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Mon année aux côtés du Pape émérite

La dernière interviewe en date de Mgr Gänswein, cette fois à l'Avvenire (3/3/2014, mise à jour)

     

Georg Gänswein s'est beaucoup exprimé dans la presse mondiale, depuis le début de l'année: CTV, le 12 février, Famiglia Cristiana le 13, Radio Vatican le 14, Washington Post le 27, sans oublier l'interviewe avec Angela Ambrogetti le 4 janvier (j'en oublie sûrement!).

Difficile de supposer qu'il n'a pas le feu vert de son patron pour le faire; mais il pèse soigneusement ses propos, sachant bien que la moindre indiscrétion pourrait être mal interprétée. Il n'a pas d'autre choix que celui de se répéter, car les questions sont toujours à peu près les mêmes.

Récemment, il a accordé une interviewe au quotidien allemand "Suddeutsche Zeitung", dans laquelle il a fait une révélation très significative relayée par le Point.fr: la Coupe du monde de football avait entraîné une avancée de la date des JMJ de Rio auxquelles Benoît XVI avait décidé de renoncer. Ce qui a provoqué son départ anticipé.

Effectivement, une façon de le faire partir était de décider d'organiser les JMJ à l'autre bout du monde - ce qui avait déjà été fait avec Sidney, qu'il redoutait beaucoup - les vols long courrier étant particulièrement redoutables pour un homme de son âge.
D'ailleurs, en prenant congé des jeunes, à Sidney, Benoît XVI leur avait dit: "Je vous donne rendez-vous à Madrid". Mais à la fin des JMJ de Madrid, il a seulement dit: "J'ai le plaisir d'annoncer que les prochaines JMJ auront lieu à Rio de Janeiro". Sans doute, à ce moment-là, pensait-il déjà qu'il ne pourrait pas y aller.

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La dernière interviewe du Secrétaire du Pape émérite est celle accordée au quotidien de la CEI, L'Avvenire, le 28 février, jour anniversaire de la "Vacance du Siège".
On n'y apprend pas vraiment de choses nouvelles (entre autre, quand même, que la totalité de sa bibliothèque a suivi Benoît XVI dans sa retraite), mais en mettant bout à bout avec ce que nous savons déjà, on arrive à se faire une idée assez précise de la vie du Pape émérite à Mater Ecclesiae.
Le principal intérêt de cet article, c'est que, selon Antonio Socci, Benoît XVI répond à travers son secrétaire aux questions importunes de La Stampa.

     

«Mon année aux côtés du pape émérite»

http://www.avvenire.it/Chiesa/Pagine/intervista-a-ganswein-su-papa-benedetto.aspx
(traduction benoit-et-moi)
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«Très attentif» à la vie de l'Eglise dirigée par le pape François avec qui il a un «très bon rapport» et aucune «opposition», en dépit de ce qu'écrivent, «certains journalistes». «Attentif aussi aux événements du monde - avec un oeil particulier à l'Italie et à l'Allemagne, son pays. Très occupé à expédier une abondante correspondance qui augmente de jour en jour.
Tel est le pape émérite Benoît XVI vu de très près, que l'archevêque Georg Gänswein, son secrétaire particulier et préfet de la Maison pontificale de son successeur, raconte à L'Avvenire.
Nous rencontrons le prélat dans son bureau à la veille du premier anniversaire de la fin du pontificat de Benoît XVI.
Avec lui, nous racontons la vie qotidienne que le pape émérite mène dans le couvent Mater Ecclesiae, édifice qui abritait à l'origine la direction de Radio Vatican, et qui sous Jean-Paul II était devenu la résidence d'une communauté de moniales.

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- Excellence (!!!), qui vit avec le Pape émérite au monastère Mater Ecclesiae?
- Il y a les quatre Memores Domini - Carmela, Loredana, Cristina et Rossella - et moi-même. Pendant la journée, il y a également sa secrétaire Sœur Birgit Wansing qui toutefois rentre le soir chez elle à l'Institut de Schoenstatt dont elle fait partie.

