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Adieu à Burke?

Le Père Longenecker a beaucoup de réserves à formuler sur l'éviction du cardinal Burke, qu'il voit comme une grosse maladresse du pape ...qu'elle pourrait bien être, en effet! (10/11/2014)

Adieu à Burke?

Original ici:www.patheos.com/blogs/standingonmyhead
Traduction de Anna
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Le transfert du Cardinal Burke du poste de préfet de la Signature apostolique à celui de patron des Chevaliers de Malte est un geste étonnant qui va certainement se révéler désastreux pour le Pape François.

Que cela lui plaise ou non, lors du dernier synode sur la famille le cardinal Burke s'est imposé comme la figure de proue de la résistance conservatrice au Pape François. Dans son interview à Aletheia, Burke se défend de l'accusation de ne pas être loyal au Saint Père, mais ce n'est pas la perception qu'en ont les experts des médias progressistes ou conservateurs. Burke a affirmé que l'Eglise semble être «sans gouvernail»; il s'est révélé le critique le plus franc des modernisateurs kaspériens. Michael Sean Winters (du National Catholic Reporter, donc progressiste) et Fr. Z. (perçu comme plutôt conservateur) ici s'accordent à dire que le nouveau rôle largement cérémoniel du cardinal Burke, au lieu le faire taire, le libère de réelles responsabilités, lui donnant ainsi la liberté de devenir la voix de la résistance à ce que plusieurs perçoivent comme un programme de plus en plus progressiste au sein du Vatican.

Burke va probablement continuer de critiquer les "kasperiens" comme le cardinal Baldisseri, secrétaire du Synode sur la Famille, et le progressiste Archevêque Bruno Forte, et son évidente rétrogradation va lui donner un mégaphone mondial et un statut de figure médiatique. Les médias aiment les conflit et ils aiment les figures de proue et les représentants d'une position particulière. Qu'il le veuille ou non, et que ce soit vrai ou non, en transférant Burke de cette façon le Pape François a créé un mégaphone médiatique pour ses opposants conservateurs de plus en plus déçus.

Damian Thompson a écrit un article particulièrement caustique cette semaine, disant: «Prenez garde Pape François, la guerre civile catholique a commencé», tandis que le chroniqueur du New York Times Ross Douthat parle du chaos qui s'est produit au synode, d'indices de rébellion dans ses rangs et d'une menace de schisme.

Tout cela est désastreux pour la mission de l'Eglise, et en semblant vouloir rétrograder le Cardinal Burke, le Pape François a non seulement donné aux conservateurs un leader clair, mais il a fait de Burke une «cause célèbre» (en français dans le texte) et une espèce de martyre. Nombre de conservateurs qui voient déjà le Pape émérite Benoît comme leur «vrai pape» vont se rallier autour de Burke. Il n'y a rien de mieux pour unir une faction que le sentiment d'être persécutés, et peu de chose est plus efficace pour rallier ceux qui se sentent marginalisés que l'idée d'être persécutés par une cabale de sombres figures complotant contre eux derrière la scène. D'autant plus excitant s'il s'agit d'un cercle intérieur du Vatican.

Que cela soit réellement en train de se passer ou non, n'est pas le problème; que le Cardinal Burke se voie comme un Archevêque Lefebvre d'aujourd'hui ou non, n'est pas la question; que le Pape François et sa bande de copains soient réellement des progressistes en secret déterminés à détruire l'Eglise catholique de l'intérieur ou non, tout ceci n'est pas important.

Le transfert de Burke d'abord de la Congrégation des Evêques et maintenant de la Signature Apostolique va apparaître non seulement comme une rétrogradation, mais en plus d'une nature très personnelle. Personne n'a suggéré qu'il ait mal fait son travail, ni avoir eu vent de scandale ou d'irrégularité. Par conséquent, les gens vont en conclure, à tort ou à raison, que le Pape François n'aimait pas ce type et que donc il l'a viré. Que ce soit vrai ou pas, est sans importance.

Ce qui compte, c'est combien de catholiques conservateurs vont percevoir ainsi ce qui est en train de se passer, et que cette perception va entrainer leurs réactions et les événements futurs dans l'Eglise catholique.

En outre, c'est aussi la façon dont les progressistes vont interpréter le transfert. Ils se réjouiront du départ de Burke, et leurs gloussements de triomphe vont ajouter à la division dans l'Eglise, poussant les conservateurs à se serrer les coudes et charger leurs pistolets (load their muskets).

Concrètement, l'effet réel de transférer le Cardinal Burke de la Signature Apostolique peut se révéler négligeable.

Mais l'impact symbolique sera énorme, et il est difficile de voir comment il pourrait être autre chose qu'un désastre pour la papauté du Pape François, les réformes qu'il entend introduire, et l'Eglise en général.

Je peux me tromper et je ne suis pas du tout un expert des choses qui se passent au Vatican, mais si un bon nombre de catholiques conservateurs lisent les événements de cette façon, alors, comme l'a remarqué Ross Douthat, le Pape François peut se retrouver à essayer de guider non pas un troupeau de moutons dociles, mais une horde de bovins têtus, pas juste des boeufs stupides, mais des taureaux en colère qui, la tête basse et grattant le sol, sont prêts à charger.