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La hiérarchie de l'Eglise et les chrétiens d'Irak

Des déclarations des cardinaux Parolin et Maradiaga, et une analyse iconoclaste du site <La voix de la Russie> qui titre sur "l’effrayant balbutiement du Vatican devant la souffrance et la persécution des chrétiens" (27/8/2014)

>>> Image ci-contre: Chrétiens fuyant Mossoul, site du Patriarcat Latin de Jérusalem.

     

Le déni de réalité du cardinal Parolin

Accordant une interviewe à Andrea Tornielli dimanche dernier, à la fin de la messe pour le centenaire de la mort de saint Pie X, le cardinal secrétaire d'Etat Parolin a affirmé que le conflit en Irak n'est «absolument pas un affrontement entre Islam et christianisme», et aussi que «La majorité des musulmans rejettent ces méthodes brutales et inhumaines. Nous espérons que le monde islamique saura dire un mot...».
Voici ce qu'écrivait Andrea Tornielli le 26 août (vaticaninsider.lastampa.it):

Il y a moins d'une semaine, lors du dialogue avec les journalistes dans l'avion, le pape François a expliqué qu'il est licite d'«arrêter l'agresseur injuste», précisant toutefois qu'arrêter n'équivaut pas à bombarder, et que la décision sur la façon d'intervenir doit être prise par le communauté internationale, les Nations Unies, et non à partir d'un seul pays.

- Eminence, que pensez-vous de ce qui se passe en Irak?
«Le pape a déjà parlé, je ne commente pas ses paroles. Je pense que la situation est une source de grande préoccupation pour les chrétiens et pour toutes les autres minorités. Nous espérons vraiment que les personnes déplacées puissent rentrer dans leurs villages et que l'on puisse reconstruire, à travers une action politique d'inclusion, un Irak dans lequel tous les groupes minoritaires ont leur place et peuvent contribuer à l'édification du pays».

- Vous espèrez un sursaut de conscience de la part de la communauté internationale?
«Certes, la communauté internationale doit intervenir. Elle doit intervenir dans le sens où elle doit se rendre présente dans cette situation. Il n'est pas possible que le pays, dans la situation où il est actuellemnt, se retrouve seul pour résoudre ses problèmes».

- Certains présentent ce qui se passe en Irak comme un affrontement entre le christianisme et l'islam. Est-ce une lecture correcte ou bien une simplification?
«Je pense que c'est une simplification. J'ai lu ces derniers jours plusieurs rapports du nonce en Syrie, où il disait combien les musulmans souffrent de cette situation et sont solidaires des chrétiens. Donc, ce n'est absolument pas un affrontement entre l'islam et le christianisme. Il y a dans l'Islam, et je pense qu'ils sont la majorité, des personnes qui refusent des méthodes aussi brutales et anti-humaines. Malheureusement, certaines franges les assument pour elles-mêmes, mais je pense quc ces méthodes ne sont pas partagées par un grand nombre de leurs coreligionnaires. Nous espérons que, de leur part aussi, il y aura une parole dans ce sens, et donc distinguer entre ce qu'on peut faire et ce qu'on ne peut pas faire, nous espérons qu'il y aura aussi un mot du monde musulman».

- Il y en a qui ont accusé le Saint-Siège d'être peu intervenu récemment, d'avoir été trop silencieux devant le drame irakien ...
«Il n'y a pas toujours besoin de crier pour résoudre des problèmes. Il peut aussi y avoir d'autres moyens, d'autres méthodes. De toute façon, le Pape a parlé de nombreuses fois, on ne peut certainement pas dire à l'Église qu'elle a été trop silencieuse. Et puis, on s'efforce avant tout de donner une main concrètement pour résoudre ces problèmes».

Monique remarque:

Si le Cardinal Parolin veut dire que les chrétiens n'ont pas déclaré la guerre aux musulmans, il dit vrai. S'il veut dire que seule une frange infime des musulmans a déclaré le djihad aux chrétiens, on est dans l'auto-persuasion destinée à justifier l'inaction. C'est ce que Mgr Negri appelle «ne pas affronter la réalité».
Le bras-droit du Pape se complaît-il dans le déni de la réalité?... Et même s'il s'agit d'une frange infime, elle sème la mort!

