Une nomination à la Curie

Celle de Mgr Raymond L. Burke, archevêque de Saint-Louis (Missouri) comme Préfet du Tribunal suprême de la signature apostolique. Un article de John Allen, à rapprocher d'un billet de Daniel Hamiche (11/7/2008)



Il se passe des choses, à Rome, on n'y parle pas que des évêques français désobéissants au Pape et des lefebvristes rebelles.
Et, à petites touches, comme on dit désormais, Benoît XVI modifie la physionomie de la Curie.
La preuve.

Mon attention a été attirée par un billet de John Allen, répondant indirectement à un autre paru sur le blog "ami" (c'est ainsi que je le vois, même s'il ne me connaît pas!) de Daniel Hamiche.

Ce dernier écrivait en effet le 21 juin dernier, manifestement très réjoui (http://americatho.over-blog.com/...):



L'archevêque de Saint-Louis, Préfet de la Signature Apostolique
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Voici une nouvelle qui ne prendra pas au dépourvu les lecteurs de mon blogue, puisque je l’avais pronostiquée ici même dès le 7 mai dernier. Mgr Raymond L. Burke, archevêque de Saint-Louis (Missouri) a été nommé ce jour Préfet du Tribunal suprême de la signature apostolique.
Il faut s’en féliciter même si, à titre personnel, j’éprouve un petit pincement au cœur : car ce prélat de premier rang va manquer à mon cher diocèse de Saint-Louis – dont le siège est désormais vacant – et à l’Église catholique des États-Unis…
Mais, d’un autre côté, c’est un formidable “plus” pour l’Église universelle et un nouveau soutien à Rome d’abord pour le Saint Père mais aussi pour les catholiques attachés à la tradition, et notamment à la tradition liturgique.
Par un de ces petits miracles dont la Providence ne cesse de saupoudrer notre vie, je serai un des tout premiers Français à féliciter Mgr Burke pour cette grande marque de confiance et de reconnaissance que Benoît XVI vient de lui manifester, puisque je le rencontrerai au séminaire de l’Institut du Christ-Roi Souverain Prêtre de Gricigliano, où le désormais évêque émérite (Ô combien !) de Saint-Louis et Préfet du Tribunal suprême de la signature apostolique, viendra, ce 3 juillet, ordonner au sacerdoce, selon les livres de 1962, deux séminaristes. Mgr Burke sera évidemment créé cardinal par le pape au tout prochain consistoire…
Le nouveau Préfet est né le 30 juin 1948 : il fêtera donc ce dimanche son soixantième anniversaire.



Il s'agit donc d'un américain, inconnu chez nous.
John Allen voit en lui essentiellement un conservateur, l'homme qui a eu le courage de s'opposer aux hommes politiques se disant catholiques mais ayant publiquement soutenu des positions favorables à l'avortement. Et aussi à une chanteuse, et à un entraîneur de base-ball, autant dire des vaches sacrées, dans la société du spectacle qui est la nôtre. Dit par John Allen, ce n'est pas forcément un compliment, mais il se force à l'objectivité.
Article original ici, sur le site de NCR: http://ncrcafe.org/node/1940
Ma traduction



Burke nommé à la tête de la cour suprême du Vatican
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Benoît XVI a nommé un archevêque américain connu comme conservateur , en particulier sur la question cruciale (hot button issue) de la communion donnée aux politiciens "pro-choix", comme nouveau chef de la plus haute juridiction du Vatican.

Le Vatican a annoncé aujourd'hui que l'archevêque Raymond Burke de Saint-Louis a été nommé nouveau préfet de la Signature apostolique. La nomination met Burke, qui a fêté ses 60 ans le 30 Juin, en position pour devenir cardinal.

Burke devrait prendre ses nouvelles fonctions à Rome début août.

La nomination n'est pas vraiment une surprise pour les observateurs de l'Eglise, qui spéculent depuis longtemps sur la venue de Burke à Rome.
Burke est titulaire d'un doctorat en droit canon de l'Université grégorienne de Rome obtenu en 1984, et de 1989 à 1994, il a servi comme Defender of the Bond in the Apostolic Signatura, un poste équivalent au principal avocat de la défense (top defense attorney) dans le système juridique du Vatican.

En Juillet 2006, Benoît XVI a nommé Burke comme membre de la Signature apostolique, une mutation que certains observateurs ont à l'époque interprété comme une préparation à prendre la relève à la tête du tribunal.

Au Vatican, il y a trois tribunaux: la Rote romaine, qui est une cour d'appel qui traite en grande partie des affaires portant sur les demandes d'annulation d'un mariage, la Signature apostolique, plus ou moins la "Cour suprême" de l'église, et la Pénitencerie apostolique, qui traite en particulier des questions délicates ne pouvant être résolues par le processus juridique normal.

