Luthériens de cœur


Pour le moine espagnol qui signe "Fray Gerundio", la visite de François à Lund n'est qu'un des symptômes d'une protestantisation de l'Eglise en cours depuis un demi-siècle, jusque dans la haute hiérarchie de l'Eglise (1/10/2016)

 

Dans un mois, le 31 octobre, François se rendra à Lund, en Suède, pour commémorer le 500e anniversaire de la Réforme. Un geste qui ne passe décidément pas auprès de certains. Parmi eux, une vieille connaissance, Fray Gerundio (une découverte de Carlota), qui avait déjà réagi avec vigueur lorsque la nouvelle avait été annoncée en janvier dernier (cf. Luther le collègue) dénonce ici la protestantisation de l'Eglise, oeuvre de ces "luthériens de coeur" qui sapent la catholicité de l'intérieur.

(Carlota)

Toujours aussi déchaîné, notre vieux moine espagnol qui écrit sous le pseudonyme de Gerundio, clame son indignation - le « vivant pontifex lutherusque» ne passe décidément pas!
On me pardonnera ce jeu de mot sur le cri de ralliement,« vivat pontifex Lutherus », des mercenaires protestants prenant d’assaut Rome, massacrant les catholiques à la messe (y compris les soldats catholiques de l’empereur Charles Quint) en ce funeste jour de la Pentecôte 1527, tandis que le pape se réfugiait au Château St-Ange, que les tombeaux des Souverains Pontifes et leurs cadavres étaient profanés, et des religieuses violées. L'entreprise la destruction de la Ville Sainte dura 8 jours, et on dit que jusqu’à 40.000 catholiques périrent.

