Un plan B au Synode?

Devant les oppositions croissantes au "plan Kasper", ses partisans (et le Pape?) cherchent une alternative pour arriver malgré tout à leurs fins, en modifiant les modalités juridiques du processus canonique d'annulation du mariage

Le texte ci-dessous (que j'ai traduit partiellement) est publié sur la Bussola d'aujourd'hui.

L'auteur, qui évoque des perspectives inquiétantes, semble penser (ingénument?) que "tout se fait à l'insu du Pape". On peut évidemment en douter, et même plus que cela!
D'ailleurs, la manoeuvre apporte un éclairage nouveau sur le "limogeage" du cardinal Burke - indéniablement du fait du Pape: on comprend mieux pourquoi il était urgent d'éloigner le brillant et rigoureux canoniste. D'une pierre deux coups: on envoie un avertissement aux anti-bergogliens, mais sutout on se débarrasse d'un empêcheur de tourner en rond.

Synode, voici le plan B pour le «divorce catholique»

Marco Benelli
6 septembre 2015
www.lanuovabq.it

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Le débat sur la famille, provoqué par ce qui a émergé au cours du Synode extraordinaire et en marge de celui-ci, a concerné principalement le versant théologique et doctrinal. Cependant, en concomitance avec ces événements, le Saint-Père a accompli un acte important, passé presque inaperçu: la création d'une commission spéciale chargée d'étudier la réforme du processus matrimonial canonique, présidé par Mgr Pio Vito Pinto, doyen du Tribunal de la Rote Romaine.
Si l'intention déclarée du Pontife était de vérifier la possibilité de parvenir plus rapidement et plus objectivement à la sentence sur la validité de nombreux mariages, l'analyse de la pensée des membres de la Commission permettait d'emblée de comprendre quelles étaient les solutions vers lesquelles on voulait aller: l'élimination de l'obligation de la double sentence conforme, l'institution d'un juge unique de première instance, voire "l'administrativisation" du processus canonique de nullité matrimoniale.

En ce qui concerne le premier aspect - l'obligation des deux décisions conformes, - tant le congrès qui s'est tenu à l'Université Grégorienne en janvier dernier, dix ans après l'Instruction Dignitas Connubii - dont, selon certains participants, on a célébré à cette occasion l'enterrement, même si ce n'était pas en grande pompe -, que la conférence sur la famille, tenue à l'Université de la Sainte Croix en mars, ont enregistré comme un fait déjà établi, son élimination. Il convient à cet égard de noter que même des Professeurs qui tout au long de leur carrière ont soutenu l'importance et souligné la valeur de cette disposition de loi, ont accepté une reddition inconditionnelle, allant jusqu'à postuler le contraire de ce qu'ils avaient affirmé pendant des décennies.

Sur les deuxième et troisième aspects - institution d'un seul juge de première instance et "administrativisation" du processus canonique de nullité matrimoniale - en revanche, on a enregistré davantage de résistance à leur introduction et plusieurs critiques argumentées.

Toutefois, il convient de noter que le débat, en plus de rester dans un milieu scientifique et de spécialistes - exception faite pour les écrits des cardinaux Raymond Burke et Velasio De Paolis, publiés dans le livre «Rester dans la vérité du Christ» - n'a pas eu le grand écho qu'il aurait mérité.

Le sentiment est que le même courant qui a jusqu'ici poussé pour le changement doctrinal en matière d'indissolubilité du mariage, à travers la carte de la pastorale, embrasse désormais cet argument comme un «plan B». En d'autres termes, compte tenu de l'escalade de la confrontation sur le plan doctrinal et la croissance du front opposé à la «théorie Kasper» - il suffit de citer, par exemple, les interventions des évêques polonais et africains, du cardinal Sarah, des professeurs américains et des 500 prêtres anglais - qui semble éloigner la possibilité de l'acceptation de cette «thèse» par le magistère pontifical, on constate parmi les partisans de la «théorie» en question, un changement de stratégie et un changement du front sur lequel agir, afin d'atteindre malgré tout le but fixé: intervenir sur le champ d'application du droit canon, afin introduire, ni plus ni moins, un «divorce catholique».

Cette stratégie a bénéficié de l'indifférence presque complète du public envers le droit dans l'Eglise et de l'Eglise - un attitude qui persiste depuis cinquante ans - qui permet d'agir tranquillement et sans être dérangés, surtout quand les spécialistes en ce domaine renoncent à faire entendre leur voix ou, pire, décident de mettre de côté leurs convictions, le résultat d'années d'études, juste pour surfer sur la vague.

En particulier, en ce qui concerne l'attitude antinomienne de la société en général et des fidèles en particulier, il faut noter que le Concile Vatican II a vu se développer «un climat d'ouverture au monde, comportant souvent le malentendu de vouloir adapter la foi et la vie chrétienne à des mentalités et des attitudes incompatibles avec le christianisme. Quant au droit, un esprit, très répandu dans ces années de contestation a fait irruption dans l'église, contraire à tout ce qui était ordre, exigence sociale, institution, autorité, etc. Au nom de la spontanéité et de l'authenticité, de la liberté et de la seule obéissance à l'Esprit et à ses dons, on a sous-estimé et même méprisé précisément ces valeurs qui sont au cœur à la manière traditionnelle de concevoir la loi de l'Eglise, en particulier depuis la Contre Réforme». Faisant ressortir des voix et des comportements opposés à la loi de l'Eglise, qui visent à relancer le conflit entre l'Eglise de la loi et l'Eglise de la charité, autrement dit entre l'autorité et le charisme. A quoi il faut ajouter qu'à l'égard de cette situation, on n'a pas prévu, à court terme, d'instruments en mesure d'y faire face de manière adéquate; il suffit de penser que, bien que les documents du Concile contiennent de nombreuses déclarations et dispositions ayant un clair contenu juridique, la nature et le sens de la loi dans l'Église n'ont été abordés dans aucun de ces documents, ni dans la Constitution dogmatique Lumen Gentium, qui traite du mystère et l'essence de l'Eglise.

En vue du Synode, il faut donc également susciter le débat sur cet aspect canonique, en particulier sur le travail que devra effectuer la commission mentionnée ci-dessus; un débat, pas seulement au niveau scientifique, mais aussi «apologétique», capable de dire et de faire la vérité au niveau de la doctrine et de la pastorale, pour atteindre tous les fidèles, afin que chacun puisse comprendre la suprême importance de la favor veritatis dans le domaine du droit canonique du mariage. Ceci parce que tout changement du processus canonique dans la direction indiquée ci-dessus entraînerait nécessairement des répercussions graves, y compris dans le domaine de la doctrine et en relation avec le rôle de celle-ci dans l'Eglise.
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