     

Le souci du cardinal Maradiaga

La position du Cardinal Parolin est partagée par son confrère Maradiaga, si l'on en croit cet article de Zenit daté du 26 août, faisant état d'une lettre qu'il a adressée le 15 août, en qualité de président de Caritas Internationalis, au patriarche de Babylone des Chaldéens, Mgr Louis Raphaël Sako, et à Mgr Shlemon Warduni, président de Caritas Irak.
Le cardinal dit qu'il a « le cœur meurtri au déplacement de plus d’un million deux cent mille personnes, qui fuient l’horreur dans l’espérance de sauver leur vie et celle de leur famille... Malgré les progrès en matière de reconnaissance des droits des minorités au niveau international, chrétiens, yézidis, Kurdes, Shabaks… et d’autres peuples sont victimes d’atrocités inouïes».
Il ajoute qu'il est « profondément préoccupé par les conséquences que cette récente flambée de violence pourrait avoir sur le dialogue entre musulmans et chrétiens » et « sur la coexistence pacifique désirée par la majorité des musulmans et des chrétiens au Moyen-Orient, comme partout ailleurs dans le monde ».
Avant de conclure en s'adressant aux militants de l'Etat islamique, «les exhortant à mettre fin à leurs brutalités et à travailler pour la construction d’une société "où tous les êtres humains, qu’ils appartiennent ou non à des communautés minoritaires, puissent vivre en paix" ».

Là encore, Monique, qui a attiré mon attention sur l'article, se dit étonnée (comme moi) que dans une situation d'urgence absolue, ce qui préoccupe avant tout le cardinal ce ne sont pas toutes ces vies détruites, c'est la mise en péril du DIALOGUE INTER-RELIGIEUX!
Quant à son exortation "aux militants de l'Etat islamique", elle relève de la naïveté, ou de l'aveuglement....
On en revient encore à Mgr Negri: «L'Église n'a pas besoin de discours creux et, que je sache, Dieu non plus».

* * *

Les propos de ces deux éminents représentants de la hiérarchie de l'Eglise semblent la parfaite illustration de cet article, issu du site LA VOIX DE LA RUSSIE, que m'a transmis un lecteur (que je remercie!).
S'agissant d'un site que l'on découvre, ou que l'on connaît juste de nom, il est toujours important de savoir à qui, à quoi, on a affaire. J'ai donc immédiatement consulté wikipedia, et les nombreuses et inhabituelles mises en garde qui accompagnent la notice m'ont amené à penser qu'il s'agissait d'un source d'information alternative tout à fait crédible (et pas que sur ce sujet!!) ou du moins autant que les grandes agences qui alimentent l'ensemble des médias occidentaux pour pratiquer leur bourrage de crâne quotidien. De toute façon, mes lecteurs sont assez grands pour se faire leur propre opinion!

L'intégralité est à lire ici: french.ruvr.ru/2014_08_26/L-effrayant-balbutiement-du-Vatican...
Extraits:
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La Voix de la Russie

L’EFFRAYANT BALBUTIEMENT DU VATICAN DEVANT LA SOUFFRANCE ET LA PERSÉCUTION DES CHRÉTIENS
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L’État islamique du Levant (ISIS) continue de persécuter des milliers des chrétiens au Proche-Orient : la réponse des autorités romaines étonne pour sa réticence et pour son manque de réalisme et de principes clairs.

Dans l’avion de retour de la Corée du Sud à Rome, le Pape François a répondu aux journalistes sur le massacre des chrétiens en Irak. Il a affirmé que pour stopper le jihadistes « il ne faut pas bombarder, ni faire la guerre, mais les arrêter », et que la décision sur une intervention au Proche-Orient doit être remise aux Nations-Unis, c’est-à-dire justement à l’organisation qui pendant soixante-dix ans s’est montrée totalement incapable de gérer tout conflit et qui mène aujourd’hui une politique violemment opposée aux principes chrétiens, du soutien à l’avortement jusqu’à l’idéologie du genre.
D’ailleurs, comment arrêter des combattants cruels et puissants tel que les jihadistes en Irak sans une action militaire (« ni bombarder, ni faire la guerre »), c’est un mystère dépassant en même temps la raison et la foi.

Ces déclarations étonnantes ne sont que le dernier anneau d’une chaîne de réticences que le Vatican a montrée depuis l’élection de Jorge Mario Bergoglio devant la souffrance et les persécutions des chrétiens.
Alors qu’on observe des dénonciationss très fortes des maux de l’économie contemporaine (sans pour autant affirmer clairement à quel modèle alternatif on devrait faire référence), ou bien une sollicitude montrée à coup de fils envers des non-chrétiens, des journalistes athées etc., on constate un certain silence sur ce thème.
Si pas mal d’évêques locaux dénoncent les persécutions, le Pape et les autorités ecclésiastiques romaines sont au contraire très prudents : on aurait du mal à repérer des dénonces aguerries, par exemple, sur les cas de Asia Bibi ou Meriam Ibrahim, deux femmes chrétiennes condamnés à mort pour apostasie dans des pays musulmans.

