Le rapport Kolvenbach


Question du site Rorate Caeli: "Un job pour un vrai journaliste: Qui peut trouver le 'rapport Kolvenbach' sur le Père Bergoglio?". Mais que faut-il croire? (24/1/2016, mise à jour le 25)

>>> Ci-contre: le Père Peter-Hans Kolvenbach, qui fut upérieur général de le Compagnie de Jésus de 1983 à 2008

 

Voici ce qu'on peut lire aujourd'hui sur le site Rorate Caeli:

Un job pour un vrai journaliste:
Qui peut trouver le 'rapport Kolvenbach' sur le Père Bergoglio?

rorate-caeli.blogspot.com
(Ma traduction)

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Les supérieurs des sociétés et des ordres religieux sont consultés par la Congrégation pour les évêques quand leurs membres prêtres sont envisagés pour une nomination épiscopale.

C'est une information bien connue et établie au Saint-Siège (comme ça l'était à Buenos Aires avant) que, lorsque le Père Jorge Mario Bergoglio, SJ, a été pressenti par l'archevêque de Buenos Aires d'alors, le cardinal Quarracino, pour devenir son auxiliaire, en 1992, le Supérieur Général de la Compagnie de Jésus de l'époque, le Père Peter Hans Kolvenbach - qui se battait pour récupérer une certaine crédibilité à son ordre après l'intervention sévère du pape Jean-Paul II et le limogeage d'Arrupe et des Arrupistes qui avaient mené la Compagnie à la ruine après le Concile - avait écrit un rapport défavorable sur la nomination possible.

Le rapport est dit être très détaillé, et révéler toutes les tendances de caractères qui sont évidentes dans la personnalité du Pape actuel.

Aujourd'hui, ce serait l'un des scoops du siècle si un journaliste révélait au monde ce document historique des plus important. Les catholiques "adultes" d'aujourd'hui, "émancipés" par le Concile Vatican II, peuvent sûrement assumer ce dont le Père Kolvenbach a essayé d'avertir le Pape Jean-Paul II et ses conseillers sur le père Bergoglio. Et à coup sûr, le nouveau Vatican éclairé peut être suffisamment transparent pour permettre à tous les catholiques et à tous les autres de connaître le contenu d'un rapport aussi précieux.

Il est temps de le mettre sous la lumière du soleil.


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Evidemment, on objectera que tout cela est à prendre avec des pincettes, et au cas (très improbable) où une information filtrerait à ce sujet, on peut faire confiance à l'entourage du Pape pour la discréditer sans difficulté, la mettant sur le compte de rivalités et règlements de compte internes passés et présents entre jésuites, doublés d'une manoeuvre des ennemis actuels du Pape.
Toutefois, ce n'est pas la première fois qu'on entend citer le Supérieur des jésuite Kolvenbach, sur le thème des relations, disons peu idylliques, de Jorge Mario Bergoglio avec la hiérarchie de son ordre.

Dans un article où il était question d'une biographie "très" autorisée du pape parue en 2014 sous le titre "Aquel Francisco", dont les auteurs sont deux journalistes argentins, Sandro Magister évoquait l'épisode assez mystérieux de "l'exil à Cordobà" du Père Bergoglio (entre 1990 et 1992, juste avant sa nomination comme évêque auxiliaire de Buenos Aires par JP II, sur recommandation de l'archevêque).
Et parmi les "points [du livre] qui l'intriguaient" Sandro Magister citait:

... les véritables raisons qui ont causé la chute en disgrâce de Bergoglio dans la Compagnie de Jésus, après qu'il en ait été, dans les années soixante-dix, le numéro un argentin.
Celui qui l'envoya en exil à Córdoba était un jésuite qui le connaissait de très près, le père Víctor Zorzin, qui avait été son «associé», c'est-à-dire le second de Bergoglio quand celui-ci était à la tête de la province argentine, et qui en 1986, devint le provincial, restant en charge jusqu'en 1991.
Entre Zorzin et Bergoglio, il y avait un profond désaccord sur les méthodes de gouvernement, de même qu'entre Bergoglio et le successeur Zorzin, le père Ignacio García-Mata, provincial de 1991 à 1997.
Ce désaccord se concrétisa - c'est ce que prouvent les auteurs du livre - dans une «campagne de diffamation» insistante contre Bergoglio, à laquelle, à Rome, le supérieur général de la Compagnie de Jésus lui-même - à l'époque le Néerlandais Peter Hans Kolvenbach - fut sensible. On fit circuler le bruit - comme en témoigne entre autres le père Ángel Rossi, actuel supérieur de la résidence cordobaine où Bergoglio avait été exilé - que cet ex-provincial des jésuites, autrfois «si brillant», avait été envoyé en isolement à Córdoba «parce que malade, fou».
(benoit-et-moi.fr/2014-II/actualites/franois-les-annees-dexil-a-cordoba)


Sur le même sujet et sur le même ton, Giuseppe Nardi écrivait, toujours à propos de cette période:

Le Père Victor Zorzin a été provincial de 1986 à 1991. Il a été remplacé par le Père Ignacio Garcia-Mata (1991-1997). Les auteurs écrivent qu'il y a eut «une campagne de dénigrement» contre Bergoglio pendant les mandats des Zorzin et García-Mata, qui avait franchi les frontières de la province argentine de l'Ordre et atteint les jésuites d'autres pays d'Amérique du Sud et même la Maison générale à Rome.
(benoit-et-moi.fr/2014-II-1/actualites/une-biographie-argentine-autorisee-de-franois)


