Le 27 février, Benoît XVI a annoncé lui-même qu'il livrait sa dernière catéchèse sur Saint-Augustin. C'était la plus belle. Et j'ai eu la chance, grâce au satellite, de pouvoir l'enregistrer sur Telepace, sans traduction.
C'est un exercice idéal pour perfectionner son italien: écouter le Saint-Père, et suivre simultanément le texte en français. J'ai utilisé la traduction de Zenit: http://zenit.org/
Et voilà la "Confession" de Benoît XVI:
La confession de Benoît
J'ai consacré une réflexion à cette expérience particulière au cours du pèlerinage que j'ai accompli à Pavie l'année dernière pour vénérer la dépouille mortelle de ce Père de l'Eglise. De cette façon, j'ai voulu lui exprimer l'hommage de toute l'Eglise catholique, mais également rendre visible ma dévotion personnelle et ma reconnaissance à l'égard d'une figure à laquelle je me sens profondément lié, en raison du rôle qu'elle a joué dans ma vie de théologien, de prêtre et de pasteur. .... ...j'ai voulu conclure mon pèlerinage à Pavie en remettant idéalement à l'Eglise et au monde, devant la tombe de ce grand amoureux de Dieu, ma première Encyclique, intitulée Deus caritas est. Celle-ci doit en effet beaucoup à la pensée de saint Augustin, en particulier dans sa première partie. Aujourd'hui aussi, comme à son époque, l'humanité a besoin de connaître et surtout de vivre cette réalité fondamentale : Dieu est amour et la rencontre avec lui est la seule réponse aux inquiétudes du cœur humain ; un cœur qui est habité par l'espérance - peut-être encore obscure et inconsciente chez beaucoup de nos contemporains - mais qui, pour nous chrétiens, nous ouvre déjà à l'avenir, à tel point que saint Paul a écrit que : « Nous avons été sauvés, mais c'est en espérance ». J'ai voulu consacrer ma deuxième Encyclique, Spe salvi, à l'espérance ; elle doit elle aussi beaucoup à Augustin et à sa rencontre avec Dieu.
Première partie
Chers frères et sœurs,
Avec la rencontre d'aujourd'hui je voudrais conclure la présentation de la figure de saint Augustin. Après nous être arrêtés sur sa vie, ses œuvres et sur plusieurs aspects de sa pensée, je voudrais revenir aujourd'hui sur son itinéraire intérieur, qui en a fait l'un des plus grands convertis de l'histoire chrétienne. J'ai consacré une réflexion à cette expérience particulière au cours du pèlerinage que j'ai accompli à Pavie l'année dernière pour vénérer la dépouille mortelle de ce Père de l'Eglise. De cette façon, j'ai voulu lui exprimer l'hommage de toute l'Eglise catholique, mais également rendre visible ma dévotion personnelle et ma reconnaissance à l'égard d'une figure à laquelle je me sens profondément lié, en raison du rôle qu'elle a joué dans ma vie de théologien, de prêtre et de pasteur.
Aujourd'hui encore, il est possible de reparcourir la vie de saint Augustin en particulier grâce aux Confessions, écrites en louange à Dieu, et qui sont à l'origine de l'une des formes littéraires les plus spécifiques de l'Occident, l'autobiographie, c'est-à-dire l'expression personnelle de la conscience de soi. Eh bien, quiconque approche ce livre extraordinaire et fascinant, beaucoup lu aujourd'hui encore, s'aperçoit facilement que la conversion d'Augustin n'a pas eu lieu à l'improviste et n'a pas été pleinement réalisée dès le début, mais que l'on peut plutôt la définir comme un véritable chemin, qui reste un modèle pour chacun de nous. Cet itinéraire atteint bien sûr son sommet avec la conversion et ensuite le baptême, mais il ne se conclut pas lors de cette veillée pascale de l'année 387, lorsqu'à Milan le rhéteur africain fut baptisé par l'évêque Ambroise. Le chemin de conversion d'Augustin continua en effet humblement jusqu'à la fin de sa vie, si bien que l'on peut vraiment dire que ses différentes étapes - on peut facilement en distinguer trois - sont une unique grande conversion.
Saint Augustin a été un chercheur passionné de la vérité : il l'a été dès le début et ensuite pendant toute sa vie. La première étape de son chemin de conversion s'est précisément réalisée dans l'approche progressive du christianisme. En réalité, il avait reçu une éducation chrétienne de sa mère Monique, à laquelle il resta toujours très lié, et bien qu'il ait eu une vie dissipée pendant ses années de jeunesse, il ressentit toujours une profonde attraction pour le Christ, ayant bu l'amour pour le nom du Seigneur avec le lait maternel, comme il le souligne lui-même (cf. Confessions, III, 4, 8).
