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Le cardinal Martini et Humanae Vitae

Dans un livre d'entretiens avec un confrère jésuite écrit en 2008, le cardinal juge sans indulgence l'encyclique de Paul VI (20/5/2014)

En 2008 paraissait "Jerusalemer Nachtgespräche", un livre-entretien du cardinal Martini avec son confrère jésuite Georg Sporschill. Il sera sera plus tard traduit en français sous le titre "Le rêve de Jérusalem".
J'écrivais à l'époque:
«Sur l'euthanasie, la sexualité, le sida, le célibat sacerdotal, la pratique de l'homosexualité, les "couples de fait", la cohabitation avant le mariage, et surtout la contraception dans le couple (contre l'encyclique, "Humanæ Vitæ" de Paul VI) le cardinal Martini est TOLERANT. Une attitude qu'on attendrait d'un responsable politique de gauche ou de centre-gauche mais pas forcément d'un cardinal de l'Eglise catholique romaine».
(benoit-et-moi.fr/2010-I/)

Sandro Magister consacrait à l'ouvrage son billet du 3.11.2008, sous le titre LE JÉSUS DU CARDINAL MARTINI N'AURAIT JAMAIS ÉCRIT "Humanæ Vitæ" (chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/209045?fr=y).
Merci à Monique de me l'avoir signalé.
Voici le passage consacré à l'attitude du cardinal Martini sur "Humanæ Vitæ":

     

Un chapitre du livre prend pour cible explicite l'encyclique "Humanæ Vitæ" (1968) de Paul VI sur le mariage et la procréation. Martini l'accuse d'avoir créé "un tort grave" en interdisant la contraception artificielle: "beaucoup de gens se sont éloignés de l’Eglise et elle s’est éloignée des gens".
Martini reproche à Paul VI d'avoir caché délibérément la vérité, laissant aux théologiens et pasteurs le soin de réparer ensuite les dégâts en adaptant les règles à la pratique:
"J’ai bien connu Paul VI. Par l'encyclique il voulait exprimer son respect de la vie humaine. Il a expliqué son intention à des amis en utilisant une comparaison: il ne faut pas mentir, mais il est parfois impossible de faire autrement; soit il faut cacher la vérité, soit on ne peut éviter de dire un mensonge. C’est aux moralistes d’expliquer où commence le péché, surtout dans les cas où existe un devoir plus grand que la transmission de la vie".
En effet, poursuit le cardinal, "après l'encyclique Humanæ Vitæ, les évêques autrichiens, allemands, et beaucoup d’autres évêques ont pris, quand ils disaient leur préoccupation, une orientation que l’on pourrait poursuivre aujourd’hui". Une orientation qui exprime "une nouvelle culture de la tendresse et une approche de la sexualité plus libre de préjugés". (*)

Mais après Paul VI est venu Jean-Paul II, qui "a suivi la voie d’une application rigoureuse" des interdits de l'encyclique. "Il ne voulait pas que des doutes naissent à ce sujet. Il paraît qu’il avait même pensé à une déclaration qui aurait bénéficié du privilège de l'infaillibilité pontificale".

Et après Jean-Paul II est venu Benoît XVI. Martini ne le cite pas, ne semble pas lui faire confiance, mais il risque cette prévision:

"Le pape ne retirera probablement pas l'encyclique, mais il peut en écrire une autre qui en soit la continuation. Je suis fermement convaincu que la direction de l’Eglise peut indiquer une voie meilleure qu'Humanæ Vitæ. Savoir reconnaître ses erreurs et l’étroitesse de ses vues d’hier est un signe de grandeur d'âme et de sûreté de soi. L’Eglise regagnera de la crédibilité et de la compétence".

Voilà ce que dit Martini. Mais si l’on se limite à lire son dernier livre, on n’apprend rien sur la lettre et encore moins sur l’esprit de cette encyclique très contestée.
A cet égard, le discours du pape sur "Humanæ Vitæ," le 10 mai 2008 (cf. Les quarante ans d'Humanae Vitae (2)), est bien plus instructif. Evoquant son contenu, il a déclaré que "40 ans après sa publication, cet enseignement manifeste sa vérité intacte, mais aussi la prévoyance avec laquelle le problème a été traité".

(*) On ne peut s'empêcher de trouver un écho de ces mots du cardinal Martini dans le rapport Kasper...
La prédiction de Martini trouvera-t-elle confirmation à l'issue des Synodes sur la famille? Car il paraît clair que quand il dit "le pape", il ne parle pas de l'homme mais du ministère, quel que soit celui qui l'assume.