Luthériens de cœur


"Fray Gerundio"
18 septembre 2016
Traduction de Carlota

* * *

Je ne saurais les décrire d’une manière adéquate. Ils me rappellent ceux dont parle le Seigneur quand Il disait que celui qui regarde une femme en la désirant, a déjà commis le péché d’adultère dans son cœur.
En ces temps-là, Amoris Laetitia n’avait pas été encore publiée et les choses étaient plus strictes. Bon, en tout cas, quand j’en vois tant et tant qui regardent, mine de rien, le protestantisme, qui se complaisent dans ses vertus et ses merveilles, se soumettant à la doctrine et à la personnalité de ce bienfaiteur de l’Humanité que fut Luther, l’analogie avec les paroles du Seigneur me devient facile: ils se sont déjà fait protestants en eux-mêmes, ils sont déjà protestantisés dans leur cœur. Celui qui regarde le luthéranisme en le désirant, s’est déjà uni à lui, dans le cœur.
Nous avons parmi les membres de notre hiérarchie beaucoup de membres du Club de l’attraction luthérienne. Membres d’Honneur. Ils ont fait le possible et l’impossible pour protestantiser l’Eglise dans de nombreuses graves questions. Mais ils ont aussi obtenu que peu à peu dans le quotidien des fidèles dits catholiques, le protestantisme se soit introduit comme sans le vouloir. Sans s’en rendre compte. Et si à l’instant même nous faisions une enquête simple, - parmi ceux qui nous entourent - sur la doctrine catholique, ils nous apporteraient une surprise. Il y a beaucoup de luthériens parmi les catéchistes, les ministres sans ordination et les ministres ordonnés, les religieuses sans voile et celles plus que voilées. Jusqu’au peuple est arrivée l’odeur de la brebis que les mauvais pasteurs ont disséminée.
On pourrait presque dire que parmi le peuple fidèle, excepté la dévotion à la Sainte Vierge qui existe encore dans les villages et les hameaux, on a l’habitude de penser que ce qui est important c’est la foi et que les œuvres servent peu, que la Bible, chacun peut l’interpréter comme il lui plait, que l’Église catholique n’est pas l’unique vérité, que les prêtres sont de simples représentants des laïcs, que la Messe est un Repas (ndt: "Cène", même avec la majuscule dans le sens d’un dîner, mot d’ailleurs identique en espagnol !), que l’Eucharistie est le symbole du Christ, rien de plus, que les curés et les religieux feraient mieux d’être mariés, etc., etc., etc.
Ces gens ont été endoctrinés durant ces cinquante dernières années par des théologiens, des curés de paroisse et des hautes autorités ecclésiales qui ne croyaient plus dans les vérités catholiques et étaient arrivés à être des protestants de cœur. Je pense à un de mes compagnons moines qui commençait à expliquer aux novices l’Histoire de la Réforme et qui avançait dans son étude avec un tel brio, qu’au final, il se réforma lui-même et se fit à son tour protestant contre tout ce qui avait l’odeur de la doctrine catholique.
Si nous pouvons illustrer le problème depuis le bas, ne parlons pas de ce que nous avons en haut ; J’ai déjà dit que les docteurs et les théologiens ont été les premiers. Bien que, - il faut le dire -, il y en ait eu aussi qui se sont refusés à suivre pareille folie. Mais nous avons dû souffrir en ces cinquante dernières années d’une grande quantité de loups prédateurs qui avançaient fascinés par Luther. Et aujourd’hui ils sont une multitude. Du Cardinal Bea (jésuite, d’ailleurs), avec son décret sur l’œcuménisme second-vaticaniste, jusqu’aux cardinaux d’aujourd’hui, quintessence de l’ébahissement pour Luther et ses fils spirituels, il n’y a qu’un pas. Et si Jean-Paul II a embrassé le Coran, eh bien les écrits de Luther il faudrait les encenser en toute solennité, moi je vous le dis. Koch, Schönborn, Marx et beaucoup d’autres barrettes (ndt: le mot espagnol correspond au chapeau spécifique des cardinaux) germaniques, ont entraîné aussi des barrettes anglo-saxonnes, yankees et méditerranéennes sur cette voie merveilleuse de l’œcuménisme imbécile qui arrive à obtenir que les siens propres passent dans le camp adverse après avoir écouté un prêche dans lequel était porté aux nues ledit camp adverse.
Dans ces jours de lucidité que nous vivons, nous avons l’élan de François comme certificat d’authenticité (en v.o. « carnet de pedigrí ») de l’envoûtement par Luther. Prochainement on célébrera le 500ème anniversaire de la division et de la destruction de la Chrétienté. Il sera célébré en portant aux nues et en valorisant les vertus de celui qui l’a rendue possible. Et plein de catholiques tellement satisfaits. Et plein d’évêques tellement enchantés de la vie. Et François en Suède. Cela vaut la peine, un voyage pour honorer et fêter l’un des plus grands insolents, des plus grands profanateurs, de ceux qui ont le plus outragé, le plus mal parlé et le plus déblatéré contre la Sainte Mère l’Église. Destructeur des Sacrements et de la Sainte Messe.
Pour François, Luther fut un homme bon. Un réformateur des mauvaises habitudes (ndt: allusion aux propos du Pape dans l’avion de retour d’Arménie en juin dernier, cf. benoit-et-moi.fr) de ces papes totalitaires de la Renaissance qui ne gouvernaient pas synodalement comme on le fait aujourd’hui (par exemple). Cette Rome corrompue, et pas la Rome d’aujourd’hui (par exemple). Où l’on vendait les indulgences, pas comme la Rome d’aujourd’hui où se vendent les nullités matrimoniales (par exemple). (1)
Il faudrait écrire un livre. J’ai déjà fait un commentaire sur le sujet quand la méga nouvelle a été diffusée cf. “Luther le collègue”). C’était en ce déjà lointain janvier 2016. Beaucoup d’eaux sont tombées depuis lors, sur ce Pontificat si rempli de surprise. On ne canonisera pas Luther à Lund, mais on donnera en exemple la Réforme Luthérienne comme quelque chose de nécessaire et de bon pour la Chrétienté.
Pauvre Jorge Bergoglio quand il aura à expliquer cela à des tribunaux dont personne ne peut se moquer. Et pauvres petits luthériens de cœur qui l’accompagnent dans la « Comparsa » (2) Hérétique. Nous lutterons pour la paix ensemble, nous vaincrons la pauvreté ensemble et nous ferons disparaître le catholicisme ensemble. (3)
Encore heureux qu’après, arrivera Notre Seigneur.

NDT


(1) Luther a expliqué que le but de sa réforme n’avait pas comme cause comme on veut nous le faire croire les mœurs de certains prélats : « Je ne conteste ni l’immoralité ni les abus; mais la substance et la doctrine de la Papauté (…). Je n’ai jamais cessé d’attaquer les deux colonnes de la Papauté : les vœux monastiques et le sacrifice de la messe ». Cité par Alfredo Sáenz dans son ouvrage : « La Nave y las tempestades. La Reforma Protestante (La barque et les tempêtes. La Réforme Protestante), éd. Gladius, Buenos Ayres 2005. Les lecteurs francophones auront sans doute aussi des références dans des ouvrages rédigés en français sur le sujet.

(2) Une « comparsa » au théâtre espagnol classique, c’est un groupe de figurants qui à l’occasion chante une rengaine (que le frère Gerundio fait entonner à sa manière, « nous lutterons pour la paix… »). Le terme employé accentue plus encore le dérisoire de ceux qui clament ces« incantations » et n’en est que plus ironiquement cruel. C’est pour ne pas pleurer, peut-être !

(3) J’ai du mal aussi à croire que cette luthéromania permette en même temps un rapprochement avec le monde orthodoxe de l’ex-empire soviétique mais qui suis-je pour penser et en plus douter…