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le dilemne de Medjugorje

Le processus de reconnaissance des apparitions présumées semble dans une mauvaise passe. Rappel des épisodes précédents, et le dernier en date, résumé par Magister (16/11/2013)

>>> Ci-contre: la voyante Mirjana

J'ai traduit dans ces pages plusieurs textes sur les apparitions de Medjugorje, et tous étaient de plumes catholiques au-dessus de tout soupçon (il serait d'ailleurs très intéressant de connaître leur avis aujourd'hui...).

Mais tout d'abord, voici quelques éléments permettant de situer l'affaire, au point où elle en était au moment de la démission de Benoît XVI:

Il y a 31 ans, un groupe de sept personnes déclarait avoir physiquement vu la Vierge Marie à Medjugorje, un petit village de Bosnie, dans ce qui était encore la République de Yougoslavie. Depuis lors, d'autres affirmations ont suivi, attirant sur place des milliers (des millions!) de personnes.
Mis à part ces grandes foules de pèlerins, le Vatican n'a pas commenté les apparitions présumées, mais en 1991, les évêques locaux ont dit qu'ils n'étaient au courant d'aucune des apparitions surnaturelles.

En 2010, Benoît XVI mettait en place une commission du Vatican, dirigée par le cardinal Camillo Ruini, composée de 17 experts , pour examiner les apparitions présumées et donner une explication officielle.

     

Les bons fruits de Medjugorge: Messori

En juin 2011, Vittorio Messori, sur son blog <Et-et> (article traduit ici: benoit-et-moi.fr/2011-II), abordait la question sans trancher, mais il racontait qu'au début des années 80, sous le régime communiste d'alors, il s'était rendu dans ce village perdu de l'ex-Yougoslavie, et sans avoir lui-même "eu" des visions, il avait été témoin oculaire d'un épisode d'«apparitions".

Il écrivait:
Trente ans ont passé depuis ce Juin 1981 où tout a commencé, je ne suis plus retourné en ces lieux, mais je n'ai pas cessé de m'informer et, surtout, de tomber sur des gens qui avaient été là-bas: des gens de tout âge, statut, niveau culturel. Et pourtant, tous protagonistes d'une expérience qu'ils considèrent comme importante et même pour quelques-uns, décisive. J'ai vu des vies transformées, des vocations religieuses épanouies, des pratiques religieuses redécouvertes. Sur la «vérité» de Medjugorje, on ne pourrait pas avoir de doutes, si l'on appliquait le critère énoncé par Jésus lui-même: "Il n'y a pas un bon arbre qui produise de mauvais fruits ... Chaque arbre se reconnaît à ses fruits ... "(Luc 6.43). Trois décennies d'expérience montrent combien a été spirituellement abondante et excellente la récolte produite par cet arbre grandi de manière inattendue dans les Balkans.

Concluant:
Pour le Saint-Siège, Medjugorje est un dilemme déchirant.
D'une part, il reconnaît avec gratitude l'abondance des fruits spirituels, et de l'autre côté il n'oublie pas le vulnus (coup porté) au droit canon, avec un mouvement mondial combattu par les ordinaires du lieu, auquel il revient de discerner. Au point où on en est arrivé, une désaveu officiel par Rome de la vérité de l'affaire serait une catastrophe sur le plan pastoral. Mais le contraire serait aussi catastrophique: c'est à dire un démenti officiel de la position des deux évêques qui nient sans hésitation le surnaturel et ne parlent pas de miracles, mais d'arnaques et de tromperies. Cela aurait des effets inédits et imprévisibles sur le droit de l'Eglise.

     

Les bons fruits de Medjugorge: Tornielli

Un peu plus tard, c'est Andrea Tornielli lui-même qui rapportait le témoignage d'un homme d'affaire qu'il avait accompagné dans son pélerinage à Medjugorje (http://benoit-et-moi.fr/ete2011).
Les "bons fruits" trouvaient une nouvelle illustration éclatante.

     

Les bons fruits de Medjugorge: Cammilleri

Enfin, Rino Cammilleri, en 2012, a écrit un livre intitulé "Medjugorje, le chemin du coeur" ["Medjugorje. Il cammino del cuore", Mondadori, Milan 2012]
(cf. benoit-et-moi.fr/2012(III)/articles/medjugorje-une-experience-de-foi.php ).
Dans une interviewe sur Vatican Insider, Cammilleri parlait lui aussi «des fruits qui garantissent la bonté de l'arbre», citant un livre écrit par le cardinal Bertone en 2007, «La dernière voyante de Fatima» (préfacé par Benoît XVI), dans lequel le cardinal affirmait: «tous les pèlerins catholiques peuvent aller à Medjugorje, lieu de culte marial où il est possible de s'exprimer avec toutes les formes de dévotion».

