Mgr Rogelio Livieres Plano, RIP

Ejecté brutalement de son diocèse de Ciudad del Este (Paraguay) par François en septembre dernier, cet évêque avait vécu très douloureusement la façon dont cela s'était passé. Il vient de mourir. En hommage, l’une de ses dernières réflexions : «Pourquoi les gens quittent l’Eglise». Information de Carlota

>>> Articles de mon site en relation avec cette affaire: tinyurl.com/o7ejjff

 

(Carlota)

Rogelio Ricardo Livieres Plano né à Corrientes (Argentine), le 30 août 1945, a fait toute sa scolarité et ses études universitaires (d’avocat et de notariat) à Assomption (Paraguay). Il se forma ensuite à l’Ecole Nationale d’Administration Publique de Madrid. Ordonné prêtre le 15 août 1978, en appartenant à la Prélature de la Sainte Croix et de l’Opus Dei, il fut reçu docteur en droit canonique à l’Université de Navarre (Espagne).
Il fut nommé par le Pape Jean-Paul II évêque du diocèse paraguayen de Ciudad del Este, le 12 juillet 2004
Le 25 septembre 2014, sur ordre de Rome, il dut quitter son siège épiscopal, dans des conditions douloureuses et qui ont révolté un certain nombre de catholiques qui voyaient en lui un «saint et vaillant évêque», appréciant notamment la fécondité vocationnelle de son séminaire dans un Paraguay de plus en plus décatholicisé et le courage de ce prélat dans sa lutte contre certaines « incohérences » de l’ «Église des catholique adultes».
Moins d’un an plus tard, et tout juste trente sept ans après son ordination, il vient de décéder, le 14 août 2015, dans un hôpital de Buenos Aires où il était hospitalisé depuis déjà quelques temps pour de graves problèmes de santé.
À sa messe de Requiem, Mgr João Evangelista Martins Terra, évêque auxiliaire émérite de Brasilia, n’a pas hésité à déclarer : «Mgr Rogelio est au ciel. Il a été crucifié dans la vie et c’est pour cela que Dieu l’a emporté le jour d’un autre martyr (en référence au frère franciscain Maximilien Marie Kolbe, qui s'est offert de mourir à la place d'un père de famille dans le camp de concentration nazi à Auschwitz le 14 août 1941). Il a fait le plus important que doit faire un évêque : former des prêtres».
Mgr Livieres avait encore sa maman âgée de quelque quatre-vingt-dix ans…

Le mieux que je puisse faire pour évoquer Mgr Livieres, c’est peut-être de traduire l’une de ses dernières réflexions parues sur le site <Adelante La Fe> (fév 2015), en rapport avec la situation particulière de l’Amérique hispanique, mais dont nous pouvons tirer enseignement.
Original ici: www.adelantelafe.com/mons-livieres-por-que-se-va-la-gente-de-la-iglesia/
Les mots en gras sont de mon initiative

Pourquoi les gens quittent l'Eglise

Mgr Rogielo Livieres
10 février 2015
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Depuis quelques décennies nous assistons à une constante diminution du nombre de catholiques en Amérique latine. Beaucoup de ceux qui abandonnent l’Église ne le font pas parce qu’ils ont cessé de croire en Dieu, mais par ce qu’ils rejoignent d’autres groupes religieux, principalement des sectes pentecôtistes.

Dans quelques pays les chiffres sont particulièrement dramatiques : seulement 46% des gens se déclarent catholiques au Guatemala et 66% au Brésil. Rappelons-nous que, il n’y a guère de décennies, il s’agissait de pays qui étaient catholiques à plus de 90%, avant que ne commence à avoir lieu cette migration [vers les sectes].

Comment peut-on expliquer cet échec de la pastorale de l’Église dans des pays d’ancienne condition catholique?
Naturellement notre réponse rentre dans le terrain de la conjecture. Plus qu’une cause, il y a un ensemble de causes qui explique ce phénomène. Mais pour l’instant il est intéressant de signaler la plus importante d’entre elles. Et cela, évidemment, dépend de celui qui donne son opinion.