- N'y avait-il pas aussi avec vous, un diacre flamand de la famille spirituelle "Das Werk?"
- Oui, c'est vrai . Il a été avec nous au début, après la renonciation, pendant quelques semaines, mais il est ensuite retourné dans sa communauté pour poursuivre sa formation. Bientôt il va être ordonné prêtre.

- La journée ommence avec la célébration de la Sainte Messe ...
- Comme toujours. Dans la simple belle chapelle du monastère. Ensuite, il y a la récitation du bréviaire et puis le petit déjeuner.

- Et après?
- La première partie de la journée commence. Le Pape émérite prie, lit, s'occupe de sa correspondance privée, recevoir des visiteurs. Ensuite, il y a le déjeuner, qui, avec la sieste, marque l'intervallee avec le deuxième temps de la journée, qui commence à environ seize heures, avec la promenade habituelle dans les jardins du Vatican et la récitation du Saint Rosaire.

- Et vous l'accompagnez?
- Oui, comme je l'accompagne pour les courtes promenades que le pape émérite aime faire après les repas.

- Ensuite?
- La deuxième moitié de la journée, comme dans les matches de football, est similaire à la première. Prière, lecture, correspondance, visites. Avec un rythme plutôt humain, pas celui des casernes prussiennes (ndt: j'imagine que c'est dit avec le sourire...).

- Que lit-il?
- Maintenant, il a plus de temps à consacrer à son premier amour, la théologie. Mais il arrive beaucoup de livres de toutes sortes. Évidemment il ne peut pas tous les lire, mais il regarde, feuillette et - s'il est intéressé - il lit aussi des livres d'histoire et des biographies de grandes personnalités.

- Quelques titres?
- Je préfère les garder dans mon cœur.

- Sa grande bibliothèque a été entièrement transférée au monastère?
- Oui Tous ses livres bien-aimés sont près de lui.

- Il lit les journaux?
- Oui.

- Lesquels?
- Là encore, je ne veux pas citer de noms. Toutefois, il parcourt les journaux italiens et allemands et puis il y a la revue de presse compilée par la Secrétairerie d'État.

- Correspondance, disiez-vous. Il y en a beaucoup?
- Elle a augmenté. Le pape émérite a un bon rythme. Il répond à beaucoup de lettres, soit de ceux qu'il connaît déjà, mais souvent - et il y en a de plus en plus - de gens qu'il ne connaît pas.

- Donc, si on luit écrit, il y a un espoir raisonnable de pouvoir recevoir une réponse?
- Qu'elle soit toujours de lui, on ne peut pas le promettre. Mais si une personne écrit, d'habitude, elle reçoit une réponse.

- Ecrit-il de nouveaux livres, peut-être une autobiographie?
- Non. On ne peut pas prévoir de nouveaux livres sous sa signature. Ni autobiographique ni théologique. Une autre question concerne les volumes de l'Opera Omnia, publié par Herder et la Lev, qui continuent d'être publiés selon le calendrier prévu.

- Il rencontre des personnes qu'il connaît déjà, ou bien aussi de nouvelles?
- Il préfère recevoir ceux qu'il connaît déjà, car ils sont très nombreux. Mais vous ne pouvez pas imaginer combien sont nombreuse les personnes qui veulent le rencontrer, le voir. Je lui soumets toutes les demandes, et ensuite il décide. Pendant ce temps, la liste d'attente est déjà très longue ...

- Écoute-t-il de la musique?
- Certainement oui.

- Genres?
- Surtout de la musique classique: Mozart d'abord, puis Bruckner, Liszt, Bach, Schubert, Beethoven, Brahms. Mais aussi de la musique religieuse: le chant grégorien et la polyphonie. Et bien sûr, ne peuvent manquer les enregistrements des Regensburger Domspatzen de son frère Georg.

