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Une tâche inédite pour la CDF

Elle doit "structurer théologiquement le Pontificat" a dit son Préfet, dans sa récente interview à La Croix. Commentaire dépité d'Andrea Tornielli.

Cela fait un certain temps que je ne consulte plus Vatican Insider, et que je n'ai donc plus l'occasion de lire Tornielli. C'est le site Chiesa e Post Concilio qui a attiré mon attention sur cet article de lui, et la remarque effectivement curieuse du cardinal Müller dans l'interview à la Croix du 29 mars dernier.
On perçoit chez Tornielli quelque chose entre l'inquiétude et le dépit - peut-être une menace contre le cardinal Müller, comme je l'ai lu dans les commentaires de <Chiesa e post Concilio>. Il voit dans les propos du Préfet de la CDF une sorte de mise sous tutelle du Pontificat (chose impensable au moins sous les deux pontificats précédents).
Vue sa proximité avec le Pape, sa réaction ne me paraît pas insignifiante...

Müller suggère une nouvelle tâche pour la Doctrine de la Foi

Le cardinal allemand annonce une compétence inédite de son dicastère: celui de «structurer théologiquement un pontificat»

Andrea Tornielli
vaticaninsider.lastampa.it
Ma traduction
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Le Cardinal Gerhard Ludwig Müller, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, dans l'une des nombreuses interviews concédées au cours des dernières semaines et focalisées sur le prochain Synode, a parlé d'une nouvelle tâche de son dicastère. Une tâche qui n'a jamais été citée dans les documents qui se rapportent aux compétences spécifiques de l'ex-Saint-Office.

Le cardinal allemand, interviewé par "La Croix" , a en effet déclaré:

« L’arrivée sur le Siège de Pierre d’un théologien comme Benoît XVI est sans doute une exception. Mais Jean XXIII n’était pas un théologien de métier. Le pape François est aussi plus pastoral, et la Congrégation pour la doctrine de la foi a une mission de structuration théologique d’un pontificat.»

Donc, d'après ce que déclare Müller, l'ex Saint-Office doit «structurer théologiquement» le pontificat de François. Et c'est probablement pour cette raison que le préfet intervient si souvent publiquement, comme ce n'était jamais arrivé avant.

Il s'agit d'une innovation significative, puisque, selon l'article 48 de la Constitution apostolique sur la Curie romaine, «Pastor Bonus» (ndt: introuvable actuellement en français sur le site du Vatican sans doute encore en cours de réaménagement), promulguée par Jean-Paul II en 1988, «la tâche propre de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi est de promouvoir et protéger la la doctrine de la foi et les moeurs dans le monde catholique».
Tandis que le pape «par la volonté du Christ lui-même», comme l'a rappelé également François en clôture du Synode de 2014, est le «pasteur et docteur suprême de tous les fidèles» (canon 749).
Jusqu'à il y a quelques décennies (le dernier à le faire était Paul VI) c'est le pape lui-même qui présidait en personne la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, précisément à cause de cette tâche qui revient à lui seul en vertu de la primauté pétrinienne. Une primauté qui appartient à l'évêque de Rome, celle de présider «dans la charité», tranchant, au cas où elles surgiraient, les questions théologiques.

Les paroles du Cardinal Müller, avec l'introduction de la tâche inédite, et à ce jour pas encore officialisée de «structurer théologiquement un pontificat» sont passées presque inaperçues. Si d'un côté elles ouvrent de nouveaux scénarios doctrinaux par rapport à la tradition de l'Église, de l'autre, elles laisseraientt à penser que, selon Müller, l'actuel pontificat - comme d'ailleurs celui de saint Jean XXIII - n'a pas de «structure» théologique suffisante.

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