Personnellement je pense que les gens recherchent dans la religion, dans leur foi, une sécurité spirituelle et un sens clair de leur existence. Des croyances solides qui viennent de Dieu et ont été expérimentées de façon positive tout au long des siècles. Au contraire, les catholiques, depuis des décennies, rencontrent généralement chez leurs évêques et leurs prêtres, des relativisations, et pas des certitudes de foi : des doutes et des interprétations trop personnelles qui diluent la vérité révélée par Dieu et la foi partagée par la communauté de l’Église à travers les siècles.

Une personne qui vit de la foi catholique recherche, en plus de la solidité, une harmonisation entre cette foi et la raison
. Cette foi «expliquée» et «raisonnable» va devenir monolithique au moyen de la prière et des sacrements, à partir desquels va s’approfondir la relation personnelle avec Dieu. Dans ce dialogue constant avec le Seigneur, cette personne va grandir dans la fermeté de sa foi et en même temps, elle la transmettra aux autres quand elle les verra hésitants, déconcertés ou titubants.

Le relativisme, et une formation doctrinale pauvre, - quoique parfois sophistiquée - a dilué les certitudes de la foi et l’intensité de la vie spirituelle parmi nous. L’Église a besoin de revenir à la solidité doctrinale du passé, si elle ne veut pas se désagréger, perdre tout son sang, en mille sectes, même si elles subsistent à l’intérieur de l’Église elle-même.

Il est vrai que Jésus a promis d’apporter son assistance à l’Église jusqu’à la fin des temps. Mais il nous a aussi prévenus qu’à son retour, la foi de beaucoup se sera éteinte, et l’Église se verra réduite à un petit troupeau, à une poignée qui aura réussi à échapper à la désagrégation spirituelle et doctrinale. C’est à nous, à chaque moment, qu’il revient d’être fidèles au Christ et ainsi d’attirer le monde entier à la lumière de la foi.

Beaucoup ont envisagé d’une manière erronée le dialogue Église-monde. Nous ne rendons pas un service au monde quand nous accourons à ce dialogue avec les mêmes perplexités que celles de ce monde. Le dialogue se transforme ainsi fréquemment en un échange de doutes.

Là où l’on réalise réellement ce dialogue avec le monde, c’est dans nos propres cœurs quand nous considérons les choses à la lumière du rayonnement du Christ. Les chrétiens sont le monde lui-même, sacralisé, orienté vers Dieu et pour cette raison plein et heureux.

Je fais référence au monde dont parle saint Jean quand il dit que les ennemis que nous craignons sont trois: le monde, le démon et la chair. Ici le monde signifie tout ce qui est créé et qui n’a pas été encore racheté dans le cœur du chrétien par l’œuvre de la grâce.

Nous devons vivre en enfants de Dieu et nous adresser à nos frères, les autres hommes, avec cette connaissance du Père et de son envoyé, Jésus Christ, par qui Il nous fait participer à la vie éternelle. Les splendeurs de la vérité de la foi doivent se refléter dans notre conduite et s’expliquer de façon raisonnable, dans notre dialogue avec le reste du monde. En outre nous devons cultiver un comportement humain qui se préoccupe de toutes choses dans un esprit de simplicité, et sans prétendre «pontifier» envers les autres dès la première rencontre.
Les temps et les moyens viendront, où nous pourrons leur suggérer une rencontre aimable avec les vérités systématisées pour nous dans le Catéchisme de l’Église Catholique ou, plus simplement, le Compendium du Catéchisme.

Quand nous faisons participer les vérités de Dieu au dialogue avec les hommes, la plupart d’entre eux respectent nos convictions et nous remercient pour notre paix intérieure. C’est ainsi que nous dialoguons avec le monde, à partir de la vérité que nous possédons, non pas parce qu’elle serait la nôtre, mais parce qu’elle est celle de notre Père, et par conséquent, de nous tous. L’expérience nous montre que, quand nous sommes fidèles à la vérité de l’Évangile en toute plénitude et certitude, les hommes commencent à retourner à l’Église, celle qu’ils ont quittée seulement parce qu’ils n'y trouvaient pas d’aliment suffisant pour leurs vies.
Accomplissons donc, ce que le Seigneur nous a commandé : «Allez et prêchez à toutes les nations».