Bonne année, les misérables

... enfin, façon de parler! Les "voeux" très noirs, (mais paradoxalement toniques: identifier l'origine du mal, c'est déjà se préparer à l'affronter) du blogueur espagnol Eduardo Arroyo, traduits par Carlota (7/1/2012)

>> Plusieurs articles de ce blogueur tonitruant sur ce site: http://tinyurl.com/ascnorn

     

Bonne année, les misérables (1)
http://www.elsemanaldigital.com
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Bonne année, les misérables. Parce que si vous ne l’êtes pas maintenant, vous le serez sans doute à brève échéance. Ou peut-être que vous êtes déjà en train de grossir l’armée de parias. Mais pire qu’être un misérable sur le plan matériel c’est l’être dans la tête. Car quand le cœur a du soleil en lui, il y a encore de la place pour la régénération et l’espoir. Pour cela il faut d’abord prendre de la distance par rapport au désir frivole de possession mondaine : ce n’est que dans la souffrance que l’on peut aujourd’hui espérer. C’est à ceux qui souffrent que je vais adresser mes vœux aujourd’hui pour l’année qui vient, non aux autres qui assistent complaisants à ce qui se prépare.

À la nouvelle multitude de compatriotes qui souffrent je veux adresser mes vœux de Nouvel An ; une nouvelle année qui, sans doute, sera pire, malgré ce qu’annoncent les politicâtres.

Donc bonne année aux victimes du rééquilibrage budgétaire, aux expulsés (2) et à ceux qui vivent dans l’angoisse de voir ce qui va leur tomber dessus.
Bonne année à ceux qui écoutent les déclarations du ministre Montoro (ministre des Finances espagnol de l’actuel gouvernement Rajoy dit de droite) sans rien dire et ceux qui n’arrivent pas à comprendre pourquoi leur expulsion est « une souffrance nécessaire ».
Bonne année à ceux qui oeuvrent pour leur malheur afin de diminuer le déficit public et à ceux qui ont fermé leur entreprise (problème de liquidité lui aussi bien connu pour les PME) à cause de « la re-structuration du secteur bancaire » qui les a laissés dans une situation encore pire qu’avant.
Bonne année à ceux qui voient combien leurs vieux assassins prospèrent avec des fonds publics et jouissent d’une « représentation parlementaire » (3).
Bonne année à ceux qui assistent impuissants au lavage de cerveau de l’ « éducation » moderne, et à ceux qui voient leurs enfants leur échapper sans savoir pourquoi.
Bonne année à tous ceux qui avaient des économies de toute une vie investis dans des entreprises frauduleuses protégées par le gouvernement et à ceux qui ont perdu leur modeste patrimoine grâce à des institutions avec lesquelles notre système vit et octroie la respectabilité.
Bonne année à ceux qui déprécient la « mémoire historique » parce qu’ils étaient dans le mauvais camp (4) et à ceux qui voient de l’intérieur comment il suffit d’appartenir à un clan familial pour que les corruptions dorment du sommeil des justes dans le tiroir de certains tribunaux.
Bonne année à ceux qui soutiennent comme ils le peuvent l’effondrement progressif de l’idéologie dominante : celle que l’on appelle « progressisme » et que la gauche de tous pelages protège.
Bonne année à vous qui avez perdu votre maison et avaient en plus écouté comment on le justifie au nom de la « liberté de marché ».
Bonne année à ceux qui perdent leur travail parce que leur entreprise s’en va en Chine tandis que les mêmes qui s’enrichissent abominent la dictature cubaine.
Bonne année aux victimes, directes ou indirectes, du nihilisme social, des drogues qui oppriment le corps des adolescents, de la vulgarisation du sexe, de la violence, de l’alcool, alors que de sages experts se perdent dans des explications qui n’expliquent rien.
Bonne année à ceux qui regardent avec mépris la classe politique, à ceux qui savent que chaque critique, chaque déclaration et chaque article renferme une nouvelle dose de mensonge et de compromis avec le poison qui nous étouffe et nous détruit.
Bonne année à ceux qui sont répudiés par tout le monde, à ceux qui osent mettre en doute ce que tout le monde accepte, et à ceux qui ne veulent pas des « révoltes » à demi et des « indignations » couvertes par de puissantes affiches médiatiques.
Bonne année à ceux qui parient le gros lot et à ceux qui sont conscients qu’un jour leurs fils leur cracheront peut-être à la figure pour avoir transigé avec ce pour quoi on ne peut transiger.
Bonne année, en somme, à ceux qui préfèrent le jugement de Dieu à celui d’une humanité qui recule.

Parce que ce sont ces misérables, ces réprouvés de notre époque, les uniques fondements possibles d’un avenir meilleur. Dans un endroit doit bien exister la levure qui obtiendra que l’énergie de tant de souffrances regarde dans la même direction. Avec les autres, il est mieux de ne pas établir de relation pour que cela ne se transforme pas en confusion, une confusion qui nous entraîne à faire ce qu’ils font (5). C’est le travail dans le silence et le sacrifice muet l’unique alternative qui reste aux forces saines d’aujourd’hui.

À eux, bonne année, de tout cœur. Pour les autres, indifférence.

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Notes complémentaires de traductioin
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(1) Le mot espagnol « Miserable » a aussi plusieurs sens qui vont de malheureux à vils. Y voir peut-être aussi une allusion au titre hugolien.

(2) Les accédants à la propriété devenus chômeurs n’ont pu payer les traites de leur appartement acheté à crédit, des crédits accordés en dépit du bon sens dans le cadre de la bulle financière et immobilière. Le système s’auto-alimentait, les banques prêtaient, les entrepreneurs gagnaient de l’argent. On a aussi parlé de blanchissement de l’argent dans le bâtiment, ce qui n’est pas forcément faux …

(3) Allusion, me semble-t-il, à un certain parti de gauche basque (très en lien avec les séparatistes qui ont provoqué dans des attentats la mort de nombreux gardes civiles et leurs familles, ainsi que des élus ne partageant pas leurs idées). Ce parti légalisé par Zapatero est désormais représenté au parlement espagnol.

(4) Nos politiques, en France, n’ont pas la guerre civile espagnole, mais bien d’autres sujets où ils peuvent bafouer la réalité historique.

(5) Cette remarque sur la confusion, me fait penser à la confusion de la marche pour « tous » du 13 janvier prochain où « l’on devrait mettre dans sa poche sa spécificité de catholique ». En outre parmi les silencieux qui marcheront, ils y en a beaucoup pour qui le fait de « monter » à Paris, présente un sacrifice financier non négligeable. Pendant ce temps des députés et sénateurs grassement payés pour être de temps en temps présents dans les assemblées, voteront non pas avec leurs pieds, mais selon les consignes de vote du parti. C’est cela effectivement la démocratie ! Mais il y a aussi l’importance capitale de la prière car « il est dangereux de vouloir discuter avec le diable. Parce que le combat, s'il repose sur des arguments de la raison, sur l'anthropologie, est néanmoins en tout premier lieu un combat spirituel. Une attaque frontale du démon contre Celle qui enfante (Apo 12)(2). Contre la Vierge Marie» (cf ici le texte de l’abbé Lelièvre http://www.evangelium-vitae.org/actualite/2152/alerte-info--l-immense-manifestation-du-13-janvier.htm)