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L'Islam envahira l'Europe (suite)

Réactions à la "vision prophétique" de saint Jean-Paul II. Et la marche-arrière de l'auteur de la révélation (23/11/2017, mise à jour le 25)

Mgr Longhi avec Jean-Paul II

Contrairement à ce que j'avais pensé, les révélations de Mgr Longhi sur les présumées visions prophétiques de Jean-Paul II semblent avoir eu un assez large écho. Ma propre traduction m'a d'ailleurs valu un nombre inhabituel de visites. Je n'en tire aucune gloire, il se trouve que plusieurs sites amis l'ont citée, et que leurs lecteurs ont complété leur information à la source - donc sur mon site. On peut supposer que beaucoup ont trouvé là ce qu'ils voulaient trouver, c'est-à-dire une prise de position claire (enfin!) de l'Eglise, qui plus est par un de ses plus prestigieux représentants de notre époque - fût-il dans l'autre monde - sur une cause hyper-sensible que l'Eglise d'aujourd'hui, justement, a désertée, comme tant d'autres causes.
Et il n'y a pas qu'en France, apparemment.
Aujourd'hui, La Nuova Bussola publie la lettre envoyée au directeur Riccardo Cascioli par l'auteur des révélations, Mgr Longhi. Une lettre "d'excuse", pour ne pas dire une douche froide, comme si Mgr Longhi répugnait à se voir recruter dans une croisade, ou plutôt à endosser en son nom une tentative détournée de "recrutement" de Jean-Paul II par ceux qui voient d'un mauvais oeil le déferlement migratoire sur l'Europe.
D'où son utilisation d'un vocabulaire qu'on peut qualifier de lénifiant, où le concept de "bataille" est remplacé par celui de "relations", sans oublier l'immanquable référence à François.

Je suis surpris par l'écho qu'ont eu mes propos lors de la conférence qui s'est tenue à Bienno le 22 octobre dernier. Je vois que certains les interprètent en termes de "bataille entre chrétiens et musulmans". Je suis très attristé par cette lecture et je m'excuse si, par manque de clarté, je peux avoir conduit à cette interprétation: dans l'esprit de Jean-Paul II il n' y avait aucune idée de "bataille", au contraire il y avait une recherche de relations.
Dans la conversation avec le Pape dont j'ai parlé lors de la conférence et qui a été diffusée par la "Nuova Bussola Qotidiana", le Pape se référait à certains groupes de terroristes qui avaient déjà commencé à agir, utilisant le nom de Dieu (comme le Pape François nous le rappelle souvent aujourd'hui) et dans ses commentaires, il n'y avait aucune sorte de généralisation.

Pour être plus complet, voici deux contributions. Celle d'Aldo Maria Valli, qui, sans valider totalement les visions "mystiques" du pape polonais, rappelle que leur contenu n'est pas en contradiction avec les propos que ce dernier a constamment tenus sur l'islam. Et celle d'un prêtre ami, dont je vais respecter la volonté d'anonymat, qui est quant à lui plus sévère et surtout très sceptique sur la réalité desdites visions, s'étonnant en particulier que Jean-Paul II ait pu "se confier soudain entre deux descentes à ski à une personne qui lui était malgré tout étrangère"!

Aldo Maria Valli

Jean-Paul II et l'Islam

18 novembre 2017
www.aldomariavalli.it
Ma traduction

* * *

«Je vois l'Église affligée d'une plaie mortelle. Plus profonde, plus douloureuse que celles de ce millénaire, celles du communisme et du totalitarisme nazi. Elle se nomme l'islamisme. Ils envahiront l'Europe. J'ai vu les hordes venir de l'Occident vers l'Orient».

Ces paroles de Jean-Paul II, citées par Monseigneur Mauro Longhi, ont fait grand bruit. Monseigneur Longhi, prêtre de l'Opus Dei, a dit (durant une rencontre publique à Bienno) que la vision lui fut décrite directement par Jean-Paul II en 1992.

Longhi, qui a pu fréquenter le Pape Wojtyla pendant des années, a confirmé dans son récit que Jean-Paul II avait une vie mystique intense, incluant même des visions. L'une d'entre elles concernait l'islam: «l'Europe sera une cave, vieilles reliques, pénombre, toiles d'araignée. Souvenirs familiaux. Vous, Eglise du troisième millénaire, vous devrez contenir l'invasion. Mais pas avec des armes, les armes ne suffiront pas, avec votre foi vécue intégralement»

On m'a demandé: mais selon toi, il est possible que Wojtyla ait parlé ainsi? Je n'ai pas de réponse. D'autre part, je n'ai aucune raison de douter de la correction de Monseigneur Longhi et de la véracité de l'histoire.

