais pas à autrui’ ne peut en aucune façon varier en fonction de la diversité des peuples » .

Mais je veux surtout souligner un aspect qui n'a pas été abordé par les "observateurs" ... pour la bonne raison qu'il était absent: la protection de l'environnement.
Plus précisément, dans un discours de 3500 mots environ, et de 39 paragraphes (statistiques de mon logiciel de traitement de texte), voici les deux seules allusions:

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1. [..] les questions de sécurité, les objectifs de développement, la réduction des inégalités au niveau local et mondial, la protection de l’environnement, des ressources et du climat, requièrent que tous les responsables de la vie internationale agissent de concert et soient prêts à travailler en toute bonne foi, dans le respect du droit, pour promouvoir la solidarité dans les zones les plus fragiles de la planète.

2. [..] l’action internationale visant à préserver l’environnement et à protéger les différentes formes de vie sur la terre doit non seulement garantir un usage rationnel de la technologie et de la science, mais doit aussi redécouvrir l’authentique image de la création. Il ne s’agira jamais de devoir choisir entre science et éthique, mais bien plutôt d’adopter une méthode scientifique qui soit véritablement respectueuse des impératifs éthiques.
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On admettra que c'est peu, et s'insère d'ailleurs dans un discours bien plus large qui est celui du respect de la création.

Si je parle de l'argument absent, c'est parce que je me suis souvenue d'un article paru en octobre dernier dans un grand quotidien italien (La Stampa) et qui avait à l'époque été amplement commenté, et repris par nos spécialistes des religions !! La raison de cet intérêt suspect était la fabrication d'une fiction commode, destinée à servir les intérêts d'un certain lobby, "le pape vert". Comme si Joseph Ratzinger pouvait se couler dans un moule aussi rudimentaire!

Comme je l'avais traduit, et commenté d'une façon qui ne me fait pas rougir, 6 mois après, je ne résiste pas au plaisir de citer à nouveau cet article de La Stampa, qui avait alors toutes les apparences du sérieux et de l'objectivité, et que les faits infirment (et même ridiculisent) de façon si éclatante.

Le Pape "vert" en route vers l'Onu (La Stampa)

(La Stampa, 14 octobre 2007)
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L'intervention de Benoît XVI aux Nations Unies sera un "blitz" environnementaliste.
Si, à l'assemblée générale des Nations Unies Paul VI a tonné contre la guerre et Jean-Paul II a défendu le droit des nations à la liberté, à New-York, Benoît XVI sanctionnera en avril l'obligation morale des gouvernements à intervenir au plus vite contre les changements climatiques.
Et l'alarme écologiste de l'Église catholique (partagée, en une stratégie oecuménique, dans un avertissement à la sauvegarde de l'environnement du patriarche oecuménique de Constantinople, Bartolomeo I) trouvera aussi son expression dans l'encyclique que le pape prépare, sur les thèmes de l'espoir, la globalisation et les défis sociaux du futur.
Au Palais de Verre de l'ONU, le Souverain Pontife mettra au centre de l'attention la question de l'environnement et du développement durable, en misant sur l'éducation à la responsabilité écologique. Face aux preuves scientifiques du réchauffement de la planète, Benoît XVI réclamera aux états des "politiques de protection de l'environnement" pour conjurer la destruction de ce "patrimoine naturel" dont les fruits sont nécessaires au bien-être de l'humanité.

"C'est un thème d'extraordinaire urgence qui justifie un appel fort à la conscience des dirigeants", explique le cardinal Achille Silvestrini : "Le prix Nobel attribué à Al Gore est la marque d'une prise de conscience qui s'exprime aussi dans la sollicitude du Saint-Père".
Le Pape fera également appel aux opportunités offertes par la science, c'est-à-dire, selon l'anthropologue et environnementaliste Brando Crespi,... collaborateur de projets éthiques au Vatican, "à la capacité d'évaluer et de prévoir, de contrôler les dynamiques des modifications de l'environnement et du développement durable, de tracer les grandes lignes et d'appliquer des solutions au niveau international". Dans les changements climatiques, mettra en garde le Pape, les Pays plus pauvres sont ceux destinés à payer le prix plus lourd : "des choix courageux sont nécessaires pour éviter des dégradations irréversibles de la planète".

Entre temps, le Vatican devient le premier état à effet de serre zéro. Deux entreprises, une américaine et un hongroise, ont offert au Saint-Siège un bois, pour contre-balancer les émissions de CO2 produites par le plus petit état du monde...
En outre, le Saint-Siège a décidé de couvrir de panneaux solaires la salle "Nervi" (aula Paul VI), où se tiennent les audiences du Pape au Vatican...
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Théorie et pratique, donc, avec Benoît XVI qui à l'Onu portera à l'attention des gouvernements les symptomes d'un développement qui "n'a pas su défendre les délicats équilibres de la nature", réclamant des choix courageux et une nouvelle alliance entre l'homme et la terre "avant qu'il ne soit trop tard". Il est prioritaire de respecter la création, "don de Dieu", selon le Pape qui s'exprimera en porte-parole de la chrétienté parce que la ligne environnementaliste a été définie "en dialogue avec les chrétiens des différentes confessions".
Une préoccupation pour l'environnement, guidée par des principes éthiques objectifs : les décisions prises aujourd'hui sur l'environnement doivent tenir compte de la responsabilité morale envers les générations futures. Et, pour le Pape qui se posera ainsi à la tête de la bataille mondiale contre les changements climatiques la sauvegarde du "créé" demande une mobilisation globale. Il n'y a pas temps à perdre : le "problème de l'environnement se manifeste dans toute son urgence".


Stupéfiante désinformation par anticipation!
Il est clair qu'il s'agissait purement et simplement d'instrumentaliser le discours du Pape au profit de la cause débattue du changement climatique - ou plus précisément du réchauffement global.
A moins que ce ne soit une simple maladresse, ou la volonté de faire un scoop à tout prix (mais l'orientation est bien opportune!), et sans céder à la facilité de la théorie du complot, qui a intérêt à cette manipulation?
On pourra lire mon commentaire de l'époque ici: benoit et moi 2007 >| humeurs>| le pape vert