Deuxième partie
Mais la philosophie, en particulier d'inspiration platonicienne, avait également contribué à le rapprocher ultérieurement du Christ en lui manifestant l'existence du Logos, la raison créatrice. Les livres des philosophes lui indiquaient qu'il y a d'abord la raison, de laquelle est ensuite issu le monde tout entier, mais ils ne lui disaient pas comment rejoindre ce Logos, qui semblait si loin. Seule la lecture des lettres de saint Paul, dans la foi de l'Eglise catholique, lui révéla pleinement la vérité. Augustin synthétisa cette expérience dans l'une des pages les plus célèbres de ses Confessions : il raconte que, dans le tourment de ses réflexions, s'étant retiré dans un jardin, il entendit à l'improviste une voix d'enfant qui répétait une cantilène, jamais entendue auparavant : tolle, lege, tolle, lege, « prends, lis, prends, lis » (VII, 12, 29). Il se rappela alors de la conversion d'Antoine, père du monachisme, et avec attention il revint au codex de Paul qu'il tenait quelques instants auparavant entre les mains, il l'ouvrit, et son regard tomba sur la lettre aux Romains où l'Apôtre exhorte à abandonner les œuvres de la chair et à se revêtir du Christ (13, 13-14). Il avait compris que cette parole, à ce moment, lui était personnellement adressée, qu'elle provenait de Dieu à travers l'Apôtre et lui indiquait ce qu'il fallait faire à ce moment. Il sentit ainsi se dissiper les ténèbres du doute et il se retrouva finalement libre de se donner entièrement au Christ : « Tu avais converti mon être à toi », commente-t-il (Confessions, VIII, 12, 30). Ce fut la première conversion décisive.
Le rhéteur africain arriva à cette étape fondamentale de son long chemin grâce à sa passion pour l'homme et pour la vérité, passion qui le mena à chercher Dieu, grand et inaccessible. La foi dans le Christ lui fit comprendre que le Dieu, apparemment si lointain, en réalité ne l'était pas. En effet, il s'était fait proche de nous, devenant l'un de nous. C'est dans ce sens que la foi dans le Christ a porté à son accomplissement la longue recherche d'Augustin sur le chemin de la vérité. Seul un Dieu qui s'est fait « tangible », l'un de nous, était finalement un Dieu que l'on pouvait prier, pour lequel et avec lequel on pouvait vivre. Il s'agit d'une voie à parcourir avec courage et en même temps avec humilité, en étant ouvert à une purification permanente dont chacun de nous a toujours besoin. Mais, comme nous l'avons dit, le chemin d'Augustin ne s'est pas conclu avec cette Veillée pascale de 387.
Troisième partie
De retour en Afrique, et ayant fondé un petit monastère, il s'y retira avec quelques amis pour se consacrer à la vie contemplative et à l'étude. C'était le rêve de sa vie. A présent, il était appelé à vivre totalement pour la vérité, avec la vérité, dans l'amitié du Christ qui est la vérité. Un beau rêve qui dura trois ans, jusqu'à ce qu'il soit, malgré lui, consacré prêtre à Hippone et destiné à servir les fidèles, en continuant certes à vivre avec le Christ et pour le Christ, mais au service de tous. Cela lui était très difficile, mais il comprit dès le début que ce n'est qu'en vivant pour les autres, et pas seulement pour sa contemplation privée, qu'il pouvait réellement vivre avec le Christ et pour le Christ. Ainsi, renonçant à une vie uniquement de méditation, Augustin apprit, souvent avec difficulté, à mettre à disposition le fruit de son intelligence au bénéfice des autres. Il apprit à communiquer sa foi aux personnes simples et à vivre ainsi pour elles, dans ce qui devint sa ville, accomplissant sans se lasser une activité généreuse et difficile, qu'il décrit ainsi dans l'un de ses très beaux sermons : « Sans cesse prêcher, discuter, reprendre, édifier, être à la disposition de tous - c'est une lourde charge, un grand poids, une immense fatigue » (Serm. 339, 4). Mais il prit ce poids sur lui, comprenant que précisément ainsi il pouvait être plus proche du Christ. Comprendre que l'on arrive aux autres avec la simplicité et l'humilité, telle fut sa véritable deuxième conversion.