Je crois que l'épisode narré est de toute façon utile pour une réflexion, aussi brève soit-elle, sur la manière dont Jean-Paul II s'est mis en relation avec le monde islamique.

Comme nous le savons, au cours de son long pontificat, le pape Wojtyla a accordé une grande importance au dialogue avec l'islam, à tel point qu'il s'est rendu plusieurs fois dans des pays musulmans et est entré, premier pape de l'histoire, dans une mosquée de Damas en 2001.

Il existe de nombreux textes dans lesquels Jean-Paul II réfléchit sur le rapport avec l'Islam.

La base de toutes les interventions se trouve dans "Nostra aetate", le document du Concile Vatican II (28 octobre 1965) consacré au dialogue avec les religions non chrétiennes, dans lequel il est dit que «l'Église regarde avec estime les musulmans qui adorent le Dieu unique, vivant et subsistant, miséricordieux et tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, qui a parlé aux hommes».

Jean-Paul II a vraiment toujours fait preuve d'estime et de respect, mais nous ne pouvons pas ignorer les réflexions ultérieures qu'il a proposées. Des réflexions caractérisées par trois aspects: la loyauté dans la reconnaissance des différences, la nécessité de procéder toujours à la lumière de la vérité et la demande de garantir la réciprocité en matière de liberté religieuse.

Jean-Paul II a explicitement évoqué la question de la loyauté dans le discours célèbre, historique qu'il a prononcé le 19 août 1985 à Casablanca devant de jeunes musulmans marocains. Voici le passage-clé:
«La loyauté exige aussi que nous reconnaissions et respections nos différences. Évidemment, la plus fondamentale est le regard que nous portons sur la personne et l'œuvre de Jésus de Nazareth. Vous savez que, pour les chrétiens, ce Jésus les t entrer dans une connaissance intime du mystère de Dieu et dans une communion filiale avec ses dons, bien qu'ils le reconnaissent et le proclament Seigneur et Sauveur. Ce sont des différences importantes, que nous pouvons accepter avec humilité et respect, dans la tolérance mutuelle; en cela il y a un mystère sur lequel Dieu nous illuminera un jour, j'en suis sûr».

Les différences ne doivent donc pas être effacées ou minimisées. Il n'y a pas de dialogue sincère sans une reconnaissance claire de ce qui différencie, à commencer par la figure de Jésus.

Et nous en arrivons ici à la grande question de la vérité, que Jean-Paul II ne se lassa jamais de mettre au premier plan. Comme il l'a dit dans le palais présidentiel de Carthage, le 14 juin 1996, lors du voyage en Tunisie, «se confronter dans la vérité les uns aux autres est une exigence fondamentale». Seuls ceux qui sont interprètes conscients et sincères de la foi peuvent dialoguer fructueusement: «Les protagonistes du dialogue seront en sécurité et sereins dans la mesure où ils seront vraiment enracinés dans leurs religions respectives. Cet enracinement permettra d'accepter les différences et d'éviter deux obstacles opposés: le syncrétisme et l'indifférenciation. Il permettra aussi de tirer profit du regard critique des autres sur la manière de formuler et de vivre leur foi».

Il n' y a pas de dialogue sans vérité. Si la vérité est exclue, on tombe facilement dans le mélange arbitraire des différents messages, dans la prétention de réconcilier ce qui n'est pas réconciliable et dans l'idée que chaque religion est égale à l'autre. «La grande tâche de la vie est de rechercher la vérité de Dieu et sa justice» (Discours dans la mosquée Omayyade, Damas, 6 mai 2001).

De ce point de vue, Jean Paul II n'a jamais caché le point crucial de la vérité du Christ, comme on le lit clairement l'exhortation apostolique "Une espérance nouvelle pour le Liban" (10 mai 1997):
«L'Église catholique considère avec attention la recherche spirituelle des hommes et des femmes et reconnaît volontiers la part de vérité qui entre dans le cheminement religieux des personnes et des peuples, affirmant cependant que la vérité parfaite se trouve dans le Christ, qui est le commencement et la fin de l'histoire qui, grâce à lui, arrive à sa plénitude».

