Les adieux du cardinal Ruini

A 77 ans il quitte le vicariat de Rome. Ce n'est pas ce que les medias appelleront "une voix différente", car il est fidèle au Pape, et ferme dans ses convictions, et il ne craint pas l'impopularité.
Une belle leçon d'indépendance par rapport aux medias. (22/6/2008)



Article original en italien sur le site de l'Agence AdnKronos: http://www.adnkronos.com/...
Ma traduction




 

L'adieu de Ruini

..."les évêques ne doivent pas céder à l'opinion publique"
AdnKronos
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Camillo Ruini se prépare à quitter la charge de vicaire du Pape pour le diocèse de Rome, et la messe qu'il a célébrée ce 21 juin pour les 25 ans de son épiscopat, avait un parfum d'adieu.
"Au terme de mon service de Cardinal Vicaire, a-t'il dit, j'avoue le savourer encore plus, j'y reviendrai, dans les années qui me restent, avec la mémoire et la prière".
Durant l'homélie, le cardinal s'est beaucoup attardé sur le courage, et sur les devoirs des évêques.
La force, a-t'il fait remarquer, consiste à se soustraire à la pression de l'opinion publique, et surtout à annoncer la vérité du Christ. A ce propos, il a rappelé sa boutade célèbre sur " les boulettes en papier qui ne me font pas vraiment peur".

"Quand on parle de force et de courage, a expliqué le cardinal, faisant allusion à sa longue expérience dans le diocèse de Rome, on pense au courage qui s'adresse en quelque sorte à l'extérieur, surtout envers la pression exercée par l'opinion publique, telle qu'elle est interprétée - et il n'est pas rare qu'elle soit même formée - par les medias.

Il est indispensable, pour un évêque, de se soustraire à la sujétion envers ce genre de pressions, et dans ce but, il est important de rappeler que la vérité qui nous a été donnée et confiée, cette vérité qui, en dernière analyse, est le Christ lui-même, compte et pèse bien plus que n'importe quelle opinion."
"En réalité, a ajouté Ruini, pour moi, cela a été en fin de compte un problème assez léger: comme je l'ai dit sur le ton de la plaisanterie à quelques confrères évêques alors que je pensais que personne ne nous écoutait 'les boulettes en papier ne me font pas peur'. Ce qui m'a été plus difficile, en revanche, c'est de réussir à conjuguer, y compris dans ma façon de m'exprimer et de communiquer, la fermeté avec l'amour".

Puis, une allusion aux devoirs d'un évêque en forme d'avertissement. "Etre aux côtés du Pape dans l'annonce et dans le témoignage de la foi, a-t'il souligné, particulièrement quand ceux-ci sont difficiles et réclament du courage, est en réalité le devoir de chaque évêque, un aspect essentiel de la collégialité épiscopale."
"Je me permets de dire, a-t'il observé, que si tout le corps épiscopal avait été fort et explicite sous cet angle, plusieurs difficultés, dans l'Eglise, auraient été moins graves, et pour le futur aussi, cela peut être un moyen efficace pour les redimensionner et les surmonter".

Dans un long message adressé au cardinal pour ses 25 ans d'épiscopat, lu cet après-midi dans la basilique Saint-Jean de Latran, le Pape a exprimé sa gratitude à son vicaire pour "sa grande capacité de travail, sa foi simple et sincère, son intelligente créativité pastorale, sa fidélité à l'identité de l'institution à travers l'union avec le Pape, même parmi les difficultés, son optimisme fidèle et souriant".
Benoît XVI a exprimé aussi sa "reconnaissance personnelle pour le dévouement avec lequel , au cours de ces années, vous m'avez introduit dans la réalité complexe de cette Eglise bien-aimée, m'accompagnant dans les visites aux paroisses, dans les rencontres avec le clergé, les pauvres, les malades, les jeunes. Merci d'avoir soutenu mon invitation à s'engager sérieusement pour l'éducation, et pour avoir appelé à plusieurs reprises, Place saint-Pierre, de nombreux fidèles pour écouter, soutenir et encourager le ministère du Pontife Romain". (source)
Ruini, 77 ans, a assumé la charge de vicaire pendant 17 ans et demi, sous deux pontifes, Jean-Paul II et Benoît XVI. Le cardinal a également expliqué qu'il continuera à travailler afin que les romains et les italiens "sachent regarder le monde avec les yeux de la foi". Allusion à la fonction que Ruini conservera à la tête du projet culturel de la Conférence des Evêques, projet que lui même a conçu ces dernières années.

Le cardinal, s'apprêtant à quitter la direction du diocèse de Rome sort des rôles-clés de l'Eglise, après que Benoît ait appelé pour le remplacer à la tête de la CEI le 7 mars 2007, l'archevêque de Gênes, le cardinal Angelo Bagnasco.



Rappelons en effet que le Cardinal Ruini a par exemple été à l'origine de la messe célébrée Place Saint-Pierre à l'occasion des 80 ans du Pape (il avait dans une lettre invité tous les romains à venir lui manifester leur affection: on en trouvera le très beau texte ici: http://beatriceweb.eu/Blog/... ); après la lamentable affaire de la visite annulée du pape à l'Université de la Sapienza, c'est lui qui une fois encore avait demandé aux romains de venir nombreux lors de l'Angelus pour témoigner leur soutien au pape, et on sait que plus de 200 milles personnes ont afflué Place Saint-Pierre pour l'Angelus du 20 janvier (voir aussi ici http://benoit-et-moi.fr/2008-I/... ).

Vu de France, la nouvelle de la retraite du cardinal Ruini (peu connu, mais pas moins, finalement que le Cardinal Martini) est relatée sur un tout autre ton. C'est ce que met en évidence cette dépêche de l'AFP, reproduite sur La Croix.fr.
On sent bien que Camillo Ruini est l'emblème (assez peu apprécié) de ce qui est considéré comme l'ingérence indûe de l'Eglise dans les affaires du monde. Un briseur de laïcité, en somme:



Le cardinal Ruini avait été nommé vicaire de Rome en 1991 par Jean Paul II.

Ce prélat, auquel on prête énormément d'influence en particulier dans les milieux politiques, s'est notamment opposé au projet de Pacs souhaité par le gouvernement de gauche de Romano Prodi.

Il avait aussi refusé en décembre 2006 des obsèques religieuses à un Italien atteint de dystrophie musculaire en phase terminale qui avait été débranché à sa demande du respirateur qui le maintenait en vie.

Il a aussi été à l'origine de la grande manifestation en faveur de Benoît XVI le 20 janvier après que le pape eut été contraint d'annuler une visite à l'Université romaine de La Sapienza.

Au cours de la messe d'adieux célébrée samedi soir à Saint Jean de Latran à Rome, Mgr Ruini a jugé "essentiel" que les évêques se soustraient aux pressions de l'opinion publique et des médias.

Le plus proche conseiller de Silvio Berlusconi, Gianni Letta, et le nouveau maire de droite de la capitale Gianni Alemanno assistaient à l'office.



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