- Il joue?
- De temps en temps. Dans la soirée, après le dîner.

- Quels auteurs?
- Il aime improviser. Mais je reconnais aussi quelques morceaux de Mozart et d'autres compositeurs qu'il préfère.

- Il regarde la télévision?
- Seulement les nouvelles de 20h, ou 20h30 s'il y a un hôte, et que le dîner se prolonge.

- Il voit des DVD?
- De temps en temps.

- Lesquels?
- Les vieux films de Don Camillo avec Fernandel, et ceux de la série Rex, le berger allemand célèbre aussi en Italie, de belles vidéos sur des saints et même certains épisodes de Don Matteo. Il y a aussi quelques documentaires intéressants que nous recevons.

- Il suit la politique?
- Oui, autant que possible. Avant tout les grandes questions internationales. Mais aussi les affaires italiennes et celles de son pays.

- Il fait des commentaires?
- Bien sûr, mais je préfère garder le silence ...

- Il suit la vie de l'Eglise?
- Attentivement.

- Et donc aussi l'activité du Pape François?
- Évidemment, au jour le jour.

- Egalement les nominations?
- Il les lit quand elles sont publiées dans L'Osservatore Romano.

- le Pape et le Pape émérite se parlent fréquemment?
- Il y a une très bonne relation entre eux. Les moyens par lesquels ils se parles sont divers. Ils se téléphonent, s'écrivent, se voient, mangent ensemble. Plusieurs fois, le Pape François a été invité à déjeuner au monastère. Une fois, après Noël, le pape émérite a également été à Santa Marta.

- Il y en a qui les opposent.
- C'est un jeu de prédilection, tout d'abord par certains journalistes. Que je n'aime pas. J'ai la grâce de vivre avec un et de travailler avec l'autre. Et ainsi je peux me permettre de dire que je les connais assez bien tous les deux. Je ne les vois pas comme opposés, mais comme complémentaires. Il est évident que le style, les gestes et même le mode de gouvernement du pape Françis sont différents de ceux du pape Benoît. Mais on ne peut pas créer une opposition uniquement sur cela. Faire les choses différemment ne veut pas dire les faire en sens inverse. On doit toujours avoir à l'esprit ce que le pape émérite a écrit au professeur Hans Küng et répété à Tornielli, quand il a exprimé «identité de vues et amitié de cœur» envers le pape François.

- Sur la liturgie aussi, il y a des sensibilités différentes.
- C'est vrai. C'est un fait objectif, et ce n'est pas offensant de le dire. Mais même dans ce cas, je le répète, faire les choses différemment ne veut pas dire les faire dans le sens opposé.

- Comment le Pape émérite a-t-il suivi et suit-il le débat qui a eu lieu au Consistoire et chemin synodal sur la pastorale de la famille?
- Il suit avant tout à travers les médias. Il prend donc acte de ce qui s'écrit, de ce dont on parle, de ce qui se décide. En mode passif ad extra et en mode actif ad intra.

- C'est-à-dire?
- Il écoute et lit ce qu'on a dit du Consistoire ou du questionnaire envoyé par le Secrétariat général du Synode. Mais il n'appelle personne «en haut» pour donner des conseils ou des instructions. Il s'est retiré. Il ne prend plus part au gouvernement de l'Eglise. Et cela n'a pas été dit une fois, puis oublié. Cela vaut, et vaudra à l'avenir.

- Le Pape émérite ne s'est jamais repenti d'avoir démissionné?
- Jamais. Pour cela aussi, il vit totalement en paix avec lui-même et avec le Seigneur.

- Et de se faire appeler Pape émérite?
- Non plus. Il considère que ce titre correspond à la réalité.


- A-t-il jamais pensé à se retirer en Allemagne?
- Pour autant que je sache, jamais. Dans mes conversations avec lui, je n'ai jamais ressenti ce désir, cette nostalgie, cette idée.