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Je n'ai pas eu le temps de suffisamment creuser, mais grâce à Rorate Caeli, je suis remontée à deux articles parus dès le lendemain de l'élection.
Le premier est d'Ignazio Ingrao, le vaticaniste de l'hebdomadaire Panorama: le 29 mars 2013, il faisait état d'une lettre de Pater Hans Kolvenbach, interdisant aux autres maisons et communautés de jésuites d'accueillir le Père Bergoglio au cas où celui-ci aurait décidé de quitter l'église qui lui avait été assignée à Cordobà. D'après le journaliste, l'information aurait été confirmée par la propre soeur du futur Pape, et c'est le propre neveu de ce dernier, le Père Narvaja, lui-même jésuite, qui aurait conservé la lettre.
Le second article est une mise au point publiée 4 jours plus tard par "la rédaction" du Sismografo (càd Luis Badillà, voir à son sujet: Autour du livre-interview d'Andrea Tornielli) démentant formellement les "révélations" d'Ingrao en ces termes:

L'information est non seulement tout à fait invraisemblable, car une telle intervention du Père Général aurait été totalement inhabituelle, mais elle est absolument fausse, parce que cette lettre n'a jamais existé. Elle est démentie à la fois par la Curie Jésuite, où l'envoi d'une telle lettre ne trouve aucune confirmation, et par le Père José Luis Narvaja, cité par "Panorama" comme gardien de cette lettre, et qui nie avoir jamais fait de déclarations à Panorama.


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Reste évidemment la question: s'il avait entre les mains un rapport aussi défavorable, pourquoi Jean-Paul II l'a-t-il quand même nommé? En a-t-il reconnu le non-fondé? Ou y a-t-il d'autres explications?

Mise à jour (25/1)

Je reprends ici le commentaire de mon amie Teresa, que je partage largement....


Le Vatican aura une réponse facile à la question de savoir pourquoi, nous vivants, le rapport Kolvenbach ne verra jamais le jour: il fait partie des archives du pontificat de Jean-Paul II qui ne seront pas rendues publiques avant Dieu sait quand! Les papiers de Pie XII étaient censés devenir disponibles à tout chercheur de bonne foi à partir de 2012. Est-ce qu'ils le sont déjà?
Bien sûr, tout journaliste de ressources, ayant la possibilité de regarder dans les archives du P. Kolvenbach lui-même, ou connaissant quelqu'un au Vatican qui puisse récupérer le rapport Kolvenbach dans les archives de JPII, pourrait le faire, s'il le voulait vraiment.
Mais pourquoi pas un seul journaliste n'a-t-il pris la peine de donner suite aux fabrications de Carlo Maria Vigano et Paolo Gabriele sur les premiers 'Vatileaks'? Par exemple, pour dénicher au moins un vrai cas de corruption ou d'entourloupe financière n'ayant pas été déjà rapporté dans les médias?
Personne ne s'est dérangé pour Vatileaks - parce que pratiquement tous les journalistes voulaient que le récit des médias autour «du mal et de la corruption» au Vatican de Benoît XVI perdure, et soit gravé dans la pierre.
Personne ne se donne la peine de rechercher le rapport Kolvenbach - ou même des infos de l'époque à ce sujet - parce que ce serait ruiner leur récit du pape hyper-parfait.
A part Sandro Magister, personne n'a même pris la peine de suivre le sentier sordide et apparemment bien documenté laissé derrière lui en Amérique du Sud par le favori du Pape Mgr Ricca, et ses mésaventures homosexuelles.
Personne, d'ailleurs, ne nous a fourni d'information détaillée sur la façon exacte dont Jorge Mario Bergoglio était considéré par les fidèles de Buenos Aires (et pas seulement par ceux des quartiers de taudis qu'il affectionnait).
Et, mon exemple favori parmi tous, pas même John Allen, qui s'est rendu à Buenos Aires peu après le 13 Mars 2013 pour vérifier les antécédents du nouveau pape, n'est revenu avec la moindre photo, ou même une description de l'appartement désormais légendaire où on dit que JMB a vécu comme archevêque (y a-t-il quelqu'un pour croire qu'Allen n'aurait pas au minimum pu se faire photographier en face de l'immeuble? Mais niente, nada, zip, zilch!)

Et je n'oublie pas que la biographie officielle de JMB sur le site du Vatican n'a jamais clarifié exactement combien de temps il était resté en Allemagne au moment où il était censé faire une thèse de doctorat sur Guardini, ni pourquoi il a dû rentrer chez lui sans la finir. Ni n'a clarifié que JMB n'a jamais eu un diplôme d'études supérieures en chimie mais seulement un brevet de technicien (ndt: à ce jour, cette informaton figure sur la version en français).
Je soulève ces choses non pas pour dénigrer JMB (après tout le cv d'une personne n'est pas forcément uniformément impeccable), mais pour montrer que ce qui a été rapporté sur lui ne l'a pas toujours été dans la transparence et la lumière, comme le Vatican et les 'FOB' (fan of Bergoglio) voudraient le faire croire au monde.
Pourtant, sa popularité est tellement phénoménale qu'il est certain que des faits qui, pour n'importe qui d'autre que lui, pourraient ne pas être vraiment flatteurs, devraient venir à la lumière sans rien ôter à la légende.