Dans les milieux catholiques, Burke a longtemps été considéré comme l'un des juristes les plus pointus au plus haut niveau de l'Eglise, avec une connaissance encyclopédique du Code de Droit Canonique, le système juridique de l'Eglise catholique, ainsi que de la jurisprudence qui découle de ce code.

Entre autres choses, la nomination de Burke est un autre signe de l'affection de Benoît XVI pour le catholicisme d'Amérique. Trois importants dicastères du Vatican sont à présent dirigée par les Américains: la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, dirigée par le Cardinal William Levada, la Pénitencerie apostolique, dirigé par le Cardinal Francis Stafford, et la Signature, avec Burke maintenant en première position.

Depuis sa prise de fonction à Saint-Louis en 2003, Burke gagné une réputation solide de prélat conservateur et disposé à tracer des lignes dans le sable afin de défendre l'enseignement de l'Eglise.
En 2004, par exemple, Burke a fait valoir publiquement que le candidat démocrate John Kerry ne devait pas recevoir l'Eucharistie en raison de son engagement pro-choix. Selon Burke lui-même, les catholiques ayant voté pour Kerry ne devraient pas recevoir la communion avant d'avoir reçu le Sacrement de la Confession.

Il y a un an, devant la conférence épiscopale des États-Unis, Burke a échoué à prendre la direction de la commission des affaires canoniques, obtenant un peu plus de 40 pour cent des votes.
Bien que peu d'évêques mettent en cause la nécessité de défendre l'enseignement de l'Eglise, nombreux sont ceux qui sont réticents à refuser publiquement la communion à quelqu'un, considérant cela comme une façon de "politiser" ce qui est censé être le moment suprême de l'unité de l'Eglise.

La question de la communion n'a pas été l'unique étincelle au cours du mandat de Burke à Saint-Louis.

En 2007, Burke a démissionné du conseil d'administration d'un hôpital pour enfants afin de protester contre un concert de charité mettant en vedette la chanteuse Sheryl Crow, tenante d'une position pro-choix; en 2008, Burke a exhorté l'Université Saint-Louis à prendre des mesures contre l'entraîneur de basket-ball Rick Majerus, qui avait annoncé son soutien pour les droits à l'avortement et les cellules souches embryonnaires lors d'une campagne en faveur du sénateur Hilary Clinton.

Comme préfet de la Signature, le travail de Burke sera d'appliquer la loi de l'Eglise à des questions qui sont posées au Tribunal.

Voici les types de cas soumis en général à la Signature:

• Conflits entre deux bureaux du Vatican;
• Les appels contre les décisions prises par les évêques diocésains et les bureaux du Vatican;
• Les appels contre les décisions de la Rote romaine.

Deux autres Américains sont membres de la Signature apostolique: le Cardinal Edward Egan, de New Yor, et l'évêque Thomas Doran de Rockford, en Illinois.



John Allen a consacré un autre article à cette nomination "More on Burke’s move to Vatican court", je n'ai pas le temps de le traduire, je résume donc.
Voici le lien: http://ncrcafe.org/node/1959



Il commence ainsi: "Est-ce un exemple de ce que les italiens appellent 'promuovere per rimuovere' … autrement dit donner une promotion à quelqu'un pour s'en débarasser?"

Ce serait la tonalité générale des questions qui lui auraient été posées "de part et d'autre de l'Atlantique".
On peut imaginer par qui...
Sans écarter tout à fait cette éventualité (conclusion), sa réponse - au moins sur son site - est plutôt "promotion pour de multiples motifs", et se développe en quatre points
- Burke a laissé de bons souvenirs à Rome lors de ses précédents séjours.
- Comme spécialiste de droit canon, Burke a une "excellente réputation", bien que beaucoup, aux Etats-Unis, soient loin de partager ses vues. Et de citer le cardinal George, archevêque de Washington et président de la conférence épiscopale, qui s'inquièterait d'une politisation de l'Eucharistie.
- Le Pape est tenu de donner la parole, au sein de l'Eglise, à toutes les sensibilités, et Burke représente "une voix forte pour l'identité catholique traditionnelle".
- De la part du pape, il s'agit d'une marque de considération envers l'Eglise des Etats-Unis. En particulier, beaucoup de responsables du Vatican se méfieraient de l'Europe, aux prises avec une forme radicale de sécularisme et verraient dans les Etats-Unis, avec son héritage chrétien, un partenaire plus fiable dans une gestion globale des affaires du monde.



Sur le chemin de Rome, les Anglicans hésitent
Après le voyage du Pape

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