L'année de la foi, dans la lucarne franchouillarde

Mgr di Falco commente avec brio le scandale de cette représentation caricaturale de L'Eglise. Et la lettre d'un lecteur... (12/10/2012)

 

Hier, à côté du grand évènement qui se déroulait à Rome (et pour bien l'étouffer), un autre, tout petit, mesquin et dérisoire - j'allais dire "franchouillard" si ce terme que je déteste en général, ne recouvrait pas une toute autre réalité - occupait nos lucarnes.
Il n'en a été que trop question ici: c'était le damarrage claironné par un réseau médiatique bien huilé de la série d'Arte "Ainsi soient-ils".
J'ai regardé cette bouillie, et j'allais me fendre d'un commentaire rageur, mais je vois grâce à mes amis du Salon Beige que Mgr di Falco s'est déjà chargé de la tâche avec panache: il n'y a rien à rajouter à son texte paru sur le site du diocèse de Gap, et que je crois utile de reproduire in extenso, tellement il contient de vérités. Hélas, aucune tribune ne lui a été offerte par les gros medias, et il n'a pas été suivi par ses confrères. Et je regrette qu'aucune réaction de ce type ne vienne jamais contrer les honteuses insultes dont le Saint-Père est régulièrement la cible.

Un lecteur m'a par ailleurs envoyé une réflexion après avoir écouté une émission sur France-Inter, consacrée à la série que je publie également.

Je termine sur deux remarques:

. La diffusion de la série était précédée par un débat auquel participait Isabelle de Gaulmyn, qui est après tout directrice du service religion de la Croix, organe plus ou moins officiel de la CEF. Sa présence (totalement incongrue) était donc une sorte de caution catholique pour la série. J'avoue que la tête des participants m'a dissuadée de regarder cette partie de l'émission
. Les audiences annoncées ce matin sont très bonnes... mais tellement de mensonges ont déjà été dits sur la série qu'un de plus ne saurait surprendre...

 

La charge de Mgr di Falco

http://www.diocesedegap.fr

Critique de la série Ainsi soient-ils par Mgr Jean-Michel di Falco Léandri qui a pu visionner l’ensemble des huit épisodes avant sa diffusion sur la chaîne Arte.
-----------------
Arte, attention, n’oubliez pas qu’il s’agit de la chaîne dite culturelle, Arte donc a fait le choix de diffuser un téléfilm en huit épisodes sur les séminaristes. Si vous ne connaissiez pas grand-chose sur le sujet vous n’en saurez pas davantage après avoir vu ces épisodes que je me suis efforcé de regarder jusqu’à la dernière seconde mais, dois-je le préciser, par devoir.

On a beaucoup parlé de caricatures ces derniers temps et il n’y a pas que Mahomet et l’islam qui soient caricaturés, les chrétiens n’y échappent pas, mais avec eux ça fait moins de bruit : bien que véritables têtes de Turcs de certains médias, ils ne menacent personne de mort.
Après la diffusion des téléfilms Les Borgia et Inquisitio, voici Ainsi soient-ils sur la vie dans un séminaire ! Après des récits à prétention historique sur une caricature du passé voici un récit sur une caricature du présent. Certes on peut comprendre le souhait de certains de vouloir surfer sur le succès du film Des hommes et des Dieux. Si tel était le cas, c’est plus que raté car on en est bien loin avec cette mascarade carnavalesque.
Les acteurs ne sont pas en cause, ils sont plutôt bons (Bof...) au service d’un scénario qui lui ne l’est pas. Il transpire l’ennui !
Pourtant, tous les ingrédients sont là : sexe, adultère, argent, corruption, suicide, IVG, alcoolisme, luttes de pouvoir, conservateurs et progressistes, lutte des classes; malgré cela la mayonnaise ne prend pas tant les situations sont invraisemblables. Des approximations de vocabulaire, des relations entre les personnes passéistes, des costumes d’un autre temps, des phrases pseudo-pieuses creuses et toutes faites, et j’en passe. Tout cela fait perdre à ce téléfilm une hypothétique crédibilité.
François Hollande a mis le mot « normal » à la mode. On se demande qui, dans ce téléfilm, est « normal ».
Pour couronner le tout il faut mentionner un président de la Conférence des évêques de France isolé, ambitieux, imbu de pouvoir, sans cœur, calculateur, qui prépare une campagne pour sa réélection comme un mauvais homme politique.
Le tout sous l’autorité d’un Pape de carnaval, gâteux et acariâtre, sous la haute surveillance d’une religieuse moustachue qui le drogue… au thé.