Enfin, la question de la réciprocité en matière de liberté religieuse, que le Pape Wojtyla ne manqua jamais de souligner, comme dans le message à l'occasion de l'ouverture de la mosquée de Rome (21 juin 1995):
«Dans une circonstance significative comme celle-ci, il faut malheureusement souligner que dans certains pays islamiques, il n'y a pas autant de signes de reconnaissance de la liberté religieuse. Pourtant, le monde, au seuil du troisième millénaire, attend ces signes».
Et comme dans l'exhortation apostolique "Ecclesia in Europa" (28 juin 2003), quand il écrivit:
«On comprend par ailleurs que l'Église, alors qu'elle demande aux Institutions européennes d'avoir à promouvoir la liberté religieuse en Europe, se fasse également un devoir de rappeler que la réciprocité dans la garantie de la liberté religieuse doit être observée aussi dans les pays de tradition religieuse différente, où les chrétiens sont en minorité».

A la fin de cet excursus rapide, il vaut la peine de mentionner ce que Jean-Paul II écrit dans "Franchir le seuil de l'espérance", publié en 1994, peut-être le texte dans lequel le pape exprime de la manière la plus claire son évaluation des différences radicales entre le christianisme et l'islam:
«Quiconque, connaissant l'Ancien et le Nouveau Testament, lit le Coran, voit clairement le processus de réduction de la Révélation Divine qui s'est accompli dans le Coran. Il est impossible de ne pas remarquer l'éloignement de ce que Dieu a dit de Lui-même, d'abord dans l'Ancien Testament par les prophètes, puis définitivement dans le Nouveau par son Fils. Toute cette richesse de l'autorévélation de Dieu, qui constitue le patrimoine de l'Ancien et du Nouveau Testament, a en fait été mise de côté dans l'islam. Au Dieu du Coran sont donnés des noms parmi les plus beaux connus par la langue humaine, mais finalement il est un Dieu extérieur au monde, un Dieu qui n'est que Majesté, jamais Emmanuel, Dieu-avec-nous. L'islamisme n'est pas une religion de rédemption. Il n'y a pas de place en lui pour la Croix et la Résurrection. Le drame de la rédemption est complètement absent. Non seulement la théologie mais aussi l'anthropologie de l'Islam est très éloignée de la théologie chrétienne [...]. Le Concile a appelé l'Église à dialoguer aussi avec les disciples du "Prophète" et l'Église continue sur cette voie [...]. Il y a cependant des difficultés bien réelles. Dans les pays où les mouvements fondamentalistes arrivent au pouvoir, les droits de l'homme et la liberté religieuse sont malheureusement interprétés de façon très unilatérale: la liberté religieuse est comprise comme la liberté d'imposer la "vraie religion" à tous les citoyens. La situation des chrétiens dans ces pays est parfois même dramatique».

Ces évaluations furent-elles aussi le résultat de visions de caractère mystique? Mgr Longhi dit que oui. En tout cas, quelle qu'en soit l'origine, ces analyses ne doivent pas être oubliées, surtout dans une saison comme celle que nous traversons.

Père J***

Des visions peu vraisemblables

Je suis moins enthousiaste que vous au sujet de Jean-Paul II et je vous avoue que je ne crois absolument pas aux dites révélations de ce prêtre de l'Opus Dei. Cela ne correspond en rien aux actions du pontificat. Lorsque Jean-Paul II a été élu, une immense espérance m'a habité. Rapidement la déception et l'interrogation l'ont remplacée. En effet, sous son pontificat, tout a empiré, sauf la morale qui est demeurée sauve et que l'actuel pape brade. Mais tout le reste a été catastrophique: liturgie, nominations épiscopales, références constantes à Vatican II, préférences accordées à l'Opus Dei et aux Légionnaires du Christ (couvrant et protégeant le P. Maciel), oecuménisme débridé (Assise), islamophilie (il a embrassé le Coran), mauvaises relations avec l'orthodoxie russe (pays qui nous protègera peut-être), etc.. (...) Le pape actuel peut puiser sans problème dans cet héritage (à l'exception encore une fois de la morale).

Je suis pour ma part réticent face aux multiples "révélations" privées qui fleurissent depuis des décennies. Les messages reconnus par l'Eglise me suffisent (...).
Bien sûr, vous êtes libre d'accueillir cette nouvelle concernant Jean-Paul II comme vraie, mais je ne suis pas convaincu.
Je ne désire pas vous choquer en vous livrant cela. Simplement vous dire ma réserve.