Mais il y a une dernière étape du chemin d'Augustin, une troisième conversion : celle qui le mena chaque jour de sa vie à demander pardon à Dieu. Il avait tout d'abord pensé qu'une fois baptisé, dans la vie de communion avec le Christ, dans les Sacrements, dans la célébration de l'Eucharistie, il serait arrivé à la vie proposée par le Discours sur la montagne : à la perfection donnée dans le baptême et reconfirmée dans l'Eucharistie. Dans la dernière partie de sa vie, il comprit que ce qu'il avait dit dans ses premières prédications sur le Discours de la montagne - c'est-à-dire que nous à présent, en tant que chrétiens, nous vivons constamment cet idéal - était erroné. Seul le Christ lui-même réalise vraiment et complètement le Discours de la montagne. Nous avons toujours besoin d'être lavés par le Christ, nous avons besoin qu'il nous lave les pieds et qu'il nous renouvelle. Nous avons besoin d'une conversion permanente. Jusqu'à la fin nous avons besoin de cette humilité qui reconnaît que nous sommes des pécheurs en chemin, jusqu'à ce que le Seigneur nous donne la main définitivement et nous introduise dans la vie éternelle. Augustin est mort dans cette dernière attitude d'humilité, vécue jour après jour.
Cette attitude de profonde humilité devant l'unique Seigneur Jésus le conduisit à l'expérience de l'humilité également intellectuelle. En effet, au cours des dernières années de sa vie, Augustin, qui est l'une des plus grandes figures de l'histoire de la pensée, voulut soumettre à un examen critique clairvoyant toutes ses œuvres, très nombreuses. C'est ainsi qu'eurent origine les Retractationes (« révisions »), qui insèrent de cette façon sa pensée théologique, vraiment grande, dans la foi humble et sainte de celle qu'il appelle simplement par le nom de Catholica, c'est-à-dire l'Eglise. « J'ai compris - écrit-il précisément dans ce livre très original (I, 19, 1-3) - qu'une seule personne est véritablement parfaite et que les paroles du discours de la montagne ne se sont totalement réalisées que dans une seule personne : en Jésus Christ lui-même. En revanche, toute l'Eglise - nous tous, y compris les apôtres - doit prier chaque jour : pardonne nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés ».
Quatrième partie
Converti au Christ, qui est vérité et amour, Augustin l'a suivi pendant toute sa vie et il est devenu un modèle pour chaque être humain, pour nous tous, à la recherche de Dieu. C'est pourquoi j'ai voulu conclure mon pèlerinage à Pavie en remettant idéalement à l'Eglise et au monde, devant la tombe de ce grand amoureux de Dieu, ma première Encyclique, intitulée Deus caritas est. Celle-ci doit en effet beaucoup à la pensée de saint Augustin, en particulier dans sa première partie. Aujourd'hui aussi, comme à son époque, l'humanité a besoin de connaître et surtout de vivre cette réalité fondamentale : Dieu est amour et la rencontre avec lui est la seule réponse aux inquiétudes du cœur humain ; un cœur qui est habité par l'espérance - peut-être encore obscure et inconsciente chez beaucoup de nos contemporains - mais qui, pour nous chrétiens, nous ouvre déjà à l'avenir, à tel point que saint Paul a écrit que : « Nous avons été sauvés, mais c'est en espérance » (Rm 8, 24). J'ai voulu consacrer ma deuxième Encyclique, Spe salvi, à l'espérance ; elle doit elle aussi beaucoup à Augustin et à sa rencontre avec Dieu.
Dans un très beau texte, saint Augustin définit la prière comme l'expression du désir et il affirme que Dieu répond en élargissant notre cœur vers Lui. Quant à nous, nous devons purifier nos désirs et nos espérances pour accueillir la douceur de Dieu (cf. In Ioannis, 4, 6). En effet, celle-ci est la seule qui nous sauve, en nous ouvrant également aux autres. Prions donc pour que dans notre vie il nous soit donné chaque jour de suivre l'exemple de ce grand converti, en rencontrant comme lui à chaque moment de notre vie le Seigneur Jésus, le seul qui nous sauve, qui nous purifie et nous donne la vraie joie, la vraie vie.
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Remerciement
"Bandeau" d'après une photo prise par Michelle G-H. à Lorenzago di Cadore, en juillet 2007. D'autres photos de Michelle illustrent les pages intérieures.