En fait la vision de l’Église qui est donnée là est conforme aux idées reçues de ceux qui ne la connaissent pas. Certes je ne m’attendais pas à ce que la réalité soit enjolivée. Les hommes restent des hommes, avec leurs faiblesses, leur médiocrité. Les événements récents vécus dans l’entourage même du Pape Benoît XVI en sont bien la preuve. Parce que faite d’hommes et de femmes imparfaits l’Église est fragile et vulnérable dans son humanité, mais elle est forte de l’Esprit du Christ qui l’habite et l’anime.
La question qui reste après avoir visionné les épisodes de ce téléfilm est bien « Et Dieu dans tout ça ? » Visiblement il n’a pas été retenu au casting, pas plus d’ailleurs que le bon peuple de Dieu qui est l’Église et qui une fois de plus sera blessé par cette image de l’Église donnée par des ignorants.

Mgr Jean-Michel di Falco Léandri
Évêque de Gap et d’Embrun

 

Un lecteur m'écrit

Samedi dernier, le matin, je me suis infligé d'écouter une émission concernant la série "Ainsi soient-ils", sur France Inter.
Le contenu prenait, à mes oreilles, la signification que pourrait avoir, aux yeux d'un géographe, un film sur Dakar entièrement tourné au Groënland. Bref, si elle contient vraiment ce qui a été dit et, naturellement, loué, cette série doit paraître tout simplement très bête, à un catholique mais aussi pour n'importe quel non catholique.

Le comédien qui joue le directeur du séminaire, s'il a vraiment dit ce que disent les extraits de ses propos sélectionnés pour l'émission, et s'il pense véritable ce salmigondis, m'inspire la plus grande inquiétude quant à ses capacités d'analyse; il a particulièrement conquis ma pitié quand il a comparé les qualités attribuées par lui au rôle en question avec celles d'un autre rôle interprêté par lui dans un téléfilm inspiré, si je me souviens bien, par la "Grande peur dans la montagne", de Ramuz: production lamentable dans laquelle des paysans des Alpes d'une période indéterminée pour le spectateur navré par tant de ridicule, vraisemblablement le début du XXème siècle, se comportaient d'une manière anachronique, vu la caricature de l'oeuvre de Ramuz, et parfaitement stupide quelles que soient les époques.

Mais pourquoi ces stupidités, transposées dans un séminaire, ne sautent-elles pas aux yeux des critiques laudateurs et de quelques autres gens?

Peut-être en raison d'une méchanceté anti-catholique aux origines complexes, mais hélas, et plus immédiatement, parce que l'actualité et les témoignages de séminaristes que j'ai moi-même reçus, disent que des comportements inadéquats et des situations déplacées sont en quelque sorte cultivés, ou l'étaient encore très récemment, dans certaines maisons de formation pour les futurs prêtres.

Aussi, voyez-vous, je pense qu'une erreur en s'exprimant à propos de cette production consiste à seulement dire que son contenu est entièrement faux. Cette manière de protester n'irait pas bien loin puisque nous savons que la série pointe des comportements négatifs qui ont pu exister. En revanche il me semble pertinent de critiquer la manière dont ces comportements sont mis en perspective dans la série.
Toujours d'après ce que j'ai entendu en écoutant l'émission de France Inter, il semble n'y avoir que du négatif dans tout séminaire et cela pour le soi-disant motif que ce négatif serait imposé par l'autorité romaine tandis que de valeureux Robin-des-Séminaires détiendraient individuellement des solutions aussi efficaces que merveilleusement révolutionnaires mais repousées par la hiérarchie ecclésiastique...
Ainsi donc ai-je entendu le peu subtil interprète du directeur du séminaire, expliquer que les cardinaux et le pape ont tout intérêt à ce que rien ne change dans les comportements négatifs! Pourtant, dans ce domaine de la formation des prêtres comme dans celui de la liturgie, on sait combien les comportements négatifs récurrents proviennent, non pas d'une application mais d'un refus des directives de l'Eglise telles que les papes les ont exprimées, refus qui correspond avec "l'herméneutique de la rupture" par opposition à "l'herméneutique de la continuité" préconisée par Benoît XVI.

Bref, la série caricature des situations, mais pis encore, elle présente comme évidentes des explications ineptes, elle milite pour des solutions si stupidement erronées que les soi-disant solutions consistent à aggraver les situations que la série a caricaturées, et tout cela puisque la série se plaît à ignorer les véritables responsabilités et à en accuser l'autorité dont elle méconnaît, ou feint de méconnaître, les difficultés à faire entendre raison à ses subordonnés.

Je pense à la formule si sévère, attribuée à Bossuet, suivant laquelle Dieu flétrit ceux qui chérissent les causes dont ils déplorent les conséquences.

Ch. J.