     

Medjugorje, la douche froide: Magister

Dernier épisode, résumé par Sandro Magister sur son blog personnel Settimo Cielo (ma traduction):

Sur Medjugorje, le baromètre du pape vire au mauvais
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La dévotion à Marie est l'un des piliers de la spiritualité de Jorge Mario Bergoglio.

Sa première sortie du Vatican après son élection à la papauté, a été pour vénérer l'icône de la "Salus Populi Romani" dans la basilique de Santa Maria Maggiore.
Lors de la veillée de prière pour la paix, le 7 Septembre sur la Place Saint-Pierre, il a mis au centre cette même icône mariale. Au Brésil, son étreinte de l'effigie de la Sainte Vierge, au sanctuaire d'Aparecida, a été très émouvante. Le 13 Octobre il a fait venir du Portugal sur la place Saint-Pierre la statue de Notre Dame de Fatima.

Mais dans ce dernier cas, François a également provoqué une très forte déception parmi les milliers de fidèles qui étaient accourus des quatre coins du monde, sûrs que le pape allait consacrer le monde au Cœur Immaculé de Marie, comme le demandaient les apparitions. Il s'est au contraire limité à une formule générique, lue à voix basse, sans parler de consécration et sans citer Fatima, ni le cœur de Marie, ni les apparitions, ni les messages.

La seule fois jusqu'ici que François Pape a parlé des apparitions mariales, c'était il y a quelques jours, le 14 Novembre, dans l'homélie du matin à Santa Marta. Et ce fut une autre douche froide.

En commentant l'Evangile de Luc, le pape a opposé à la «sagesse» «l'esprit de curiosité» de «quand nous voulons nous approprier le projet de Dieu, de l'avenir, des choses, tout savoir, prendre tout en main».

Il a poursuivi: «L'esprit de curiosité est mondain, il nous mène à la confusion». C'est ce qui se passe lorsqu'on entend dire «Je connais un voyant, une voyante qui reçoit des lettres de la Vierge Marie, des messages de la Madone. Mais la Madone est une mère, pas un chef de bureau de poste, pour envoyer des messages tous les jours».

Difficile de ne pas relier cette réprimande de François contre les voyants et les messages à la «question disputée» des apparitions mariales de Medjugorje.

Ces derniers jours, a circulé le texte d'une directive envoyée le 21 octobre par le préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Gerhard Ludwig Müller, aux évêques des États-Unis, par l'intermédiaire du nonce apostolique dans ce pays, Carlo Maria Vigano.

Révérend Monseigneur Jenkins,

Je vous écris à la demande de Son Excellence Gerhard Ludwig Müller, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, qui demande que les évêques des États-Unis soient avertis, une fois de plus, des faits suivants (en référence à ma lettre du 27 Février 2013). Son Excellence désire informer les évêques que l'un des "voyants", M. Ivan Dragicevic, sera présent à certaines rencontres dans certaines paroisses du pays, au cours desquelles il illustrera des faits concernant le phénomène de Medjugorje. Il a également été anticipé que M. Dragicevic aurait des «apparitions» au cours de ces rencontres.
Comme vous le savez, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi enquête sur certains aspects doctrinaires et disciplinaires du phénomène de Medjugorje. Pour cette raison, la Congrégation a affirmé que, en ce qui concerne la crédibilité des «apparitions» en question, tout le monde doit accepter la déclaration, datée du 10 Avril 1991, des évêques de l'ex-République de Yougoslavie, qui dit: «Sur la base des recherches qui ont été menées , il n'est pas possible de dire qu'il y a eu des apparitions ou des révélations surnaturelles». Il s'ensuit, donc, que le clergé et les fidèles ne doivent pas participer aux rencontres, conférences ou célébrations publiques où la crédibilité de ces «apparitions» est donnée pour acquise.
Dans le but, donc, d'éviter le scandale et la confusion, l'archevêque Müller demande que les évêques soient informés de l'affaire dès que possible. Je saisis cette occasion pour présenter mes sentiments de profonde estime et reste
Sincèrement vôtre dans le Christ
Carlo Maria Viganò
Nonce Apostolique

Comme on peut le voir, dans la lettre, le mot «apparitions» est toujours cité entre guillemets, et l'absence de certitude est réitérée. Ivan Dragicevic est cité comme un «soi-disant visionnaire». Et on voit une évidente incrédulité envers les «apparitions» préannoncées lors de sa 'tournée' (en français dans le texte) américaine.

Ce n'est pas un secret que Müller agit en conformité avec le pape François (??), comme il l'a fait récemment au sujet de la communion des divorcés remariés.

Le dernier mot de l'Eglise sur Medjugorje n'a pas encore été dit. Mais avec le pape actuel, le baromètre vire au mauvais.