Force est de constater que le pontificat du Pape François se caractérise pour une volonté de plaire à une certaine opinion publique laïque et progressiste, alors que le christianisme devrait être « signe de contradiction » devant le monde.
Pour s’en convaincre, il suffit de comparer la timidité des déclarations sur la persécution des chrétiens avec l’énergie des appels à l’aide humanitaire lors de la mort des migrants au large de Lampedusa.
Le mot d’ordre de ce pontificat, avec toute évidence, c’est bien le « dialogue », qui ressemble toutefois à une conversation incessante où les parleurs causent à l’infini sans jamais s’entendre. Le juste refus de la violence contre les innocents se transforme ainsi en un pacifisme lâche que le christianisme apostolique (catholique et orthodoxe) n’a jamais prêché.
(...)

On ne veut pas dire ici que les autorités catholiques auraient dû nécessairement appeler aux armes les nations de tradition chrétienne contre l’État islamique du Levant.
Ce qui est étonnant, c’est surtout la timidité avec laquelle le Vatican juge les massacres jihadistes et, plus en général, les persécutions antichrétiennes dans le monde entier.
Le maximum auquel on arrive, c’est quelques mots génériques contre une imprécisée « violence religieuse », sur le fait qu’on est tous égaux devant Dieu et qu’on ne devrait jamais tuer quelqu’un d’autre s’il a des convictions religieuses différentes.
Il s’agit de propositions d’une banalité déconcertante, qui évitent soigneusement d’affirmer qu’en Syrie et en Irak on est devant à une tuerie de chrétiens perpétrée par des musulmans sans qu’aucune autorité islamique ne vienne demander pardon (comme les représentants de l’Église catholique aiment faire souvent pour les fautes réelles ou présumées du christianisme dans l’histoire). De même, pas un mot fort sur le sens du martyre chrétien, sur la foi témoignée jusqu’à l’effusion du sang qui devrait donner force à chaque chrétien ayant du mal à vivre sa vie religieuse dans un monde hostile (c’est justement cela qu’on s’attendrait en principe da la part du Chef de l’Église catholique).

Pendant qu’en Irak le jihadistes continuaient de crucifier, tuer et chasser les chrétiens, le Pape a Séoul béatifiait 124 martyrs coréens.
Mais ses mots (voir son homélie)ont été là aussi stupéfiants pour le manque de sens religieux, pour le silence sur la valeur du sacrifice et de la lutte qui selon Saint Paul est le signe de l’existence chrétienne : « J'ai combattu le bon combat, j'ai terminé ma course, j'ai gardé la foi » (2 Tm, 4,7).
Bergoglio, au contraire, a affirmé que l’héritage des martyrs « peut inspirer tous les hommes et femmes de bonne volonté à œuvrer en harmonie pour une société plus juste, libre et réconciliée, contribuant ainsi à la paix et à la défense des valeurs authentiquement humaines, dans ce pays et dans le monde entier ».
Il s’agit d’une contradiction évidente : quelle paix et quelle harmonie peuvent inspirer la lutte entre persécuteurs et persécutés ? Au contraire, le martyre représente justement le contraste entre le chrétien et le monde, expliqué par Saint-Augustin comme la lutte entre le deux Cités. Le Christ lui-même a été très clair sur le sujet : « Je vous laisse la paix; je vous donne ma paix; je ne vous la donne pas comme le monde la donne » (Jn 14, 27). Cela veut dire que la vraie paix n’équivaut pas à l’absence de conflit et à une promotion de valeurs humaines « comme le monde la donne », mais suppose l’effort d’aller jusqu’à bout dans la foi, même lorsque cela détermine un conflit avec les autres.

Devant une persécution objectivement terrible, beaucoup de fidèles chrétiens voudraient écouter peut-être quelque chose de plus opportun de la part des autorités catholiques. Mais il semble que l’orientation générale des hiérarchies ne va pas changer si vite. Par exemple, le prochain 1er septembre, à Rome, va être organisé un « match (de football) interreligieux pour la paix» fortement voulu par le Pape François. Reste à savoir s’il y aura aussi des joueurs de football venant de l’État islamique du Levant: il n’y a aucun doute qu’ils aimeraient beaucoup inscrire le énième but contre les chrétiens.



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